Décision

Décision n° 2018-5542 SEN du 26 octobre 2018

SEN, Orne
Inéligibilité

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 31 janvier 2018 par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (décision du 25 janvier 2018), dans les conditions prévues au troisième alinéa de l'article L. 52-15 du code électoral. Cette saisine est relative à la situation M. Eugène-Loïc ERMESSENT, candidat à l'élection qui s'est déroulée le 24 septembre 2017, dans le département de l'Orne, en vue de la désignation de deux sénateurs. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2018-5542 SEN.

Au vu des textes suivants :

  • la Constitution, notamment son article 59 ;
  • l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
  • le code électoral, notamment ses articles L.O. 136-1 et L. 52-12 et L. 308-1 ;
  • le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ;

Au vu des pièces suivantes :

  • les observations présentées par M. ERMESSENT, enregistrées le 22 février 2018 ;
  • les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Et après avoir entendu le rapporteur ;

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT :

1. Il résulte de l'article L. 52-12 du code électoral, rendu applicable aux candidats aux élections sénatoriales par l'article L. 308-1, que chaque candidat aux élections sénatoriales soumis au plafonnement prévu à l'article L. 52-11 du même code et qui a obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés doit établir un compte de campagne retraçant, selon leur origine, l'ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l'ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l'élection. Ce compte doit être déposé à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques au plus tard avant 18 heures le dixième vendredi suivant le premier tour de scrutin. La même obligation incombe au candidat qui a bénéficié de dons de personnes physiques conformément à l'article L. 52-8. Le compte de campagne doit être en équilibre ou excédentaire et ne peut présenter un déficit. Il ressort également de l'article L. 52-12 que, sauf lorsqu'aucune dépense ou recette ne figure au compte de campagne, celui-ci est présenté par un membre de l'ordre des experts-comptables et des comptables agréés qui met ce compte en état d'examen et s'assure de la présence des pièces justificatives requises. Lorsqu'aucune dépense ou recette ne figure au compte de campagne, le mandataire établit une attestation d'absence de dépense et de recette.

2. Le compte de campagne de M. ERMESSENT, candidat tête de liste ayant obtenu plus de 1 % des suffrages exprimés, a été rejeté par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, dans sa décision du 25 janvier 2018, au double motif qu'il n'a pas été présenté par un membre de l'ordre des experts-comptables et des comptables agréés, et que les 3 082 euros de dépenses ont été réglées directement par le candidat.

3. Ces circonstances sont établies. Par suite, c'est à bon droit que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a rejeté le compte de campagne de M. ERMESSENT.

4. En vertu du deuxième alinéa de l'article L.O. 136-1 du code électoral, le juge de l'élection, saisi par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, peut déclarer inéligible le candidat qui n'a pas déposé son compte de campagne dans les conditions et le délai prescrits à l'article L. 52-12. Pour apprécier s'il y a lieu, pour lui, de faire usage de la faculté de déclarer un candidat inéligible, il appartient au juge de l'élection de tenir compte de la nature de la règle méconnue, du caractère délibéré ou non du manquement, de l'existence éventuelle d'autres motifs d'irrégularité du compte et du montant des sommes en cause. Par ailleurs, en vertu du troisième alinéa du même article L.O. 136-1, le juge de l'élection, saisi par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, déclare inéligible le candidat dont le compte de campagne a été rejeté à bon droit en cas de volonté de fraude ou de manquement d'une particulière gravité aux règles relatives au financement des campagnes électorales.

5. Il ne résulte pas de l'instruction que M. ERMESSENT ait pris les dispositions nécessaires pour que son compte soit présenté dans les conditions prévues par l'article L. 52-12 du code électoral.

