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Décision n° 78-102 DC du 17 janvier 1979 - Saisine par Premier ministre

Loi portant approbation d'un rapport sur l'adaptation du VIIe Plan
Non conformité partielle

1 - A l'occasion de l'examen et du vote du projet de loi portant approbation du rapport sur l'adaptation du VIIe Plan, l'Assemblée nationale a adopté le 29 novembre 1978 un amendement présenté par MM. Schwartz et Pinite. ainsi rédigé :
« Compléter l'article unique (« le rapport sur l'adaptation du VIIe Plan, annexée à la présente loi, est approuvée ») par les nouvelles dispositions suivantes :
«..., sous réserve qu'à la page 21 in fine de l'annexe soit introduit le nouveau paragraphe suivant :
« 4 - L'équilibre de la Sécurité sociale - notamment en ce qui concerne les retraites - comme la vigueur de notre économie et l'avenir de la France imposent de toute évidence une reprise de notre natalité.
« C'est pourquoi, particulièrement conscient de la nécessité d'une action, dont le VIIe Plan constitue à juste titre le cadre, le Gouvernement présentera lors de la prochaine session du Parlement, un ensemble cohérent de mesures visant, par l'aide apportée aux familles, et d'abord aux mères, à remédier à la crise de la natalité française »
Au cours du débat devant le Sénat, le 13 décembre 1978, le Gouvernement a déposé un amendement tendant à supprimer à l'article unique du projet de loi les dispositions introduites par l'amendement voté par l'Assemblée nationale. Le Sénat a refusé d'adopter cet amendement, bien que le ministre de l'Economie ait fait valoir, devant la Haute Assemblée, le caractère inconstitutionnel de la disposition votée par les députés.
2. En effet, l'amendement voté par l'Assemblée nationale à pour objet de faire obligation au gouvernement de présenter lors de la session parlementaire de printemps 1979, « un ensemble cohérent de mesures visant, par l'aide apportée aux familles, et d'abord aux mères, à remédier à la crise de la natalité française ».
Cet amendement constitue, sans nul doute, une injonction faite au Gouvernement par le législateur, et qui ne trouve de base juridique ni dans l'article 34, ni dans aucune des autres dispositions de la Constitution portant définition de domaine de la loi.
A plusieurs reprises, le Conseil constitutionnel a décidé que des dispositions introduites par le Parlement dans le texte de projets ou de propositions de loi et qui comportaient des injonctions au Gouvernement étaient contraires à la Constitution.
On citera en ce sens les décisions en date du 8 septembre 1961, du 21 décembre 1966 et du 28 décembre 1976 (art. 61-VI du projet de loi de finances pour 1977).
En l'espèce, il ne fait aucune doute que l'amendement adopté par l'Assemblée nationale s'analyse en une injonction faite au Gouvernement de déposer un ou plusieurs projets de loi sur le bureau du Parlement lors de la session de printemps 1979, et éventuellement de prendre telle ou telle mesure réglementaire afin de « remédier à la crise de la natalité française ». On se trouve donc dans une hypothèse identique à celles qui ont conduit aux décisions précitées du Conseil constitutionnel.
3. Le fait que l'amendement adopté par l'Assemblée nationale tende à modifier le texte du rapport sur l'adaptation du Plan, ne peut en aucune manière modifier les données du problème juridique qui se pose.
On notera en effet que :
- la disposition introduite par le Parlement est conçue de telle sorte qu'elle s'impose au Gouvernement, quelle que soit la nature du texte dans lequel elle est destinée à s'insérer ;
- l'amendement dont résulte cette disposition a été apporté à la loi d'approbation du rapport sur l'adaptation du VIIe Plan ; cet amendement a nécessairement la même valeur juridique que le texte amendé.
Il est demandé, pour ces motifs, au Conseil constitutionnel de déclarer non conforme à la Constitution la phrase de la loi votée commençant par les mots « c'est pourquoi, particulièrement conscient... et se terminant par les mots « natalité française » .