Conseil Constitutionnel

De Séville à Albi : le Conseil constitutionnel rejoint le réseau des cours constitutionnelles latines

Pour la première fois, le Conseil constitutionnel a été invité à se joindre au groupe des cours constitutionnelles latines (Portugal, Italie, Espagne), à l’occasion d’une réunion organisée à Séville du 26 au 28 octobre 2017.

M. Laurent Fabius, président du Conseil constitutionnel, ainsi que M. Michel Pinault et Mme Corinne Luquiens, membres du Conseil, ont participé à la première rencontre « quadrilatérale » des Cours constitutionnelles latines qui s’est tenue à Séville du 26 au 28 octobre 2017.

Institué « à trois » en 1999, ce groupe informel comprend le Tribunal constitutionnel espagnol, le Tribunal constitutionnel portugais, la Cour constitutionnelle italienne et, depuis 2017, le Conseil constitutionnel français. Il a vocation à se réunir chaque année pour échanger sur un thème juridique d’intérêt commun et sur l’évolution récente des différentes jurisprudences.

Accueillie au Palais Real Alcazar de Séville par le président du Tribunal constitutionnel espagnol, M. Juan José Gonzales Rivas, la délégation française a participé aux travaux consacrés aux « droits fondamentaux dans l’ordonnancement juridique national et européen ».

Ce déplacement en Espagne a également été marqué par des rencontres avec les autorités locales : Mme Susana Diaz Pacheco, présidente du Gouvernement régional d’Andalousie, et M. Juan Espadas Cejas, Maire de Séville.

Dans le prolongement de cette première réunion, le Conseil constitutionnel accueille à Albi, du 27 au 29 septembre 2018, la seconde rencontre du réseau. « Le contrôle des mesures anti-terroristes » et « l’aide à la décision juridictionnelle », entendue notamment comme la question des ressources utilisées (doctrine, droit comparé, contributions extérieures…) et des structures dont les cours disposent pour les assister dans leur prise de décision, sont à l’ordre du jour de cette réunion.


Les 20 ans de l’ACCPUF

L’Association des Cours constitutionnelles ayant en partage l’usage du français (ACCPUF) a fêté son 20e anniversaire les 16 et 17 novembre 2017 au Conseil constitutionnel.

Trente-six cours ou conseils étaient représentés au Palais-Royal pour échanger, notamment, sur « l’écriture des décisions ».

Le président Fabius, qui ouvrait cette conférence, et Ulrich Meyer, président de l’ACCPUF, président du Tribunal fédéral suisse, ont rappelé combien les cours constitutionnelles jouent un rôle décisif dans la protection des droits fondamentaux et la promotion de l’État de droit.


Algérie

carte monde Algérie

Le président du Conseil constitutionnel, Laurent Fabius, est intervenu à Alger le 25 novembre 2017 pour évoquer le cadre constitutionnel, législatif et règlementaire lié à l’exception d’inconstitutionnalité, à l’occasion du 2e séminaire international organisé par la conférence des juridictions constitutionnelles africaines (CJCA) et le Conseil constitutionnel algérien.


Le Conseil constitutionnel renforce ses liens avec la Cour constitutionnelle fédérale allemande

Le Conseil constitutionnel et la Cour constitutionnelle fédérale allemande, désireux d’approfondir la relation privilégiée qui les unit, sont convenus de rencontres régulières.

Du 11 au 13 décembre 2017, le Conseil constitutionnel a ainsi accueilli une délégation de la Cour constitutionnelle fédérale allemande conduite par son président, Andreas Voßkuhle.

Cette rencontre faisait suite à un premier déplacement en octobre 2016 à Karlsruhe du président et des membres du Conseil constitutionnel français, qui a marqué le début d’une coopération renforcée entre les deux institutions.

Introduites par le président du Conseil constitutionnel, M. Laurent Fabius, et le président de la Cour constitutionnelle fédérale allemande, ces journées de travail ont permis de riches échanges sur des thèmes d’intérêt commun et sur la jurisprudence de chaque institution.

Les travaux de la première journée ont en effet porté sur « le rôle des cours constitutionnelles en matière de développement de la protection des droits fondamentaux à l’exemple des lois sécuritaires » à partir de présentations de M. Lionel Jospin, membre du Conseil constitutionnel, et du Prof. Dr. Johannes Masing, juge à la Cour de Karlsruhe.

