Décision

Décision n° 2018-5533 AN du 8 juin 2018

A.N., Hérault 3ème circ.
Non lieu à prononcer l'inéligibilité

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 5 février 2018 par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (décision du 1er février 2018), dans les conditions prévues au troisième alinéa de l'article L. 52-15 du code électoral. Cette saisine est relative à la situation de Mme Fanny DOMBRE COSTE, candidate aux élections qui se sont déroulées les 11 et 18 juin 2017, dans la 3ème circonscription du département de l'Hérault, en vue de la désignation d'un député à l'Assemblée nationale. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2018-5533 AN.

Au vu des textes suivants :

  • la Constitution, notamment son article 59 ;
  • l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
  • le code électoral, notamment ses articles L.O. 136-1 et L. 52-12 ;
  • le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ;

Au vu des pièces suivantes :

  • les observations présentées pour Mme DOMBRE COSTE par la SCP Luc Moreau, avocat au barreau de Montpellier, enregistrées le 26 février 2018 ;
  • les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Et après avoir entendu le rapporteur ;

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT :

1. Il résulte de l'article L. 52-12 du code électoral que chaque candidat aux élections législatives soumis au plafonnement prévu à l'article L. 52-11 du même code et qui a obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés doit établir un compte de campagne retraçant, selon leur origine, l'ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l'ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l'élection. La même obligation incombe au candidat qui a bénéficié de dons de personnes physiques conformément à l'article L. 52-8. Le compte de campagne doit être en équilibre ou excédentaire et ne peut présenter un déficit. Il ressort également de l'article L. 52-12 que, sauf lorsqu'aucune dépense ou recette ne figure au compte de campagne, celui-ci est présenté par un membre de l'ordre des experts-comptables et des comptables agréés qui met ce compte en état d'examen et s'assure de la présence des pièces justificatives requises.

2. Aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 52-1 du code électoral : « À compter du premier jour du sixième mois précédant le mois au cours duquel il doit être procédé à des élections générales, aucune campagne de promotion publicitaire des réalisations ou de la gestion d'une collectivité ne peut être organisée sur le territoire des collectivités intéressées par le scrutin. Sans préjudice des dispositions du présent chapitre, cette interdiction ne s'applique pas à la présentation, par un candidat ou pour son compte, dans le cadre de l'organisation de sa campagne, du bilan de la gestion des mandats qu'il détient ou qu'il a détenus. Les dépenses afférentes sont soumises aux dispositions relatives au financement et au plafonnement des dépenses électorales contenues au chapitre V bis du présent titre ».

3. Le compte de campagne de Mme DOMBRE COSTE a été rejeté par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques dans sa décision du 1er février 2018 au motif que le numéro 4 du « Compte-rendu de mandat de votre députée » du mois de février 2017 constituait un bilan de mandat, représentant le caractère de propagande électorale, dont le coût aurait dû être intégré à son compte de campagne.

4. Il résulte de l'instruction que, eu égard à son contenu, qui est identique aux trois autres compte-rendus publiés depuis le mois de juin 2013, qui retrace factuellement l'action de la députée en mentionnant les travaux et manifestations auxquels elle a participé, sans évoquer de thèmes de campagne, ni le scrutin de juin 2017 ni a fortiori sa candidature, ce quatrième compte-rendu de mandat ne peut être regardé, dans les circonstances de l'espèce, comme constituant un document de propagande électorale au profit de Mme DOMBRE COSTE. La candidate a donc pu ne pas intégrer à son compte de campagne les dépenses d'impression et d'acheminement afférentes. Par suite, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques ne pouvait rejeter son compte de campagne pour ce motif.

5. Dans ces conditions, il n'y a pas lieu pour le Conseil constitutionnel de faire application des deuxième et troisième alinéas de l'article L.O. 136-1 du code électoral.

6. Aux termes du dernier alinéa de l'article L.O. 136-1 du code électoral : « Sans préjudice de l'article L. 52-15, lorsqu'il constate que la commission instituée par l'article L. 52-14 n'a pas statué à bon droit, le Conseil constitutionnel fixe dans sa décision le montant du remboursement forfaitaire prévu à l'article L. 52-11-1 ».

