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Décision n° 83-166 DC du 29 décembre 1983 - Saisine par 60 députés

Loi relative au prix de l'eau en 1984
Conformité

SAISINE DEPUTES : Les soussignés, députés à l'Assemblée nationale, défèrent au Conseil constitutionnel la loi relative au prix de l'eau en 1984, qui a été adoptée définitivement par l'Assemblée nationale au cours de sa troisième séance du 21 décembre 1983 suivant la procédure prévue à l'article 45, alinéa 4, de la Constitution.
Ils concluent qu'il plaise au Conseil constitutionnel déclarer non conformes à la Constitution, et notamment à son article 34, les dispositions de ladite loi.
En effet, le texte déféré à la censure du Conseil constitutionnel ne concerne pas seulement, contrairement à ce que son texte donnerait à entendre, la limitation du prix de l'eau en 1984.
Il applique les mêmes règles de limitation à la redevance visée à l'article 75-III de la loi du 29 novembre 1965 portant loi de finances pour 1966 et aux surtaxes communales ou syndicales y afférentes. En 1984, ces redevances et surtaxes ne pourraient être supérieures à des limites prévues par des accords conclus « notamment (sic » avec les professionnels, ou, à défaut, par décret. Ces accords ou, le cas échéant, les décrets préciseront les normes d'évolution applicables en 1984 et, le cas échéant, les dispositions particulières permettant d'y déroger.
La redevance d'assainissement a le caractère d'une taxe fiscale. Cette nature lui a été expressément reconnue par le Conseil Constitutionnel dans sa décision n° 82-143 DC du 30 juillet 1982. La même nature appartient évidemment aux surtaxes communales ou syndicales afférentes à ladite redevance.
Or, aux termes de l'article 34 de la Constitution : « la loi fixe les règles concernant l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toute nature ».
En conséquence, en déléguant, hors des termes de l'article 34 de la Constitution, le pouvoir de limiter le taux d'une taxe fiscale à un décret, et plus encore à des accords conclus notamment avec les professionnels, la disposition déférée a violé l'article 34 susvisé.
On ne saurait, pour justifier la disposition critiquée, tirer argument de la décision du 30 juillet 1982 précitée qui a jugé conforme à la Constitution l'article 1er de la loi sur les prix et les revenus, qui avait trait à la même redevance d'assainissement.
Cette décision, bien au contraire, contient la condamnation du texte déféré. En effet, pour déclarer conforme à la Constitution l'article 1er de la loi sur les prix et les revenus qui concernait le prix de l'eau, la décision n° 82-143 a retenu comme motif que c'était la loi elle-même qui, en son article 1er, limitait directement le taux de la redevance d'assainissement.
On s'explique difficilement qu'enseigné par la décision n° 82-143 le Gouvernement ait donné au projet déféré une rédaction aussi maladroite et aussi contraire à la Constitution et que l'Assemblée nationale ait adopté un pareil texte sans l'amender. Quoi qu'il en soit, par la délégation du pouvoir législatif qu'elle opère irrégulièrement, la loi déférée, qui a violé la Constitution, encourt la censure du Conseil constitutionnel.