Décision

Décision n° 2017-695 QPC du 29 mars 2018

M. Rouchdi B. et autre [Mesures administratives de lutte contre le terrorisme]
Non conformité partielle - effet différé - réserve - non lieu à statuer

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 29 décembre 2017 par le Conseil d'État (décision n° 415434, 415697 du 28 décembre 2017), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité. Cette question a été posée pour M. Rouchdi B. par Me Bruno Vinay, avocat au barreau de Paris, et pour la Ligue des droits de l'Homme par la SCP Spinosi et Sureau, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2017-695 QPC. Elle est relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit :
- de l'article L. 226-1 du code de la sécurité intérieure, dans sa rédaction issue de la loi n° 2017-1510 du 30 octobre 2017 renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme, des mots « ou à celle des périmètres de protection institués en application de l'article L. 226-1 » figurant au sixième alinéa de l'article L. 511-1 du même code, dans sa rédaction résultant de la même loi, des mots « y compris dans les périmètres de protection institués en application de l'article L. 226-1 » figurant au premier alinéa de l'article L. 613-1 du même code, dans la même rédaction, et des mots « ou lorsqu'un périmètre de protection a été institué en application de l'article L. 226-1 » figurant à la première phrase du second alinéa de l'article L. 613-2 du même code, dans la même rédaction ;
- de l'article L. 227-1 du même code, dans sa rédaction issue de la même loi ;
- des articles L. 228-1, L. 228-2, L. 228-3, L. 228-4, L. 228-5 et L. 228-6 du même code, dans la même rédaction ;
- des articles L. 229-1, L. 229-2, L. 229-4 et L. 229-5 du même code, dans la même rédaction.

Au vu des textes suivants :

  • la Constitution ;
  • l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
  • le code de justice administrative ;
  • le code de la sécurité intérieure ;
  • la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 relative à l'état d'urgence ;
  • la loi n° 2017-1510 du 30 octobre 2017 renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme ;
  • la décision du Conseil constitutionnel n° 2017-691 QPC du 16 février 2018 ;
  • le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ;

Au vu des pièces suivantes :

  • les observations présentées pour l'association requérante par la SCP Spinosi et Sureau, enregistrées les 25 janvier et 9 février 2018 ;
  • les observations présentées par le Premier ministre, enregistrées le 25 janvier 2018 ;
  • les observations en intervention présentées pour M. Mohamed M. par Me Raphaël Kempf, avocat au barreau de Paris, enregistrées le 25 janvier 2018 ;
  • la lettre du 15 mars 2018 par laquelle le Conseil constitutionnel a soumis aux parties des griefs susceptibles d'être relevés d'office ;
  • les observations en réponse présentées par le Premier ministre, enregistrées le 19 mars 2018 ;
  • les pièces produites et jointes au dossier ;

Après avoir entendu Me François Pinatel et Me Patrice Spinosi, avocats au Conseil d'État et à la Cour de cassation, le premier pour le requérant, le second pour l'association requérante, Me Kempf, pour la partie intervenante, et M. Philippe Blanc, désigné par le Premier ministre, à l'audience publique du 20 mars 2018 ;

Au vu de la note en délibéré présentée par le Premier ministre, enregistrée le 27 mars 2018 ;

Et après avoir entendu les rapporteurs ;

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT :

1. L'article L. 226-1 du code de la sécurité intérieure, dans sa rédaction issue de la loi du 30 octobre 2017 mentionnée ci-dessus, prévoit :
« Afin d'assurer la sécurité d'un lieu ou d'un événement exposé à un risque d'actes de terrorisme à raison de sa nature et de l'ampleur de sa fréquentation, le représentant de l'État dans le département ou, à Paris, le préfet de police peut instituer par arrêté motivé un périmètre de protection au sein duquel l'accès et la circulation des personnes sont réglementés.
« L'arrêté est transmis sans délai au procureur de la République et communiqué au maire de la commune concernée.
« L'arrêté définit ce périmètre, limité aux lieux exposés à la menace et à leurs abords, ainsi que ses points d'accès. Son étendue et sa durée sont adaptées et proportionnées aux nécessités que font apparaître les circonstances. L'arrêté prévoit les règles d'accès et de circulation des personnes dans le périmètre, en les adaptant aux impératifs de leur vie privée, professionnelle et familiale, ainsi que les vérifications, parmi celles mentionnées aux quatrième et sixième alinéas et à l'exclusion de toute autre, auxquelles elles peuvent être soumises pour y accéder ou y circuler, et les catégories d'agents habilités à procéder à ces vérifications.
« L'arrêté peut autoriser les agents mentionnés aux 2 ° à 4 ° de l'article 16 du code de procédure pénale et, sous la responsabilité de ces agents, ceux mentionnés à l'article 20 et aux 1 °, 1 ° bis et 1 ° ter de l'article 21 du même code à procéder, au sein du périmètre de protection, avec le consentement des personnes faisant l'objet de ces vérifications, à des palpations de sécurité ainsi qu'à l'inspection visuelle et à la fouille des bagages. La palpation de sécurité est effectuée par une personne de même sexe que la personne qui en fait l'objet. Pour la mise en œuvre de ces opérations, ces agents peuvent être assistés par des agents exerçant l'activité mentionnée au 1 ° de l'article L. 611-1 du présent code, placés sous l'autorité d'un officier de police judiciaire.
« Après accord du maire, l'arrêté peut autoriser les agents de police municipale mentionnés à l'article L. 511-1 à participer à ces opérations sous l'autorité d'un officier de police judiciaire.
« Lorsque, compte tenu de la configuration des lieux, des véhicules sont susceptibles de pénétrer au sein de ce périmètre, l'arrêté peut également en subordonner l'accès à la visite du véhicule, avec le consentement de son conducteur. Ces opérations ne peuvent être accomplies que par les agents mentionnés aux 2 ° à 4 ° de l'article 16 du code de procédure pénale et, sous la responsabilité de ces agents, par ceux mentionnés à l'article 20 et aux 1 °, 1 ° bis et 1 ° ter de l'article 21 du même code.
« Les personnes qui refusent de se soumettre, pour accéder ou circuler à l'intérieur de ce périmètre, aux palpations de sécurité, à l'inspection visuelle ou à la fouille de leurs bagages ou à la visite de leur véhicule s'en voient interdire l'accès ou sont reconduites d'office à l'extérieur du périmètre par les agents mentionnés au sixième alinéa du présent article.
« La durée de validité d'un arrêté préfectoral instaurant un périmètre de protection en application du présent article ne peut excéder un mois. Le représentant de l'État dans le département ou, à Paris, le préfet de police ne peut renouveler l'arrêté au-delà de ce délai que si les conditions prévues au premier alinéa continuent d'être réunies ».

2. Le sixième alinéa de l'article L. 511-1 du code de la sécurité intérieure, dans sa rédaction résultant de la loi du 30 octobre 2017, prévoit notamment que les agents de police municipale peuvent être affectés sur décision du maire à la sécurité de certaines manifestations « ou à celle des périmètres de protection institués en application de l'article L. 226-1 ».

3. Le premier alinéa de l'article L. 613-1 du code de la sécurité intérieure, dans la même rédaction, prévoit notamment que les agents exerçant une activité privée de sécurité ne peuvent exercer leurs fonctions qu'à l'intérieur des bâtiments ou dans la limite des lieux dont ils ont la garde, « y compris dans les périmètres de protection institués en application de l'article L. 226-1 ».

4. La première phrase du second alinéa de l'article L. 613-2 du code de la sécurité intérieure, dans la même rédaction, prévoit les conditions dans lesquelles les agents exerçant une activité privée de sécurité peuvent procéder, avec le consentement exprès des personnes, à des palpations de sécurité, en cas de circonstances particulières liées à l'existence de menaces graves pour la sécurité publique « ou lorsqu'un périmètre de protection a été institué en application de l'article L. 226-1 ».

5. L'article L. 227-1 du code de la sécurité intérieure, dans sa rédaction issue de la loi du 30 octobre 2017, prévoit :
« Aux seules fins de prévenir la commission d'actes de terrorisme, le représentant de l'État dans le département ou, à Paris, le préfet de police peut prononcer la fermeture des lieux de culte dans lesquels les propos qui sont tenus, les idées ou théories qui sont diffusées ou les activités qui se déroulent provoquent à la violence, à la haine ou à la discrimination, provoquent à la commission d'actes de terrorisme ou font l'apologie de tels actes.
« Cette fermeture, dont la durée doit être proportionnée aux circonstances qui l'ont motivée et qui ne peut excéder six mois, est prononcée par arrêté motivé et précédée d'une procédure contradictoire dans les conditions prévues au chapitre II du titre II du livre Ier du code des relations entre le public et l'administration.
« L'arrêté de fermeture est assorti d'un délai d'exécution qui ne peut être inférieur à quarante-huit heures, à l'expiration duquel la mesure peut faire l'objet d'une exécution d'office. Toutefois, si une personne y ayant un intérêt a saisi le tribunal administratif, dans ce délai, d'une demande présentée sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, la mesure ne peut être exécutée d'office avant que le juge des référés ait informé les parties de la tenue ou non d'une audience publique en application du deuxième alinéa de l'article L. 522-1 du même code ou, si les parties ont été informées d'une telle audience, avant que le juge ait statué sur la demande ».

6. L'article L. 228-1 du code de la sécurité intérieure, dans la même rédaction, prévoit :
« Aux seules fins de prévenir la commission d'actes de terrorisme, toute personne à l'égard de laquelle il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace d'une particulière gravité pour la sécurité et l'ordre publics et qui soit entre en relation de manière habituelle avec des personnes ou des organisations incitant, facilitant ou participant à des actes de terrorisme, soit soutient, diffuse, lorsque cette diffusion s'accompagne d'une manifestation d'adhésion à l'idéologie exprimée, ou adhère à des thèses incitant à la commission d'actes de terrorisme ou faisant l'apologie de tels actes peut se voir prescrire par le ministre de l'intérieur les obligations prévues au présent chapitre ».

