Conseil Constitutionnel

DÉCISION N° 2019-768 QPC / 21 mars 2019 / M. Adama S. [Examens radiologiques osseux aux fins de détermination de l’âge] Conformité

Examens radiologiques osseux

En l’état des connaissances
scientifiques, il est établi
que les résultats des
examens radiologiques
osseux peuvent comporter
une marge d’erreur
significative.

En l’état des connaissances scientifiques, il est établi que les résultats des examens radiologiques osseux peuvent comporter une marge d’erreur significative.
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Dans sa rédaction résultant de la loi du 14 mars 2016 relative à la protection de l’enfant, l’article 388 du code civil autorise le recours à un examen radiologique osseux aux fins de contribuer à la détermination de l’âge d’une personne.

Examinant une QPC que lui avait transmise la Cour de cassation concernant ces dispositions, le Conseil constitutionnel a déduit pour la première fois des dixième et onzième alinéas du Préambule de la Constitution de 1946 une exigence de protection de l’intérêt supérieur de l’enfant, imposant que les mineurs présents sur le territoire national bénéficient de la protection légale attachée à leur âge. Il s’ensuit que les règles relatives à la détermination de l’âge d’un individu doivent être entourées des garanties nécessaires afin que des personnes mineures ne soient pas indûment considérées comme majeures.

Au regard du cadre ainsi établi, il a relevé que les dispositions législatives contestées autorisent le recours à un examen radiologique osseux aux fins de contribuer à la détermination de l’âge d’une personne. En l’état des connaissances scientifiques, il est établi que les résultats de ce type d’examen peuvent comporter une marge d’erreur significative.

Le Conseil constitutionnel a précisé qu’il appartient à l’autorité judiciaire de s’assurer du respect du caractère subsidiaire de cet examen

Il a relevé que, toutefois, seule l’autorité judiciaire peut décider de recourir à un tel examen. Celui-ci ne peut être ordonné que si la personne en cause n’a pas de documents d’identité valables et si l’âge qu’elle allègue n’est pas vraisemblable. Le Conseil a précisé qu’il appartient à l’autorité judiciaire de s’assurer du respect du caractère subsidiaire de cet examen. En outre, cet examen ne peut intervenir qu’après que le consentement éclairé de l’intéressé a été recueilli, dans une langue qu’il comprend. À cet égard, la majorité d’une personne ne saurait être déduite de son seul refus de se soumettre à un examen osseux.

Le Conseil constitutionnel a relevé par ailleurs que le législateur a pris en compte, dans les garanties qu’il a établies, l’existence de la marge d’erreur entourant les conclusions des examens radiologiques. D’une part, la loi impose la mention de cette marge dans les résultats de ces examens. D’autre part, elle a exclu que ces conclusions puissent constituer l’unique fondement dans la détermination de l’âge de la personne. Il appartient donc à l’autorité judiciaire d’apprécier la minorité ou la majorité de celle-ci en prenant en compte les autres éléments ayant pu être recueillis, tels que l’évaluation sociale ou les entretiens réalisés par les services de la protection de l’enfance. Enfin, si les conclusions des examens radiologiques sont en contradiction avec les autres éléments d’appréciation susvisés et si le doute persiste au vu de l’ensemble des éléments recueillis, ce doute doit profiter à la qualité de mineur de l’intéressé.

Le Conseil constitutionnel juge que le législateur n’a pas méconnu l’exigence de protection de l’intérêt supérieur de l’enfant découlant des dixième et onzième alinéas du Préambule de la Constitution de 1946

Le Conseil constitutionnel juge qu’il appartient aux autorités administratives et judiciaires compétentes de donner leur plein effet à l’ensemble de ces garanties.

Au total, compte tenu des garanties entourant le recours aux examens radiologiques osseux à des fins de détermination de l’âge, le Conseil constitutionnel juge que le législateur n’a pas méconnu l’exigence de protection de l’intérêt supérieur de l’enfant découlant des dixième et onzième alinéas du Préambule de la Constitution de 1946.

Au regard de ces garanties, est également écarté le grief tiré d’une méconnaissance du droit à la protection de la santé, précision étant faite par le Conseil qu’il doit être tenu compte d’un avis médical qui déconseillerait l’examen osseux à raison des risques particuliers qu’il pourrait présenter pour la personne concernée.


OCTOBRE 2019
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