Décision n° 93-1189/1201/1365 AN du 20 octobre 1993
Le Conseil constitutionnel,
Vu la requête présentée par M. Gérard Copede, demeurant à Paris, enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 1er avril 1993, et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 21 et 28 mars 1993 dans la 11e circonscription des Yvelines pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;
Vu la requête présentée par Mme Janine Cayet, demeurant à Trappes, enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 2 avril 1993, et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 21 et 28 mars 1993 dans la 11e circonscription des Yvelines pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;
Vu la requête présentée par M. Maurice Prost, demeurant à Clamery, enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 8 avril 1993, et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 21 et 28 mars 1993 dans la 11e circonscription des Yvelines pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;
Vu les observations en défense présentées par M. Fourgous, député, enregistrées comme ci-dessus le 21 juin 1993 ;
Vu les observations en réplique présentées par M. Copede, enregistrées comme ci-dessus le 26 mai et les 4, 6 et 13 octobre 1993 ;
Vu les observations en réplique présentées par Mme Cayet, enregistrées comme ci-dessus le 12 juillet 1993 ;
Vu les observations complémentaires en défense présentées par M. Fourgous, enregistrées comme ci-dessus le 16 septembre 1993 ;
Vu les observations présentées par le ministre de l'intérieur, enregistrées comme ci-dessus les 10 mai et 2 juin 1993 ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu l'article 59 de la Constitution ;
Vu l'ordonnance no 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
Vu le code électoral ;
Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et sénateurs ;
Le rapporteur ayant été entendu ;
1. Considérant que les requêtes de M. Copede, de Mme Cayet et de M. Prost sont relatives aux mêmes opérations électorales ; qu'il y a donc lieu de les joindre pour y statuer par une seule décision ;
Sur le grief tiré de l'intervention de l'arrêt de la cour d'appel de Versailles en date du 19 mars 1993 :
2. Considérant que la diffusion des circulaires et des bulletins de vote des candidats à une élection législative constitue un acte préliminaire aux opérations électorales qui, en l'état de la législation, ne peut être contesté que devant le Conseil constitutionnel, juge de l'élection ; qu'il suit de là qu'il n'appartient pas aux juridictions judiciaires d'enjoindre à un candidat de cesser d'utiliser les documents électoraux dont la commission de propagande a accepté d'assurer la diffusion ;
3. Considérant toutefois que l'utilisation de la dénomination « Génération verte » était de nature à susciter la confusion, dans l'esprit des électeurs, avec les dénominations « Génération Ecologie » et « Les Verts » déjà utilisées ; que ce risque de confusion était encore aggravé par le choix du graphisme employé sur les documents électoraux ; que, dès lors, dans les circonstances de l'espèce, l'intervention de l'arrêt susmentionné, qui a interdit la diffusion et l'utilisation des circulaires et bulletins de vote du candidat se présentant sous l'étiquette « Génération verte », ne saurait être considérée comme ayant eu pour effet d'altérer la sincérité du scrutin ;
Sur les griefs tirés d'abus de propagande et de manoeuvres dans le déroulement de la campagne électorale :
4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, postérieurement au 3 février 1993, date à laquelle Mme Cayet a reçu l'investiture commune du Rassemblement pour la République et de l'Union pour la démocratie française, et jusqu'au lendemain du premier tour de scrutin, M. Fourgous ne s'est pas prévalu d'un soutien à sa candidature du Rassemblement pour la République, mais s'est borné à faire état de son appartenance à cette formation politique ; qu'au surplus les électeurs ont été largement informés, avant le premier tour, par les soins de Mme Cayet elle-même, de ce qu'elle était seule investie du soutien des deux formations susnommées ; qu'entre les deux tours de scrutin M. Fourgous ayant obtenu le soutien de ces deux formations, il était fondé à s'en prévaloir ;
5. Considérant que si M. Fourgous a fait apposer des affiches électorales en dehors des emplacements réservés à cet effet, une telle irrégularité, qui a été aussi commise par ses principaux concurrents, n'a pu, dans les circonstances de l'espèce, avoir pour effet d'altérer la sincérité du scrutin ;