6. En revanche, s'agissant du règlement direct des dépenses, M. ERMESSENT fait valoir qu'il est imputable au retard mis par la banque à mettre à disposition du mandataire un moyen de paiement attaché au compte de campagne. Il résulte en effet de l'instruction, notamment d'une attestation de l'établissement bancaire, que le chéquier afférent au compte de campagne ouvert le 7 septembre 2018 n'a été mis à la disposition du mandataire que le 27 septembre suivant, c'est-à-dire après le déroulement du scrutin.

7. Par suite, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de prononcer l'inéligibilité de M. ERMESSENT à tout mandat pour une durée d'un an à compter de la présente décision.

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE :

Article 1er. - M. Eugène-Loïc ERMESSENT est déclaré inéligible en application de l'article L.O. 136-1 du code électoral pour une durée d'un an à compter de la présente décision.

Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 18 du règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs.

Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 25 octobre 2018, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, MM. Jean-Jacques HYEST, Lionel JOSPIN, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, Nicole MAESTRACCI et M. Michel PINAULT.

Rendu public le 26 octobre 2018.

JORF n°0251 du 30 octobre 2018, texte n° 72
ECLI : FR : CC : 2018 : 2018.5542.SEN

Les abstracts

  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.4. ÉLECTIONS SÉNATORIALES
  • 8.4.14. Financement
  • 8.4.14.2. Etablissement d'un compte de campagne
  • 8.4.14.2.4. Conditions du dépôt
  • 8.4.14.2.4.1. Certification du compte de campagne par un membre de l'ordre des experts-comptables et comptables agréés

Rejet à bon droit du compte de campagne au double motif qu'il n'a pas été présenté par un membre de l'ordre des experts-comptables et des comptables agréés et que les 3 082 euros de dépenses ont été réglées directement par le candidat. S'il ne résulte pas de l'instruction que le candidat ait pris les dispositions nécessaires pour que son compte soit présenté par un expert-comptable, le candidat fait valoir que le règlement direct des dépenses est imputable au retard mis par la banque à mettre à disposition du mandataire un moyen de paiement attaché au compte. Il résulte en effet de l'instruction, notamment d'une attestation de l'établissement bancaire, que le chéquier afférent au compte ouvert le 7 septembre 2018 n'a été mis à la disposition du mandataire que le 27 septembre suivant, c'est-à-dire après le déroulement du scrutin. Par suite, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de prononcer l'inéligibilité du candidat à tout mandat pour une durée d'un an à compter de la décision.

(2018-5542 SEN, 26 octobre 2018, cons. 2, 3, 5, 6, 7, JORF n°0251 du 30 octobre 2018, texte n° 72)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.4. ÉLECTIONS SÉNATORIALES
  • 8.4.14. Financement
  • 8.4.14.5. Dépenses produites au compte de campagne
  • 8.4.14.5.4. Dépenses payées directement
  • 8.4.14.5.4.2. Dépenses postérieures à la désignation du mandataire financier

Rejet à bon droit du compte de campagne au double motif qu'il n'a pas été présenté par un membre de l'ordre des experts-comptables et des comptables agréés et que les 3 082 euros de dépenses ont été réglées directement par le candidat. S'il ne résulte pas de l'instruction que le candidat ait pris les dispositions nécessaires pour que son compte soit présenté par un expert-comptable, le candidat fait valoir que le règlement direct des dépenses est imputable au retard mis par la banque à mettre à disposition du mandataire un moyen de paiement attaché au compte. Il résulte en effet de l'instruction, notamment d'une attestation de l'établissement bancaire, que le chéquier afférent au compte ouvert le 7 septembre 2018 n'a été mis à la disposition du mandataire que le 27 septembre suivant, c'est-à-dire après le déroulement du scrutin. Par suite, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de prononcer l'inéligibilité du candidat à tout mandat pour une durée d'un an à compter de la décision.

(2018-5542 SEN, 26 octobre 2018, cons. 2, 3, 5, 6, 7, JORF n°0251 du 30 octobre 2018, texte n° 72)
À voir aussi sur le site : Version PDF de la décision.
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