Contenu associé

Décision n° 2015-723 DC du 17 décembre 2015 - Observations du Gouvernement

Loi de financement de la sécurité sociale pour 2016
Non conformité partielle

Le Conseil constitutionnel a été saisi par plus de soixante députés d'un recours dirigé contre la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016.

Ce recours appelle, de la part du Gouvernement, les observations suivantes.

I/ SUR L'ARTICLE 24

A/ L'article 24 de la loi déférée affecte notamment le produit des contributions sociales sur les revenus du capital au financement d'avantages non contributifs.

Les députés auteurs de la saisine estiment que cet article porterait atteinte à des situations légalement acquises en méconnaissant le droit communautaire.

B. Ce grief est sans fondement.

1/ Les dispositions contestées font suite à un arrêt de Ruyter de la Cour de justice de l'Union européenne du 26 février 2015 et à la décision du Conseil d'Etat du 27 juillet 2015 qui en a tiré les conséquences.
Dans son arrêt, la Cour de justice de l'Union européenne a estimé que les contributions sociales sur les revenus du patrimoine entrent dans le champ d'application du règlement CEE 1408/81 du Conseil du 14 juin 1971 relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs non salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté. En effet, même si ces prélèvements sont assis sur les revenus du patrimoine, indépendamment de l'exercice de toute activité professionnelle, ils participent au financement des régimes obligatoires de sécurité sociale.
Le Conseil d'Etat a déduit de cette interprétation qu'en application du principe d'unicité de législation, les résidents fiscaux français qui sont affiliés à un régime de sécurité sociale dans un autre Etat membre ne peuvent pas être assujettis aux prélèvements sociaux sur leurs revenus du capital compte tenu de l'affectation de ces prélèvements.
Comme l'indiquent les députés requérants, la loi déférée tire les conséquences de ces décisions afin de prévoir que les prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine financeront des prestations sociales à caractère non contributif versées par le Fonds de solidarité vieillesse et la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie. Elle modifie ainsi la structure du Fonds de solidarité vieillesse pour regrouper dans une section l'ensemble des prestations spéciales à caractère non contributif qui seront financées par les prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine.
Les députés requérants soutiennent que la réaffectation des contributions sociales sur les revenus du capital ne permet pas de rendre le droit interne compatible avec le droit communautaire. Ils en déduisent que ces dispositions porteraient atteinte à des situations légalement acquises.
Un tel grief est inopérant.
Le Conseil constitutionnel juge qu'il ne lui appartient pas, qu'il soit saisi sur le fondement de l'article 61 ou de l'article 61-1 de la Constitution, d'examiner la compatibilité d'une loi avec les engagements européens de la France sauf s'il est saisi d'une loi ayant pour objet de transposer en droit interne une directive communautaire (décision n°2010-605 DC, cons. 16et 18). Force est de constater que tel n'est pas le cas de la loi de financement de la sécurité sociale.

Or le grief des députés requérants, qui critiquent une affectation qui ne s'appliquera qu'à compter du 1er janvier 2016, repose précisément sur le fait que le législateur laisserait subsister une situation contraire aux engagements européens de la France.

Au demeurant, tel n'est pas le cas.

Le règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil du 14 juin 1971 reconnaît le caractère particulier des prestations sociales à caractère non contributif. L'affectation des prélèvements sociaux au financement de telles prestations ne méconnaît donc pas les dispositions du règlement qui interdisent d'imposer une double cotisation à un salarié affilié à la sécurité sociale d'un autre Etat membre.
L'article 24 est donc conforme à la Constitution.

II/ SUR L'ARTICLE 33

A/ L'article 33 de la loi déférée instaure un crédit d'impôt sur les contrats d'assurance complémentaire santé des personnes d'au moins soixante-cinq ans qui bénéficieront d'un label permettant de s'assurer qu'ils offrent, à des prix accessibles, des garanties adaptées à ces personnes.

Les députés requérants soutiennent que cet article n'a pas sa place en loi de financement de la sécurité sociale, qu'il méconnaît le principe d'égalité et porte atteinte à la liberté d'entreprendre.

B/ Le Gouvernement n'est pas de cet avis.

1/ Sur la place en loi de financement de la sécurité sociale

Le crédit d'impôt ouvert par l'article 33 bénéficiera aux organismes complémentaires qui proposeront des contrats labellisés aux personnes âgées d'au moins soixante-cinq ans.