7. L'article L. 228-2 du code de la sécurité intérieure, dans la même rédaction, prévoit :
« Le ministre de l'intérieur peut, après en avoir informé le procureur de la République de Paris et le procureur de la République territorialement compétent, faire obligation à la personne mentionnée à l'article L. 228-1 de :
« 1 ° Ne pas se déplacer à l'extérieur d'un périmètre géographique déterminé, qui ne peut être inférieur au territoire de la commune. La délimitation de ce périmètre permet à l'intéressé de poursuivre une vie familiale et professionnelle et s'étend, le cas échéant, aux territoires d'autres communes ou d'autres départements que ceux de son lieu habituel de résidence ;
« 2 ° Se présenter périodiquement aux services de police ou aux unités de gendarmerie, dans la limite d'une fois par jour, en précisant si cette obligation s'applique les dimanches et jours fériés ou chômés ;
« 3 ° Déclarer son lieu d'habitation et tout changement de lieu d'habitation.
« Les obligations prévues aux 1 ° à 3 ° du présent article sont prononcées pour une durée maximale de trois mois à compter de la notification de la décision du ministre. Elles peuvent être renouvelées par décision motivée, pour une durée maximale de trois mois, lorsque les conditions prévues à l'article L. 228-1 continuent d'être réunies. Au-delà d'une durée cumulée de six mois, chaque renouvellement est subordonné à l'existence d'éléments nouveaux ou complémentaires. La durée totale cumulée des obligations prévues aux 1 ° à 3 ° du présent article ne peut excéder douze mois. Les mesures sont levées dès que les conditions prévues à l'article L. 228-1 ne sont plus satisfaites.
« Toute décision de renouvellement des obligations prévues aux 1 ° à 3 ° du présent article est notifiée à la personne concernée au plus tard cinq jours avant son entrée en vigueur. Si la personne concernée saisit le juge administratif d'une demande présentée sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative dans un délai de quarante-huit heures à compter de la notification de la décision, la mesure ne peut entrer en vigueur avant que le juge ait statué sur la demande.
« La personne soumise aux obligations prévues aux 1 ° à 3 ° du présent article peut, dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision ou à compter de la notification de chaque renouvellement, demander au tribunal administratif l'annulation de cette décision. Le tribunal administratif statue dans un délai de deux mois à compter de sa saisine. Ces recours s'exercent sans préjudice des procédures prévues aux articles L. 521-1 et L. 521-2 du code de justice administrative ».

8. L'article L. 228-3 du code de la sécurité intérieure, dans la même rédaction, prévoit :
« À la place de l'obligation prévue au 2 ° de l'article L. 228-2, le ministre de l'intérieur peut proposer à la personne faisant l'objet de la mesure prévue au 1 ° du même article L. 228-2 de la placer sous surveillance électronique mobile, après en avoir informé le procureur de la République de Paris et le procureur de la République territorialement compétent. Ce placement est subordonné à l'accord écrit de la personne concernée. Dans ce cas, le périmètre géographique imposé en application du même 1 ° ne peut être inférieur au territoire du département.
« Le placement sous surveillance électronique mobile est décidé pour la durée de la mesure prise en application dudit 1 °. Il y est mis fin en cas de dysfonctionnement temporaire du dispositif ou sur demande de l'intéressé, qui peut alors être assujetti à l'obligation prévue au 2 ° dudit article L. 228-2.
« La personne concernée est astreinte, pendant toute la durée du placement, au port d'un dispositif technique permettant à tout moment à l'autorité administrative de s'assurer à distance qu'elle n'a pas quitté le périmètre défini en application du 1 ° du même article L. 228-2. Le dispositif technique ne peut être utilisé par l'autorité administrative pour localiser la personne, sauf lorsque celle-ci a quitté ce périmètre ou en cas de fonctionnement altéré dudit dispositif technique.
« Un décret en Conseil d'État fixe les modalités d'application du présent article. Il peut déterminer les conditions dans lesquelles la mise en œuvre du dispositif technique permettant le contrôle à distance prévu au troisième alinéa, pour lequel peut être mis en œuvre un traitement automatisé de données à caractère personnel, peut être confiée à une personne de droit privé habilitée à cet effet ».

9. L'article L. 228-4 du code de la sécurité intérieure, dans la même rédaction, prévoit :
« S'il ne fait pas application des articles L. 228-2 et L. 228-3, le ministre de l'intérieur peut, après en avoir informé le procureur de la République de Paris et le procureur de la République territorialement compétent, faire obligation à toute personne mentionnée à l'article L. 228-1 de :
« 1 ° Déclarer son domicile et tout changement de domicile ;
« 2 ° Signaler ses déplacements à l'extérieur d'un périmètre déterminé ne pouvant être plus restreint que le territoire de la commune de son domicile ;
« 3 ° Ne pas paraître dans un lieu déterminé, qui ne peut inclure le domicile de la personne intéressée. Cette obligation tient compte de la vie familiale et professionnelle de la personne intéressée.
« Les obligations mentionnées aux 1 ° à 3 ° du présent article sont prononcées pour une durée maximale de six mois à compter de la notification de la décision du ministre. Elles peuvent être renouvelées par décision motivée, pour une durée maximale de six mois, lorsque les conditions prévues à l'article L. 228-1 continuent d'être réunies. Au-delà d'une durée cumulée de six mois, le renouvellement est subordonné à l'existence d'éléments nouveaux ou complémentaires. La durée totale cumulée des obligations prévues aux 1 ° à 3 ° du présent article ne peut excéder douze mois. Les mesures sont levées dès que les conditions prévues à l'article L. 228-1 ne sont plus satisfaites.
« Toute décision de renouvellement est notifiée à la personne concernée au plus tard cinq jours avant son entrée en vigueur. Si la personne concernée saisit le juge administratif d'une demande présentée sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative dans un délai de quarante-huit heures à compter de la notification de la décision, la mesure ne peut entrer en vigueur avant que le juge ait statué sur la demande.
« La personne soumise aux obligations prévues aux 1 ° à 3 ° du présent article peut, dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision ou à compter de la notification de chaque renouvellement, demander au tribunal administratif l'annulation de cette décision. Le tribunal administratif statue dans un délai de quatre mois à compter de sa saisine. Ces recours s'exercent sans préjudice des procédures ouvertes aux articles L. 521-1 et L. 521-2 du code de justice administrative ».

10. L'article L. 228-5 du code de la sécurité intérieure, dans la même rédaction, prévoit :
« Le ministre de l'intérieur peut, après en avoir informé le procureur de la République de Paris et le procureur de la République territorialement compétent, faire obligation à toute personne mentionnée à l'article L. 228-1, y compris lorsqu'il est fait application des articles L. 228-2 à L. 228-4, de ne pas se trouver en relation directe ou indirecte avec certaines personnes, nommément désignées, dont il existe des raisons sérieuses de penser que leur comportement constitue une menace pour la sécurité publique.
« L'obligation mentionnée au premier alinéa du présent article est prononcée pour une durée maximale de six mois à compter de la notification de la décision du ministre. Au-delà d'une durée cumulée de six mois, le renouvellement est subordonné à l'existence d'éléments nouveaux ou complémentaires. La durée totale cumulée de l'obligation prévue au premier alinéa du présent article ne peut excéder douze mois. L'obligation est levée dès que les conditions prévues à l'article L. 228-1 ne sont plus satisfaites.
« Toute décision de renouvellement est notifiée à la personne concernée au plus tard cinq jours avant son entrée en vigueur. Si la personne concernée saisit le juge administratif d'une demande présentée sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative dans un délai de quarante-huit heures à compter de la notification de la décision, la mesure ne peut entrer en vigueur avant que le juge ait statué sur la demande.
« La personne soumise à l'obligation mentionnée au premier alinéa du présent article peut, dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision ou à compter de la notification de chaque renouvellement, demander au tribunal administratif l'annulation de cette décision. Le tribunal administratif statue dans un délai de quatre mois à compter de sa saisine. Ces recours s'exercent sans préjudice des procédures ouvertes aux articles L. 521-1 et L. 521-2 du code de justice administrative ».

11. L'article L. 228-6 du code de la sécurité intérieure, dans la même rédaction, prévoit :
« Les décisions du ministre de l'intérieur prises en application des articles L. 228-2 à L. 228-5 sont écrites et motivées. À l'exception des mesures prises sur le fondement de l'article L. 228-3, le ministre de l'intérieur ou son représentant met la personne concernée en mesure de lui présenter ses observations dans un délai maximal de huit jours à compter de la notification de la décision ».

12. L'article L. 229-1 du code de la sécurité intérieure, dans la même rédaction, prévoit :
« Sur saisine motivée du représentant de l'État dans le département ou, à Paris, du préfet de police, le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Paris peut, par une ordonnance écrite et motivée et après avis du procureur de la République de Paris, autoriser la visite d'un lieu ainsi que la saisie des documents, objets ou données qui s'y trouvent, aux seules fins de prévenir la commission d'actes de terrorisme et lorsqu'il existe des raisons sérieuses de penser qu'un lieu est fréquenté par une personne dont le comportement constitue une menace d'une particulière gravité pour la sécurité et l'ordre publics et qui soit entre en relation de manière habituelle avec des personnes ou des organisations incitant, facilitant ou participant à des actes de terrorisme, soit soutient, diffuse, lorsque cette diffusion s'accompagne d'une manifestation d'adhésion à l'idéologie exprimée, ou adhère à des thèses incitant à la commission d'actes de terrorisme ou faisant l'apologie de tels actes.
« Ces opérations ne peuvent concerner les lieux affectés à l'exercice d'un mandat parlementaire ou à l'activité professionnelle des avocats, des magistrats ou des journalistes et les domiciles des personnes concernées.
« La saisine du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Paris est précédée d'une information du procureur de la République de Paris et du procureur de la République territorialement compétent, qui reçoivent tous les éléments relatifs à ces opérations. L'ordonnance est communiquée au procureur de la République de Paris et au procureur de la République territorialement compétent.
« L'ordonnance mentionne l'adresse des lieux dans lesquels les opérations de visite et de saisie peuvent être effectuées, le service et la qualité des agents habilités à y procéder, le numéro d'immatriculation administrative du chef de service qui nomme l'officier de police judiciaire territorialement compétent présent sur les lieux, chargé d'assister à ces opérations et de tenir informé le juge des libertés et de la détention de leur déroulement, ainsi que la faculté pour l'occupant des lieux ou son représentant de faire appel à un conseil de son choix, sans que l'exercice de cette faculté n'entraîne la suspension des opérations autorisées sur le fondement du premier alinéa.
« L'ordonnance est exécutoire au seul vu de la minute ».

