Décision n° 2018-5616R AN du 5 octobre 2018
Au vu des textes suivants :
- la Constitution, notamment son article 59 ;
- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
- le code électoral, notamment ses articles L.O. 136-1 et L. 52-12 ;
- le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs, notamment son article 21 ;
- la décision du Conseil constitutionnel n° 2018-5616 AN du 13 juillet 2018 ;
Au vu des pièces suivantes :
- les observations de la préfecture de Saône-et-Loire, enregistrées le 17 juillet 2018 ;
- les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Et après avoir entendu le rapporteur ;
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT :
1. Aux termes de l'article 21 du règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs : « Si le Conseil constitutionnel constate qu'une de ses décisions est entachée d'une erreur matérielle, il peut la rectifier d'office ».
2. Dans sa décision mentionnée ci-dessus du 13 juillet 2018, le Conseil constitutionnel a déclaré M. GARCIA inéligible pour une durée de trois ans à compter de cette date, au motif qu'il n'avait pas, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 52-12 du code électoral, déposé son compte de campagne auprès de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques alors qu'il y était tenu, dans la mesure où, faute d'avoir restitué en préfecture le carnet de reçus dons délivré à son mandataire, il était présumé avoir reçu des dons de personnes physiques. Toutefois, il résulte des pièces produites postérieurement à la décision du Conseil constitutionnel que M. GARCIA a restitué ledit carnet à la préfecture de Saône-et-Loire le 21 février 2018. Dès lors la décision mentionnée ci-dessus est entachée d'une erreur matérielle.
3. Il y a lieu, en conséquence, de déclarer non avenue la décision mentionnée ci-dessus du 13 juillet 2018 et de statuer à nouveau, d'office, sur la saisine de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques relative à la situation de M. GARCIA.
4. Il résulte de l'article L. 52-12 du code électoral que chaque candidat aux élections législatives soumis au plafonnement prévu à l'article L. 52-11 du même code et qui a obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés doit établir un compte de campagne retraçant, selon leur origine, l'ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l'ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l'élection. Ce compte doit être déposé à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques au plus tard avant 18 heures le dixième vendredi suivant le premier tour de scrutin. La même obligation incombe au candidat qui a bénéficié de dons de personnes physiques conformément à l'article L. 52-8. Le compte de campagne doit être en équilibre ou excédentaire et ne peut présenter un déficit. Il ressort également de l'article L. 52-12 que, sauf lorsqu'aucune dépense ou recette ne figure au compte de campagne, celui-ci est présenté par un membre de l'ordre des experts-comptables et des comptables agréés qui met ce compte en état d'examen et s'assure de la présence des pièces justificatives requises. Lorsqu'aucune dépense ou recette ne figure au compte de campagne, le mandataire établit une attestation d'absence de dépense et de recette.
5. L'article L.O. 136-1 du même code dispose que le Conseil constitutionnel peut déclarer inéligible le candidat qui n'a pas déposé son compte de campagne dans les conditions et le délai prescrits à l'article L. 52-12.
6. M. GARCIA a obtenu moins de 1 % des suffrages exprimés à l'issue du premier tour de scrutin qui s'est tenu le 11 juin 2017. À l'expiration du délai prévu à l'article L. 52-12 du code électoral, soit le 18 août 2017 à 18 heures, M. GARCIA n'avait pas déposé son compte de campagne. Il n'avait pas davantage produit une attestation d'absence de dépense et de recette établie par un mandataire.
7. La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a saisi le Conseil constitutionnel au motif que M. GARCIA n'ayant pas restitué les carnets de reçus-dons délivrés à son mandataire en préfecture, il ne pouvait être regardé comme n'ayant pas bénéficié de dons consentis par des personnes physiques et était en conséquence tenu de déposer un compte de campagne.
8. L'absence de restitution par le candidat des carnets de reçus-dons fait présumer de la perception de dons de personnes physiques conformément à l'article L. 52-8. Toutefois, cette présomption peut être combattue par tous moyens. En l'espèce, postérieurement à la décision susmentionnée de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, M. GARCIA a restitué le carnet de reçus-dons qui avait été remis à son mandataire, démontrant ainsi qu'il n'avait pas perçu de dons de personnes physiques. Par suite, il n'y a pas lieu de prononcer son inéligibilité.
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE :
Article 1er. - La décision n° 2018-5616 AN du 13 juillet 2018 est déclarée non avenue.
Article 2. - Il n'y a pas lieu, pour le Conseil constitutionnel, de déclarer M. Sylvain GARCIA inéligible en application de l'article L.O. 136-1 du code électoral.
Article 3. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 18 du règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs.
Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 4 octobre 2018, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, MM. Jean-Jacques HYEST, Lionel JOSPIN, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, Nicole MAESTRACCI et M. Michel PINAULT.
Rendu public le 5 octobre 2018.
JORF n°0233 du 9 octobre 2018, texte n° 147
ECLI : FR : CC : 2018 : 2018.5616R.AN
Les abstracts
- 8. ÉLECTIONS
- 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
- 8.3.5. Financement
- 8.3.5.2. Établissement d'un compte de campagne
- 8.3.5.2.1. Obligation de dépôt du compte de campagne
8.3.5.2.1.2. Dispense de dépôt (moins de 1 % des suffrages exprimés et absence de dons de personnes physiques)
Cas d'un candidat ayant obtenu moins de 1 % des suffrages exprimés à l'issue du premier tour de scrutin et ayant restitué ses carnets de reçus-dons. À l'expiration du délai prévu à l'article L. 52-12 du code électoral, le candidat n'avait pas déposé son compte de campagne, ni produit une attestation d'absence de dépense et de recette établie par un mandataire. La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a saisi le Conseil constitutionnel au motif que le candidat n'ayant pas restitué les carnets de reçus-dons délivrés à son mandataire en préfecture, il ne pouvait être regardé comme n'ayant pas bénéficié de dons consentis par des personnes physiques et était en conséquence tenue de déposer un compte de campagne. L'absence de restitution par le candidat des carnets de reçus-dons fait présumer de la perception de dons de personnes physiques conformément à l'article L. 52-8. Toutefois, cette présomption peut être combattue par tous moyens. En l'espèce, postérieurement à la décision susmentionnée de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, le candidat a restitué les carnets de reçus-dons qui avaient été remis à son mandataire, démontrant ainsi qu'il n'avait pas perçu de dons de personnes physiques. Par suite, il n'y a pas lieu de prononcer son inéligibilité.
- 11. CONSEIL CONSTITUTIONNEL ET CONTENTIEUX DES NORMES
- 11.8. SENS ET PORTÉE DE LA DÉCISION
- 11.8.8. Contentieux - Voies de recours
11.8.8.3. Rectification d'office d'erreurs matérielles par le Conseil constitutionnel
Dans sa décision du 13 juillet 2018, le Conseil constitutionnel a déclaré un candidat inéligible pour trois ans, au motif qu'il n'avait pas déposé son compte de campagne auprès de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques alors qu'il y était tenu, dans la mesure où, faute d'avoir restitué en préfecture le carnet de reçus dons délivré à son mandataire, il était présumé avoir reçu des dons de personnes physiques. Toutefois, il résulte des pièces produites postérieurement à la décision du Conseil constitutionnel que ce candidat a restitué ledit carnet à la préfecture le 21 février 2018. Il y a lieu, en conséquence, de déclarer non avenue la décision mentionnée du 13 juillet 2018 et de statuer à nouveau, d'office.