Ce crédit d'impôt s'imputera sur la taxe de solidarité additionnelle aux cotisations d'assurance afférentes aux garanties de protection complémentaire en matière de frais de santé. En application de l'article L. 862-4 du code de la sécurité sociale, cette taxe abonde le fonds CMU pour financer les dépenses d'aide à la complémentaire santé prévues par l'article L. 861-3 du code de la sécurité sociale. Le crédit d'impôt minorera donc les recettes de ce fonds. On estime qu'après une montée en charge progressive, ce dispositif devrait avoir un coût de 65 M€, compte tenu d'un taux de souscription de contrats labellisés à hauteur de 70 %.

Ces dépenses auront, par voie de conséquence, un impact sur les recettes perçues par la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés. Le fonds CMU finance en effet cette Caisse par l'application d'une majoration du remboursement des dépenses de couverture maladie universelle prévue au quatrième alinéa de l'article L. 862-2 du code de la sécurité sociale.

L'article 33, en réduisant cette majoration, réduira donc les recettes des régimes obligatoires de base. Il a donc toute sa place en loi de financement de la sécurité sociale en application du 2 ° du B du V de l'article LO 111-3 du code de la sécurité sociale.

2/ Sur le principe d'égalité

En accordant un crédit d'impôt lié à des contrats d'assurance maladie complémentaire labellisés souscrits par les personnes d'au moins soixante-cinq ans, le législateur a entendu permettre le développement d'une offre de contrats comportant des garanties adaptées à ces personnes à des prix accessibles.

La quasi-totalité des personnes âgées d'au moins soixante-cinq ans est couverte par des contrats individuels. Et la tarification de ces contrats individuels tient compte de la hausse des dépenses de santé à partir de soixante-cinq ans. Ceci induit des dépenses de santé particulièrement élevées pour ces personnes par rapport aux autres assurés.

Les dépenses de santé augmentant avec l'âge, il en résulte une augmentation du reste à charge après intervention de l'assurance maladie. Les personnes âgées d'au moins soixante-cinq ans supportent ainsi un reste à charge de 675 € contre 480 € pour l'ensemble de la population.

Le coût des contrats d'assurance maladie complémentaire santé augmente également nettement à partir de soixante-cinq ans. Il peut varier entre 759 et 1 312 euros selon le type d'organismes complémentaires alors que ce coût est compris entre 481 et 709 euros pour l'ensemble de la population. La cotisation mensuelle moyenne pour un contrat individuel passe de 50 à 79 euros puis à 96 euros selon que la personne a 40, 60 ou 75 ans selon une enquête de la DRESS auprès des organismes complémentaires de santé.

En dépit de ces cotisations plus élevées, 76 % des contrats souscrits par les personnes d'au moins soixante-cinq ans correspondent à des contrats comportant les garanties les plus faibles contre 51 % pour l'ensemble des personnes assurées par des contrats d'assurance maladie complémentaire.

La procédure de labellisation permettra de développer l'offre de contrats présentant un meilleur rapport qualité-prix pour les personnes d'au moins soixante-cinq ans.

Au regard de l'objectif d'intérêt général poursuivi, le législateur n'a pas méconnu le principe d'égalité en ouvrant un crédit d'impôt pour les contrats labellisés souscrits par les personnes d'au moins soixante-cinq ans.

3/ Sur la liberté d'entreprendre

La loi déférée ne porte aucune atteinte à la liberté d'entreprendre.

Tous les contrats répondant aux critères de labellisation, c'est-à-dire aux niveaux de garanties et aux seuils de prix fixés par décret, pourront bénéficier de ce label. Comme le relèvent les députés requérants, ce label ne présente, à cet égard, aucun caractère obligatoire.

Il est, d'ailleurs, erroné de soutenir que la mise en place de contrats labellisés empêchera toute possibilité de mutualisation. Et les organismes complémentaires resteront libres d'organiser la mutualisation entre les différents contrats souscrits auprès d'eux.

Les griefs des députés auteurs de la saisine ne pourront donc qu'être écartés.

III/ SUR L'ARTICLE 59

A/ L'article 59 de la loi déférée instaure une protection universelle maladie.