13. L'article L. 229-2 du code de la sécurité intérieure, dans la même rédaction, prévoit :
« L'ordonnance est notifiée sur place au moment de la visite à l'occupant des lieux ou à son représentant, qui en reçoit copie intégrale contre récépissé ou émargement au procès-verbal de visite. En l'absence de l'occupant des lieux ou de son représentant, l'ordonnance est notifiée après les opérations, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. La notification est réputée faite à la date de réception figurant sur l'avis. À défaut de réception, il est procédé à la signification de l'ordonnance par acte d'huissier de justice.
« L'acte de notification comporte mention des voies et délais de recours contre l'ordonnance ayant autorisé la visite et contre le déroulement des opérations de visite et de saisie.
« La visite est effectuée en présence de l'occupant des lieux ou de son représentant, qui peut se faire assister d'un conseil de son choix. En l'absence de l'occupant des lieux, les agents chargés de la visite ne peuvent procéder à celle-ci qu'en présence de deux témoins qui ne sont pas placés sous leur autorité.
« La visite ne peut être commencée avant 6 heures ni après 21 heures, sauf autorisation expresse, écrite et motivée accordée par le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Paris, fondée sur l'urgence ou les nécessités de l'opération.
« Elle s'effectue sous l'autorité et le contrôle du juge des libertés et de la détention qui l'a autorisée. À cette fin, ce dernier donne toutes instructions aux agents qui participent à l'opération. Il peut, s'il l'estime utile, se rendre dans les locaux pendant l'opération et, à tout moment, sur saisine de l'occupant des lieux ou de son représentant, ou de son propre chef, en décider la suspension ou l'arrêt. Afin d'exercer ce contrôle, lorsque la visite a lieu en dehors du ressort du tribunal de grande instance de Paris, il peut délivrer une commission rogatoire au juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance dans le ressort duquel s'effectue la visite.
« Lorsqu'une infraction est constatée, l'officier de police judiciaire en dresse procès-verbal, procède à toute saisie utile et en informe sans délai le procureur de la République territorialement compétent.
« Un procès-verbal relatant les modalités et le déroulement de l'opération et consignant les constatations effectuées est dressé sur-le-champ par les agents qui ont procédé à la visite. Le procès-verbal est signé par ces agents et par l'officier de police judiciaire territorialement compétent présent sur les lieux, qui peuvent s'identifier par le numéro d'immatriculation administrative mentionné à l'article 15-4 du code de procédure pénale, leur qualité et leur service ou unité d'affectation, ainsi que par l'occupant des lieux ou, le cas échéant, son représentant ou les témoins. En cas de refus de signer, mention en est faite au procès-verbal.
« L'original du procès-verbal est, dès qu'il a été établi, adressé au juge qui a autorisé la visite. Une copie de ce même document est remise ou adressée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception à l'occupant des lieux ou à son représentant.
« Le procès-verbal mentionne le délai et les voies de recours.
« Si, à l'occasion de la visite, les agents qui y procèdent découvrent des éléments révélant l'existence d'autres lieux répondant aux conditions fixées au premier alinéa de l'article L. 229-1, ils peuvent, sur autorisation du juge qui a pris l'ordonnance, délivrée en cas d'urgence par tout moyen, procéder sans délai à la visite de ces lieux. Mention de cette autorisation est portée au procès-verbal mentionné au septième alinéa du présent article.
« Le juge qui a autorisé la visite et les juridictions de jugement saisies à cet effet ont accès aux nom et prénom de toute personne identifiée par un numéro d'immatriculation administrative dans le procès-verbal mentionné au même septième alinéa ».

14. L'article L. 229-4 du code de la sécurité intérieure, dans la même rédaction, prévoit :
« I.- Lorsqu'elle est susceptible de fournir des renseignements sur les objets, documents et données présents sur le lieu de la visite ayant un lien avec la finalité de prévention de la commission d'actes de terrorisme ayant justifié la visite, la personne pour laquelle il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace d'une particulière gravité pour la sécurité et l'ordre publics peut, après information sans délai du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Paris, être retenue sur place par l'officier de police judiciaire pendant le temps strictement nécessaire au déroulement des opérations.
« La retenue ne peut excéder quatre heures à compter du début de la visite et le juge des libertés et de la détention peut y mettre fin à tout moment.
« Lorsqu'il s'agit d'un mineur, la retenue fait l'objet d'un accord exprès du juge des libertés et de la détention. Le mineur doit être assisté de son représentant légal, sauf impossibilité dûment justifiée.
« Mention de l'information ou de l'accord exprès du juge des libertés et de la détention est portée au procès-verbal mentionné au premier alinéa du III.
« II.- La personne retenue est immédiatement informée par l'officier de police judiciaire ou, sous le contrôle de celui-ci, par un agent de police judiciaire, dans une langue qu'elle comprend :
« 1 ° Du fondement légal de son placement en retenue ;
« 2 ° De la durée maximale de la mesure ;
« 3 ° Du fait que la retenue dont elle fait l'objet ne peut donner lieu à audition et qu'elle a le droit de garder le silence ;
« 4 ° Du fait qu'elle bénéficie du droit de faire prévenir par l'officier de police judiciaire toute personne de son choix ainsi que son employeur.
« Si l'officier de police judiciaire estime, en raison des nécessités liées à la retenue, ne pas devoir faire droit à cette demande, il en réfère sans délai au juge des libertés et de la détention qui décide, s'il y a lieu, d'y faire droit.
« Sauf en cas de circonstance insurmontable, qui doit être mentionnée au procès-verbal, les diligences incombant à l'officier de police judiciaire en application du premier alinéa du présent 4 ° doivent intervenir, au plus tard, dans un délai de deux heures à compter du moment où la personne a formulé sa demande.
« III.- L'officier de police judiciaire mentionne, dans un procès-verbal, les motifs qui justifient la retenue. Il précise le jour et l'heure à partir desquels la retenue a débuté, le jour et l'heure de la fin de la retenue et la durée de celle-ci.
« Ce procès-verbal est présenté à la signature de l'intéressé. Si ce dernier refuse de le signer, mention est faite du refus et des motifs de celui-ci.
« Le procès-verbal est transmis au juge des libertés et de la détention, copie en ayant été remise à l'intéressé.
« La durée de la retenue s'impute, s'il y a lieu, sur celle de la garde à vue ».

15. L'article L. 229-5 du code de la sécurité intérieure, dans la même rédaction, prévoit :
« I.- Aux seules fins de prévenir la commission d'actes de terrorisme, si la visite révèle l'existence de documents, objets ou données relatifs à la menace d'une particulière gravité pour la sécurité et l'ordre publics que constitue le comportement de la personne concernée, il peut être procédé à leur saisie ainsi qu'à celle des données contenues dans tout système informatique ou équipement terminal présent sur les lieux de la visite soit par leur copie, soit par la saisie de leur support lorsque la copie ne peut être réalisée ou achevée pendant le temps de la visite.
« La copie des données ou la saisie des systèmes informatiques ou des équipements terminaux est réalisée en présence de l'officier de police judiciaire. Le procès-verbal mentionné à l'article L. 229-2 indique les motifs de la saisie et dresse l'inventaire des objets, documents ou données saisis. Copie en est remise aux personnes mentionnées au troisième alinéa du même article L. 229-2 ainsi qu'au juge ayant délivré l'autorisation. Les éléments saisis sont conservés sous la responsabilité du chef du service ayant procédé à la visite. À compter de la saisie, nul n'y a accès avant l'autorisation du juge.
« II.- Dès la fin de la visite, l'autorité administrative peut demander au juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Paris d'autoriser l'exploitation des données saisies. Au vu des éléments révélés par la visite, le juge statue dans un délai de quarante-huit heures à compter de sa saisine sur la régularité de la saisie et sur la demande de l'autorité administrative. Sont exclus de l'autorisation les éléments dépourvus de tout lien avec la finalité de prévention de la commission d'actes de terrorisme ayant justifié la visite.
« L'ordonnance est notifiée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. La notification est réputée faite à la date de réception figurant sur l'avis. À défaut de réception, il est procédé à la signification de l'ordonnance par acte d'huissier de justice.
« L'acte de notification comporte mention des voies et délais de recours contre l'ordonnance ayant autorisé l'exploitation des données saisies.
« L'ordonnance autorisant l'exploitation des données saisies peut faire l'objet, dans un délai de quarante-huit heures, d'un appel devant le premier président de la cour d'appel de Paris selon les modalités mentionnées aux trois premiers alinéas du I de l'article L. 229-3. Le premier président statue dans un délai de quarante-huit heures.
« L'ordonnance du premier président de la cour d'appel de Paris est susceptible d'un pourvoi en cassation selon les règles prévues par le code de procédure pénale. Le délai de pourvoi en cassation est de quinze jours.
« En cas de décision de refus devenue irrévocable, les données copiées sont détruites et les supports saisis sont restitués, dans l'état dans lequel ils ont été saisis, à leur propriétaire.
« Pendant le temps strictement nécessaire à leur exploitation autorisée selon la procédure mentionnée au présent article, les données et les supports saisis sont conservés sous la responsabilité du chef du service ayant procédé à la visite et à la saisie. Les systèmes informatiques ou équipements terminaux sont restitués à leur propriétaire, le cas échéant après qu'il a été procédé à la copie des données qu'ils contiennent, à l'issue d'un délai maximal de quinze jours à compter de la date de leur saisie ou de la date à laquelle le juge, saisi dans ce délai, a autorisé l'exploitation des données qu'ils contiennent. Les données copiées sont détruites à l'expiration d'un délai maximal de trois mois à compter de la date de la visite ou de la date à laquelle le juge, saisi dans ce délai, en a autorisé l'exploitation.
« En cas de difficulté dans l'accès aux données contenues dans les supports saisis ou dans l'exploitation des données copiées, lorsque cela est nécessaire, les délais prévus à l'avant-dernier alinéa du présent II peuvent être prorogés, pour la même durée, par le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Paris, saisi par l'autorité administrative au moins quarante-huit heures avant l'expiration de ces délais. Le juge statue dans un délai de quarante-huit heures sur la demande de prorogation présentée par l'autorité administrative. Si l'exploitation ou l'examen des données et des supports saisis conduit à la constatation d'une infraction, ces données et supports sont conservés selon les règles applicables en matière de procédure pénale ».

