Décision n° 2022-5822 AN du 9 décembre 2022
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 30 juin 2022 d'une requête présentée par M. Laurent TRUPIN, inscrit sur les listes électorales de la 2ème circonscription du département des Hauts-de-Seine, tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé dans cette circonscription les 12 et 19 juin 2022 en vue de la désignation d'un député à l'Assemblée nationale. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2022-5822 AN.
Au vu des textes suivants :
- la Constitution, notamment son article 59 ;
- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
- le code électoral ;
- la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse ;
- le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ;
Au vu des pièces suivantes :
-
les mémoires en défense présentés pour Mme Francesca PASQUINI, députée, par Me Philippe Bluteau, avocat au barreau de Paris, enregistrés les 12 septembre et 2 novembre 2022 ;
-
les observations présentées pour Mme Marie-Dominique AESCHLIMANN, candidate, par Me Didier Seban, avocat au barreau de Paris, enregistrées les 18 septembre et 3 novembre 2022 ;
-
les observations présentées par Mme Baï-Audrey ACHIDI, candidate, enregistrées les 18 septembre, 14 octobre et 4 novembre 2022 ;
-
le mémoire en réplique présenté par M. TRUPIN, enregistré le 14 octobre 2022 ;
-
la décision de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques du 13 octobre 2022 approuvant le compte de campagne de Mme Francesca PASQUINI ;
-
les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Et après avoir entendu le rapporteur ;
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT :
- Sur le déroulement de la campagne électorale :
1. M. TRUPIN soutient en premier lieu que la diffusion de trois tracts, les 5, 15 et 17 juin 2022, au nom du « collectif Centristes et Macronistes », appelant à voter en faveur de Mme AESCHLIMANN, candidate sous l'étiquette « les Républicains », a été de nature à semer la confusion dans l'esprit des électeurs favorables à Mme ACHIDI, candidate officielle de la majorité présidentielle.
2. Toutefois, il résulte de l'instruction que, contrairement à ce qui est soutenu, ces tracts ne comportent aucune information diffamatoire et mettent en cause, dans des termes qui n'excèdent pas les limites de la polémique électorale, l'investiture de Mme ACHIDI par la majorité présidentielle ainsi que son ancrage dans la circonscription. Par ailleurs, cette dernière a eu la possibilité d'y répondre en temps utile, ainsi qu'elle l'a d'ailleurs fait notamment dans un communiqué de presse du 17 juin 2022, relayé sur les réseaux sociaux. Enfin, la constitution de ce collectif ainsi que son positionnement politique ont fait l'objet d'un large débat public, relayé par des tribunes du magazine d'informations municipales, la presse locale et les réseaux sociaux. Dans ces conditions, la diffusion de ces tracts n'est pas constitutive d'une manœuvre de nature à avoir altéré la sincérité du scrutin.
3. Le requérant soutient en deuxième lieu que Mme AESCHLIMANN a mis en avant, dans le cadre de la campagne électorale, ses fonctions d'adjointe au maire de la commune d'Asnières-sur-Seine pour promouvoir sa candidature. Toutefois, ni le fait qu'elle ait posé avec son écharpe tricolore sur une photographie destinée à des documents diffusés avant l'ouverture de la campagne électorale, ni la publication de trois « tweets » le samedi 18 juin 2022 en rapport avec l'exercice de son mandat, ni la diffusion de deux tracts par le maire d'Asnières-sur-Seine l'assurant de son soutien à titre personnel, ne révèlent l'existence de manœuvres de nature à fausser les résultats du scrutin.
4. Si M. TRUPIN reproche en troisième lieu à Mme AESCHLIMANN d'avoir cherché à décrédibiliser Mme ACHIDI dans ses communications électorales, les seuls documents produits, dont les termes n'excèdent pas les limites de la polémique électorale, ne permettent pas de tenir pour avérées ces allégations.
5. En quatrième lieu, il ne résulte pas de l'instruction que la participation de deux employés municipaux à la campagne de Mme AESCHLIMANN ait eu lieu pendant leurs heures de service.
6. En dernier lieu, si la mention du nom et du domicile de l'imprimeur, requise en vertu des dispositions combinées de l'article L. 48 du code électoral et de l'article 3 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, ne figurait pas sur les documents de campagne établis au nom de Mme AESCHLIMANN, cette omission, pour regrettable qu'elle soit, a été dépourvue d'incidence sur le résultat du scrutin.- Sur les opérations de vote :
7. M. TRUPIN fait valoir que dans le bureau de vote n° 17 d'Asnières-sur-Seine, lors du deuxième tour, une électrice a constaté, en se présentant pour voter, qu'une personne avait déjà voté pour elle grâce à une procuration qu'elle a contesté lui avoir accordée. Toutefois, cette irrégularité, qui ne porte que sur un seul suffrage, n'a pas été de nature à altérer la sincérité du scrutin eu égard à l'écart des voix séparant les deux candidates arrivées en tête au second tour.
