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Décision n° 2015-487 QPC du 7 octobre 2015 - Décision de renvoi Cass.

M. Patoarii R. [Ouverture d'une procédure collective à l'encontre du dirigeant d'une personne morale placée en redressement ou en liquidation judiciaire]
Non conformité partielle

Cour de cassation
chambre commerciale
Audience publique du mardi 7 juillet 2015
N° de pourvoi : 15-40022
Non publié au bulletin Qpc seule - renvoi au cc

Mme Mouillard (président), président

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que la question transmise est « afférente au caractère inconstitutionnel de l'article L. 624-5 du code de commerce, dans sa version applicable en Polynésie française au regard des articles 8 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen » ;

Attendu que l'article L. 624-5 du code de commerce, dans sa version applicable en Polynésie française, dispose :

I. - En cas de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire d'une personne morale, le tribunal peut ouvrir une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire à l'égard de tout dirigeant de droit ou de fait, rémunéré ou non, contre lequel peut être relevé un des faits ci-après :
1 ° Avoir disposé des biens de la personne morale comme des siens propres ;
2 ° Sous le couvert de la personne morale masquant ses agissements, avoir fait des actes de commerce dans un intérêt personnel ;
3 ° Avoir fait des biens ou du crédit de la personne morale un usage contraire à l'intérêt de celle-ci à des fins personnelles ou pour favoriser une autre personne morale ou entreprise dans laquelle il était intéressé directement ou indirectement ;
4 ° Avoir poursuivi abusivement, dans un intérêt personnel, une exploitation déficitaire qui ne pouvait conduire qu'à la cessation des paiements de la personne morale ;
5 ° Avoir tenu une comptabilité fictive ou fait disparaître des documents comptables de la personne morale ou s'être abstenu de tenir toute comptabilité conforme aux règles légales ;
6 ° Avoir détourné ou dissimulé tout ou partie de l'actif ou frauduleusement augmenté le passif de la personne morale ;
7 ° Avoir tenu une comptabilité manifestement incomplète ou irrégulière au regard des dispositions légales ;
II. - En cas de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire prononcé en application du présent article, le passif comprend, outre le passif personnel, celui de la personne morale.
III. - La date de la cessation des paiements est celle fixée par le jugement d'ouverture du redressement judiciaire ou de la liquidation judiciaire de la personne morale.
IV. - L'action se prescrit par trois ans à compter du jugement qui arrête le plan de redressement de l'entreprise ou, à défaut, du jugement qui prononce la liquidation judiciaire.

Attendu que la disposition contestée est applicable au litige en ce qu'elle constitue le fondement de l'action engagée par M. X..., en qualité de liquidateur judiciaire de la société Kelly, contre son ancien gérant, M. Y... ;

Attendu qu'elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;

Et attendu que la question de savoir si l'article L. 624-5 du code de commerce, dans sa rédaction encore applicable dans le territoire de la Polynésie française, porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution, notamment au droit de propriété et au principe de la nécessité des peines, présente un caractère sérieux ;

D'où il suit qu'il y a lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel ;

PAR CES MOTIFS :

RENVOIE au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du sept juillet deux mille quinze.