16. En premier lieu, l'association requérante soutient que l'article L. 226-1 du code de la sécurité intérieure ne définirait pas avec suffisamment de précision les conditions de mise en place par le préfet des périmètres de protection. En outre, ces dispositions ne comporteraient pas les garanties légales appropriées permettant d'encadrer les opérations de contrôle de l'accès et de la circulation, les palpations de sécurité et les fouilles de bagages et de véhicules effectuées dans ces périmètres. Ce défaut de garanties légales priverait les personnes faisant l'objet de ces mesures de la possibilité de bénéficier d'un contrôle juridictionnel effectif. Il en résulterait une violation de la liberté d'aller et de venir, du droit au respect de la vie privée et du droit à un recours juridictionnel effectif, ainsi qu'une méconnaissance par le législateur de l'étendue de sa compétence de nature à affecter ces mêmes droits et libertés.

17. Le Conseil constitutionnel a relevé d'office, d'une part, le grief tiré de ce que, en ne précisant pas les critères en fonction desquels sont mises en œuvre, au sein des périmètres de protection, les opérations de contrôle de l'accès et de la circulation, de palpations de sécurité, d'inspection et de fouille des bagages et de visites de véhicules, les dispositions de l'article L. 226-1 du code de la sécurité intérieure méconnaîtraient le principe d'égalité devant la loi. Il a relevé d'office, d'autre part, le grief tiré de ce que, en permettant de confier à des agents exerçant des activités privées de sécurité la mise en œuvre de certaines opérations de contrôle au sein des périmètres de protection, ces dispositions méconnaîtraient les exigences résultant de l'article 12 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789.

18. En deuxième lieu, l'association requérante soutient qu'en permettant à l'autorité administrative de fermer des lieux de culte, pour prévenir la commission d'actes de terrorisme, à raison de certains propos qui y sont tenus, de certaines idées ou théories qui y sont diffusées ou de certaines activités qui s'y déroulent, l'article L. 227-1 du code de la sécurité intérieure méconnaîtrait la liberté religieuse, la liberté d'expression et de communication, le droit d'expression collective des idées et des opinions, la liberté d'association et le droit à un recours juridictionnel effectif. Elle dénonce, à cet égard, l'imprécision de la notion d'« idées ou théories » et le fait que la provocation « à la haine ou à la discrimination », qui peut justifier la fermeture du lieu de culte, ne présente pas nécessairement de lien avec la prévention du terrorisme. Elle reproche également à ce titre au législateur de ne pas avoir interdit le renouvellement indéfini de la mesure de fermeture et de n'avoir pas prévu les garanties de nature à assurer le respect des exigences constitutionnelles mentionnées ci-dessus, ce qui serait constitutif d'une incompétence négative.

19. En troisième lieu, d'après l'association requérante, les dispositions relatives aux mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance prévues aux articles L. 228-1 à L. 228-6 du code de la sécurité intérieure méconnaîtraient la liberté d'aller et de venir, le droit au respect de la vie privée et familiale et le droit à un recours juridictionnel effectif et seraient entachées d'incompétence négative dans des conditions affectant ces mêmes droits et libertés. Elle reproche au législateur de ne pas avoir défini avec suffisamment de précision, à l'article L. 228-1, les conditions de recours à ces mesures ainsi que, à l'article L. 228-5, la portée de l'interdiction de « se trouver en relation directe ou indirecte avec certaines personnes ». En outre, l'association requérante estime que le législateur aurait dû prévoir des dispositions transitoires en faveur des personnes susceptibles d'être assignées à résidence en vertu de l'article L. 228-2 du code de la sécurité intérieure, après l'avoir été, dans le cadre de l'état d'urgence, sur le fondement de l'article 6 de la loi du 3 avril 1955 mentionnée ci-dessus. Le requérant estime qu'en instaurant cette mesure d'assignation à résidence le législateur a méconnu le principe de la séparation des pouvoirs dès lors que le contrôle d'une telle mesure aurait dû échoir au juge judiciaire. Il dénonce également le fait qu'en autorisant le prononcé d'une mesure d'assignation à résidence à raison de l'adhésion à une idéologie terroriste, le législateur aurait méconnu la liberté d'opinion, la liberté d'aller et de venir et, compte tenu de l'imprécision des notions employées, l'objectif à valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi ainsi que sa propre compétence.

20. En dernier lieu, selon l'association requérante et la partie intervenante, les dispositions relatives aux visites et saisies seraient dépourvues de nécessité, ne définiraient pas avec suffisamment de précision les conditions de déclenchement et de mise en œuvre de ces mesures et ne prévoiraient pas de garanties légales suffisantes, en particulier lorsque la visite se déroule hors la présence de l'occupant des lieux ou lorsqu'elle se poursuit en d'autres lieux. L'association requérante reproche également à ces dispositions de permettre la retenue sur place de l'occupant des lieux sans autorisation préalable d'un juge. Il en résulterait une violation du droit au respect de la vie privée et à l'inviolabilité du domicile et du droit à un recours juridictionnel effectif, ainsi qu'une incompétence négative de nature à affecter ces mêmes droits. Selon la partie intervenante, ces dispositions porteraient également atteinte au droit à un procès équitable et aux droits de la défense, au motif que la procédure suivie devant le juge des libertés et de la détention, en vue d'autoriser l'exploitation des données saisies au cours d'une visite domiciliaire, n'est ni publique ni contradictoire.

21. Le Conseil constitutionnel a relevé d'office le grief tiré de ce que, en permettant, au cours d'une visite prévue à l'article L. 229-1 du code de la sécurité intérieure, la saisie de « documents » et d'« objets », sans prévoir de règles encadrant leur exploitation, leur conservation et leur restitution, les dispositions de l'article L. 229-5 du même code méconnaîtraient le droit de propriété.

22. Par conséquent, la question prioritaire de constitutionnalité porte sur les dispositions suivantes du code de la sécurité intérieure :- l'article L. 226-1, les mots « ou à celle des périmètres de protection institués en application de l'article L. 226-1 » figurant au sixième alinéa de l'article L. 511-1, les mots « y compris dans les périmètres de protection institués en application de l'article L. 226-1 » figurant au premier alinéa de l'article L. 613-1 et les mots « ou lorsqu'un périmètre de protection a été institué en application de l'article L. 226-1 » figurant à la première phrase du second alinéa de l'article L. 613-2 ;

  • l'article L. 227-1 ;
  • les articles L. 228-1, L. 228-2 et L. 228-5 ;
  • l'article L. 229-1, les troisième et dixième alinéas de l'article L. 229-2, le premier alinéa du paragraphe I de l'article L. 229-4 et l'article L. 229-5.

- Sur la recevabilité :

23. Selon les dispositions combinées du troisième alinéa de l'article 23-2 et du troisième alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 mentionnée ci-dessus, le Conseil constitutionnel ne peut être saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité relative à une disposition qu'il a déjà déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une de ses décisions, sauf changement des circonstances.

24. Dans sa décision du 16 février 2018 mentionnée ci-dessus, le Conseil constitutionnel a spécialement examiné l'article L. 228-2 du code de la sécurité intérieure. Il a prononcé la censure de trois dispositions de cet article et a déclaré le reste de l'article conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif de cette décision. Dès lors, il n'y a pas lieu, pour le Conseil constitutionnel, de statuer sur les dispositions de cet article déjà censurées ni, en l'absence de changement de circonstances, de réexaminer les dispositions déjà déclarées conformes à la Constitution.

- Sur le fond :

. En ce qui concerne l'article L. 226-1 du code de la sécurité intérieure et les dispositions contestées du sixième alinéa de l'article L. 511-1, du premier alinéa de l'article L. 613-1 et de la première phrase du second alinéa de l'article L. 613-2 du même code :

25. L'article L. 226-1 du code de la sécurité intérieure permet au représentant de l'État dans le département ou au préfet de police, à Paris, d'instituer un périmètre de protection au sein duquel l'accès et la circulation des personnes sont réglementés à des fins de sécurisation d'un lieu ou d'un événement exposé à un risque terroriste. L'accès et la circulation dans ce périmètre peuvent être conditionnés à la nécessité pour les personnes de se soumettre à des palpations de sécurité, à l'inspection visuelle ou à la fouille de leurs bagages et à la visite de leur véhicule.

- S'agissant du grief tiré de la méconnaissance des exigences résultant de l'article 12 de la Déclaration de 1789 :

26. Selon l'article 12 de la Déclaration de 1789 : « La garantie des droits de l'Homme et du Citoyen nécessite une force publique : cette force est donc instituée pour l'avantage de tous, et non pour l'utilité particulière de ceux auxquels elle est confiée ». Il en résulte l'interdiction de déléguer à des personnes privées des compétences de police administrative générale inhérentes à l'exercice de la « force publique » nécessaire à la garantie des droits.

27. Les dispositions contestées confèrent aux agents de la force publique la possibilité de se faire assister, pour la mise en œuvre des palpations de sécurité et des inspections et fouilles de bagages, par des agents agréés exerçant une activité privée de sécurité. Ce faisant, le législateur a permis d'associer des personnes privées à l'exercice de missions de surveillance générale de la voie publique. Il résulte des dispositions contestées que ces personnes ne peuvent toutefois qu'assister les agents de police judiciaire et sont placées « sous l'autorité d'un officier de police judiciaire ». Il appartient aux autorités publiques de prendre les dispositions afin de s'assurer que soit continûment garantie l'effectivité du contrôle exercé sur ces personnes par les officiers de police judiciaire. Sous cette réserve, ces dispositions ne méconnaissent pas les exigences découlant de l'article 12 de la Déclaration de 1789.

- S'agissant des griefs tirés de la méconnaissance de la liberté d'aller et de venir, du droit au respect de la vie privée et du principe d'égalité devant la loi :

28. En vertu de l'article 34 de la Constitution, la loi fixe les règles concernant les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l'exercice des libertés publiques. Dans le cadre de cette mission, il appartient au législateur d'assurer la conciliation entre, d'une part, la prévention des atteintes à l'ordre public et, d'autre part, le respect des droits et libertés reconnus à tous ceux qui résident sur le territoire de la République. Parmi ces droits et libertés figurent la liberté d'aller et de venir, composante de la liberté personnelle protégée par les articles 2 et 4 de la Déclaration de 1789, et le droit au respect de la vie privée protégé par l'article 2 de cette déclaration.

29. Selon l'article 6 de la Déclaration de 1789, la loi « doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse ». Le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit.

