Décision

Décision n° 2023-6091 AN du 22 juin 2023

A.N., Yvelines, 10e circ.
Inéligibilité

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 31 janvier 2023 par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (décision du 16 janvier 2023), dans les conditions prévues au troisième alinéa de l’article L. 52-15 du code électoral. Cette saisine est relative à la situation de M. Cédric BRIOLAIS, candidat aux élections qui se sont déroulées les 12 et 19 juin 2022, dans la 10e circonscription du département des Yvelines, en vue de la désignation d’un député à l’Assemblée nationale. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2023-6091 AN.

Au vu des textes suivants :

  • la Constitution, notamment son article 59 ;
  • l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
  • le code électoral ;
  • le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l’élection des députés et des sénateurs ;

Au vu des pièces suivantes :

  • les observations présentées pour M. BRIOLAIS, par Me Jérôme Léron, avocat au barreau de Versailles, enregistrées le 20 février 2023 ;
  • les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Et après avoir entendu le rapporteur ;

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S’EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT :

1. Il résulte de l’article L. 52-12 du code électoral que chaque candidat aux élections législatives soumis au plafonnement prévu à l’article L. 52-11 est tenu d’établir un compte de campagne lorsqu’il a obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés ou s’il a bénéficié de dons de personnes physiques conformément à l’article L. 52-8. Pour la période mentionnée à l’article L. 52-4 du code électoral, ce compte de campagne retrace, selon leur origine, l’ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l’ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l’élection. Il doit être en équilibre ou excédentaire et ne peut présenter un déficit. Ce compte de campagne doit être déposé à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques au plus tard avant 18 heures le dixième vendredi suivant le premier tour de scrutin. Il ressort également de l’article L. 52-12 que ce compte doit être présenté par un membre de l’ordre des experts-comptables qui met le compte en état d’examen et s’assure de la présence des pièces justificatives requises. Cette présentation n’est pas obligatoire lorsque le candidat a obtenu moins de 5 % des suffrages exprimés et que les recettes et les dépenses de son compte de campagne n’excèdent pas un montant fixé par décret. Dans ce cas, le candidat doit transmettre à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques les relevés du compte bancaire ouvert en application de l’article L. 52-5 ou de l’article L. 52-6.

2. L’article L. 52-6 du code électoral impose au mandataire financier d’ouvrir un compte bancaire ou postal unique retraçant la totalité de ses opérations financières. L’intitulé du compte précise que le titulaire agit en qualité de mandataire financier du candidat, nommément désigné.

3. Le compte de campagne de M. BRIOLAIS a été rejeté par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques au motif que le mandataire financier qu’il avait désigné n’a pas ouvert de compte bancaire, en violation des dispositions du deuxième alinéa de l’article L. 52-6 du code électoral.

4. Cette circonstance est établie. Par suite, c’est à bon droit que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a rejeté son compte de campagne.

5. L’article L.O. 136-1 du code électoral dispose que, en cas de volonté de fraude ou de manquement d’une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales, le Conseil constitutionnel peut déclarer inéligible le candidat dont le compte de campagne a été rejeté à bon droit.

6. Si M. BRIOLAIS invoque les difficultés auxquelles il s’est heurté pour obtenir l’ouverture d’un compte, il ressort des pièces produites que son mandataire financier n’a sollicité à cette fin un établissement bancaire que le 10 juin 2022 et que le refus qui a été opposé à sa demande est imputable à un manque de diligence à fournir les documents qui étaient exigés par l’établissement bancaire. Par ailleurs, le candidat ne justifie pas que son mandataire financier, qui n’a saisi le médiateur du crédit et la Banque de France que le 2 août 2022 après deux refus d’ouverture d’un compte, ait accompli toutes les diligences nécessaires auprès des établissements bancaires désignés par la Banque de France pour obtenir l’ouverture d’un compte. Enfin, s’il fait valoir que son parti a pris en charge l’ensemble de ses dépenses et que ce compte n’aurait dès lors retracé aucune opération, cette circonstance est sans incidence sur l’appréciation du manquement à l’obligation résultant de l’article L. 52-6.

7. Compte tenu de ce manquement, il y a lieu de prononcer l’inéligibilité de M. BRIOLAIS à tout mandat pour une durée d’un an à compter de la présente décision.

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE :
 
Article 1er. - M. Cédric BRIOLAIS est déclaré inéligible en application de l’article L.O. 136-1 du code électoral pour une durée d’un an à compter de la présente décision.
 
Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l’article 18 du règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l’élection des députés et des sénateurs.

Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 21 juin 2023, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Jacqueline GOURAULT, M. Alain JUPPÉ, Mmes Corinne LUQUIENS, Véronique MALBEC, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET, Michel PINAULT et François SÉNERS.
 
Rendu public le 22 juin 2023.
 

JORF n°0147 du 27 juin 2023, texte n° 56
ECLI : FR : CC : 2023 : 2023.6091.AN

Les abstracts

  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.5. Financement
  • 8.3.5.1. Mandataire financier
  • 8.3.5.1.3. Compte bancaire ou postal

Le compte de campagne du candidat a été rejeté par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques au motif que le mandataire financier qu’il avait désigné n’a pas ouvert de compte bancaire, en violation des dispositions du deuxième alinéa de l’article L. 52-6 du code électoral. Cette circonstance est établie. Par suite, c’est à bon droit que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a rejeté son compte de campagne. Si le candidat invoque les difficultés auxquelles il s’est heurté pour obtenir l’ouverture d’un compte, il ressort des pièces produites que son mandataire financier n’a sollicité à cette fin un établissement bancaire que le 10 juin 2022 et que le refus qui a été opposé à sa demande est imputable à un manque de diligence à fournir les documents qui étaient exigés par l’établissement bancaire. Par ailleurs, le candidat ne justifie pas que son mandataire financier, qui n’a saisi le médiateur du crédit et la Banque de France que le 2 août 2022 après deux refus d’ouverture d’un compte, ait accompli toutes les diligences nécessaires auprès des établissements bancaires désignés par la Banque de France pour obtenir l’ouverture d’un compte. Enfin, s’il fait valoir que son parti a pris en charge l’ensemble de ses dépenses et que ce compte n’aurait dès lors retracé aucune opération, cette circonstance est sans incidence sur l’appréciation du manquement à l’obligation résultant de l’article L. 52-6. Un an d'inéligibilité.

(2023-6091 AN, 22 juin 2023, cons. 3, 4, 6, JORF n°0147 du 27 juin 2023, texte n° 56)
À voir aussi sur le site : Version PDF de la décision.
Toutes les décisions