7. Selon l'article L. 52-11-1 du code électoral : « Les dépenses électorales des candidats aux élections auxquelles l'article L. 52-4 est applicable font l'objet d'un remboursement forfaitaire de la part de l'État égal à 47,5 % de leur plafond de dépenses. Ce remboursement ne peut excéder le montant des dépenses réglées sur l'apport personnel des candidats et retracées dans leur compte de campagne. - Le remboursement forfaitaire n'est pas versé aux candidats qui ont obtenu moins de 5 % des suffrages exprimés au premier tour de scrutin, qui ne se sont pas conformés aux prescriptions de l'article L. 52-11, qui n'ont pas déposé leur compte de campagne dans le délai prévu au deuxième alinéa de l'article L. 52-12 ou dont le compte de campagne est rejeté pour d'autres motifs ou qui n'ont pas déposé leur déclaration de situation patrimoniale, s'ils sont astreints à cette obligation. - Dans les cas où les irrégularités commises ne conduisent pas au rejet du compte, la décision concernant ce dernier peut réduire le montant du remboursement forfaitaire en fonction du nombre et de la gravité de ces irrégularités ».

8. Le compte de campagne de Mme DOMBRE COSTE fait apparaître un montant de dépenses déclarées de 35 607 euros et un montant de recettes déclarées de 36 089 euros dont 27 295 euros d'apport personnel. Toutefois, il résulte de l'instruction qu'il convient de déduire de ces montants les sommes de vingt-et-un euros et quarante euros, correspondant respectivement à des frais de transport et à des frais de prise de photos qui ne présentent pas le caractère de dépenses électorales. Par suite, il y a lieu de fixer à 27 234 euros le montant du remboursement forfaitaire prévu par l'article L. 52-11-1 du code électoral.

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE :

Article 1er. - Il n'y a pas lieu de prononcer l'inéligibilité de Mme Fanny DOMBRE COSTE.
Article 2. - Le montant du remboursement forfaitaire prévu à l'article L. 52-11-1 du code électoral, pour le compte de campagne de Mme Fanny DOMBRE COSTE en vue de l'élection d'un député dans la troisième circonscription de l'Hérault, est fixé à 27 234 euros.
Article 3. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 18 du règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs.

Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 7 juin 2018, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, MM. Michel CHARASSE, Jean-Jacques HYEST, Lionel JOSPIN, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, Nicole MAESTRACCI et M. Michel PINAULT.

Rendu public le 8 juin 2018.

JORF n°0133 du 12 juin 2018, texte n° 50
ECLI : FR : CC : 2018 : 2018.5533.AN

Les abstracts

  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.5. Financement
  • 8.3.5.5. Dépenses produites au compte de campagne
  • 8.3.5.5.3. Dépenses n'ayant pas à figurer dans le compte
  • 8.3.5.5.3.2. Absence de campagne de promotion publicitaire

C'est à tort que le compte de campagne de la candidate a été rejeté par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques au motif que le numéro 4 du « Compte-rendu de mandat de votre députée » du mois de février 2017 constituait un bilan de mandat, représentant le caractère de propagande électorale, dont le coût aurait dû être intégré à son compte de campagne. En effet, il résulte de l'instruction que, eu égard à son contenu, qui est identique aux trois autres comptes-rendus publiés depuis le mois de juin 2013, qui retrace factuellement l'action de la députée en mentionnant les travaux et manifestations auxquels elle a participé, sans évoquer de thèmes de campagne, ni le scrutin de juin 2017 ni a fortiori sa candidature, ce quatrième compte-rendu de mandat ne peut être regardé, dans les circonstances de l'espèce, comme constituant un document de propagande électorale au profit de la candidate. Celle-ci a donc pu ne pas intégrer à son compte de campagne les dépenses d'impression et d'acheminement afférentes. Dans ces conditions, il n'y a pas lieu pour le Conseil constitutionnel de faire application des deuxième et troisième alinéas de l'article L.O. 136-1 du code électoral.

(2018-5533 AN, 08 juin 2018, cons. 3, 4, 5, JORF n°0133 du 12 juin 2018, texte n° 50 )
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.5. Financement
  • 8.3.5.10. Absence d'inéligibilité du candidat

C'est à tort que le compte de campagne a été rejeté par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques. Dans ces conditions, il appartient au Conseil constitutionnel de fixer le montant du remboursement forfaitaire des frais de campagne auquel a droit le candidat en application de l'article L. 52-11-1 du code électoral.

(2018-5533 AN, 08 juin 2018, cons. 3, 4, 5, 7, 8, JORF n°0133 du 12 juin 2018, texte n° 50 )
À voir aussi sur le site : Version PDF de la décision.
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