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Présentation générale

Introduction

Le Conseil constitutionnel a été institué par la Constitution de la Ve République, en date du 4 octobre 1958. Régulateur du fonctionnement des pouvoirs publics et juridiction aux compétences variées, il a notamment la charge du contrôle de conformité de la loi à la Constitution.

I - Composition, procédure et organisation

1 - Composition

Le Conseil constitutionnel est composé de neuf membres nommés pour neuf ans. Les membres sont désignés par le Président de la République et les présidents  des assemblées parlementaires (Assemblée nationale et Sénat). Depuis la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, la procédure de nomination des membres fait intervenir pour avis, selon des modalités variables en fonction de l'autorité de nomination, la commission des lois constitutionnelles de chaque assemblée. Par un vote à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés, il peut être fait obstacle à la nomination du candidat pressenti par l'autorité de nomination.

Le Conseil se renouvelle par tiers tous les trois ans. Le Président de la République et les présidents des assemblées parlementaires nomment, chacun, un membre du Conseil tous les trois ans. Le mandat des conseillers n'est pas renouvelable. Toutefois, en cas de nomination en remplacement d'un membre démissionnaire ou empêché de finir son mandat, et à l'expiration de celui-ci, le conseiller remplaçant peut être ensuite nommé pour neuf ans s'il a occupé ces fonctions de remplacement pendant moins de trois ans.

Les conseillers nommés prêtent serment devant le Président de la République.

Les anciens Présidents de la République font partie, de droit, du Conseil constitutionnel.

Nommé par le Président de la République, le Président du Conseil constitutionnel est choisi parmi ses membres.

Aucune qualification d'âge ou de profession n'est requise pour devenir membre du Conseil constitutionnel. La fonction est en revanche incompatible avec celle de membre du Gouvernement ou du Conseil économique, social et environnemental, ainsi qu'avec celle de Défenseur des droits. Elle est également incompatible avec l'exercice de tout mandat électoral. Les membres sont en outre soumis aux mêmes incompatibilités professionnelles que les parlementaires. Un ancien Président de la République, membre de droit, ne peut siéger au Conseil s'il occupe une fonction incompatible avec la qualité de membre de ce dernier. De plus, pendant la durée de leurs fonctions, les membres du Conseil ne peuvent être nommés à un emploi public ni recevoir de promotion au choix s'ils sont fonctionnaires.

Les membres nommés peuvent choisir de cesser leurs fonctions. Ils peuvent aussi être déclarés démissionnaires d'office en cas d'incompatibilité ou d'incapacité physique permanente constatée par le Conseil constitutionnel.

2 - Procédure

Le Conseil constitutionnel est une juridiction dont les audiences et séances suivent le rythme des requêtes dont il est saisi.

Lorsqu'il est saisi de la constitutionnalité d'une loi avant sa promulgation, le Conseil doit statuer dans le délai d'un mois ou de huit jours en cas d'urgence.

Lorsqu'il est saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil a trois mois pour rendre sa décision. Dans ce délai, les parties sont mises à même de présenter contradictoirement leurs observations par écrit et invitées à participer à une audience publique.

L'instruction des affaires est confiée à un membre du Conseil désigné comme rapporteur par le président, sauf en matière de contentieux électoral. Pour ce contentieux, l'instruction est confiée à l'une des trois sections composées de trois membres désignés par tirage au sort, chacun devant avoir été nommé par une autorité différente.

La procédure de la question prioritaire de constitutionnalité est contradictoire et écrite. Les parties sont en outre entendues lors d'une audience publique. En matière de contentieux électoral, les parties peuvent demander à être entendues, à moins que le Conseil n'ait pris l'initiative de les inviter à s'exprimer devant lui.

Le Conseil ne siège et ne juge qu'en formation plénière. Ses décisions et avis sont rendus par sept conseillers au moins (règle de quorum). En cas de partage, la voix du président est prépondérante. Il n'y a pas d'opinion dissidente possible. Contrairement aux audiences, les délibérés et votes ne sont pas publics.

3 - Organisation

Un secrétaire général, nommé par décret du Président de la République, dirige les services du Conseil :

  • un service juridique composé d'un magistrat de l'ordre judiciaire, d'un magistrat de l'ordre administratif, d'un administrateur de l'Assemblée nationale, et d'un administrateur du Sénat, assistés de maîtres de conférences de l'Université. Le greffe est rattaché au service juridique.
  • un service de documentation chargé de travaux de recherches juridiques ;
  • un service des relations extérieures chargé des rapports du Conseil avec toutes les juridictions, universités et institutions françaises ainsi que des relations internationales ;
  • un service de communication ;
  • un service administratif et financier ;
  • un service informatique.

Le Conseil constitutionnel jouit de l'autonomie financière. Son président en fixe le budget. La dotation correspondante est inscrite dans le projet de loi de finances au titre de la mission « Pouvoirs publics ».

