Décision n° 2022-5845 AN du 31 mars 2023
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 18 octobre 2022 par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (décision du 12 octobre 2022), dans les conditions prévues au troisième alinéa de l’article L. 52-15 du code électoral. Cette saisine est relative à la situation de Mme Malia Nive KULIKOVI, candidate aux élections qui se sont déroulées les 12 et 19 juin 2022, dans la circonscription unique de Wallis-et-Futuna, en vue de la désignation d’un député à l’Assemblée nationale. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2022-5845 AN.
Au vu des textes suivants :
- la Constitution, notamment son article 59 ;
- l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
- le code électoral ;
- le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l’élection des députés et des sénateurs ;
Au vu des pièces suivantes :
- les observations présentées par Mme KULIKOVI, enregistrées le 14 novembre 2022 ;
- les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Et après avoir entendu le rapporteur ;
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S’EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT :
1. Il ressort de l’article L. 52-4 du code électoral qu’il appartient au mandataire financier désigné par le candidat de régler les dépenses engagées en vue de l’élection et antérieures à la date du tour de scrutin où elle a été acquise, à l’exception des dépenses prises en charge par un parti ou groupement politique. Les dépenses antérieures à sa désignation payées directement par le candidat ou à son profit font l’objet d’un remboursement par le mandataire et figurent dans son compte bancaire ou postal. Si le règlement direct de menues dépenses par le candidat peut être admis, ce n’est qu’à la double condition que leur montant, tel qu’apprécié à la lumière de ces dispositions, c’est-à-dire prenant en compte non seulement les dépenses intervenues après la désignation du mandataire financier mais aussi celles réglées avant cette désignation et qui n’auraient pas fait l’objet d’un remboursement par le mandataire, soit faible par rapport au total des dépenses du compte de campagne et négligeable au regard du plafond de dépenses autorisées par l’article L. 52-11 du même code.
2. Le compte de campagne de Mme Malia Nive KULIKOVI a été rejeté par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques dans sa décision du 12 octobre 2022. Après avoir relevé, d’une part, que le compte de campagne ne retraçait pas l’ensemble des recettes perçues et des dépenses engagées, l’intégralité de ces dernières ayant été réglées en espèces alors que le compte bancaire du mandataire ne comporte qu’une opération de dépôt et trois retraits d’espèces, la commission a constaté, d’autre part, que la candidate a payé directement 947 431 francs CFP de dépenses, soit 19,15 % du montant total des dépenses et 15,61 % du plafond des dépenses autorisées.
3. Si, pour des raisons pratiques, il peut être toléré que le candidat ou un tiers règle à son profit directement de menues dépenses postérieurement à la désignation de son mandataire, les circonstances dont se prévaut Mme KULIKOVI, qui fait valoir la situation particulière du secteur bancaire à Wallis-et-Futuna et les difficultés rencontrées par les consommateurs pour effectuer leurs opérations bancaires, ne permettent pas de justifier l’ampleur des irrégularités commises en l’espèce.
4. Par suite, c’est à bon droit que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a rejeté le compte de campagne de Mme KULIKOVI.
5. En vertu du troisième alinéa de l’article L.O. 136-1 du code électoral, le juge de l’élection, saisi par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, peut déclarer inéligible le candidat dont le compte de campagne a été rejeté à bon droit en cas de volonté de fraude ou de manquement d’une particulière gravité aux règles relatives au financement des campagnes électorales.
6. Dès lors, eu égard au cumul d’irrégularités et au caractère substantiel des obligations méconnues, il y a lieu de prononcer l’inéligibilité de Mme KULIKOVI à tout mandat pour une durée de trois ans à compter de la présente décision.
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE :
Article 1er. - Mme Malia Nive KULIKOVI est déclarée inéligible en application de l’article L.O. 136-1 du code électoral pour une durée de trois ans à compter de la présente décision.
Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l’article 18 du règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l’élection des députés et des sénateurs.Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 30 mars 2023, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Jacqueline GOURAULT, M. Alain JUPPÉ, Mmes Corinne LUQUIENS, Véronique MALBEC, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET, Michel PINAULT et François SÉNERS.
Rendu public le 31 mars 2023.
JORF n°0080 du 4 avril 2023, texte n° 76
ECLI : FR : CC : 2023 : 2022.5845.AN
Les abstracts
- 8. ÉLECTIONS
- 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
- 8.3.5. Financement
- 8.3.5.3. Présentation du compte
8.3.5.3.2. Totalité des opérations financières
Le compte de campagne a été rejeté par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques. Après avoir relevé, d’une part, que le compte de campagne ne retraçait pas l’ensemble des recettes perçues et des dépenses engagées, la commission a constaté, d’autre part, que la candidate a payé directement 947 431 francs CFP de dépenses, soit 19,15 % du montant total des dépenses et 15,61 % du plafond des dépenses autorisées. Rejet à bon droit et trois ans d'inéligibilité eu égard au cumul de manquements.
- 8. ÉLECTIONS
- 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
- 8.3.5. Financement
- 8.3.5.5. Dépenses produites au compte de campagne
8.3.5.5.4. Dépenses payées directement
Le compte de campagne a été rejeté par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques. Après avoir relevé, d’une part, que le compte de campagne ne retraçait pas l’ensemble des recettes perçues et des dépenses engagées, la commission a constaté, d’autre part, que la candidate a payé directement 947 431 francs CFP de dépenses, soit 19,15 % du montant total des dépenses et 15,61 % du plafond des dépenses autorisées. Rejet à bon droit et trois ans d'inéligibilité eu égard au cumul de manquements.