Décision n° 2018-5590 AN du 1er juin 2018
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 14 février 2018 par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (décision du 8 février 2018), dans les conditions prévues au troisième alinéa de l'article L. 52-15 du code électoral. Cette saisine est relative à la situation de Mme Yamina MAMOU, candidate aux élections qui se sont déroulées les 11 et 18 juin 2017, dans la 1ère circonscription de l'Aude, en vue de la désignation d'un député à l'Assemblée nationale. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2018-5590 AN.
Au vu des textes suivants :
- la Constitution, notamment son article 59 ;
- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
- le code électoral, notamment ses articles L.O. 136-1, L. 52-4, L. 52-5 et L. 52-12 ;
- le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ;
Au vu des pièces suivantes :
- les observations présentées par Mme MAMOU, enregistrées le 8 mars 2018 ;
- les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Et après avoir entendu le rapporteur ;
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT :
1. Il résulte de l'article L. 52-12 du code électoral que chaque candidat aux élections législatives soumis au plafonnement prévu à l'article L. 52-11 du même code et qui a obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés doit établir un compte de campagne retraçant, selon leur origine, l'ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l'ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l'élection. La même obligation incombe au candidat qui a bénéficié de dons de personnes physiques conformément à l'article L. 52-8. Le compte de campagne doit être en équilibre ou excédentaire et ne peut présenter un déficit. Il ressort également de l'article L. 52-12 que, sauf lorsqu'aucune dépense ou recette ne figure au compte de campagne, celui-ci est présenté par un membre de l'ordre des experts-comptables et des comptables agréés qui met ce compte en état d'examen et s'assure de la présence des pièces justificatives requises.
2. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 52-4 du code électoral : « Tout candidat à une élection déclare un mandataire conformément aux articles L. 52-5 et L. 52-6 au plus tard à la date à laquelle sa candidature est enregistrée. Ce mandataire peut être une association de financement électoral, ou une personne physique dénommée »le mandataire financier". Un même mandataire ne peut être commun à plusieurs candidats ». Il résulte des dispositions de l'article L. 52-5 du code électoral que le candidat ne peut pas être membre de son association de financement électoral et que l'association doit avoir une durée limitée.
3. Le compte de campagne de Mme MAMOU a été rejeté par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques dans sa décision du 8 février 2018 au motif que la candidate est membre de son association de financement électoral, en contradiction avec les dispositions combinées des articles L. 52-4 et L. 52-5 du code électoral, et que, par ailleurs, cette association de financement électoral ne présente pas l'ensemble des caractéristiques d'une association de financement électoral notamment relativement à son objet et à sa durée.
4. Ces circonstances sont établies. Par suite, c'est à bon droit que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a rejeté le compte de campagne de Mme MAMOU.
5. En vertu du troisième alinéa du même article L.O. 136-1, le juge de l'élection, saisi par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, déclare inéligible le candidat dont le compte de campagne a été rejeté à bon droit en cas de volonté de fraude ou de manquement d'une particulière gravité aux règles relatives au financement des campagnes électorales.
6. Eu égard au caractère substantiel de l'obligation méconnue, dont Mme MAMOU ne pouvait ignorer la portée, il y a lieu de prononcer l'inéligibilité de Mme MAMOU à tout mandat pour une durée d'un an à compter de la présente décision.
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE :
Article 1er. - Mme Yamina MAMOU est déclarée inéligible en application des dispositions de l'article L.O. 136-1 du code électoral pour une durée d'un an à compter de la présente décision.
Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 18 du règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs.
Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 31 mai 2018, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, MM. Michel CHARASSE, Jean-Jacques HYEST, Lionel JOSPIN, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, Nicole MAESTRACCI et M. Michel PINAULT.
Rendu public le 1er juin 2018.
JORF n°0126 du 3 juin 2018 texte n° 54
ECLI : FR : CC : 2018 : 2018.5590.AN
Les abstracts
- 8. ÉLECTIONS
- 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
- 8.3.5. Financement
- 8.3.5.1. Mandataire financier
8.3.5.1.1. Association de financement
Rejet à bon droit du compte de campagne au motif que le candidate est membre de son association de financement électoral, en contradiction avec les dispositions combinées des articles L. 52-4 et L. 52-5 du code électoral, et que, par ailleurs, cette association de financement électoral ne présente pas l'ensemble des caractéristiques d'une association de financement électoral notamment relativement à son objet et à sa durée. Eu égard au caractère substantiel de l'obligation méconnue, dont le candidat ne pouvait ignorer la portée, il y a lieu de prononcer son inéligibilité pour un an.