Les députés auteurs de la saisine considèrent que cet article rompt le lien entre droit à prestations et cotisations d'assurance-maladie, qu'il méconnaît le principe d'égalité et qu'il porte atteinte à l'équilibre financier de la branche maladie. Ils soutiennent également que cet article méconnaît le principe d'égalité en maintenant la notion d'ayant droit pour certains enfants mineurs. Ils estiment que le législateur a méconnu le principe d'égalité en confiant la prise en charge des prestations des frais de santé aux organismes chargés de la gestion des régimes obligatoires auxquels sont affiliés les personnes exerçant une activité professionnelle. Ils soutiennent enfin que le législateur a méconnu le Préambule de la Constitution de 1946 et l'objectif d'équilibre financier de la sécurité sociale en permettant la mise en place de délégations de gestion au profit des mutuelles et qu'il a méconnu l'étendue de sa compétence en prévoyant un dispositif d'indemnisation en cas de transfert de délégations actuellement existantes qui n'a pas sa place en loi de financement de la sécurité sociale.

B/ Ces griefs sont infondés.

1/ Sur la rupture du lien entre droit à prestations et cotisations d'assurance-maladie.

A titre liminaire, on relèvera que les députés auteurs de la saisine ne fondent leur critique sur aucune norme de valeur constitutionnelle qui s'imposerait en matière de protection sociale. Le Conseil constitutionnel a ainsi déjà jugé qu'il n'existait pas de principe contributif qui imposerait de n'accorder des prestations de sécurité sociale qu'en échange de l'acquittement de cotisations (décision n°99-416 DC du 23 juillet 1999, cons. 28 et 29).

Le fait que le Conseil constitutionnel juge que le principe d'égalité s'oppose à ce que les cotisations salariales de sécurité sociale des salariés puissent faire l'objet d'une réduction dégressive alors que le législateur maintiendrait inchangés, pour tous les salariés, l'assiette des cotisations ainsi que les prestations et avantages auxquels ces cotisations ouvrent droit n'implique pas que toute prestation sociale serait subordonnée au versement d'une cotisation sociale. Une telle conception serait contraire aux exigences de solidarité qui découlent des dixième et onzième alinéas du Préambule de la Constitution de 1946.

Au demeurant, la loi déférée ne remet nullement en cause la contributivité du système d'assurance maladie.

L'instauration de la protection universelle maladie constitue une réforme de grande ampleur en simplifiant les conditions d'ouverture des droits aux frais de santé pour les personnes majeures qui travaillent ou résident en France et en supprimant la notion d'ayant droit majeur. Cette réforme permettra de limiter les démarches administratives des personnes qui connaissent un changement de situation familiale ou professionnelle et ainsi de limiter les ruptures de droits. Elle permettra également de faire des économies de gestion importantes.

Mais cette réforme ne change ni la nature des droits qui sont actuellement ouverts aux personnes résidant en France, ni le mode de financement de l'assurance-maladie. L'assurance-maladie restera financée par les mêmes cotisations sociales. La contributivité du système d'assurance maladie reste inchangée.

Les critiques des députés requérants sont donc infondées.

2/ Sur le maintien du statut d'ayant droit pour certains mineurs.

L'article L. 160-2 du code de la sécurité sociale maintient le statut d'ayant droit d'un assuré social pour les enfants mineurs n'exerçant pas d'activité professionnelle jusqu'à l'année au cours de laquelle ils atteignent l'âge de sa majorité. Il maintient néanmoins le droit d'option qui permet déjà, en application de l'article L. 161-14-1 du code de la sécurité sociale, à l'enfant ayant droit d'un assuré social de demander, lorsqu'il atteint l'âge de seize ans, à être identifié de façon autonome et à bénéficier à titre personnel du remboursement des prestations en nature de l'assurance maladie.

Le législateur a évidemment pu tenir compte de la situation particulière des mineurs, et notamment de l'autorité parentale qui s'exerce jusqu'à leur majorité, pour prévoir que leurs frais de santé seraient pris en charge en tant qu'ayants droit d'un assuré social jusqu'à leur majorité.

Et il a également pu tenir compte de la situation particulière des enfants de plus de seize ans pour maintenir la possibilité pour ses enfants de bénéficier, à titre personnel, de la prise en charge des frais de santé. Les enfants de plus de seize ans disposent, en effet, d'une autonomie plus grande qui leur confère déjà des droits particuliers avant leur majorité, et notamment la possibilité d'être émancipé dans les conditions prévues à l'article 413-2 du code civil. On relèvera d'ailleurs que les mineurs de plus de seize ans ne sont plus soumis à l'obligation scolaire, ce qui peut conduire certains d'entre eux à s'orienter vers le marché du travail.

