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Présentation de la procédure contentieuse

Aux termes de l'article 59 de la Constitution, « le Conseil constitutionnel statue, en cas de contestation, sur la régularité de l'élection des députés et des sénateurs ».

Indépendamment des requêtes émanant d'un électeur ou d'un candidat aux fins d'annuler l'élection d'un sénateur (I), le Conseil constitutionnel peut également être saisi comme juge d'appel dans le contentieux de la désignation des délégués sénatoriaux (II). Il peut enfin être saisi pour faire constater une incompatibilité ou une inéligibilité (III).

I. Le Conseil constitutionnel, juge de l'élection des sénateurs

La Constitution a confié au Conseil constitutionnel le contrôle de l'élection des sénateurs dans les conditions fixées par l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel.

L'élection d'un sénateur peut être contestée devant le Conseil constitutionnel par tout électeur de la circonscription intéressée (et non par les seuls membres du collège électoral sénatorial) ou par toute personne qui y a fait acte de candidature. La procédure est enserrée dans des délais brefs puisque le recours est ouvert durant les dix jours qui suivent la proclamation des résultats du scrutin. Pendant ces dix jours, les procès-verbaux des bureaux de vote restent à disposition des personnes pouvant exercer le recours dans les bureaux de la préfecture.

La requête est obligatoirement formulée par écrit. Elle peut être rédigée sur papier libre. Elle est dispensée de tous frais de timbre ou d'enregistrement. Elle est adressée au préfet ou au représentant de l'État dans les collectivités d'outre-mer, qui la transmet au Conseil constitutionnel. Le Conseil peut aussi être saisi directement par requête adressée à son secrétaire général.

La requête doit préciser le nom, les prénoms et la qualité du requérant et le nom des élus dont l'élection est contestée ainsi que les moyens d'annulation invoqués.

Tout au long de la procédure, le requérant ou l'élu dont l'élection est contestée peuvent être assistés ou représentés par un avocat ou toute autre personne qu'ils désignent.

Sauf en cas de requête manifestement irrecevable ou fondée sur des griefs manifestement sans influence sur le résultat de l'élection, la requête est instruite par une section d'instruction composée de trois membres du Conseil constitutionnel ou par le Conseil lui-même.

Un rapporteur adjoint, membre du Conseil d'État ou de la Cour des comptes, est désigné.

L'instruction se caractérise par une procédure contradictoire, avec échange de mémoires entre les parties. Il peut être ordonné une enquête ou la communication de toute pièce permettant d'apporter un éclairage utile au Conseil. Le règlement applicable à la procédure devant le Conseil constitutionnel permet également l'audition des parties. Le Conseil fait droit à une demande d'audition d'une des parties lorsqu'il s'avère utile de préciser les arguments de celle-ci, toutes les parties sont alors convoquées. L'audition a lieu non pas devant la section d'instruction mais en séance plénière. L'audition donne lieu à un procès-verbal versé au dossier. Le Conseil peut lui-même, à titre de mesure d'instruction et en dehors de toute demande des parties, organiser une audition. Le rapporteur adjoint assiste à toutes les auditions.

La section d'instruction entend le rapporteur adjoint. Une fois l'instruction achevée, la séance de jugement du Conseil est fixée. La date d'examen en séance plénière est déterminée par le Président. Le rôle est rendu public quarante-huit heures avant la séance sur le site Internet du Conseil.

Le Conseil se réunit en séance plénière, le rapporteur adjoint est entendu en son rapport. Ce dernier assiste au délibéré sans toutefois prendre part au vote.

La décision est motivée. Elle fait l'objet d'une notification au Président du Sénat et est publiée au Journal officiel. Les parties en reçoivent copie. Le sénateur dont l'élection est contestée est systématiquement informé de la suite donnée à la requête.

La requête n'a pas d'effet suspensif. Tant qu'une décision d'annulation des opérations électorales n'est pas rendue, la personne proclamée élue continue d'exercer son mandat de sénateur.

Le Conseil constitutionnel peut soit rejeter la contestation et valider l'élection, soit prononcer l'annulation de l'élection, soit réformer les résultats et proclamer élu un autre candidat. Ses décisions sont souveraines et revêtues de l'autorité de la chose jugée. En effet, aux termes de l'article 62 de la Constitution « les décisions du Conseil constitutionnel ne sont susceptibles d'aucun recours. Elles s'imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et juridictionnelles ».

II. Le Conseil constitutionnel, juge d'appel de la désignation des délégués sénatoriaux et des déclarations de candidature

Les contestations relatives à l'élection des délégués sénatoriaux sont portées devant le tribunal administratif. Par dérogation au droit commun, c'est le Conseil constitutionnel qui juge en appel ces décisions et non le Conseil d'État ou les cours administratives d'appel. Toutefois, la décision du tribunal administratif ne peut être contestée devant le Conseil constitutionnel que si celui-ci est saisi d'un recours contre l'élection d'un ou plusieurs sénateurs.

Le Conseil constitutionnel est également juge en appel des décisions des tribunaux administratifs relatives aux déclarations de candidature. En effet, si une déclaration ne remplit pas les conditions requises, le préfet saisit dans les vingt-quatre heures le tribunal administratif qui statue dans les trois jours. Son jugement ne peut être contesté que devant le Conseil constitutionnel saisi de l'élection. Il en va de même de l'enregistrement de la candidature d'une personne inéligible. Le préfet sursoit à statuer à l'enregistrement de la candidature et saisit dans les vingt-quatre heures le tribunal administratif qui statue dans les trois jours. La décision du tribunal administratif ne pourra être contestée que devant le Conseil constitutionnel à condition que celui-ci soit, par ailleurs, saisi de l'élection.

III. Le Conseil constitutionnel, juge des incompatibilités et de l'inégibilité

S'agissant des sénateurs, le Conseil constitutionnel peut également être saisi par le Bureau du Sénat. Tel est le cas en matière d'incompatibilité (A) ou en matière de transparence financière de la vie politique (B).

A. Les incompatibilités

Le mandat de sénateur est incompatible avec d'autres fonctions électives, ou avec l'exercice de certaines professions. Par exemple, le mandat de sénateur est incompatible avec :

  • le mandat de député,
  • le mandat de membre du parlement européen,
  • la qualité de membre du Conseil économique, social et environnemental
  • les fonctions de magistrat,

et l'exercice de plus d'un des mandats énumérés ci-après :

  • conseiller régional,
  • conseiller à l'assemblée de Corse,
  • conseiller général,
  • conseiller de Paris,
  • conseiller municipal d'une commune d'au moins 3 500 habitants.

Les cas d'incompatibilités ne peuvent être soumis au Conseil constitutionnel que par le Bureau du Sénat, le Garde des sceaux ou le sénateur lui-même

B. L'inéligibilité en cas de non-dépôt d'une déclaration de patrimoine

Les sénateurs sont concernés par l'obligation de déclaration de patrimoine imposée aux membres du Parlement.

Dans les deux mois qui suivent son entrée en fonction, chaque sénateur est tenu de déposer une déclaration, certifiée sur l'honneur exacte et sincère, de situation patrimoniale. Ces déclarations sont déposées auprès de la Commission pour la transparence financière de la vie politique. En cas de non-dépôt, la commission susvisée saisit le Bureau du Sénat. À son tour, le Bureau du Sénat saisit le Conseil constitutionnel, lequel, le cas échéant, va constater l'inéligibilité du sénateur et le déclarer démissionnaire d'office.