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Décision n° 85-198 DC du 13 décembre 1985 - Saisine par 60 sénateurs

Loi modifiant la loi n° 82-652 du 29 juillet 1982 et portant diverses dispositions relatives à la communication audiovisuelle
Non conformité partielle

Monsieur le président, Messieurs les conseillers,
Nous avons l'honneur de déférer au Conseil constitutionnel la « loi modifiant la loi n° 82-652 du 29 juillet 1982 et portant dispositions diverses relatives à la communication audiovisuelle » afin qu'il se prononce sur la conformité à la Constitution : et notamment à l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen : du II de son article 2.
L'Assemblée nationale a introduit, au II de l'article 2 de la loi qui vous est déférée, au cours de la nouvelle lecture suivant la réunion de la commission mixte paritaire, une disposition proposée par le Gouvernement afin d'insérer un article 34-1 dans la loi du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle.
Le texte proposé pour cet article 34-1 tend à établir au profit de l'établissement public de diffusion une servitude administrative lui permettant d'installer et d'exploiter sur les toits, terrasses et superstructures des propriétés, notamment privées, les moyens de diffusion par voie hertzienne et de poser les équipements nécessaires à leur fonctionnement.
Les garanties que paraît offrir le texte aux personnes publiques ou privées dont les immeubles seraient grevés par cette servitude se limiteraient à : : la possibilité d'obtenir une indemnisation des dommages de travaux publics causés par l'installation, la pose ou l'entretien des moyens de diffusion par voie hertzienne ou des équipements nécessaires à leur fonctionnement ;
: l'autorisation du président du tribunal de grande instance pour l'introduction des agents de l'établissement public de diffusion.
Cette intervention du juge judiciaire ne saurait toutefois constituer une authentique garantie puisque le texte ne lui confie que la mission de constater que l'introduction des agents de l'établissement public de diffusion est nécessaire à l'étude, la réalisation ou l'exploitation des installations, et non d'apprécier au fond la légitimité de leur intervention, c'est-à-dire l'utilité de ces installations ou la nécessité de les implanter en un lieu déterminé.
L'institution par le législateur d'une servitude administrative ne constitue pas une innovation et n'est pas en soi contraire aux principes constitutionnels. Toutefois, pour être conforme aux principes posés par l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, l'atteinte portée par le législateur à l'exercice normal et complet du droit de propriété doit, d'une part, être justifiée par une « nécessité publique, légalement constatée », et qui « l'exige évidemment » et, d'autre part, être subordonnée à l'octroi d'une juste indemnité.
I : Le texte adopté ne comporte aucune disposition ni n'impose aucune procédure permettant de constater la « nécessité publique » des servitudes qu'il prévoit, ou de garantir qu'elles soient effectivement indispensables à la mission confiée à l'établissement public. C'est pour combler cette lacune fondamentale que le Sénat avait adopté, en nouvelle lecture, des dispositions tendant : : à restreindre le champ d'application de l'article 34 (1) de la loi du 29 juillet 1982 à la diffusion des programmes du service public de la radiodiffusion sonore et de la télévision ;
: à prévoir que ces servitudes ne puissent être établies que pour la réalisation et l'exploitation d'installations déclarées d'utilité publique.
Le Sénat ne faisait en cela que transposer les dispositions retenues précédemment par le législateur pour définir le régime applicable aux servitudes administratives existantes.
a) C'est ainsi que l'article 12 de la loi du 15 juin 1906 sur les distributions d'énergie établit certaines servitudes au bénéfice des concessionnaires d'une distribution d'énergie déclarée d'utilité publique. De plus, le législateur a prévu que l'exécution des travaux visés à cet article 12 « doit être précédée d'une notification directe aux intéressés et d'une enquête spéciale dans chaque commune » et qu'elle « ne peut avoir lieu qu'après approbation du projet de détail des tracés par le projet ». Enfin, l'article 18 de la même loi ajoute que « l'avis des conseils municipaux intéressés devra, dans tous les cas, être demandé au cours de l'enquête ».