3/ Sur les organismes chargé de la prise en charge des frais de santé

L'article L. 160-17 du code de la sécurité sociale a pour objet de déterminer les organismes qui assureront la gestion des frais de santé. Le législateur a prévu de confier la prise en charge des personnes qui exercent une activité professionnelle aux organismes chargés de la gestion des régimes obligatoires auxquels ils sont affiliés pour les prestations d'assurances sociales, c'est-à-dire pour les prestations en espèces comme les indemnités journalières, dans une logique de guichet unique. Ces organismes prendront également en charge les frais de santé des personnes n'exerçant pas d'activité professionnelle.

Contrairement à ce que soutiennent les députés requérants, ces dispositions n'instituent aucune différence dans le niveau de prise en charge des prestations de santé. Elles se bornent à organiser les modalités administratives de gestion de cette prise en charge. Le moyen tiré de ce que cet article méconnaîtrait le principe d'égalité en instaurant des prises en charge des frais de santé différentes en fonction de l'affiliation manque donc en fait.

Le législateur a maintenu la possibilité pour les mutuelles ou les groupements de mutuelles d'exécuter des opérations de gestion pour le compte d'organismes chargés de la gestion des régimes obligatoires. Mais il a encadré le recours à ces délégations en prévoyant notamment qu'un décret en Conseil d'Etat déterminerait les modalités d'organisation, de mise en œuvre et de financement de ces opérations de gestion.

La délégation de tâches de gestion purement administratives aux mutuelles ne porte aucune atteinte aux dixième et onzième alinéas du Préambule de la Constitution de 1946. Il convient, à cet égard, de rappeler que les caisses de sécurité sociale sont elles-mêmes souvent des organismes de droit privé.

L'existence de telles délégations ne porte pas davantage atteinte à la sincérité des comptes et à l'équilibre financier de la sécurité sociale. Toutes les prestations versées en application de ces délégations resteront retracées dans les comptes de l'assurance-maladie.

Et, pour tenir compte de la possible remise en cause de délégations de gestion déjà conclues, le législateur a pu prévoir un dispositif d'indemnisation d'éventuels préjudices susceptibles de résulter, pour ces organismes, d'un transfert d'opérations de gestion de la prise en charge des frais de santé à d'autres opérateurs après l'entrée en vigueur du nouveau cadre juridique des délégations.

Ce dispositif constitue une des modalités d'accompagnement de l'entrée en vigueur de l'article L.160-17 du code de la sécurité sociale, ce qui justifie sa place dans la loi de financement de la sécurité sociale. Il se borne à rappeler la possibilité d'une indemnisation éventuelle d'un titulaire actuel d'une délégation de gestion par l'Etat pour préjudice anormal et spécial en cas de remise en cause de cette délégation de gestion liée au nouveau cadre juridique instauré par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2016. Il prévoit néanmoins que l'indemnité sera fixée dans le cadre d'un constat établi à la suite d'une procédure contradictoire. De telles dispositions ne sont entachées d'aucune incompétence négative.

L'article 59 est donc conforme à la Constitution.

IV/ SUR L'ARTICLE 77

A/ L'article 77 de la loi déférée prolonge jusqu'au 31 décembre 2019 la période pendant laquelle la participation aux frais d'hospitalisation des patients pris en charge dans les établissements participant au service public hospitalier est calculée sur la base de tarifs journaliers de prestation.

Les députés requérants soutiennent que cet article méconnaît le principe d'égalité entre les établissements de santé publics et privés.

B/ Un tel grief est infondé.

Lors de la mise en œuvre de la tarification à l'activité par l'article 33 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2004, le législateur a prévu un dispositif transitoire permettant aux hôpitaux publics et aux établissements privés participant au service public hospitalier de continuer à calculer le ticket modérateur à la charge des patients sur la base de tarifs journaliers de prestation et non sur les tarifs nationaux de prestations issus des groupes homogènes de séjour.

La prolongation de ce dispositif transitoire reste nécessaire en raison de l'impossibilité technique d'établir une facturation individuelle directe sur la base des tarifs nationaux des prestations. Les outils informatiques existants et les modalités de facturation ne permettent pas de mettre en place cette tarification individuelle de manière généralisée. Il est prévu, au 1er mars 2016, de la mettre en place pour les actes et consultations externes après une phase d'expérimentation de plusieurs années. Mais la mise en place d'une facturation individualisée complète n'est prévue qu'au 1er mars 2018 dans le cadre du programme de dématérialisation Simphonie qui intègre un projet de facturation individuelle des établissements de santé (FIDES).