À l’occasion d’une seconde table ronde, les discussions ont porté sur les enjeux des « accords commerciaux de l’Union européenne » à partir des interventions croisées de M. Michel Pinault et de Mme Claire Bazy Malaurie, membres du Conseil français, et du Prof. Dr. Peter M. Huber, juge à la Cour allemande.

En marge des rencontres entre les juges constitutionnels, des échanges réguliers se sont également noués depuis 2016 entre les membres du service juridique du Conseil constitutionnel et les référendaires de la Cour fédérale allemande. Une délégation du service juridique français a ainsi été invitée à Karlsruhe pour une réunion de travail les 1er et 2 février 2018.


Lettonie

carte monde Lettonie

Le 1er mars 2018, le Conseil constitutionnel a accueilli une délégation de la Cour constitutionnelle lettone conduite par sa présidente, Mme Ineta Ziemele. Une réunion de travail a permis des échanges sur « l’identité constitutionnelle » et « la constitutionnalité des lois de finances ».

Dans le prolongement de cette rencontre, le Conseil a été invité à Riga en mai 2018, pour participer à la conférence organisée à l’occasion du 100e anniversaire de l’État letton sur le « rôle des cours constitutionnelles dans le monde globalisé du XXIe siècle ». Claire Bazy Malaurie y est intervenue pour traiter de la question suivante : « la protection des droits fondamentaux à l’ère du numérique : quelles relations entre les juridictions européennes ? ».


Mexique

carte monde Mexique

Le 12 mars 2018, le président du Conseil constitutionnel a reçu Mme Janine Madeline Otálora Malassis, présidente du Tribunal électoral du pouvoir judiciaire fédéral du Mexique.

Soucieuse de connaître l’expérience de la France en ce domaine, elle souhaitait échanger sur l’organisation des élections fédérales et locales mexicaines du 1er juillet 2018.

La présidente Otálora Malassis a souhaité également évoquer à cette occasion le lancement du Réseau mondial de Justice électorale, dont elle a soutenu l’initiative.


République tchèque

carte monde République tchèque

L’association de la Conférence des cours constitutionnelles européennes (CCCE), présidée pour trois années par la Cour constitutionnelle tchèque, a organisé à Prague du 13 au 15 juin 2018 une réunion préparatoire à son prochain congrès, qui se déroulera en 2020.

Parallèlement à cette réunion, se tenait un colloque sur « les héritiers de Hans Kelsen », thème d’actualité pour de nombreuses cours constitutionnelles européennes fêtant cette année l’anniversaire de leur création.

Mme Corinne Luquiens y représentait le Conseil constitutionnel et est intervenue sur le thème de « l’évolution du Conseil constitutionnel : de la régulation des pouvoirs publics à la juridictionnalisation ».


Giorgio Lattanzi, président de la Cour constitutionnelle italienne

Le dialogue des juges à l’échelle européenne

Giorgio Lattanzi,
président de la Cour constitutionnelle italienne.

Malgré le cadre culturel et juridique dans lequel il s’insère, de par sa nature, le dialogue entre les Cours, et notamment celui entre les Cours nationales et européennes, est loin d’être voué à un succès certain. C’est pourquoi, pour qu’il soit efficace, quelques conditions doivent être respectées et deux dangers doivent être évités grâce, notamment, à un usage attentif des arguments et des mots.

Le premier de ces dangers est représenté par la tentation de considérer l’écoute des arguments d’autrui comme une étape certes nécessaire (avant de pouvoir finalement avoir son mot à dire de manière définitive), mais, en fin de compte, fastidieuse. Si, à l’issue de l’échange, le point de vue des parties protagonistes n’a pas évolué et si aucune concession n’a été faite à l’autre, on peut alors fortement douter que celles-ci se soient engagées dans un dialogue loyal, avec l’intention d’écouter l’autre avant de décider.

Ouverture accroche Le dialogue entre les Cours est loin d’être voué à un succès certain.

Fermeture accroche

De manière plus banale (mais, en pratique, plus probable), le second danger réside dans le fait de ne pas réussir à se comprendre en raison des différences culturelles et des oscillations contingentes auxquelles sont soumis les dispositifs de chaque ordre juridique, dispositifs dont la similarité n’est qu’apparente. D’un côté, les Cours utilisent les sources du droit européen dont l’interprétation est confiée à la compétence des Cours européennes, de l’autre, celles-ci peuvent difficilement évaluer pleinement une situation, à laquelle ces sources s’appliquent, en faisant abstraction des éléments offerts par le droit national qui, à son tour, met en jeu différents facteurs de complication.