30. En permettant au préfet d'instituer des périmètres au sein desquels l'accès et la circulation des personnes sont réglementés et des mesures de contrôle mises en œuvre, les dispositions contestées portent atteinte à la liberté d'aller et de venir et au droit au respect de la vie privée.

31. En premier lieu, un périmètre de protection ne peut être institué par le préfet, par arrêté motivé, qu'aux fins d'assurer la sécurité d'un lieu ou d'un événement exposé à un risque d'actes de terrorisme à raison de sa nature et de l'ampleur de sa fréquentation. En outre, ce périmètre doit être limité aux lieux exposés à la menace et à leurs abords. Enfin, son étendue et sa durée doivent être adaptées et proportionnées aux nécessités que font apparaître les circonstances. En adoptant les dispositions contestées, le législateur a ainsi poursuivi l'objectif de lutte contre le terrorisme, qui participe de l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public. Il a également défini avec précision les conditions de mise en place d'un périmètre de protection et a limité le champ d'application d'un tel dispositif.

32. En deuxième lieu, les règles d'accès et de circulation au sein du périmètre, définies par l'arrêté préfectoral, doivent être adaptées aux impératifs de la vie privée, professionnelle et familiale des personnes. Cet arrêté détermine également les mesures de vérification, limitativement définies par les dispositions contestées, auxquelles les personnes peuvent être soumises pour y accéder ou y circuler. Ces mesures correspondent à des palpations de sécurité, des inspections visuelles et fouilles de bagages et des visites de véhicules. Elles ne peuvent être opérées que par des autorités de police judiciaire ou, en leur présence et sous leur contrôle effectif, par des agents de police municipale ou des agents agréés exerçant une activité privée de sécurité, avec le consentement des personnes faisant l'objet de ces vérifications.

33. Toutefois, s'il était loisible au législateur de ne pas fixer les critères en fonction desquels sont mises en œuvre, au sein des périmètres de protection, les opérations de contrôle de l'accès et de la circulation, de palpations de sécurité, d'inspection et de fouille des bagages et de visite de véhicules, la mise en œuvre de ces vérifications ainsi confiées par la loi à des autorités de police judiciaire ou sous leur responsabilité ne saurait s'opérer, conformément aux droits et libertés mentionnés ci-dessus, qu'en se fondant sur des critères excluant toute discrimination de quelque nature que ce soit entre les personnes.

34. En dernier lieu, les dispositions contestées limitent à un mois la durée de validité de l'arrêté préfectoral. Celui-ci ne peut être renouvelé que si les conditions justifiant l'institution du périmètre de protection continuent d'être réunies. Ce renouvellement est ainsi subordonné à la nécessité d'assurer la sécurité du lieu ou de l'événement et à la condition qu'il demeure exposé à un risque d'actes de terrorisme, à raison de sa nature et de l'ampleur de sa fréquentation. Toutefois, compte tenu de la rigueur des mesures prévues par les dispositions contestées, un tel renouvellement ne saurait, sans méconnaître la liberté d'aller et de venir et le droit au respect de la vie privée, être décidé par le préfet sans que celui-ci établisse la persistance du risque.

35. Il résulte de ce qui précède que, sous les réserves énoncées aux paragraphes 33 et 34, en adoptant les dispositions contestées, le législateur, qui a à la fois strictement borné le champ d'application de la mesure qu'il a instaurée et apporté les garanties nécessaires, a assuré une conciliation qui n'est pas manifestement déséquilibrée entre, d'une part, l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public et, d'autre part, la liberté d'aller et de venir et le droit au respect de la vie privée. Sous la réserve énoncée au paragraphe 33, les dispositions contestées ne méconnaissent pas non plus le principe d'égalité devant la loi.

36. Il résulte de tout ce qui précède que, sous les réserves énoncées aux paragraphes 27, 33 et 34, les dispositions de l'article L. 226-1, les mots « ou à celle des périmètres de protection institués en application de l'article L. 226-1 » figurant au sixième alinéa de l'article L. 511-1, les mots « y compris dans les périmètres de protection institués en application de l'article L. 226-1 » figurant au premier alinéa de l'article L. 613-1 et les mots « ou lorsqu'un périmètre de protection a été institué en application de l'article L. 226-1 » figurant à la première phrase du second alinéa de l'article L. 613-2 du code de la sécurité intérieure, qui ne méconnaissent ni le droit à un recours juridictionnel effectif, ni aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit et qui ne sont pas entachés d'incompétence négative, doivent être déclarés conformes à la Constitution.

. En ce qui concerne l'article L. 227-1 du code de la sécurité intérieure :

37. Aux termes de l'article 10 de la Déclaration de 1789 : « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la loi ». Il en résulte la liberté de conscience. L'article 1er de la Constitution dispose que « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances ». Il résulte de cet article et de l'article 10 de la Déclaration de 1789 que le principe de laïcité impose notamment que la République garantisse le libre exercice des cultes.

38. L'article L. 227-1 du code de la sécurité intérieure autorise le préfet, aux fins de prévenir la commission d'actes de terrorisme, à fermer provisoirement des lieux de culte sous certaines conditions. Cette disposition porte donc atteinte à la liberté de conscience et au libre exercice des cultes.

39. En premier lieu, la mesure de fermeture d'un lieu de culte ne peut être prononcée qu'aux fins de prévenir la commission d'un acte de terrorisme. En outre, une seconde condition doit être remplie : les propos tenus en ce lieu, les idées ou théories qui y sont diffusées ou les activités qui s'y déroulent doivent soit provoquer à la violence, à la haine ou à la discrimination soit provoquer à la commission d'actes de terrorisme ou en faire l'apologie. Il résulte de la combinaison de ces deux conditions, que, lorsque la justification de cette mesure repose sur la provocation à la violence, à la haine ou à la discrimination, il appartient au préfet d'établir que cette provocation est bien en lien avec le risque de commission d'actes de terrorisme. En autorisant l'adoption d'une telle mesure de fermeture provisoire d'un lieu de culte, le législateur a ainsi poursuivi l'objectif de lutte contre le terrorisme, qui participe de l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public.

40. En deuxième lieu, le législateur a limité à six mois la durée de la mesure prévue à l'article L. 227-1 du code de la sécurité intérieure et n'a pas prévu qu'elle puisse être renouvelée. L'adoption ultérieure d'une nouvelle mesure de fermeture ne peut que reposer sur des faits intervenus après la réouverture du lieu de culte.

41. En troisième lieu, la mesure de fermeture du lieu de culte doit être justifiée et proportionnée, notamment dans sa durée, aux raisons l'ayant motivée. À ce titre, il appartient au préfet de tenir compte des conséquences d'une telle mesure pour les personnes fréquentant habituellement le lieu de culte et de la possibilité qui leur est offerte ou non de pratiquer leur culte en un autre lieu. Le juge administratif est chargé de s'assurer que cette mesure est adaptée, nécessaire et proportionnée à la finalité qu'elle poursuit.

42. En dernier lieu, la mesure de fermeture d'un lieu de culte peut faire l'objet d'un recours en référé sur le fondement des articles L. 521-1 et L. 521-2 du code de justice administrative. Elle est alors suspendue jusqu'à la décision du juge de tenir ou non une audience publique. S'il décide de tenir cette audience, la suspension de la mesure se prolonge jusqu'à sa décision sur le référé, qui doit intervenir dans les quarante-huit heures.

43. Il résulte de ce qui précède que le législateur, qui n'a pas méconnu l'étendue de sa compétence, a assuré une conciliation qui n'est pas manifestement déséquilibrée entre, d'une part, l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public et, d'autre part, la liberté de conscience et le libre exercice des cultes. L'article L. 227-1 du code de la sécurité intérieure, qui ne méconnaît pas non plus la liberté d'expression et de communication, le droit d'expression collective des idées et des opinions, la liberté d'association ou le droit à un recours juridictionnel effectif, ni aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doit être déclaré conforme à la Constitution.

. En ce qui concerne les articles L. 228-1 et L. 228-5 du code de la sécurité intérieure :

44. Il appartient au législateur d'assurer la conciliation entre, d'une part, la prévention des atteintes à l'ordre public et, d'autre part, le respect des droits et libertés reconnus à tous ceux qui résident sur le territoire de la République. Parmi ces droits et libertés figurent le droit de mener une vie familiale normale, qui résulte du dixième alinéa du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, le droit au respect de la vie privée et la liberté d'aller et de venir.

45. Aux termes de l'article 16 de la Déclaration de 1789 : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution ». Est garanti par cette disposition le droit des personnes intéressées à exercer un recours juridictionnel effectif.

- S'agissant de l'article L. 228-1 du code de la sécurité intérieure :

46. En vertu de l'article L. 228-1 du code de la sécurité intérieure, une mesure individuelle de contrôle administratif et de surveillance ne peut être prononcée qu'aux fins de prévenir la commission d'un acte de terrorisme. En outre, deux conditions cumulatives doivent être réunies. D'une part, il appartient au ministre de l'intérieur d'établir qu'il existe des raisons sérieuses de penser que le comportement de la personne visée par la mesure constitue une menace d'une particulière gravité pour la sécurité et l'ordre publics. Cette menace doit être nécessairement en lien avec le risque de commission d'un acte de terrorisme. D'autre part, il lui appartient également de prouver soit que cette personne « entre en relation de manière habituelle avec des personnes ou des organisations incitant, facilitant ou participant à des actes de terrorisme », soit qu'elle « soutient, diffuse, lorsque cette diffusion s'accompagne d'une manifestation d'adhésion à l'idéologie exprimée, ou adhère à des thèses incitant à la commission d'actes de terrorisme ou faisant l'apologie de tels actes ». En adoptant les dispositions contestées, le législateur a défini avec précision les conditions de recours aux mesures de contrôle administratif ou de surveillance.

47. L'article L. 228-1, qui n'est pas entaché d'incompétence négative dans des conditions de nature à affecter les exigences constitutionnelles mentionnées ci-dessus et qui ne méconnaît aucun droit ou liberté que la Constitution garantit, doit être déclaré conforme à la Constitution.

- S'agissant de l'article L. 228-5 du code de la sécurité intérieure :

48. L'article L. 228-5 du code de la sécurité intérieure permet au ministre de l'intérieur d'interdire à toute personne mentionnée à l'article L. 228-1 de se trouver en relation directe ou indirecte avec certaines personnes, nommément désignées, dont il existe des raisons sérieuses de penser que leur comportement constitue une menace pour la sécurité publique. Ces dispositions portent donc atteinte au droit de mener une vie familiale normale, au droit au respect de la vie privée et à la liberté d'aller et de venir.

