Décision

Décision n° 2023-6238 AN du 16 juin 2023

A.N., Guyane, 2e circ.
Inéligibilité

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 16 février 2023 par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (décision du 8 février 2023), dans les conditions prévues au troisième alinéa de l’article L. 52-15 du code électoral. Cette saisine est relative à la situation de M. Manuel Victor JEAN-BAPTISTE, candidat aux élections qui se sont déroulées les 11 et 18 juin 2022, dans la 2e circonscription de la Guyane, en vue de la désignation d’un député à l’Assemblée nationale. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2023-6238 AN.

Au vu des textes suivants :

  • la Constitution, notamment son article 59 ;
  • l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
  • le code électoral ;
  • le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l’élection des députés et des sénateurs ;

Au vu des pièces suivantes :

  • les observations présentées pour M. JEAN-BAPTISTE par Mme Florance Nancy Clothilde AJODHA, enregistrées le 3 mars 2023 ;
  • les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Et après avoir entendu le rapporteur ;

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S’EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT :

1. Il résulte de l’article L. 52-12 du code électoral que chaque candidat aux élections législatives soumis au plafonnement prévu à l’article L. 52-11 est tenu d’établir un compte de campagne lorsqu’il a obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés ou s’il a bénéficié de dons de personnes physiques conformément à l’article L. 52-8. Pour la période mentionnée à l’article L. 52-4 du code électoral, ce compte de campagne retrace, selon leur origine, l’ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l’ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l’élection. Il doit être en équilibre ou excédentaire et ne peut présenter un déficit. Ce compte de campagne doit être déposé à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques au plus tard avant 18 heures le dixième vendredi suivant le premier tour de scrutin. Il ressort également de l’article L. 52-12 que ce compte doit être présenté par un membre de l’ordre des experts-comptables qui met le compte en état d’examen et s’assure de la présence des pièces justificatives requises. Cette présentation n’est pas obligatoire lorsque le candidat a obtenu moins de 5 % des suffrages exprimés et que les recettes et les dépenses de son compte de campagne n’excèdent pas un montant fixé par décret. Dans ce cas, le candidat doit transmettre à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques les relevés du compte bancaire ouvert en application de l’article L. 52-5 ou de l’article L. 52-6.

2. Le compte de campagne de M. JEAN-BAPTISTE a été rejeté par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques dans sa décision du 8 février 2023, au motif que ce compte ne comportait pas une description sincère et exhaustive des recettes et des dépenses, eu égard aux montants sensiblement différents de recettes et de dépenses que le candidat a fait figurer dans le second formulaire de compte de campagne qu’il a déposé dans le cadre de la procédure contradictoire.

3. Il résulte de l’instruction que, si M. JEAN-BAPTISTE a présenté devant la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques un second formulaire de compte les 9 et 10 novembre 2022, les montants qu’il fait apparaître diffèrent toutefois, tant en recettes qu’en dépenses, de ceux déclarés dans le compte qu’il avait déposé dans le délai légal et il est accompagné de factures qui n’étaient pas jointes au premier compte déposé, si bien que celui-ci ne peut être regardé comme comportant une description exacte de la totalité des recettes et des dépenses relatives à l’élection. Dans ces conditions, c’est à bon droit que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a rejeté le compte de campagne de M. JEAN-BAPTISTE.

4. L’article L.O. 136-1 du code électoral dispose que, en cas de volonté de fraude ou de manquement d’une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales, le Conseil constitutionnel peut déclarer inéligible le candidat qui n’a pas déposé son compte de campagne dans les conditions et le délai prescrits à l’article L. 52-12.

5. Compte tenu de ce manquement, il y a lieu de prononcer l’inéligibilité de M. JEAN-BAPTISTE à tout mandat pour une durée d’un an à compter de la présente décision.

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE :
 
Article 1er. - M. Manuel Victor JEAN-BAPTISTE est déclaré inéligible en application de l’article L.O. 136-1 du code électoral pour une durée d’un an à compter de la présente décision.
 
Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l’article 18 du règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l’élection des députés et des sénateurs.

Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 15 juin 2023, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Jacqueline GOURAULT, M. Alain JUPPÉ, Mmes Corinne LUQUIENS, Véronique MALBEC, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET, Michel PINAULT et François SÉNERS.
 
Rendu public le 16 juin 2023.
 

JORF n°0141 du 20 juin 2023, texte n° 77
ECLI : FR : CC : 2023 : 2023.6238.AN

Les abstracts

  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.5. Financement
  • 8.3.5.3. Présentation du compte
  • 8.3.5.3.2. Totalité des opérations financières

Le compte de campagne a été rejeté par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques au motif que ce compte ne comportait pas une description sincère et exhaustive des recettes et des dépenses, eu égard aux montants sensiblement différents de recettes et de dépenses que le candidat a fait figurer dans le second formulaire de compte de campagne qu’il a déposé dans le cadre de la procédure contradictoire. Il résulte de l’instruction que, si le candidat a présenté devant la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques un second formulaire de compte les 9 et 10 novembre 2022, les montants qu’il fait apparaître diffèrent toutefois, tant en recettes qu’en dépenses, de ceux déclarés dans le compte qu’il avait déposé dans le délai légal et il est accompagné de factures qui n’étaient pas jointes au premier compte déposé, si bien que celui-ci ne peut être regardé comme comportant une description exacte de la totalité des recettes et des dépenses relatives à l’élection. Dans ces conditions, c’est à bon droit que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a rejeté le compte de campagne. Inéligibilité un an.

(2023-6238 AN, 16 juin 2023, cons. 2, 3, 5, JORF n°0141 du 20 juin 2023, texte n° 77)
À voir aussi sur le site : Version PDF de la décision.
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