Si, dans ce contexte, les conditions du dialogue exposées ci-après ne peuvent être considérées comme exhaustives, elles constituent néanmoins un bon point de départ.

Voilà, donc, ce que le fruit de l’expérience nous permet de considérer comme utile à un bon dialogue :

  1. Un langage commun, qui, malgré un contexte favorisé par l’usage du vocabulaire juridique, requiert l’effort de préciser avec soin le sens des expressions utilisées, étant donné que d’un ordre juridique à l’autre, à l’apparente univocité de la formule sémantique ne correspond pas toujours une identité de contenu.
  2. Le partage des informations, c’est-à-dire l’introduction, dans le dialogue, du plus grand nombre possible d’explications au sujet de l’ordre juridique auquel on appartient, tout autant que sur le fonctionnement des dispositifs juridiques à mobiliser pour statuer sur une question : car si elles semblent évidentes pour qui relève de cet ordre juridique, il n’en demeure pas moins qu’elles peuvent paraître étranges à ceux qui ont été façonnés par d’autres expériences juridiques.
  3. Le respect des compétences exclusives d’autrui, à savoir un dialogue qui se développe seulement sur les domaines dans lesquels les pouvoirs de décision coexistent (et le dialogue vise aussi à en marquer les frontières respectives), sans que l’interaction arrive à toucher des matières relevant entièrement de la compétence d’une seule des autorités.
  4. La multilatéralité du dialogue, c’est-à-dire une approche qui ne s’épuise pas dans la confrontation des positions des protagonistes, mais qui prenne en considération celles des autres Cours, nationales et européennes, non seulement pour rechercher une tradition constitutionnelle commune de laquelle s’inspirer, mais également afin que la solution donnée pour un cas concret puisse vraiment tenir lieu de règle universelle pour les cas analogues successifs.

En guise d’illustration de la façon par laquelle le dialogue peut être fructueux lorsqu’au moins ces quatre conditions sont réunies, on peut faire référence à une récente affaire qui a impliqué la Cour de justice de l’Union européenne et la Cour constitutionnelle.

Avec la décision Taricco du 8 septembre 2015, la Cour de justice a considéré que dans les procès pénaux relatifs aux délits en matière de taxe sur la valeur ajoutée (TVA), une certaine qualification du régime juridique de la prescription aurait dû être écartée par le juge italien dans deux cas :

  1. Si l’application de ce régime devait impliquer l’impunité pour de graves fraudes fiscales dans un nombre considérable de cas.
  2. Si, dans l’ordre juridique national, des délits analogues mais commis au détriment de l’État, étaient sujets à des délais de prescription moins favorables.

Le juge européen est arrivé à une telle conclusion par l’interprétation du premier et du deuxième alinéa de l’art. 325 du TFUE qui oblige les États adhérents à lutter efficacement contre les fraudes commises au détriment des intérêts financiers de l’Union, en considérant que l’impunité systématique des fraudes concernant une telle contribution, causée par la survenance du terme de la prescription, se reflète de manière négative sur les finances européennes.

Sous réserve d’une appréciation par le juge national, la Cour de justice n’a pas considéré la « règle Taricco », telle qu’énoncée, en conflit avec le principe de légalité du droit pénal, car la prescription ne concerne pas la description du délit et de la peine. En ce domaine, il serait donc permis un traitement défavorable par rapport aux dispositions prévues par le Code pénal qui s’appliquaient au moment où le délit avait été commis. Forte d’une tradition juridique consolidée, fondée sur la large portée du deuxième alinéa de l’art. 25 de la Constitution (nul ne peut être puni qu’en vertu d’une loi entrée en vigueur avant la commission du fait), dans notre ordre juridique, la prescription est un dispositif qui, ayant une incidence sur l’incrimination, appartient au droit pénal substantiel. Comme notre Cour constitutionnelle l’a déjà affirmé à plusieurs reprises, ce dispositif n’est donc conforme à la Constitution que s’il respecte les règles de prévisibilité et de non rétroactivité propres au principe de légalité.