II - Compétences

La compétence du Conseil constitutionnel, délimitée par la Constitution, est précisée et complétée par des lois organiques. Les attributions que lui confient les textes peuvent se ranger en deux catégories :

1 - Une compétence juridictionnelle s'étendant à deux catégories de contentieux

a) Un contentieux normatif
  • Juge de la constitutionnalité des lois, le Conseil constitutionnel exerce soit un contrôle a priori, soit un contrôle a posteriori.

Contrôle a priori :

Le Conseil constitutionnel est obligatoirement saisi des lois organiques et des règlements des assemblées parlementaires, avant la promulgation des premières et l'entrée en vigueur des seconds. Il peut être saisi d'un engagement international avant sa ratification ou son approbation. Pour les lois ordinaires, le Conseil peut être saisi d'une loi avant sa promulgation. Dans ces deux derniers cas de figure, le Conseil est saisi, selon des modalités variables selon l'acte contrôlé, soit par une autorité politique (Président de la République, Premier ministre, président de l'Assemblée nationale ou du Sénat), soit par 60 députés ou 60 sénateurs au moins.

Depuis 1999, le Conseil constitutionnel peut également examiner la conformité à la Constitution des lois du pays adoptées par le congrès de la Nouvelle-Calédonie.

Contrôle a posteriori :

Depuis le 1er mars 2010 et à la suite de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, le Conseil constitutionnel, sur renvoi du Conseil d'État ou de la Cour de cassation, contrôle si une disposition législative déjà en application porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution. Dans cette hypothèse, un requérant est à l'origine du contrôle de constitutionnalité exercé, puisque la question posée a été soulevée à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction. On parle de question prioritaire de constitutionnalité (QPC).

  • Juge de la répartition des compétences entre la loi et le règlement, le Conseil constitutionnel peut être saisi, soit en cours de discussion parlementaire par le président de l'assemblée intéressée ou le Premier ministre, soit a posteriori par ce dernier pour déclasser une disposition législative, c'est-à-dire modifier par décret une telle disposition dont le contenu est de nature réglementaire.
  • Depuis la révision du 23 juillet 2008, le Conseil constitutionnel peut être amené à vérifier si les conditions de présentation des projets de loi répondent aux conditions fixées par une loi organique (loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009).

  • Enfin, le Conseil constitutionnel est juge de la répartition des compétences entre l'État et certaines collectivités d'outre-mer (à ce jour : Polynésie française, Saint-Barthélemy et Saint-Martin).

b) Un contentieux électoral et référendaire

Le Conseil constitutionnel veille à la régularité de l'élection du Président de la République et des opérations de référendum, dont il proclame les résultats. Il est juge de la régularité de l'élection des parlementaires, et donc de leur éligibilité ; il intervient également lorsqu'un parlementaire se trouve, ou est susceptible de se trouver, dans un cas d'incompatibilité.

Largement ouvertes aux électeurs, les saisines du Conseil en matière électorale ont vu leur nombre considérablement augmenter à la suite du vote de la législation organisant et contrôlant le financement des dépenses électorales dont le Conseil est juge pour les candidats aux élections législatives et présidentielle (en appel). Ainsi, au 4 octobre 2012, le Conseil avait rendu 2871 décisions en matière électorale pour 889 décisions sur le contentieux des normes (dont 650 DC).

2 - Une compétence consultative

Le Conseil constitutionnel émet un avis lorsqu'il est consulté par le chef de l'État sur la mise en œuvre de l'article 16 de la Constitution et ultérieurement sur les décisions prises dans ce cadre. Il vérifie si les conditions de mise en œuvre sont toujours réunies soit à la demande d'un président d'assemblée ou 60 députés ou 60 sénateurs au bout de 30 jours, soit de plein droit au bout de 60 jours et à tout moment au-delà de cette durée.

Par ailleurs, le Gouvernement consulte le Conseil sur les textes relatifs à l'organisation du scrutin pour l'élection du Président de la République et le référendum. Le Conseil formule également des observations sur les élections parlementaires et présidentielle passées ainsi que sur les prochaines échéances électorales, afin de proposer aux pouvoirs publics toutes mesures susceptibles d'améliorer le déroulement de ces élections.

III - Nature et effets des jugements

  • les visas des textes applicables et des éléments de procédure,
  • les motifs présentés par paragraphes analysant les moyens invoqués, indiquant les principes applicables et répondant à la requête,
  • un dispositif final divisé en articles énonçant la solution adoptée.