Il est vrai que l'article 298 de la loi de finances du 13 juillet 1925 a étendu le bénéfice des servitudes par l'article 12 de la loi du 15 juin 1906 « aux distributions d'énergie électrique placées sous le régime de la concession ou de la région et non déclarées d'utilité publique, lorsqu'elles seront réalisées avec le concours financier de l'Etat, des départements, des communes ou des syndicats de communes ». Il a, par là même, amoindri les garanties dont le législateur de 1906 avait entouré l'exercice des servitudes qu'il instituait ; mais il a pris garde de mentionner que la plus lourde de ces servitudes, c'est-à-dire la servitude d'appui pour les supports de conducteurs aériens établis sur des terrains privés non bâtis, qui ne sont pas fermés de murs ou autres clôtures équivalentes, ne peut être exercée « qu'après déclaration d'utilité publique, lorsque l'emprise des supports dépassera un mètre carré ».
b) C'est ainsi également que le texte de l'article 35 de la loi n° 46-628 du 8 avril 1946 sur la nationalisation de l'électricité et du gaz, modifié par l'ordonnance n° 58-997 du 23 octobre 1958, dispose : "Les servitudes d'ancrage, d'appui, de passage, d'abattage d'arbres, d'aqueduc, de submersion et d'occupation temporaire s'appliquent dès la déclaration d'utilité publique des travaux.
Un règlement d'administration publique déterminera les formes de la déclaration d'utilité publique des travaux qui ne nécessitent que l'établissement de servitudes et n'impliquent aucun recours à l'expropriation. Ce règlement fixera également les conditions d'établissement desdites servitudes".
c) C'est ainsi enfin que l'article L 48 du code des postes et télécommunications, qui confère à l'Etat « le droit d'établir des conduits ou des supports, de poser des câbles et des dispositifs de raccordement ou de coupure », n'ouvre ce droit que « lorsque ces installations sont réalisées en vue de la distribution des lignes de télécommunications nécessaires pour le raccordement individuel ou collectif des occupants de l'immeuble ou des immeubles voisins, suivant les nécessités de l'équipement du réseau », l'appréciation de cette nécessité se trouvant par là même soumise au contrôle du juge.
Le texte qui vous est déféré contraste singulièrement avec ces dispositions protectrices des droits et libertés. En effet : : il n'impose aucune appréciation de l'utilité publique des installations et équipements visés ;
: il ne prévoit aucune procédure d'établissement des servitudes permettant de garantir que l'importance de ces dernières n'excède pas les exigences du service ;
: il n'impose enfin aucune procédure d'enquête ou d'information et n'exige pas même la notification aux propriétaires de l'institution des servitudes.
Il donne donc en fait à l'établissement public le droit d'installer n'importe quel équipement, aussi superflu soit-il, sur n'importe quel immeuble, sans même fournir le moindre fondement à un contrôle du juge. Comment, en effet, apprécier si les sujétions imposées par une installation excèdent l'utilité de cette installation, si le législateur omet de préciser que l'installation doit être utile ? Ces prérogatives exorbitantes de puissance publique et cette restriction injustifiée et virtuellement illimitée à l'exercice du droit de propriété sont d'autant moins acceptables qu'elles peuvent notamment être utilisées par TDF dans un domaine, la radiodiffusion sonore, pour lequel il ne jouit d'aucun monopole et se trouve dans une situation de concurrence commerciale avec des émetteurs privés.
Or, le texte adopté lui donne un véritable droit d'accès libre et gratuit à tous les « points hauts », interdisant ainsi aux diffuseurs privés d'exercer leur activité dans des conditions de concurrence normales, et privant du même coup les propriétaires d'immeubles du droit d'utiliser ou de louer librement leurs toits, terrasses ou superstructures pour l'installation d'émetteurs privés.
L'atteinte injustifiée au droit de propriété pourrait donc se doubler d'une atteinte également injustifiée à la liberté du commerce et de l'industrie.
II : Le texte adopté ne prévoit pas une juste indemnisation du préjudice causé par les servitudes qu'il institue.