Sur la base des données de l'année 2013, on peut estimer que la suppression dès le 1er janvier 2016 du dispositif transitoire permettant d'asseoir la participation des assurés et des patients non assurés sociaux conduirait à une perte nette de recettes pour les établissements d'environ 2,5 Md€ par an puisque ces derniers sont dans l'incapacité technique d'établir une facture patient sur la base des groupes homogènes de séjour. Cette perte représenterait environ 5 % des recettes des établissements concernés, ce qui mettrait ces structures dans une situation financière extrêmement difficile voire insoutenable et poserait la question de la continuité des soins dans un grand nombre des structures.

Ces difficultés sont, par définition, propres aux établissements participant au service public hospitalier, qui étaient historiquement financés sur la base d'une dotation globale forfaitaire et dont la tarification est d'ailleurs distincte de celle des établissements privés de santé.

Au regard de cette différence de situation, le législateur a pu, sans méconnaître le principe d'égalité, décider d'un ultime report jusqu'au 31 décembre 2019 le dispositif transitoire de calcul du ticket modérateur à la charge des patients dans les établissements participant au service public hospitalier. Le système de facturation individuelle des patients sera définitivement établi au plus tard à cette date.

V/ SUR L'ARTICLE 78

A/ L'article 78 de la loi déférée instaure une réforme du financement des établissements de soins de suite et de réadaptation à compter de 2017.

Les députés auteurs de la saisine estiment que cet article porte atteinte à la sincérité de la loi de financement de la sécurité sociale et que le législateur a méconnu l'étendue de sa compétence et l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi en ne définissant pas un certain nombre de paramètres de calcul permettant de déterminer les nouvelles modalités de financement de établissements concernés.

B/ Ces griefs sont infondés.

1/ Sur la méconnaissance du principe de sincérité.

Le Conseil constitutionnel veille à ce que les conséquences des dispositions des projets de loi de financement de la sécurité sociale soient évaluées et prises en compte dans la détermination des conditions générales de l'équilibre financier de la sécurité sociale (décision n°2014-706 DC, cons. 19 et 21).

Tel est bien le cas en l'espèce.

Comme l'indique l'évaluation préalable accompagnant le projet de loi, cette mesure induit une charge de 30 M€ pour l'année 2016 afin de préparer au mieux la mise en œuvre de cette réforme. Ces crédits ont été prévus au sein de l'ONDAM 2016.

Le fait que les économies qui proviendront de l'application de cette réforme à compter de 2017 ne peuvent encore être évaluées avec précision n'a aucune incidence sur l'équilibre général pour l'année 2016.

2/ Sur la méconnaissance de l'objectif à valeur constitutionnelle d'intelligibilité et d'accessibilité de la loi et l'incompétence négative.

Le législateur a défini les principes qui s'appliqueront au financement des activités des établissements de soins de suite et de réadaptation. Ce financement reposera sur une dotation modulée à l'activité composée d'une dotation calculée chaque année sur la base de l'activité moyenne des années antérieures des établissements valorisée à partir des tarifs nationaux des prestations concernées et sur un montant forfaitaire par séjour. La dotation fondée sur l'activité permettra de sécuriser les trajectoires financières des établissements en assurant le financement d'une base de ressources minimales pour leur permettre de mettre en œuvre des stratégies pluriannuelles et de lisser les aléas de revenus liés à l'activité. Le montant forfaitaire par séjour permettra de valoriser les établissements dynamiques qui développeront leur activité tout en optimisant leurs coûts.

Il appartient au pouvoir réglementaire de fixer les différents paramètres techniques prévus par le législateur permettant de déterminer les financements concernés (tarifs nationaux des prestations, fractions des tarifs liées à la dotation majorée par activité et au montant forfaitaire par séjour, coefficients géographiques susceptibles de s'appliquer aux tarifs nationaux, coefficient susceptible de s'appliquer aux tarifs nationaux pour assurer le respect de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie).

Le législateur n'a ainsi méconnu ni l'étendue de sa compétence, ni l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi.

L'article 78 est donc conforme à la Constitution.

Pour l'ensemble de ces raisons, le Gouvernement est d'avis que les griefs articulés dans les saisines ne sont pas de nature à conduire à la censure de la loi déférée.

Aussi estime-t-il que le Conseil constitutionnel devra rejeter le recours dont il est saisi.