49. En premier lieu, toutefois, la mesure prévue à l'article L. 228-5 n'est susceptible de s'appliquer que si les conditions fixées à l'article L. 228-1 sont remplies. En adoptant ces dispositions, le législateur a poursuivi l'objectif de lutte contre le terrorisme, qui participe de l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public, et a limité le champ d'application de cette mesure aux personnes soupçonnées de présenter une menace d'une particulière gravité pour l'ordre public.

50. En deuxième lieu, compte tenu des conditions ainsi retenues par le législateur, la menace présentée par les personnes nommément désignées, dont la fréquentation est interdite, doit être en lien avec le risque de commission d'actes de terrorisme.

51. En troisième lieu, il appartient au ministre de l'intérieur de tenir compte, dans la détermination des personnes dont la fréquentation est interdite, des liens familiaux de l'intéressé et de s'assurer en particulier que la mesure d'interdiction de fréquentation ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit de mener une vie familiale normale.

52. En quatrième lieu, le législateur a limité la durée de la mesure prévue à l'article L. 228-5. Elle ne peut être initialement prononcée ou renouvelée que pour une durée maximale de six mois. Au-delà d'une durée cumulée de six mois, son renouvellement est subordonné à la production par le ministre de l'intérieur d'éléments nouveaux ou complémentaires. La durée totale cumulée de l'interdiction de fréquenter ne peut excéder douze mois. Compte tenu de sa rigueur, cette mesure ne saurait, sans méconnaître les exigences constitutionnelles précitées, excéder, de manière continue ou non, une durée totale cumulée de douze mois.

53. En dernier lieu, d'une part, la mesure prévue à l'article L. 228-5, qui peut faire l'objet d'un recours en référé sur le fondement des articles L. 521-1 et L. 521-2 du code de justice administrative, est susceptible d'être contestée par la voie du recours pour excès de pouvoir, dans un délai de deux mois après sa notification ou la notification de son renouvellement, devant le tribunal administratif. Ce dernier doit alors se prononcer dans un délai de quatre mois. Toutefois, compte tenu de l'atteinte qu'une telle mesure porte aux droits de l'intéressé, en laissant au juge un délai de quatre mois pour statuer, le législateur a opéré une conciliation manifestement déséquilibrée entre les exigences constitutionnelles précitées et l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public. Par conséquent, la deuxième phrase du dernier alinéa de l'article L. 228-5 du code de la sécurité intérieure doit être déclarée contraire à la Constitution. En outre, le droit à un recours juridictionnel effectif impose que le juge administratif soit tenu de statuer sur la demande d'annulation de la mesure dans de brefs délais.

54. D'autre part, toute décision de renouvellement de la mesure étant notifiée à la personne en cause au plus tard cinq jours avant son entrée en vigueur, celle-ci peut saisir, dans les quarante-huit heures, le juge des référés du tribunal administratif, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, afin qu'il ordonne toutes les mesures nécessaires à la sauvegarde de ses droits et libertés. Ce recours est suspensif. Aux termes du même article L. 521-2, le contrôle mis en œuvre par le juge des référés est limité aux atteintes graves et manifestement illégales. En permettant que la mesure contestée soit renouvelée au-delà de six mois sans qu'un juge ait préalablement statué, à la demande de la personne en cause, sur la régularité et le bien-fondé de la décision de renouvellement, le législateur a opéré une conciliation manifestement déséquilibrée entre les exigences constitutionnelles précitées et l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public. Dès lors, les mots « sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative » figurant à la deuxième phrase de l'avant-dernier alinéa de l'article L. 228-5 du code de la sécurité intérieure doivent être déclarés contraires à la Constitution.

55. Il résulte de ce qui précède que, sous les réserves énoncées aux paragraphes 51, 52 et 53, en adoptant le reste des dispositions contestées, le législateur, qui a à la fois strictement borné le champ d'application de la mesure qu'il a instaurée et apporté les garanties nécessaires, a assuré une conciliation qui n'est pas manifestement déséquilibrée entre, d'une part, l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public et, d'autre part, le droit de mener une vie familiale normale, le droit au respect de la vie privée et la liberté d'aller et de venir. Il n'a pas non plus méconnu le droit à un recours juridictionnel effectif.

56. Sous les réserves énoncées aux paragraphes 51, 52 et 53, le reste de l'article L. 228-5 du code de la sécurité intérieure, qui ne méconnaît aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doit être déclaré conforme à la Constitution.

. En ce qui concerne l'article L. 229-1, les troisième et dixième alinéas de l'article L. 229-2, le premier alinéa du paragraphe I de l'article L. 229-4 et l'article L. 229-5 du code de la sécurité intérieure :

- S'agissant des griefs tirés de la méconnaissance du droit au respect de la vie privée, de l'inviolabilité du domicile, de la liberté d'aller et de venir et du droit à un recours juridictionnel effectif :

57. Il appartient au législateur d'assurer la conciliation entre, d'une part, la prévention des atteintes à l'ordre public et, d'autre part, le respect des droits et libertés reconnus à tous ceux qui résident sur le territoire de la République. Parmi ces droits et libertés figurent l'inviolabilité du domicile, protégée par l'article 2 de la Déclaration de 1789, le droit au respect de la vie privée et la liberté d'aller et de venir.

58. Les articles L. 229-1, L. 229-2, L. 229-4 et L. 229-5 du code de la sécurité intérieure instituent un régime de visites et de saisies à des fins de prévention du terrorisme. L'article L. 229-1 définit les conditions dans lesquelles ces visites et saisies peuvent être autorisées par le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Paris, sur saisine du représentant de l'État dans le département ou, à Paris, du préfet de police. L'article L. 229-2 détermine les modalités de mise en œuvre des visites. L'article L. 229-4 permet de retenir sur place, pendant le déroulement des opérations, la personne en cause. L'article L. 229-5 fixe les conditions dans lesquelles l'autorité administrative peut, à l'occasion de la visite, procéder à la saisie de documents, objets et données qui s'y trouvent, ainsi qu'à leur exploitation.

59. En premier lieu, en vertu de l'article L. 229-1 du code de la sécurité intérieure, les visites et saisies ne peuvent être autorisées qu'aux seules fins de prévenir la commission d'actes de terrorisme. En outre, deux conditions cumulatives doivent être réunies. D'une part, il appartient au préfet d'établir qu'il existe des raisons sérieuses de penser qu'un lieu est fréquenté par une personne dont le comportement constitue une menace d'une particulière gravité pour la sécurité et l'ordre publics. Cette menace doit être en lien avec le risque de commission d'un acte de terrorisme. D'autre part, il lui appartient également de prouver soit que cette personne entre en relation de manière habituelle avec des personnes ou des organisations incitant, facilitant ou participant à des actes de terrorisme, soit qu'elle soutient, diffuse, lorsque cette diffusion s'accompagne d'une manifestation d'adhésion à l'idéologie exprimée, ou adhère à des thèses incitant à la commission d'actes de terrorisme ou faisant l'apologie de tels actes. En adoptant les dispositions contestées, le législateur a ainsi poursuivi l'objectif de lutte contre le terrorisme, qui participe de l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public. Il a également défini avec précision les conditions de recours aux visites et saisies et limité leur champ d'application à des personnes soupçonnées de présenter une menace d'une particulière gravité pour l'ordre public.

60. En deuxième lieu, d'une part, le législateur a soumis toute visite et saisie à l'autorisation préalable du juge des libertés et de la détention, qui doit être saisi par une requête motivée du préfet et statuer par une ordonnance écrite et motivée, après avis du procureur de la République. D'autre part, les visites et saisies ne peuvent concerner les lieux affectés à l'exercice d'un mandat parlementaire ou à l'activité professionnelle des avocats, des magistrats ou des journalistes et les domiciles de ces personnes.

61. En troisième lieu, en application du troisième alinéa de l'article L. 229-2 du code de la sécurité intérieure, la visite doit être effectuée en présence de l'occupant des lieux ou de son représentant et lui permet de se faire assister d'un conseil de son choix. En l'absence de l'occupant, les agents ne peuvent procéder à la visite qu'en présence de deux témoins qui ne sont pas placés sous leur autorité.

62. En quatrième lieu, si le dixième alinéa de l'article L. 229-2 permet aux agents chargés d'une visite, en cas de découverte d'éléments révélant l'existence d'autres lieux répondant aux conditions fixées au premier alinéa de l'article L. 229-1, de procéder sans délai à la visite de ces lieux sur autorisation du juge des libertés et de la détention, ces dispositions ne dispensent pas du respect des autres conditions prévues à l'article L. 229-2. Les voies de recours prévues à l'article L. 229-3 sont également applicables.

63. En cinquième lieu, la mesure de retenue sur place prévue par le premier alinéa de l'article L. 229-4 ne peut s'appliquer qu'à la personne pour laquelle il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace d'une particulière gravité et à la condition qu'elle soit susceptible de fournir des renseignements sur les objets, documents et données présents sur le lieu de la visite ayant un lien avec la finalité de prévention de la commission d'actes de terrorisme ayant justifié cette visite. Cette retenue, dont la durée est limitée à quatre heures et qui ne peut concerner que la personne fréquentant le lieu visité, est précédée de l'information sans délai du juge des libertés et de la détention, qui peut y mettre fin à tout moment. Lorsqu'il s'agit d'un mineur, la retenue fait l'objet d'un accord exprès du juge des libertés et de la détention.

64. En dernier lieu, d'une part, la copie des données informatiques permise par l'article L. 229-5 n'est possible que lorsque la visite révèle l'existence de données relatives à la menace d'une particulière gravité pour la sécurité et l'ordre publics que constitue le comportement de la personne. Réalisée en présence de l'officier de police judiciaire, cette copie ne peut être effectuée sans que soit établi un procès-verbal indiquant ses motifs et dressant l'inventaire des données saisies, et sans qu'une copie en soit remise à l'occupant du lieu, à son représentant ou à deux témoins ainsi qu'au juge ayant délivré l'autorisation.

