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Décision n° 2014-385 QPC du 28 mars 2014 - Décision de renvoi Cass.

M. Joël M. [Discipline des officiers publics ou ministériels - Interdiction temporaire d'exercer]
Conformité

Cour de cassation
chambre civile 1
Audience publique du mercredi 22 janvier 2014
N° de pourvoi : 13-40066
Arrêt n° 163
Non publié au bulletin Qpc seule - renvoi au cc

M. Charruault (président), président

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE Français

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que, par citation du 22 avril 2013 visant l'article 3 de l'ordonnance n° 45-1418 du 28 juin 1945 relative à la discipline des notaires et de certains officiers ministériels, le ministère public a exercé l'action disciplinaire prévue à l'article 10 de cette ordonnance à l'encontre de M. X…, notaire, lequel a soulevé une question prioritaire de constitutionnalité ;

Attendu que la question transmise par le tribunal de grande instance est ainsi rédigée :

L'article 3 de l'ordonnance n° 45-1418 du 28 juin 1945 porte-t-il atteinte aux droits de la défense, au droit à un procès équitable, au principe de légalité des peines et à l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 en ce que la peine d'interdiction temporaire qu'il édicte ne prévoit pas une limitation de durée maximale ?

Attendu que cette disposition, modifiée par la loi n° 73-546 du 25 juin 1973, s'intègre à l'ordonnance précitée qui, prise par le Gouvernement provisoire de la République française, a valeur législative ; qu'elle entre donc dans le champ d'application de l'article 61-1 de la Constitution ;

Qu'applicable au litige en ce qu'elle détermine les sanctions disciplinaires encourues par M. X… en vertu des dispositions combinées des articles 10 et 15 de l'ordonnance, elle n'a pas été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;

Et attendu que la disposition contestée qui, en son 5 °, édicte la peine disciplinaire d'interdiction temporaire sans en fixer la durée maximale, laquelle est remise à l'appréciation du juge qui la prononce sous réserve, en l'état du droit positif constant, d'en respecter le caractère effectivement temporaire, pourrait être regardée comme portant atteinte tant au principe constitutionnel de légalité des délits et des peines en ce qu'elle délègue à l'autorité juridictionnelle le soin de fixer le plafond d'une peine de nature temporaire dont la détermination ne revient qu'à la loi, qu'à ceux de nécessité et de proportionnalité des peines, dès lors que cette sanction disciplinaire emportant pour le notaire l'interdiction d'exercer sa profession et la privation de ses droits sur les produits de l'étude, pour ne lui conserver qu'un droit de présentation dont l'exercice ne serait admis, en pratique, qu'au terme de la peine, laquelle s'exécute sans sursis, pourrait revêtir pour l'interdit temporaire, au-delà d'un délai compatible avec un retour effectif à ses fonctions, un caractère définitif ; que la question posée revêt donc un caractère sérieux ;

D'où il suit qu'il y a lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel ;

PAR CES MOTIFS :

RENVOIE au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux janvier deux mille quatorze.