C’est pour cette raison que, selon les juristes italiens, la « règle Taricco » ne respectait pas un principe de l’ordre suprême constitutionnel italien en matière pénale, tant en raison du fait qu’elle était applicable à des faits commis avant son énonciation, qu’en raison de son manque total de prévisibilité, qui la rendait donc imprévisible pour les justiciables et inapplicable pour le juge. En l’occurrence, ce dernier n’aurait pu déterminer quand aurait été rejoint « le nombre considérable de cas » auquel est subordonnée l’efficacité de la « règle Taricco », car un tel concept quantitatif n’aurait pas été défini de manière adéquate. De même, une personne destinataire d’une norme pénale, qui doit être claire et intelligible, n’aurait jamais pu prévoir que l’art. 325 du TFUE aurait pu donner naissance à une opération juridique complexe, rejoignant son point culminant dans la non application, à son détriment, d’un aspect spécifique de la règlementation sur la prescription des délits.

Les doutes alimentés par le débat juridique ont été accueillis par la jurisprudence, qui les a donc rendus objet de question de constitutionnalité. La Cour constitutionnelle, quant à elle, bien que considérant la « règle Taricco » contrevenait au principe de légalité du droit pénal, ne l’a pas exclue de l’ordre juridique. En effet, il lui avait été demandé de déclarer inconstitutionnelle la loi de ratification du Traité dans la partie où, imposant l’application de l’art. 325 TFUE tel qu’interprété par la Cour de justice, elle impliquait la non application de deux dispositions du Code pénal sur la prescription.

Avec l’ordonnance n° 24 de 2017, la Cour constitutionnelle a préféré soulever un renvoi préjudiciel devant la Cour de justice de l’Union européenne. Sans remettre en discussion l’interprétation de l’art. 325 du TFUE faite par le juge européen, la Cour constitutionnelle s’est limitée à souligner la nature substantielle de la prescription dans l’ordre juridique italien et, donc, sa soumission au régime de la légalité pénale que la « règle Taricco » aurait violé de par sa rétroactivité et son manque de prévisibilité, si tant est qu’elle avait été appliquée par le juge.

Ouverture accroche Le dialogue a permis d’élaborer une règle commune aux différents ordres juridiques, le tout sous le signe du respect des droits de la personne.

Fermeture accroche

Avec la décision M.A.S. et M.B. du 5 décembre 2017, la Cour de justice, rejoignant la position de la Cour constitutionnelle italienne, a pris acte de la nature substantielle de la prescription dans notre ordre juridique et, par suite, en plus d’en exclure directement son application à des faits commis avant le 8 septembre 2015, a permis au juge national de se soustraire à la « règle Taricco » au cas où il la considérerait contraire au principe de légalité énoncé également à l’art. 49 de la Charte européenne des droits fondamentaux. La décision M.A.S ne trahit pas l’approche originelle de la décision Taricco, mais elle la relit à la lumière des nouvelles informations concernant l’ordre juridique national qui lui ont été présentées par la Cour constitutionnelle dans le cadre du renvoi préjudiciel. L’affaire s’est conclue par la décision n° 115 de 2018 de la Cour constitutionnelle, par laquelle, après avoir rappelé que l’art. 325 du TFUE et la « règle Taricco » dérogeaient au principe fondamental de légalité pénale, il a été définitivement refusé que le juge pénal puisse écarter le régime juridique de la prescription. Il est important de souligner que cette conclusion n’a pas été adoptée sur la base du seul droit constitutionnel national, mais en application du droit de l’Union, tel que précisé par la Cour de justice. Le dialogue, en d’autres termes, a permis d’élaborer une règle commune aux différents ordres juridiques, le tout sous le signe du respect des droits de la personne.

L’affaire s’est conclue par la décision n° 115 de 2018 de la Cour constitutionnelle, par laquelle, après avoir rappelé que l’art. 325 du TFUE et la « règle Taricco » dérogeaient au principe fondamental de légalité pénale, il a été définitivement refusé que le juge pénal puisse écarter le régime juridique de la prescription.

Il est important de souligner que cette conclusion n’a pas été adoptée sur la base du seul droit constitutionnel national, mais en application du droit de l’Union, tel que précisé par la Cour de justice. Le dialogue, en d’autres termes, a permis d’élaborer une règle commune aux différents ordres juridiques, le tout sous le signe du respect des droits de la personne.