L'article 34 (1) de la loi du 29 juillet 1982 se borne à prévoir l'indemnisation par le juge administratif des dommages de travaux publics occasionnés par les ouvrages installés par TDF et leur fonctionnement.
Cette solution minimale est critiquable à un double titre : elle ne prévoit pas d'indemniser le préjudice résultant de l'institution même de la servitude, et ce n'est pas à l'autorité judiciaire qu'elle confie le soin d'évaluer et de réparer ce dommage.
1 Le texte n'indemnise pas le préjudice résultant de l'existence même de la servitude.
a) Pourtant, la seule existence de la servitude entraîne pour le propriétaire un préjudice ouvrant droit à réparation, puisque : : elle entraîne une dépréciation de l'immeuble ;
: elle interdit au propriétaire l'usage normal de son bien ;
: elle le prive des revenus qu'il pourrait tirer de la location de l'emplacement qui fait l'objet d'une emprise ;
: elle peut s'accompagner de servitudes de passage des agents de l'établissement public.
Ce sont là autant de charges correspondant à une diminution ou à une privation de jouissance, et dont le législateur doit prévoir la réparation.
b) C'est ainsi que l'article 12 de la loi du 15 juin 1906 précitée dispose que « les indemnités qui pourraient être dues à raison des servitudes d'appui, de passage ou d'ébranchage () sont réglées en premier ressort par le juge de paix ».
De même, l'article L 59 du code des postes et télécommunications prévoit : « Lorsque l'établissement de ces servitudes cause aux propriétés ou ouvrages un dommage direct, matériel et actuel, il est dû aux propriétaires et à tout ayant droit une indemnité compensant le dommage qu'ils éprouvent » c) Sans doute, d'autres textes législatifs instituant des servitudes sont-ils moins favorables, mais on peut observer qu'ils ne traitent alors que des servitudes dont l'importance et la gravité sont sans commune mesure avec celles qui résultent du texte qui vous est déféré.
En effet, l'article L 51 du code des postes et télécommunications prévoit que : « il n'est dû aux propriétaires d'autre indemnité que celle correspondant au préjudice résultant des travaux de construction de la ligne ou de son entretien » Mais ce texte, où le Gouvernement semble avoir trouvé son inspiration pour rédiger l'amendement qui a donné naissance à l'article 34 (1), ne porte que sur des servitudes relativement légères, définies à l'article L 48 du même code.
En effet, cet article ne confère à l'Etat que « le droit d'établir des conduits ou des supports, de poser des câbles et des dispositifs de raccordement ou de coupure ». Il ne permet l'intervention de l'Etat que « dans les parties communes des propriétés bâties, à usage collectif, et sur les murs et façades ne donnant pas sur la voie publique, à condition qu'on puisse y accéder par l'extérieur ou par les parties communes ». Enfin, si l'article L 50 du même code autorise, par arrêté préfectoral, « l'introduction des agents de l'administration des postes et télécommunications dans les propriétés privées », c'est seulement « pour l'étude des projets d'établissement des lignes ».
Les ouvrages visés à l'article 34 (1) sont d'une tout autre importance. La diffusion de programmes de télévision depuis une terrasse implique en effet tout à la fois la pose, sur celle-ci, d'émetteurs abrités des intempéries, l'installation d'antennes, la jonction entre les uns et les autres ainsi que l'alimentation en électricité de l'ensemble et leur liaison avec les studios.
Rappelons en outre que ces emprises s'accompagnent de servitudes de passage à l'intérieur des immeubles ; que ces servitudes, loin d'être circonscrites à l'étude des installations, englobent la réalisation et la maintenance des ouvrages et qu'il ne s'agit pas, en l'espèce, d'installations légères et auxquelles on peut « accéder par l'extérieur » De plus, il n'est pas niable que le préjudice résultant de l'institution de la servitude créée par l'article 34 (1) pourra être très important. Dans bien des cas, la rentabilité d'un immeuble de grande hauteur exige l'exploitation de sa terrasse, qui peut se prêter à l'installation d'un restaurant ou d'équipements de loisirs, à l'atterrissage d'hélicoptères, voire à l'installation d'équipements de diffusion donnant lieu à un contrat commercial. Or, le choix par l'établissement public de diffusion d'une terrasse privera son propriétaire de toute autre possibilité d'utilisation de cet espace et pourrait même le contraindre à mettre fin à un contrat en cours.
