Décision

Décision n° 2022-5789/5804 AN du 9 décembre 2022

A.N., Paris (15e circ.), M. Nicolas BINOIS et autre
Rejet

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 29 juin 2022 d'une requête présentée par M. Nicolas BINOIS, inscrit sur les listes électorales de la 15e circonscription de Paris, tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé dans cette circonscription les 12 et 19 juin 2022 en vue de la désignation d'un député à l'Assemblée nationale. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2022-5789 AN.
Il a également été saisi le même jour d'une requête tendant aux mêmes fins présentée par M. Rémi TAIEB, inscrit sur les listes électorales de la même circonscription, enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2022-5804 AN.

Au vu des textes suivants :

  • la Constitution, notamment son article 59 ;
  • l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
  • le code électoral ;
  • le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ;

Au vu des pièces suivantes :

  • les observations présentées pour M. Philippe ARAGON, candidat, par Me Raoul Delamare, avocat au barreau de Paris, enregistrées le 9 septembre 2022 ;
  • le mémoire en défense présenté pour Mme Danielle SIMONNET, députée, par Me Xavier Sauvignet, avocat au barreau de Paris, enregistré le 18 septembre 2022 ;
  • le mémoire en réplique présenté par M. TAIEB, enregistré le 14 octobre 2022 ;
  • le mémoire en réplique présenté par M. BINOIS, enregistré le même jour ;
  • la décision de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques du 13 octobre 2022, approuvant le compte de campagne de Mme SIMMONET ;
  • les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Et après avoir entendu le rapporteur ;

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT :

1. Les requêtes mentionnées ci-dessus sont dirigées contre la même élection. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par une seule décision.

2. À l'appui de leurs requêtes, les requérants soutiennent que M. ARAGON se serait prévalu de son appartenance à la majorité présidentielle dans ses documents de propagande et ses supports de campagne, alors que seul M. Mohamad GASSAMA avait reçu l'investiture de la nuance « Ensemble ! ». Ils estiment que cette manœuvre aurait été de nature à créer une confusion dans l'esprit des électeurs et que, eu égard à l'écart de voix séparant le candidat arrivé en deuxième position et M. GASSAMA arrivé en troisième position au premier tour, elle a altéré la sincérité du scrutin.

3. S'il appartient au juge de l'élection de vérifier si des manœuvres ont été susceptibles de tromper les électeurs sur la réalité de l'investiture des candidats par les partis politiques, il ne lui appartient pas de vérifier la régularité de cette investiture au regard des statuts et des règles de fonctionnement des partis politiques.

4. Il résulte de l'instruction que M. ARAGON a, sur ses affiches, dans sa profession de foi, sur son bulletin de vote et sur la page d'accueil de son site internet fait référence à « la majorité présidentielle ». Il a également fait figurer dans sa profession de foi des photographies le représentant en présence de soutiens du Président de la République avec pour légende « apprécié par la majorité présidentielle » et utilisé à plusieurs reprises le mot « ensemble ». Toutefois, il a associé à l'expression « majorité présidentielle » celles de « majorité citoyenne » ou de « majorité populaire ». Par ailleurs, il n'a pas apposé sur ses documents de propagande le logotype ou le nom du parti « La République en marche » ou de la nuance « Ensemble ! », ni aucune photographie du Président de la République et n'a pas fait état d'une investiture par la majorité présidentielle. En outre, celle-ci a diffusé, le 7 juin 2022, un communiqué de presse rappelant que M. GASSAMA était son seul candidat dans la 15ème circonscription de Paris et attirant l'attention des électeurs sur la confusion entretenue par certains candidats. Cette information, relayée par la presse nationale et sur le réseau social Twitter, ainsi que sur les panneaux officiels devant les bureaux de vote de la circonscription, a reçu une publicité suffisante avant la tenue du scrutin pour prévenir une confusion dans l'esprit des électeurs de nature à altérer la sincérité du scrutin.

5. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par Mme SIMONNET, que les requêtes de M. BINOIS et de M. TAIEB doivent être rejetées.

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE :

Article 1er. - Les requêtes de M. Nicolas BINOIS et de M. Rémi TAIEB sont rejetées.

Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 18 du règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs.

Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 8 décembre 2022, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Jacqueline GOURAULT, M. Alain JUPPÉ, Mmes Corinne LUQUIENS, Véronique MALBEC, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET, Michel PINAULT et François SÉNERS.

Rendu public le 9 décembre 2022.

JORF n°0288 du 13 décembre 2022, texte n° 104
ECLI : FR : CC : 2022 : 2022.5789.AN

Les abstracts

  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.4. Campagne électorale - Pressions, interventions, manœuvres
  • 8.3.4.2. Manœuvres ou interventions relatives à la situation politique des candidats
  • 8.3.4.2.1. Appartenance ou " étiquette " politique

À l'appui de leurs requêtes, les requérants soutiennent que M. ARAGON se serait prévalu de son appartenance à la majorité présidentielle dans ses documents de propagande et ses supports de campagne, alors que seul M. Mohamad GASSAMA avait reçu l'investiture de la nuance « Ensemble ! ». Ils estiment que cette manœuvre aurait été de nature à créer une confusion dans l'esprit des électeurs et que, eu égard à l'écart de voix séparant le candidat arrivé en deuxième position et M. GASSAMA arrivé en troisième position au premier tour, elle a altéré la sincérité du scrutin. S'il appartient au juge de l'élection de vérifier si des manœuvres ont été susceptibles de tromper les électeurs sur la réalité de l'investiture des candidats par les partis politiques, il ne lui appartient pas de vérifier la régularité de cette investiture au regard des statuts et des règles de fonctionnement des partis politiques.
Il résulte de l'instruction que M. ARAGON a, sur ses affiches, dans sa profession de foi, sur son bulletin de vote et sur la page d'accueil de son site internet fait référence à « la majorité présidentielle ». Il a également fait figurer dans sa profession de foi des photographies le représentant en présence de soutiens du Président de la République avec pour légende « apprécié par la majorité présidentielle » et utilisé à plusieurs reprises le mot « ensemble ». Toutefois, il a associé à l'expression « majorité présidentielle » celles de « majorité citoyenne » ou de « majorité populaire ». Par ailleurs, il n'a pas apposé sur ses documents de propagande le logotype ou le nom du parti « La République en marche » ou de la nuance « Ensemble ! », ni aucune photographie du Président de la République et n'a pas fait état d'une investiture par la majorité présidentielle. En outre, celle–ci a diffusé, le 7 juin 2022, un communiqué de presse rappelant que M. GASSAMA était son seul candidat dans la 15ème circonscription de Paris et attirant l'attention des électeurs sur la confusion entretenue par certains candidats. Cette information, relayée par la presse nationale et sur le réseau social Twitter, ainsi que sur les panneaux officiels devant les bureaux de vote de la circonscription, a reçu une publicité suffisante avant la tenue du scrutin pour prévenir une confusion dans l'esprit des électeurs de nature à altérer la sincérité du scrutin. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par Mme SIMONNET, que les requêtes de M. BINOIS et de M. TAIEB doivent être rejetées.

(2022-5789/5804 AN, 09 décembre 2022, cons. 2, 3, 4, 5, JORF n°0288 du 13 décembre 2022, texte n° 104)
À voir aussi sur le site : Version PDF de la décision.
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