L’issue de l’affaire Taricco a donc été particulièrement satisfaisante. Si l’on pense à la façon avec laquelle elle avait commencé, il existait concrètement le risque qu’un État membre de l’Union, faisant appel aux principes suprêmes de son ordre constitutionnel, enfreigne le principe de la primauté du droit européen, en ouvrant un contentieux aux développements imprévisibles sur un terrain particulièrement sensible comme celui du droit pénal et, en particulier, du respect des droits de la personne vis-à-vis de la fonction répressive des pouvoirs publics.

Si un tel scénario a pu être évité, le mérite revient en grande partie aux vertus du dialogue qui a eu lieu en respectant correctement les conditions de succès du dialogue précédemment énoncées.

La recherche d’un langage commun a demandé un effort de définition afin de rendre compréhensible le régime juridique italien de la prescription dans le domaine de la légalité pénale. En suivant ce parcours, l’ordre juridique européen, qui parle du principe de légalité des délits et des peines dans l’art. 49 de la Charte européenne des droits fondamentaux, a pu accueillir virtuellement la prescription des délits en matière pénale, qui en était initialement exclue.

Il est important de souligner que cette conclusion n’a pas été adoptée sur la base du seul droit constitutionnel national, mais en application du droit de l’Union, tel que précisé par la Cour de justice. Le dialogue, en d’autres termes, a permis d’élaborer une règle commune aux différents ordres juridiques, le tout sous le signe du respect des droits de la personne.

Ouverture accroche Le partage des informations s’est révélé une carte gagnante et nécessaire.

Fermeture accroche

L’issue de l’affaire Taricco a donc été particulièrement satisfaisante. Si l’on pense à la façon avec laquelle elle avait commencé, il existait concrètement le risque qu’un État membre de l’Union, faisant appel aux principes suprêmes de son ordre constitutionnel, enfreigne le principe de la primauté du droit européen, en ouvrant un contentieux aux développements imprévisibles sur un terrain particulièrement sensible comme celui du droit pénal et, en particulier, du respect des droits de la personne vis-à-vis de la fonction répressive des pouvoirs publics.

Si un tel scénario a pu être évité, le mérite revient en grande partie aux vertus du dialogue qui a eu lieu en respectant correctement les conditions de succès du dialogue précédemment énoncées.

La recherche d’un langage commun a demandé un effort de définition afin de rendre compréhensible le régime juridique italien de la prescription dans le domaine de la légalité pénale. En suivant ce parcours, l’ordre juridique européen, qui parle du principe de légalité des délits et des peines dans l’art. 49 de la Charte européenne des droits fondamentaux, a pu accueillir virtuellement la prescription des délits en matière pénale, qui en était initialement exclue.

Le partage des informations s’est révélé une carte gagnante et nécessaire. Une fois défini un taux de corrélation acceptable entre légalité pénale et prescription, il a fallu expliquer que, dans l’ordre juridique italien, ce dernier n’est pas seulement théorique, puisqu’il est constamment et fortement validé par la législation et la jurisprudence constitutionnelle.

Le respect des compétences exclusives d’autrui a été la clé de voûte du raisonnement juridique des deux Cours. La Cour italienne n’a pas remis en discussion la façon avec laquelle la Cour de justice a interprété l’art. 325 du TFUE. Si cette voie avait été suivie, le conflit aurait été inévitable, car aucun juge national ne peut violer l’application uniforme du droit européen en s’écartant du sens qui lui est attribué par son interprète institutionnel. Cependant, ayant pris acte du contenu de la norme européenne, que seul le juge de Luxembourg a le pouvoir de préciser, il a ensuite été vérifié sa compatibilité avec le principe de prévisibilité du droit pénal ainsi que s’il était susceptible d’application directe par le juge.

La conclusion fut négative.

Enfin, la multilatéralité du dialogue a trouvé un espace dans l’évocation, par la Cour constitutionnelle, des traditions constitutionnelles des pays à légalité continentale et, en particulier, il a été fait référence à l’expérience espagnole, où la prescription est un dispositif relevant du droit pénal substantiel.

Vraisemblablement, le futur mettra encore les Cours face à de possibles collisions. Néanmoins, après l’affaire Taricco, nous pouvons avoir davantage confiance en notre capacité à résoudre les problèmes qui surviendront.