65. D'autre part, l'exploitation des données saisies nécessite l'autorisation préalable du juge des libertés et de la détention, saisi à cette fin par l'autorité administrative à l'issue de la visite. Cette autorisation ne peut porter sur des éléments dépourvus de tout lien avec la finalité de prévention de la commission d'actes de terrorisme ayant justifié la visite. Dans l'attente de la décision du juge, les données sont placées sous la responsabilité du chef du service ayant procédé à la visite et nul ne peut y avoir accès. Si l'ordonnance autorisant l'exploitation des données saisies est prise par le juge des libertés et de la détention sans débat contradictoire ni audience publique, elle est susceptible d'un recours, non suspensif, devant le premier président de la cour d'appel, qui se prononce alors dans les quarante-huit heures.

66. Il résulte de ce qui précède que le législateur, qui a à la fois strictement borné le champ d'application de la mesure qu'il a instaurée et apporté les garanties nécessaires, a assuré une conciliation qui n'est pas manifestement déséquilibrée entre, d'une part, l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public et, d'autre part, le droit au respect de la vie privée, l'inviolabilité du domicile et la liberté d'aller et de venir. Il n'a pas non plus méconnu le droit à un recours juridictionnel effectif.

- S'agissant du grief tiré de la méconnaissance du droit de propriété :

67. La propriété figure au nombre des droits de l'homme consacrés par les articles 2 et 17 de la Déclaration de 1789. Selon son article 17 : « La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité ». En l'absence de privation du droit de propriété au sens de cet article, il résulte néanmoins de l'article 2 de la Déclaration de 1789 que les atteintes portées à ce droit doivent être justifiées par un motif d'intérêt général et proportionnées à l'objectif poursuivi.

68. Les dispositions contestées permettent la saisie, au cours de la visite, non seulement de données et des systèmes informatiques et équipements terminaux qui en sont le support, mais aussi de « documents » et d'« objets ». Toutefois, à la différence du régime qu'il a défini pour les données et les supports, le législateur n'a fixé aucune règle encadrant l'exploitation, la conservation et la restitution des documents et objets saisis au cours de la visite. Par conséquent, les dispositions contestées méconnaissent le droit de propriété.

69. Dès lors, les mots « des documents, objets ou » figurant au premier alinéa de l'article L. 229-1, les mots « objets, documents et » figurant au premier alinéa du paragraphe I de l'article L. 229-4 et les mots « documents, objets ou » et « objets, documents ou » figurant respectivement aux premier et second alinéas du paragraphe I de l'article L. 229-5 du code de la sécurité intérieure doivent être déclarés contraires à la Constitution.

70. Il résulte de tout ce qui précède que le reste de l'article L. 229-1, les troisième et dixième alinéas de l'article L. 229-2, le reste du premier alinéa du paragraphe I de l'article L. 229-4 et le reste de l'article L. 229-5 du code de la sécurité intérieure, qui ne sont pas entachés d'incompétence négative et qui ne méconnaissent ni les droits de la défense, ni le droit à un procès équitable, ni aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent être déclarés conformes à la Constitution.

- Sur les effets de la déclaration d'inconstitutionnalité :

71. Selon le deuxième alinéa de l'article 62 de la Constitution : « Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l'article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d'être remis en cause ». En principe, la déclaration d'inconstitutionnalité doit bénéficier à l'auteur de la question prioritaire de constitutionnalité et la disposition déclarée contraire à la Constitution ne peut être appliquée dans les instances en cours à la date de la publication de la décision du Conseil constitutionnel. Cependant, les dispositions de l'article 62 de la Constitution réservent à ce dernier le pouvoir tant de fixer la date de l'abrogation et de reporter dans le temps ses effets que de prévoir la remise en cause des effets que la disposition a produits avant l'intervention de cette déclaration.

72. En premier lieu, l'abrogation immédiate des mots « sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative », figurant à la deuxième phrase de l'avant-dernier alinéa de l'article L. 228-5 du code de la sécurité intérieure, aurait des conséquences manifestement excessives. En effet, la combinaison du caractère suspensif du recours avec le fait qu'aucun délai n'est fixé au juge pour statuer pourrait avoir pour conséquence d'empêcher l'exécution en temps utile de la décision de renouvellement de l'interdiction de fréquenter. Par suite, afin de permettre au législateur de remédier à l'inconstitutionnalité constatée, il y a lieu de reporter au 1er octobre 2018 la date de l'abrogation de ces mots.

73. En second lieu, aucun motif ne justifie de reporter les effets des déclarations d'inconstitutionnalité mentionnées aux paragraphes 53 et 69. Celles-ci interviennent donc à compter de la date de publication de la présente décision.

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE :

Article 1er. - Il n'y a pas lieu de statuer sur la question prioritaire de constitutionnalité portant sur l'article L. 228-2 du code de la sécurité intérieure, dans sa rédaction issue de la loi n° 2017-1510 du 30 octobre 2017 renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme.

Article 2. - Sont contraires à la Constitution :

  • les mots « sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative » figurant à la deuxième phrase de l'avant-dernier alinéa de l'article L. 228-5 et la deuxième phrase du dernier alinéa du même article L. 228-5 du code de la sécurité intérieure, dans sa rédaction issue de la loi n° 2017-1510 du 30 octobre 2017 renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme ;
  • les mots « des documents, objets ou » figurant au premier alinéa de l'article L. 229-1, les mots « objets, documents et » figurant au premier alinéa du paragraphe I de l'article L. 229-4 et les mots « documents, objets ou » et « objets, documents ou » figurant respectivement aux premier et second alinéas du paragraphe I de l'article L. 229-5 du code de la sécurité intérieure, dans la même rédaction.

Article 3. - Sont conformes à la Constitution :

  • sous les réserves énoncées aux paragraphes 27, 33 et 34, les dispositions de l'article L. 226-1 du code de la sécurité intérieure, dans sa rédaction issue de la loi n° 2017-1510 du 30 octobre 2017 renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme, les mots « ou à celle des périmètres de protection institués en application de l'article L. 226-1 » figurant au sixième alinéa de l'article L. 511-1, les mots « y compris dans les périmètres de protection institués en application de l'article L. 226-1 » figurant au premier alinéa de l'article L. 613-1 et les mots « ou lorsqu'un périmètre de protection a été institué en application de l'article L. 226-1 » figurant à la première phrase du second alinéa de l'article L. 613-2 du même code, dans leur rédaction résultant de la même loi  ;
  • sous les réserves énoncées aux paragraphes 51, 52 et 53, le reste de l'article L. 228-5 du code de la sécurité intérieure, dans sa rédaction issue de la même loi.

Article 4. - Sont conformes à la Constitution :

  • l'article L. 227-1 du code de la sécurité intérieure, dans sa rédaction issue de la loi n° 2017-1510 du 30 octobre 2017 renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme ;
  • l'article L. 228-1 du code de la sécurité intérieure, dans la même rédaction ;
  • le reste de l'article L. 229-1, les troisième et dixième alinéas de l'article L. 229-2, le reste du premier alinéa du paragraphe I de l'article L. 229-4 et le reste de l'article L. 229-5 du code de la sécurité intérieure, dans la même rédaction.

Article 5. - La déclaration d'inconstitutionnalité de l'article 2 prend effet dans les conditions fixées aux paragraphes 72 et 73 de cette décision.

Article 6. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée.

Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 29 mars 2018, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, MM. Michel CHARASSE, Jean-Jacques HYEST, Lionel JOSPIN, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, Nicole MAESTRACCI et M. Michel PINAULT.

Rendu public le 29 mars 2018.

JORF n°0075 du 30 mars 2018 texte n° 111
ECLI : FR : CC : 2018 : 2017.695.QPC

Les abstracts

  • 1. NORMES CONSTITUTIONNELLES
  • 1.5. CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
  • 1.5.1. Préambule et article 1er
  • 1.5.1.5. Principe de laïcité (article 1er)

Aux termes de l'article 10 de la Déclaration de 1789 : « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la loi ». Il en résulte la liberté de conscience. L'article 1er de la Constitution dispose que « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances ». Il résulte de cet article et de l'article 10 de la Déclaration de 1789 que le principe de laïcité impose notamment que la République garantisse le libre exercice des cultes.

(2017-695 QPC, 29 mars 2018, cons. 37, JORF n°0075 du 30 mars 2018 texte n° 111)
  • 1. NORMES CONSTITUTIONNELLES
  • 1.7. OBJECTIFS DE VALEUR CONSTITUTIONNELLE
  • 1.7.1. Retenus
  • 1.7.1.1. Sauvegarde de l'ordre public

L'objectif de lutte contre le terrorisme participe de l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public.

(2017-695 QPC, 29 mars 2018, cons. 31, JORF n°0075 du 30 mars 2018 texte n° 111)
  • 3. NORMES LÉGISLATIVES ET RÉGLEMENTAIRES
  • 3.3. ÉTENDUE ET LIMITES DE LA COMPÉTENCE LÉGISLATIVE
  • 3.3.4. Incompétence négative
  • 3.3.4.2. Absence d'incompétence négative
  • 3.3.4.2.1. Le législateur a épuisé sa compétence

En vertu de l'article L. 228-1 du code de la sécurité intérieure, une mesure individuelle de contrôle administratif et de surveillance ne peut être prononcée qu'aux fins de prévenir la commission d'un acte de terrorisme. En outre, deux conditions cumulatives doivent être réunies. D'une part, il appartient au ministre de l'intérieur d'établir qu'il existe des raisons sérieuses de penser que le comportement de la personne visée par la mesure constitue une menace d'une particulière gravité pour la sécurité et l'ordre publics. Cette menace doit être nécessairement en lien avec le risque de commission d'un acte de terrorisme. D'autre part, il lui appartient également de prouver soit que cette personne « entre en relation de manière habituelle avec des personnes ou des organisations incitant, facilitant ou participant à des actes de terrorisme », soit qu'elle « soutient, diffuse, lorsque cette diffusion s'accompagne d'une manifestation d'adhésion à l'idéologie exprimée, ou adhère à des thèses incitant à la commission d'actes de terrorisme ou faisant l'apologie de tels actes ». En adoptant les dispositions contestées, le législateur a défini avec précision les conditions de recours aux mesures de contrôle administratif ou de surveillance. Absence d'incompétence négative dans des conditions de nature à affecter le droit de mener une vie familiale normale, le droit au respect de la vie privée et la liberté d'aller et de venir.