2 Le texte ne confie pas à l'autorité judiciaire le soin d'évaluer et de réparer ce dommage.
Compte tenu de l'importance de l'atteinte portée à l'exercice du droit de propriété, dont on peut même se demander si elle n'équivaut pas à une dépossession partielle, il paraît plus conforme aux principes généraux de notre droit de confier l'évaluation et l'indemnisation du dommage au juge de l'expropriation.
Rappelons à cet égard que la loi du 15 juin 1906 précitée prévoyait la compétence du juge de paix et que le décret n° 70-492 du 11 juin 1970 portant règlement d'administration publique pour l'application de l'article 35 modifié de la loi du 8 avril 1946 sur la nationalisation de l'électricité et du gaz retient la compétence du juge de l'expropriation.
Rappelons enfin que le Sénat avait essayé, en nouvelle lecture, d'insérer dans l'article 34 (1) une disposition en ce sens.
Par ces motifs, nous demandons au Conseil constitutionnel de déclarer non conforme à la Constitution le II de l'article 2 de la loi modifiant la loi n° 82-652 du 29 juillet 1982 et portant dispositions diverses relatives à la communication audiovisuelle.
MEMOIRE AMPLIATIF AU RECOURS PRESENTE PAR M CHARLES PASQUA DEVANT LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, SUR LA LOI MODIFIANT LA LOI N° 82-652 DU 29 JUILLET 1982, PORTANT DIVERSES DISPOSITIONS RELATIVES A LA COMMUNICATION AUDIOVISUELLE, ADOPTEE PAR LE PARLEMENT LE 29 NOVEMBRE 1985 Le paragraphe II de l'article 3 de la loi déférée au Conseil constitutionnel a été introduit en nouvelle lecture par le biais d'un amendement du Gouvernement sans lien nécessaire avec les autres dispositions du projet alors en navette entre les deux assemblées du Parlement et qui avait fait l'objet des travaux d'une commission mixte paritaire.
Il faut admettre qu'un tel comportement de la part du Gouvernement constitue, s'agissant d'une disposition additionnelle nouvelle, un détournement de pouvoir au regard de l'article 45 de la Constitution. En effet : 1 Le Gouvernement se dispense ainsi des formalités prévues par l'article 39, alinéa 2, de la Constitution en matière de dépôt de projet de loi (avis du Conseil d'Etat et délibération du conseil des ministres) en baptisant amendement une disposition entièrement nouvelle et sans lien nécessaire avec le projet en discussion. Or, une mesure aussi fondamentale relevait à l'évidence du droit d'initiative législative prévu par l'article 39, alinéa premier, de la Constitution, et non du droit d'amendement, lequel doit s'exercer dans le cadre du texte en discussion comme l'indique le sens même du terme « amendement ». Ce droit s'analyse en effet comme un pouvoir de modification, d'adaptation d'un texte en discussion et non comme un pouvoir d'innovation originaire.
Le Conseil constitutionnel a d'ailleurs lui-même reconnu dans sa décision n° 76-73 DC du 28 décembre 1976 l'existence d'une telle distinction entre amendement et initiative entièrement nouvelle au regard de la dernière phrase de l'article 39 de la Constitution.
2 Les membres de l'Assemblée nationale, au stade de la nouvelle lecture, ont subi une limitation du droit d'amendement qui leur est garanti par l'article 44, alinéa premier, de la Constitution puisque cette initiative gouvernementale s'est présentée sous la forme d'un amendement. Intégrée dans le projet initial, la même disposition aurait pu faire l'objet d'amendements et de sous-amendements ; au contraire, ici, seuls les sous-amendements demeuraient possibles.