6. Considérant que, si sur sa profession de foi diffusée entre les deux tours de scrutin, M. Fourgous a fait figurer le nom de douze personnalités locales présentées comme soutenant sa candidature, alors que quatre de ces personnes ont affirmé n'avoir pas donné leur accord à cette fin, ce fait n'a pas été de nature à vicier la sincérité du scrutin, dès lors que les quatre personnalités en cause ont pu procéder en temps utile à toute mise au point qu'elles ont estimée nécessaire ;
7. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que M. Fourgous aurait suscité la candidature d'une autre personne appartenant, comme Mme Cayet, à l'Union pour la démocratie française, à seule fin de nuire à cette dernière ;
8. Considérant enfin qu'il ne résulte pas de l'instruction que l'organisation par M. Fourgous, les 6 et 19 mars 1993, de réunions ouvertes au public dénommées « Journées emploi » ait revêtu le caractère d'une manoeuvre ; que les autres griefs invoqués dans la requête présentée par M. Copede ne sont assortis d'aucun commencement de preuve ;
Sur les conclusions de M. Fourgous tendant à ce que lui soient allouées certaines sommes au titre des frais irrépétibles sur le fondement de l'article 75-I de la loi no 91-647 du 10 juillet 1991 :
9. Considérant qu'aux termes de l'article 63 de la Constitution : « Une loi organique détermine les règles d'organisation et de fonctionnement du Conseil constitutionnel, la procédure qui est suivie devant lui... »
10. Considérant que M. Fourgous ne saurait utilement se prévaloir, devant le Conseil constitutionnel, au soutien de sa demande tendant au règlement par Mme Cayet et MM. Copede et Prost de certaines sommes au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991, dès lors que cette disposition ne résulte pas d'une loi organique qui seule peut régir la procédure devant le Conseil constitutionnel ; que, dès lors, ses conclusions doivent être rejetées,
Décide :
Article premier :
Les requêtes de M. Gérard Copede, Mme Janine Cayet, et M. Maurice Prost sont rejetées.
Article 2 :
Les conclusions de M. Fourgous sont rejetées.
Article 3 :
La présente décision sera notifiée à l'Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 20 octobre 1993, où siégeaient : MM. Robert BADINTER, président, Robert FABRE, Maurice FAURE, Marcel RUDLOFF, Georges ABADIE, Jean CABANNES, Jacques LATSCHA, Jacques ROBERT et Mme Noëlle LENOIR.
Le président,
Robert BADINTERJournal officiel du 31 octobre 1993, page 15120
Recueil, p. 380
ECLI : FR : CC : 1993 : 93.1189.AN
Les abstracts
- 8. ÉLECTIONS
- 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
- 8.3.3. Campagne électorale - Moyens de propagande
- 8.3.3.1. Affiches
8.3.3.1.5. Date et lieu d'apposition des affiches
Affichage illégal. Irrégularité également commise par les adversaires du candidat élu. Grief non retenu.
- 8. ÉLECTIONS
- 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
- 8.3.3. Campagne électorale - Moyens de propagande
- 8.3.3.3. Circulaires
8.3.3.3.2. Présentation des professions de foi
Sur sa profession de foi diffusée entre les deux tours de scrutin, le candidat élu a fait figurer le nom de 12 personnalités locales présentées comme soutenant sa candidature, alors que 4 de ces personnes ont affirmé n'avoir pas donné leur accord à cette fin. Ce fait n'a pas été de nature à vicier la sincérité du scrutin, dès lors que les 4 personnalités en cause ont pu procéder en temps utile à toute mise au point qu'elles ont estimé nécessaire.
- 8. ÉLECTIONS
- 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
- 8.3.4. Campagne électorale - Pressions, interventions, manœuvres
- 8.3.4.2. Manœuvres ou interventions relatives à la situation politique des candidats
8.3.4.2.1. Appartenance ou " étiquette " politique
Postérieurement au 3 février 1993, date à laquelle la requérante a reçu l'investiture commune du Rassemblement pour la République (RPR) et de l'Union pour la démocratie française (UDF), et jusqu'au lendemain du premier tour de scrutin, le candidat élu ne s'est pas prévalu d'un soutien à sa candidature du RPR, mais s'est borné à faire état de son appartenance à cette formation politique. Les électeurs ont été largement informés, avant le premier tour, par les soins de la requérante, de ce qu'elle était seule investie du soutien des deux formations susnommées. Entre les deux tours de scrutin, le candidat élu ayant obtenu le soutien de ces deux formations, il était fondé à s'en prévaloir.
