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Décision n° 2013-671 DC du 6 juin 2013 - Réplique par 60 sénateurs

Loi portant prorogation du mandat des membres de l'Assemblée des Français de l'étranger
Conformité

Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Conseillers,

Les Sénateurs auteurs de la saisine entendent apporter les observations suivantes, en réplique aux mémoires que le gouvernement a adressées au Conseil Constitutionnel.

Le Gouvernement reconnaît lui-même que le projet de loi de prorogation et le projet de réforme de la représentation des Français de l'étranger, dont il précise qu'ils sont liés, aboutiront à porter le mandat de la série B à huit ans et le mandat des élus de la série A à quatre ans, soit une différence de moitié. Celle-ci étant très importante, elle caractérise une atteinte portée au principe d'égalité des élus.

Il ne nie pas non plus qu'il s'agit d'une deuxième modification de la durée des mandats en cours. Or, celle-ci ne repose pas sur une contrainte incontournable mais sur la simple volonté du gouvernement de procéder en urgence, non justifié par des impératifs précis, à une réforme des instances représentatives des Français établis hors de France.

Or, s'il est loisible pour le législateur de prolonger au-delà de son terme le mandat que s'est vu confier des élus, comme le souligne la décision n° 2001-444 DC du 09 mai 2001, ces prorogations ne peuvent intervenir qu'à la condition d'être indispensables à l'objectif poursuivi par la loi, comme en témoigne son considérant n° 5 qui précise que : « cette prolongation, limitée à onze semaines, apparaît comme strictement nécessaire à la réalisation de l'objectif de la loi et revêt un caractère exceptionnel et transitoire ; qu'elle n'est donc pas manifestement inappropriée audit objectif ».

Même si les motivations des deux prorogations sont distinctes, il n'en reste pas moins que la perspective de deux prorogations successives conduit à une grande incertitude dans l'esprit des électeurs qui ne sont plus assurés désormais que la durée du mandat des membres de l'Assemblée des Français de l'étranger sera respectée. Cette situation conduit à une modification incessante des durées de mandat. Il s'agit d'une grave atteinte à la périodicité raisonnable des élections et, finalement d'une prime à toutes les illégalités à venir. Il suffirait, en effet, aux Gouvernements successifs de stopper un processus électoral ou de renoncer à tenir des élections qui lui sont imposées par la loi, en multipliant les projets de transformations des instances à élire.

Or, il n'est pas contestable que le Gouvernement a empêché le déroulement normal d'une élection prévue par la loi et que cette illégalité s'est produite non pas en temps opportun pour avertir les électeurs mais en extrême urgence, la loi ayant été votée en première lecture au Sénat, le jour même où le collège électoral aurait dû être convoqué.