1 - Types de décisions

Les différents types de décisions sont identifiables par des lettres placées après le numéro d'enregistrement de la saisine, qui lui-même succède à l'année d'enregistrement de la saisine. On distingue notamment :

  • les décisions relatives au contrôle de constitutionnalité a priori qui sont classées [DC] (décision de conformité) ou [LP] pour les lois du pays de Nouvelle-Calédonie ;
  • les décisions relatives aux questions prioritaires de constitutionnalité qui sont classées [QPC] ;
  • les décisions portant les lettres [L] (déclassement législatif) et [FNR] (fin de non-recevoir) relatives au contrôle de la répartition des compétences entre les pouvoirs législatif et réglementaire ;
  • les décisions notées [LOM] portant sur la répartition des compétences entre l'État et les collectivités d'outre-mer ;
  • les décisions liées au contentieux électoral des élections parlementaires qui sont classées [AN] (Assemblée nationale) ou [SEN] (Sénat), et pour lesquelles sont mentionnées les références de la circonscription ou du département ;
  • les décisions liées au régime des [incompatibilités] des membres du Parlement (notées [I]) et à la déchéance de leur mandat à la suite d'une inéligibilité (notées [D]).
  • les décisions liées à l'élection du Président de la République (notées [PDR].

2 - Effets juridiques des décisions

Les décisions s'imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et juridictionnelles. Elles ne sont susceptibles d'aucun recours. L'autorité de la chose jugée ne s'attache pas seulement au dispositif mais aussi aux motifs qui en sont le soutien nécessaire. En matière électorale, comme pour les questions prioritaires de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel admet cependant les recours en rectification d'erreur matérielle.

Les décisions de conformité (DC) concernant les lois organiques ou ordinaires peuvent conduire à la censure totale ou partielle de la loi, mais non à son annulation puisqu'elles sont prononcées avant la promulgation de celle-ci, acte juridique qui en assure l'application.

Les dispositions déclarées inconstitutionnelles d'un règlement d'une assemblée parlementaire ne peuvent être mises en application.

Si le Conseil constitutionnel estime qu'un engagement international comporte une clause contraire à la Constitution, l'autorisation de ratifier ou d'approuver cet engagement international ne peut intervenir qu'après révision de la Constitution.

Lorsque, saisi d'une QPC, le Conseil constitutionnel déclare une disposition inconstitutionnelle, cette dernière est abrogée à compter de la publication de la décision ou d'une date ultérieure fixée par celle-ci. Le Conseil peut, en application de l'article 62 de la Constitution, déterminer les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition inconstitutionnelle a produits peuvent être remis en cause.

L'effet des décisions en matière de contentieux électoral varie, allant de l'annulation de bulletins à celle des opérations électorales elles-mêmes, et peut comporter la déclaration d'inéligibilité d'un candidat et/ou la démission d'office d'un élu.

3 - Publication

Les décisions sont notifiées aux parties et publiées au Journal officiel de la République Française (série Lois et décrets). Pour les décisions DC, le site du Conseil constitutionnel permet également d'accéder au texte de la saisine parlementaire (disponibles depuis l'année 1983) et aux observations du Gouvernement (disponibles depuis l'année 1995).

Le Conseil constitutionnel a publié par ailleurs de 1996 à 2018 la revue trimestrielle « les Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel » (anciennement « Cahiers du Conseil constitutionnel », revue semestrielle), à laquelle a succédé en septembre 2018 Titre VII, édition numérique et gratuite.

Enfin, l'ensemble des décisions depuis l'origine est disponible sur le site Internet du Conseil constitutionnel, certaines décisions étant accompagnées d'un commentaire rédigé par son service juridique.

Conclusion

Depuis 2010, le Conseil constitutionnel rend annuellement deux à trois fois plus de décisions qu'avant la réforme de la QPC et encore beaucoup plus qu'avant l'ouverture de la saisine aux parlementaires en 1974. Le considérable essor de la jurisprudence constitutionnelle résulte essentiellement de la conjonction de deux éléments :

  • jurisprudentiel d'abord, puisque, par sa décision du 16 juillet 1971« Liberté d'association », le Conseil constitutionnel reconnaît sans ambiguïté que la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 et le préambule de la Constitution de 1946, auxquels renvoie le préambule de la Constitution de 1958, font partie des normes constitutionnelles de référence et peuvent donc être invoqués dans le cadre du contrôle de constitutionnalité. Cette avancée jurisprudentielle majeure consacre le rôle du Conseil comme garant des droits et des libertés ;
  • institutionnel ensuite, puisque sont survenues au moins deux révisions constitutionnelles déterminantes pour le Conseil : en 1974, est accordé à une minorité de parlementaires (60 députés ou 60 sénateurs) le droit de le saisir d'une loi ordinaire, droit jusqu'alors réservé au Président de la République, au Premier ministre et au président de chaque assemblée parlementaire ; en 2008, la procédure de la question prioritaire de constitutionnalité a permis à tout justiciable, dans le cadre d'une instance engagée devant une juridiction, de faire valoir que la loi qu'on veut lui appliquer est contraire aux droits et libertés garantis par la Constitution. Le Conseil constitutionnel peut désormais être saisi sur renvoi de la Cour de cassation ou du Conseil d'État.