Décision

Décision n° 2023-6146 AN du 26 mai 2023

A.N., Seine-Saint-Denis, 11e circ.
Inéligibilité

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 9 février 2023 par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (décision du 23 janvier 2023), dans les conditions prévues au troisième alinéa de l’article L. 52-15 du code électoral. Cette saisine est relative à la situation de Mme Hakima OUARET, candidate aux élections qui se sont déroulées les 12 et 19 juin 2022, dans la 11e circonscription du département de la Seine-Saint-Denis, en vue de la désignation d’un député à l’Assemblée nationale. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2023-6146 AN.

Au vu des textes suivants :

  • la Constitution, notamment son article 59 ;
  • l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
  • le code électoral ;
  • le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l’élection des députés et des sénateurs notamment le troisième alinéa de son article 9-1 ;

Au vu des pièces suivantes :

  • les observations présentées par Mme OUARET, enregistrées le 4 mai 2023 ;
  • les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Et après avoir entendu le rapporteur ;

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S’EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT :

1. Il résulte de l’article L. 52-12 du code électoral que chaque candidat aux élections législatives soumis au plafonnement prévu à l’article L. 52-11 est tenu d’établir un compte de campagne lorsqu’il a obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés ou s’il a bénéficié de dons de personnes physiques conformément à l’article L. 52-8. Pour la période mentionnée à l’article L. 52-4 du code électoral, ce compte de campagne retrace, selon leur origine, l’ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l’ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l’élection. Il doit être en équilibre ou excédentaire et ne peut présenter un déficit. Ce compte de campagne doit être déposé à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques au plus tard avant 18 heures le dixième vendredi suivant le premier tour de scrutin. Il ressort également de l’article L. 52-12 que ce compte doit être présenté par un membre de l’ordre des experts-comptables qui met le compte en état d’examen et s’assure de la présence des pièces justificatives requises. Cette présentation n’est pas obligatoire lorsque le candidat a obtenu moins de 5 % des suffrages exprimés et que les recettes et les dépenses de son compte de campagne n’excèdent pas un montant fixé par décret. Dans ce cas, le candidat doit transmettre à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques les relevés du compte bancaire ouvert en application de l’article L. 52-5 ou de l’article L. 52-6.

2. L’article L.O. 136-1 du même code dispose que, en cas de volonté de fraude ou de manquement d’une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales, le Conseil constitutionnel peut déclarer inéligible le candidat qui n’a pas déposé son compte de campagne dans les conditions et le délai prescrits à l’article L. 52-12.

3. Mme OUARET a obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés à l’issue du scrutin dont le premier tour s’est tenu le 12 juin 2022. À l’expiration du délai prévu à l’article L. 52-12 du code électoral, elle n’a pas déposé de compte de campagne alors qu’elle y était tenue.

4. Si Mme OUARET soutient que, n’ayant pas l’intention d’engager des dépenses autres que celles nécessaires à la campagne officielle, elle avait décidé de ne pas procéder à la désignation d’un nouveau mandataire financier suite à la démission de la personne nommée à ces fonctions au début de la campagne électorale, ces circonstances ne sont pas de nature à justifier la méconnaissance des obligations résultant de l’article L. 52-12. De plus, si Mme OUARET fait valoir qu’elle n’a eu ni dépense ni recette, il résulte de l’instruction que son mandataire financier n’a pas ouvert de compte bancaire. Elle est donc insusceptible de produire les relevés bancaires qui lui permettraient d’attester l’absence de dépense et de recette.

5. Dès lors, compte tenu de la particulière gravité de ce manquement, il y a lieu de prononcer l’inéligibilité de Mme OUARET à tout mandat pour une durée de trois ans à compter de la présente décision.

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE :
 
Article 1er. - Mme Hakima OUARET est déclarée inéligible en application de l’article L.O. 136-1 du code électoral pour une durée de trois ans à compter de la présente décision.
 
Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l’article 18 du règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l’élection des députés et des sénateurs.

Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 25 mai 2023, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Jacqueline GOURAULT, M. Alain JUPPÉ, Mmes Corinne LUQUIENS, Véronique MALBEC, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT.
 
Rendu public le 26 mai 2023.
 

JORF n°0123 du 28 mai 2023, texte n° 59
ECLI : FR : CC : 2023 : 2023.6146.AN

Les abstracts

  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.5. Financement
  • 8.3.5.2. Établissement d'un compte de campagne
  • 8.3.5.2.1. Obligation de dépôt du compte de campagne
  • 8.3.5.2.1.3. Attestation d'absence de dépense et de recette
  • 8.3.5.2.1.3.2. Inéligibilité

La candidate a obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés à l’issue du scrutin dont le premier tour s’est tenu le 12 juin 2022. À l’expiration du délai prévu à l’article L. 52-12 du code électoral, elle n’a pas déposé de compte de campagne alors qu’elle y était tenue. Si la candidate soutient que, n’ayant pas l’intention d’engager des dépenses autres que celles nécessaires à la campagne officielle, elle avait décidé de ne pas procéder à la désignation d’un nouveau mandataire financier suite à la démission de la personne nommée à ces fonctions au début de la campagne électorale, ces circonstances ne sont pas de nature à justifier la méconnaissance des obligations résultant de l’article L. 52-12. De plus, si la candidate fait valoir qu’elle n’a eu ni dépense ni recette, il résulte de l’instruction que son mandataire financier n’a pas ouvert de compte bancaire. Elle est donc insusceptible de produire les relevés bancaires qui lui permettraient d’attester l’absence de dépense et de recette. Trois ans d'inéligibilité

(2023-6146 AN, 26 mai 2023, cons. 3, 4, JORF n°0123 du 28 mai 2023, texte n° 59)
À voir aussi sur le site : Version PDF de la décision.
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