Décision

Décision n° 2024-6295 SEN du 20 septembre 2024

SEN, Saint-Pierre-et-Miquelon

Inéligibilité

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 26 février 2024 par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (décision du 5 février 2024), dans les conditions prévues au troisième alinéa de l’article L. 52-15 du code électoral. Cette saisine est relative à la situation de M. Patrick LEBAILLY, candidat aux élections qui se sont déroulées le 24 septembre 2023, dans la circonscription de Saint-Pierre-et-Miquelon, en vue de la désignation d’un sénateur. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2024-6295 SEN.

Au vu des textes suivants :

  • la Constitution, notamment son article 59 ;
  • l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
  • le code électoral ;
  • le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l’élection des députés et des sénateurs notamment le troisième alinéa de son article 9-1 ;

Au vu des pièces suivantes :

  • les observations présentées par M. LEBAILLY, enregistrées le 14 mars 2024 ;
  • les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Et après avoir entendu le rapporteur ;

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S’EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT :

1. Il résulte de l’article L. 52-12 du code électoral, rendu applicable aux candidats aux élections sénatoriales par l’article L. 308-1 du même code, que chaque candidat ou candidat tête de liste aux élections sénatoriales soumis au plafonnement prévu à l’article L. 52-11 est tenu d’établir un compte de campagne lorsqu’il a obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés ou s’il a bénéficié de dons de personnes physiques conformément à l’article L. 52-8. Pour la période mentionnée à l’article L. 52-4 du code électoral, ce compte de campagne retrace, selon leur origine, l’ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l’ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l’élection. Il doit être en équilibre ou excédentaire et ne peut présenter un déficit. Ce compte de campagne doit être déposé à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques au plus tard avant 18 heures le dixième vendredi suivant le premier tour de scrutin. Il ressort également de l’article L. 52-12 que ce compte doit être présenté par un membre de l’ordre des experts-comptables qui met le compte en état d’examen et s’assure de la présence des pièces justificatives requises. Cette présentation n’est pas obligatoire lorsque le candidat a obtenu moins de 5 % des suffrages exprimés et que les recettes et les dépenses de son compte de campagne n’excèdent pas un montant fixé par décret. Dans ce cas, le candidat doit transmettre à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques les relevés du compte bancaire ouvert en application de l’article L. 52-5 ou de l’article L. 52-6.

2. L’article L.O. 136-1 du même code dispose que, en cas de volonté de fraude ou de manquement d’une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales, le Conseil constitutionnel peut déclarer inéligible le candidat qui n’a pas déposé son compte de campagne dans les conditions et le délai prescrits à l’article L. 52-12.

3. M. LEBAILLY a obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés à l’issue du scrutin dont le premier tour s’est tenu le 24 septembre 2023. Le délai pour déposer son compte de campagne expirait le 1er décembre 2023 à 18 heures. Or, M. LEBAILLY a déposé son compte de campagne le 8 décembre 2023, soit après l’expiration de ce délai. Par ailleurs, son mandataire financier n’a pas ouvert de compte bancaire, en violation de l’article L. 52-6 du code électoral.

4. Si M. LEBAILLY invoque des problèmes de santé et fait valoir que l’ouverture d’un compte bancaire aurait généré des frais, il ne résulte pas de l’instruction que ces circonstances ni aucune autre circonstance particulière étaient de nature à justifier la méconnaissance des obligations résultant des articles L. 52-6 et L. 52-12.

5. Dès lors, eu égard au cumul d’irrégularités constatées et au caractère substantiel des obligations méconnues, il y a lieu de prononcer l’inéligibilité de M. LEBAILLY à tout mandat pour une durée de trois ans à compter de la présente décision.

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE :
 
Article 1er. - M. Patrick LEBAILLY est déclaré inéligible en application de l’article L.O. 136-1 du code électoral pour une durée de trois ans à compter de la présente décision.
 
Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l’article 18 du règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l’élection des députés et des sénateurs.
 

Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 19 septembre 2024, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Jacqueline GOURAULT, M. Alain JUPPÉ, Mmes Corinne LUQUIENS, Véronique MALBEC, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET, Michel PINAULT et François SÉNERS.
 
Rendu public le 20 septembre 2024.
 

JORF n°0225 du 21 septembre 2024, texte n° 52
ECLI : FR : CC : 2024 : 2024.6295.SEN

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