- 8. ÉLECTIONS
- 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
- 8.3.4. Campagne électorale - Pressions, interventions, manœuvres
- 8.3.4.2. Manœuvres ou interventions relatives à la situation politique des candidats
8.3.4.2.2. Investitures (voir ci-dessous également : Manœuvres ou interventions relatives au second tour de scrutin)
Postérieurement au 3 février 1993, date à laquelle la requérante a reçu l'investiture commune du Rassemblement pour la République (RPR) et de l'Union pour la démocratie française (UDF), et jusqu'au lendemain du premier tour de scrutin, le candidat élu ne s'est pas prévalu d'un soutien à sa candidature du RPR, mais s'est borné à faire état de son appartenance à cette formation politique. Les électeurs ont été largement informés, avant le premier tour, par les soins de la requérante, de ce qu'elle était seule investie du soutien des deux formations susnommées. Entre les deux tours de scrutin le candidat élu ayant obtenu le soutien de ces deux formations, il était fondé à s'en prévaloir.
- 8. ÉLECTIONS
- 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
- 8.3.4. Campagne électorale - Pressions, interventions, manœuvres
- 8.3.4.2. Manœuvres ou interventions relatives à la situation politique des candidats
8.3.4.2.3. Soutiens
Si sur sa profession de foi diffusée entre les deux tours de scrutin, le candidat élu a fait figurer le nom de 12 personnalités locales présentées comme soutenant sa candidature, alors que 4 de ces personnes ont affirmé n'avoir pas donné leur accord à cette fin, ce fait n'a pas été de nature à vicier la sincérité du scrutin, dès lors que les 4 personnalités en cause ont pu procéder en temps utile à toute mise au point qu'elles ont estimé nécessaire.
- 8. ÉLECTIONS
- 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
- 8.3.6. Opérations électorales
- 8.3.6.8. Dépouillement
- 8.3.6.8.3. Validité des bulletins
8.3.6.8.3.2. Mentions
Rédaction de bulletins " Génération verte " étant de nature, par l'appellation choisie, à susciter la confusion avec d'autres dénominations, ce risque de confusion étant aggravé par l'usage du graphisme des bulletins et documents électoraux.
- 8. ÉLECTIONS
- 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
- 8.3.7. Contentieux - Compétence
- 8.3.7.1. Étendue de la compétence du Conseil constitutionnel
8.3.7.1.1. Décisions préliminaires
Il n'appartient qu'au Conseil constitutionnel, juge de l'élection, de connaître des contestations des décisions de la commission de propagande relatives à la diffusion des bulletins de vote, à leur dénomination et à leur graphisme. L'autorité judiciaire n'a pas compétence pour intervenir dans le déroulement de ces opérations préliminaires.
- 8. ÉLECTIONS
- 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
- 8.3.7. Contentieux - Compétence
- 8.3.7.2. Questions n'entrant pas dans la compétence du Conseil constitutionnel
8.3.7.2.4. Remboursement des frais de propagande
Recours tendant à l'indemnisation du préjudice subi du fait de l'impossibilité d'atteindre 5 % des voix et de pouvoir prétendre au remboursement des frais de propagande. Irrecevabilité.
- 8. ÉLECTIONS
- 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
- 8.3.7. Contentieux - Compétence
- 8.3.7.2. Questions n'entrant pas dans la compétence du Conseil constitutionnel
8.3.7.2.9. Frais irrépétibles
Dès lors que les dispositions du I de l'article 75 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ne résultent pas d'une loi organique qui seule, en vertu de l'article 63 de la Constitution, peut régir la procédure devant le Conseil constitutionnel, le requérant ne peut demander devant le Conseil constitutionnel la condamnation de la partie adverse aux frais exposés et non compris dans les dépens.