Décision n° 2024-6298 SEN du 20 septembre 2024
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 29 février 2024 par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (décision du 26 février 2024), dans les conditions prévues au troisième alinéa de l’article L. 52-15 du code électoral. Cette saisine est relative à la situation de M. Michel MASSET, candidat à l’élection qui s’est déroulée le 24 septembre 2023, dans le département du Lot-et-Garonne, en vue de la désignation de deux sénateurs. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2024-6298 SEN.
Au vu des textes suivants :
- la Constitution, notamment son article 59 ;
- l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
- le code électoral ;
- le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l’élection des députés et des sénateurs ;
Au vu des pièces suivantes :
- les observations présentées pour M. MASSET, sénateur, par Me Jérôme Léron, avocat au barreau de Versailles, enregistrées le 25 mars 2024 ;
- les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Après avoir entendu M. MASSET et son conseil ;
Au vu de la note en délibéré présentée pour M. MASSET par Me Léron, enregistrée le 11 septembre 2024 ;
Et après avoir entendu le rapporteur ;
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S’EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT :
1. Il ressort de l’article L. 52-4 du code électoral, rendu applicable aux candidats aux élections sénatoriales par l’article L. 308-1 du même code, qu’il appartient au mandataire financier désigné par le candidat de régler les dépenses engagées en vue de l’élection et antérieures à la date du tour de scrutin où elle a été acquise, à l’exception des dépenses prises en charge par un parti ou groupement politique. Les dépenses antérieures à sa désignation, payées directement par le candidat ou à son profit, font l’objet d’un remboursement par le mandataire et figurent dans son compte bancaire ou postal. Si le règlement direct de menues dépenses par le candidat peut être admis, ce n’est qu’à la double condition que leur montant, tel qu’apprécié à la lumière de ces dispositions, c’est-à-dire prenant en compte non seulement les dépenses intervenues après la désignation du mandataire financier mais aussi celles réglées avant cette désignation et qui n’auraient pas fait l’objet d’un remboursement par le mandataire, soit faible par rapport au total des dépenses du compte de campagne et négligeable au regard du plafond de dépenses autorisées par l’article L. 52-11 du même code.
2. Le compte de campagne de M. MASSET a été rejeté par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques dans sa décision du 26 février 2024 au motif que, si le candidat a déposé un compte de campagne dans lequel figurait l’intégralité des dépenses engagées en vue de l’élection, il a réglé directement un total de 3 998 euros de dépenses, en méconnaissance des dispositions du troisième alinéa de l’article L. 52-4 du code électoral.
3. Ces circonstances sont établies. Par suite, c’est à bon droit que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a rejeté le compte de campagne de M. MASSET.
4. L’article L.O. 136-1 du code électoral dispose que, en cas de volonté de fraude ou de manquement d’une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales, le Conseil constitutionnel peut déclarer inéligible le candidat dont le compte de campagne a été rejeté à bon droit.
5. Il résulte de l’instruction que le manquement aux dispositions du troisième alinéa de l’article L. 52-4 ne procède ni d’une fraude ni d’une volonté de dissimulation et qu’il n’a privé ni la Commission ni le Conseil constitutionnel des informations et des justificatifs nécessaires au contrôle de la licéité des dépenses et des recettes de la campagne électorale et ne s’est accompagné d’aucun autre manquement.
6. Nonobstant le caractère substantiel de l’obligation résultant du troisième alinéa de l’article L. 52-4 du code électoral, le manquement commis au regard de ces dispositions ne justifie pas, dans les circonstances particulières de l’espèce, le prononcé d’une inéligibilité.
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE :
Article 1er. - Il n’y a pas lieu de déclarer M. Michel MASSET inéligible en application des dispositions de l’article L.O. 136-1 du code électoral.
Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l’article 18 du règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l’élection des députés et des sénateurs.
Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 19 septembre 2024, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Jacqueline GOURAULT, M. Alain JUPPÉ, Mmes Corinne LUQUIENS, Véronique MALBEC, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET, Michel PINAULT et François SÉNERS.
Rendu public le 20 septembre 2024.
JORF n°0225 du 21 septembre 2024, texte n° 54
ECLI : FR : CC : 2024 : 2024.6298.SEN