3 Le Sénat s'était inquiété, lors de la première lecture de l'apparition d'une telle initiative ; le secrétaire d'Etat chargé des techniques de la communication, interrogé à ce sujet, avait démenti l'existence de semblables intentions gouvernementales. Dès lors, le Sénat n'a pas disposé sur ce texte des mêmes pouvoirs qu'il aurait eus si cette disposition avait été incluse dans le projet initial, voire même avait fait l'objet d'un amendement en première lecture lors de la discussion soit devant l'Assemblée nationale, soit devant le Sénat lui-même car : a) d'une part, il n'a examiné ladite disposition qu'une seule fois en nouvelle lecture au lieu du minimum de deux lectures garanti par les alinéas premier, deux et quatre de l'article 45 de la Constitution en cas d'urgence.
b) d'autre part, la délibération du Sénat et les amendements votés par lui n'ont eu aucune conséquence juridique puisque l'Assemblée nationale n'est pas saisie, au stade de la lecture définitive, du texte voté par le Sénat et n'est pas appelé à débattre sur celui-ci au contraire de ce qui se produit lors des lectures antérieures. La seule conséquence du vote d'amendement par le Sénat, à ce stade de la procédure, est d'autoriser des députés à reprendre éventuellement les amendements adoptés par le Sénat et à les redéposer devant l'Assemblée nationale.
Encore faut-il noter que ces amendements doivent être repris ne varietur et que l'Assemblée nationale, à ce stade, est dans l'impossibilité d'amender à son tour (et a fortiori de sous-amender) les propositions faites par le Sénat.
Dans ces conditions, le Sénat était réduit à l'égard de la disposition additionnelle nouvelle introduite par le Gouvernement en nouvelle lecture devant l'Assemblée nationale, au rang de simple chambre consultative en violation du mécanisme de conciliation prévu par l'article 45 de la Constitution.
Certes le Conseil constitutionnel a déjà admis dans des décisions antérieures et notamment la décision n° 85-191 DC du 10 juillet 1985 que « l'article 45 de la Constitution ne comporte, après l'intervention de la commission mixte paritaire, aucune restriction au droit d'amendement du Gouvernement ». Mais il a également admis la conformité à la Constitution de l'article 108 du règlement de l'Assemblée nationale qui stipule d'une part que « la discussion des articles est limitée à ceux pour lesquels les deux assemblées du Parlement n'ont pu parvenir à un texte identique » et d'autre part, que « les articles votés ne peuvent faire l'objet d'amendements qui remettraient en cause soit directement soit par des additions incompatibles, les dispositions adoptées ».
Or la conformité de ces dispositions à la Constitution suppose justement que les irrecevabilités formulées par cet article sont implicitement contenues dans la Constitution elle-même, sauf à admettre que le règlement de l'Assemblée nationale ait pu ajouter aux irrecevabilités constitutionnelles. Admettre un tel ajout aboutirait de plus à créer une inégalité dans l'exercice du droit d'amendement entre les députés et le Gouvernement ; en effet, ce dernier pourrait méconnaître les termes de l'article 108 du règlement de l'Assemblée nationale puisque les règlements des assemblées parlementaires n'ont pas en eux-mêmes valeur constitutionnelle alors que les députés seraient tenus de s'y conformer. En l'absence de dispositions de valeur constitutionnelle établissant une telle inégalité dans l'exercice du droit d'amendement prévu par l'article 44 de la Constitution, il apparaît donc que les termes de l'article 108 du règlement de l'Assemblée nationale s'appliquent aussi bien aux députés qu'au Gouvernement et trouvent donc (dans la mesure même où le Conseil constitutionnel a d'ores et déjà admis leur conformité à la Constitution) leur fondement dans la Constitution, et en particulier dans son article 45. Dès lors, cet article, compte tenu de l'interprétation qu'en a donné le Conseil quand il a statué sur la conformité de l'article 108 du règlement de l'Assemblée nationale à la Constitution, fait obstacle au détournement de procédure auquel le Gouvernement s'est livré en introduisant par voie d'amendement en nouvelle lecture une initiative législative nouvelle dans la loi déférée au Conseil constitutionnel.