8. Il résulte de ce qui précède que la requête de M. TRUPIN doit être rejetée.
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE :
Article 1er. - La requête de M. Laurent TRUPIN est rejetée.
Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 18 du règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs.
Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 8 décembre 2022, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Jacqueline GOURAULT, M. Alain JUPPÉ, Mmes Corinne LUQUIENS, Véronique MALBEC, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET, Michel PINAULT et François SÉNERS.
Rendu public le 9 décembre 2022.
JORF n°0288 du 13 décembre 2022, texte n° 106
ECLI : FR : CC : 2022 : 2022.5822.AN
Les abstracts
- 8. ÉLECTIONS
- 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
- 8.3.3. Campagne électorale - Moyens de propagande
- 8.3.3.3. Circulaires
8.3.3.3.2. Présentation des professions de foi
Si la mention du nom et du domicile de l'imprimeur, requise en vertu des dispositions combinées de l'article L. 48 du code électoral et de l'article 3 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, ne figurait pas sur les documents de campagne établis au nom de Mme AESCHLIMANN, cette omission, pour regrettable qu'elle soit, a été dépourvue d'incidence sur le résultat du scrutin.
- 8. ÉLECTIONS
- 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
- 8.3.3. Campagne électorale - Moyens de propagande
- 8.3.3.16. Tracts
- 8.3.3.16.5. Absence d'irrégularités
8.3.3.16.5.1. Contenu n'excédant pas les limites de la polémique électorale
M. TRUPIN soutient en premier lieu que la diffusion de trois tracts, les 5, 15 et 17 juin 2022, au nom du « collectif Centristes et Macronistes », appelant à voter en faveur de Mme AESCHLIMANN, candidate sous l'étiquette « les Républicains », a été de nature à semer la confusion dans l'esprit des électeurs favorables à Mme ACHIDI, candidate officielle de la majorité présidentielle. Toutefois, il résulte de l'instruction que, contrairement à ce qui est soutenu, ces tracts ne comportent aucune information diffamatoire et mettent en cause, dans des termes qui n'excèdent pas les limites de la polémique électorale, l'investiture de Mme ACHIDI par la majorité présidentielle ainsi que son ancrage dans la circonscription. Par ailleurs, cette dernière a eu la possibilité d'y répondre en temps utile, ainsi qu'elle l'a d'ailleurs fait notamment dans un communiqué de presse du 17 juin 2022, relayé sur les réseaux sociaux. Enfin, la constitution de ce collectif ainsi que son positionnement politique ont fait l'objet d'un large débat public, relayé par des tribunes du magazine d'informations municipales, la presse locale et les réseaux sociaux. Dans ces conditions, la diffusion de ces tracts n'est pas constitutive d'une manœuvre de nature à avoir altéré la sincérité du scrutin.
- 8. ÉLECTIONS
- 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
- 8.3.4. Campagne électorale - Pressions, interventions, manœuvres
- 8.3.4.1. Nature des pressions, interventions, manœuvres
8.3.4.1.5. Utilisation par un candidat de fonctions officielles
Le requérant soutient que Mme AESCHLIMANN a mis en avant, dans le cadre de la campagne électorale, ses fonctions d'adjointe au maire de la commune d'Asnières-sur-Seine pour promouvoir sa candidature. Toutefois, ni le fait qu'elle ait posé avec son écharpe tricolore sur une photographie destinée à des documents diffusés avant l'ouverture de la campagne électorale, ni la publication de trois « tweets » le samedi 18 juin 2022 en rapport avec l'exercice de son mandat, ni la diffusion de deux tracts par le maire d'Asnières-sur-Seine l'assurant de son soutien à titre personnel, ne révèlent l'existence de manœuvres de nature à fausser les résultats du scrutin.
- 8. ÉLECTIONS
- 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
- 8.3.4. Campagne électorale - Pressions, interventions, manœuvres
- 8.3.4.1. Nature des pressions, interventions, manœuvres
- 8.3.4.1.6. Utilisation de moyens de l'administration
8.3.4.1.6.3. Personnel
Il ne résulte pas de l'instruction que la participation de deux employés municipaux à la campagne de Mme AESCHLIMANN ait eu lieu pendant leurs heures de service. Grief écarté.
- 8. ÉLECTIONS
- 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
- 8.3.6. Opérations électorales
- 8.3.6.4. Déroulement du scrutin
8.3.6.4.13. Incidents divers
Le requérant fait valoir que dans le bureau de vote n° 17 d'Asnières-sur-Seine, lors du deuxième tour, une électrice a constaté, en se présentant pour voter, qu'une personne avait déjà voté pour elle grâce à une procuration qu'elle a contesté lui avoir accordée. Toutefois, cette irrégularité, qui ne porte que sur un seul suffrage, n'a pas été de nature à altérer la sincérité du scrutin eu égard à l'écart des voix séparant les deux candidates arrivées en tête au second tour.