Décision n° 2023-6126 AN du 16 juin 2023
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 7 février 2023 par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (décision du 25 janvier 2023), dans les conditions prévues au troisième alinéa de l’article L. 52-15 du code électoral. Cette saisine est relative à la situation de Mme Nawal HAFED, candidate aux élections qui se sont déroulées les 12 et 19 juin 2022, dans la 1re circonscription du département du Bas-Rhin, en vue de la désignation d’un député à l’Assemblée nationale. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2023-6126 AN.
Au vu des textes suivants :
- la Constitution, notamment son article 59 ;
- l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
- le code électoral ;
- le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l’élection des députés et des sénateurs notamment le troisième alinéa de son article 9-1 ;
Au vu des pièces suivantes :
- les observations présentées par Mme HAFED, enregistrées le 7 février 2023 ;
- les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Et après avoir entendu le rapporteur ;
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S’EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT :
1. Il résulte de l’article L. 52-12 du code électoral que chaque candidat aux élections législatives soumis au plafonnement prévu à l’article L. 52-11 est tenu d’établir un compte de campagne lorsqu’il a obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés ou s’il a bénéficié de dons de personnes physiques conformément à l’article L. 52-8. Pour la période mentionnée à l’article L. 52-4 du code électoral, ce compte de campagne retrace, selon leur origine, l’ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l’ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l’élection. Il doit être en équilibre ou excédentaire et ne peut présenter un déficit. Ce compte de campagne doit être déposé à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques au plus tard avant 18 heures le dixième vendredi suivant le premier tour de scrutin. Il ressort également de l’article L. 52-12 que ce compte doit être présenté par un membre de l’ordre des experts-comptables qui met le compte en état d’examen et s’assure de la présence des pièces justificatives requises. Cette présentation n’est pas obligatoire lorsque le candidat a obtenu moins de 5 % des suffrages exprimés et que les recettes et les dépenses de son compte de campagne n’excèdent pas un montant fixé par décret. Dans ce cas, le candidat doit transmettre à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques les relevés du compte bancaire ouvert en application de l’article L. 52-5 ou de l’article L. 52-6.
2. L’article L. 52-6 du code électoral impose au mandataire financier d’ouvrir un compte bancaire ou postal unique retraçant la totalité de ses opérations financières. L’intitulé du compte précise que le titulaire agit en qualité de mandataire financier du candidat, nommément désigné.
3. Le compte de campagne de Mme HAFED a été rejeté par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques dans sa décision du 25 janvier 2023 au motif que le mandataire financier qu’elle avait désigné n’a pas ouvert de compte bancaire, en violation des dispositions du deuxième alinéa de l’article L. 52-6 du code électoral.
4. Cette circonstance est établie. Par suite, c’est à bon droit que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a rejeté son compte de campagne.
5. L’article L.O. 136-1 du code électoral dispose que, en cas de volonté de fraude ou de manquement d’une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales, le Conseil constitutionnel peut déclarer inéligible le candidat dont le compte de campagne a été rejeté à bon droit.
6. Si Mme HAFED invoque le refus qui aurait été opposé à son mandataire par certains établissements bancaires à sa demande d’ouverture d’un compte, elle ne produit aucune pièce en justifiant. Par ailleurs, si elle soutient avoir demandé l’intervention de la Banque de France, cette demande est datée du 23 janvier 2023. De telles circonstances ne sont donc pas de nature à faire obstacle à l’application des dispositions de l’article L. 52-6 du code électoral.
7. Dès lors, compte tenu du manquement commis, il y a lieu de prononcer l’inéligibilité de Mme HAFED à tout mandat pour une durée d’un an à compter de la présente décision.
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE :
Article 1er. - Mme Nawal HAFED est déclarée inéligible en application de l’article L.O. 136-1 du code électoral pour une durée d’un an à compter de la présente décision.
Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l’article 18 du règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l’élection des députés et des sénateurs.Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 15 juin 2023, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Jacqueline GOURAULT, M. Alain JUPPÉ, Mmes Corinne LUQUIENS, Véronique MALBEC, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET, Michel PINAULT et François SÉNERS.
Rendu public le 16 juin 2023.
JORF n°0141 du 20 juin 2023, texte n° 52
ECLI : FR : CC : 2023 : 2023.6126.AN
Les abstracts
- 8. ÉLECTIONS
- 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
- 8.3.5. Financement
- 8.3.5.1. Mandataire financier
8.3.5.1.3. Compte bancaire ou postal
Le compte de campagne de la candidate a été rejeté par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques au motif que le mandataire financier qu’elle avait désigné n’a pas ouvert de compte bancaire, en violation des dispositions du deuxième alinéa de l’article L. 52-6 du code électoral. Cette circonstance est établie. Par suite, c’est à bon droit que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a rejeté son compte de campagne. Si la candidate invoque le refus qui aurait été opposé à son mandataire par certains établissements bancaires à sa demande d’ouverture d’un compte, elle ne produit aucune pièce en justifiant. Par ailleurs, si elle soutient avoir demandé l’intervention de la Banque de France, cette demande est datée du 23 janvier 2023. De telles circonstances ne sont donc pas de nature à faire obstacle à l’application des dispositions de l’article L. 52-6 du code électoral. Un an d'inéligibilité.