(2017-695 QPC, 29 mars 2018, cons. 46, 47, JORF n°0075 du 30 mars 2018 texte n° 111)
  • 4. DROITS ET LIBERTÉS
  • 4.2. PRINCIPES GÉNÉRAUX APPLICABLES AUX DROITS ET LIBERTÉS CONSTITUTIONNELLEMENT GARANTIS
  • 4.2.2. Garantie des droits
  • 4.2.2.3. Droit au recours
  • 4.2.2.3.2. Procédure administrative

Le législateur a soumis toute visite et saisie prévue aux articles L. 229-1 et suivants du code de la sécurité intérieure à l'autorisation préalable du juge des libertés et de la détention, qui doit être saisi par une requête motivée du préfet et statuer par une ordonnance écrite et motivée, après avis du procureur de la République. Ces visites et saisies ne peuvent concerner les lieux affectés à l'exercice d'un mandat parlementaire ou à l'activité professionnelle des avocats, des magistrats ou des journalistes et les domiciles de ces personnes. Si les dispositions contestées permettent aux agents chargés d'une visite, en cas de découverte d'éléments révélant l'existence d'autres lieux répondant aux conditions fixées au premier alinéa de l'article L. 229-1, de procéder sans délai à la visite de ces lieux sur autorisation du juge des libertés et de la détention, ces dispositions ne dispensent pas du respect des autres conditions prévues à l'article L. 229-2. Les voies de recours prévues à l'article L. 229-3 sont également applicables. Par ailleurs, la mesure de retenue sur place prévue par le premier alinéa de l'article L. 229-4 ne peut s'appliquer qu'à la personne pour laquelle il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace d'une particulière gravité et à la condition qu'elle soit susceptible de fournir des renseignements sur les objets, documents et données présents sur le lieu de la visite ayant un lien avec la finalité de prévention de la commission d'actes de terrorisme ayant justifié cette visite. Cette retenue, dont la durée est limitée à quatre heures et qui ne peut concerner que la personne fréquentant le lieu visité, est précédée de l'information sans délai du juge des libertés et de la détention, qui peut y mettre fin à tout moment. Lorsqu'il s'agit d'un mineur, la retenue fait l'objet d'un accord exprès du juge des libertés et de la détention. D'autre part, l'exploitation des données saisies nécessite l'autorisation préalable du juge des libertés et de la détention, saisi à cette fin par l'autorité administrative à l'issue de la visite. Cette autorisation ne peut porter sur des éléments dépourvus de tout lien avec la finalité de prévention de la commission d'actes de terrorisme ayant justifié la visite. Dans l'attente de la décision du juge, les données sont placées sous la responsabilité du chef du service ayant procédé à la visite et nul ne peut y avoir accès. Si l'ordonnance autorisant l'exploitation des données saisies est prise par le juge des libertés et de la détention sans débat contradictoire ni audience publique, elle est susceptible d'un recours, non suspensif, devant le premier président de la cour d'appel, qui se prononce alors dans les quarante-huit heures. Le grief tiré de la méconnaissance du droit à un recours juridictionnel effectif est écarté.

(2017-695 QPC, 29 mars 2018, cons. 60, 62, 63, 65, JORF n°0075 du 30 mars 2018 texte n° 111)

La mesure d'interdiction de fréquenter prévue à l'article L. 228–5 du code de sécurité intérieure, qui peut faire l'objet d'un recours en référé sur le fondement des articles L. 521–1 et L. 521-2 du code de justice administrative, est susceptible d'être contestée par la voie du recours pour excès de pouvoir, dans un délai de deux mois après sa notification ou la notification de son renouvellement, devant le tribunal administratif. Ce dernier doit alors se prononcer dans un délai de quatre mois. Le Conseil constitutionnel censure ce délai, en raison de l'atteinte qu'il porte à d'autres exigences constitutionnelles, et il précise que le droit à un recours juridictionnel effectif impose que le juge administratif soit tenu de statuer sur la demande d'annulation de la mesure dans de brefs délais.

(2017-695 QPC, 29 mars 2018, cons. 53, JORF n°0075 du 30 mars 2018 texte n° 111)
  • 4. DROITS ET LIBERTÉS
  • 4.2. PRINCIPES GÉNÉRAUX APPLICABLES AUX DROITS ET LIBERTÉS CONSTITUTIONNELLEMENT GARANTIS
  • 4.2.2. Garantie des droits
  • 4.2.2.7. Force publique nécessaire à la garantie des droits

Les dispositions contestées confèrent aux agents de la force publique la possibilité de se faire assister, au sein des périmètres de protection, pour la mise en œuvre des palpations de sécurité et des inspections et fouilles de bagages, par des agents agréés exerçant une activité privée de sécurité. Ce faisant, le législateur a permis d'associer des personnes privées à l'exercice de missions de surveillance générale de la voie publique. Il résulte des dispositions contestées que ces personnes ne peuvent toutefois qu'assister les agents de police judiciaire et sont placées « sous l'autorité d'un officier de police judiciaire ». Il appartient aux autorités publiques de prendre les dispositions afin de s'assurer que soit continûment garantie l'effectivité du contrôle exercé sur ces personnes par les officiers de police judiciaire. Sous cette réserve, ces dispositions ne méconnaissent pas les exigences découlant de l'article 12 de la Déclaration de 1789.

(2017-695 QPC, 29 mars 2018, cons. 27, JORF n°0075 du 30 mars 2018 texte n° 111)
  • 4. DROITS ET LIBERTÉS
  • 4.5. DROIT AU RESPECT DE LA VIE PRIVÉE (voir également ci-dessous Droits des étrangers et droit d'asile, Liberté individuelle et Liberté personnelle)
  • 4.5.3. Inviolabilité du domicile (voir également ci-dessous Liberté individuelle)

En premier lieu, en vertu des dispositions contestées, les visites et saisies ne peuvent être autorisées qu'aux seules fins de prévenir la commission d'actes de terrorisme. En outre, deux conditions cumulatives doivent être réunies. D'une part, il appartient au préfet d'établir qu'il existe des raisons sérieuses de penser qu'un lieu est fréquenté par une personne dont le comportement constitue une menace d'une particulière gravité pour la sécurité et l'ordre publics. Cette menace doit être en lien avec le risque de commission d'un acte de terrorisme. D'autre part, il lui appartient également de prouver soit que cette personne entre en relation de manière habituelle avec des personnes ou des organisations incitant, facilitant ou participant à des actes de terrorisme, soit qu'elle soutient, diffuse, lorsque cette diffusion s'accompagne d'une manifestation d'adhésion à l'idéologie exprimée, ou adhère à des thèses incitant à la commission d'actes de terrorisme ou faisant l'apologie de tels actes. En adoptant les dispositions contestées, le législateur a ainsi poursuivi l'objectif de lutte contre le terrorisme, qui participe de l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public. Il a également défini avec précision les conditions de recours aux visites et saisies et limité leur champ d'application à des personnes soupçonnées de présenter une menace d'une particulière gravité pour l'ordre public.
En deuxième lieu, d'une part, le législateur a soumis toute visite et saisie à l'autorisation préalable du juge des libertés et de la détention, qui doit être saisi par une requête motivée du préfet et statuer par une ordonnance écrite et motivée, après avis du procureur de la République. D'autre part, les visites et saisies ne peuvent concerner les lieux affectés à l'exercice d'un mandat parlementaire ou à l'activité professionnelle des avocats, des magistrats ou des journalistes et les domiciles de ces personnes.
En troisième lieu, la visite doit être effectuée en présence de l'occupant des lieux ou de son représentant et lui permet de se faire assister d'un conseil de son choix. En l'absence de l'occupant, les agents ne peuvent procéder à la visite qu'en présence de deux témoins qui ne sont pas placés sous leur autorité.
En quatrième lieu, si les dispositions contestées permettent aux agents chargés d'une visite, en cas de découverte d'éléments révélant l'existence d'autres lieux répondant aux conditions précitées, de procéder sans délai à la visite de ces lieux sur autorisation du juge des libertés et de la détention, ces dispositions ne dispensent pas du respect des autres conditions prévues à l'article L. 229-2 du code de la sécurité intérieure. Les voies de recours prévues à l'article L. 229-3 sont également applicables.
En cinquième lieu, la mesure de retenue sur place prévue par les dispositions contestées ne peut s'appliquer qu'à la personne pour laquelle il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace d'une particulière gravité et à la condition qu'elle soit susceptible de fournir des renseignements sur les objets, documents et données présents sur le lieu de la visite ayant un lien avec la finalité de prévention de la commission d'actes de terrorisme ayant justifié cette visite. Cette retenue, dont la durée est limitée à quatre heures et qui ne peut concerner que la personne fréquentant le lieu visité, est précédée de l'information sans délai du juge des libertés et de la détention, qui peut y mettre fin à tout moment. Lorsqu'il s'agit d'un mineur, la retenue fait l'objet d'un accord exprès du juge des libertés et de la détention.
En dernier lieu, d'une part, la copie des données informatiques permise par les dispositions contestées n'est possible que lorsque la visite révèle l'existence de données relatives à la menace d'une particulière gravité pour la sécurité et l'ordre publics que constitue le comportement de la personne. Réalisée en présence de l'officier de police judiciaire, cette copie ne peut être effectuée sans que soit établi un procès-verbal indiquant ses motifs et dressant l'inventaire des données saisies, et sans qu'une copie en soit remise à l'occupant du lieu, à son représentant ou à deux témoins ainsi qu'au juge ayant délivré l'autorisation. D'autre part, l'exploitation des données saisies nécessite l'autorisation préalable du juge des libertés et de la détention, saisi à cette fin par l'autorité administrative à l'issue de la visite. Cette autorisation ne peut porter sur des éléments dépourvus de tout lien avec la finalité de prévention de la commission d'actes de terrorisme ayant justifié la visite. Dans l'attente de la décision du juge, les données sont placées sous la responsabilité du chef du service ayant procédé à la visite et nul ne peut y avoir accès. Si l'ordonnance autorisant l'exploitation des données saisies est prise par le juge des libertés et de la détention sans débat contradictoire ni audience publique, elle est susceptible d'un recours, non suspensif, devant le premier président de la cour d'appel, qui se prononce alors dans les quarante-huit heures.
Il résulte de ce qui précède que le législateur, qui a à la fois strictement borné le champ d'application de la mesure qu'il a instaurée et apporté les garanties nécessaires, a assuré une conciliation qui n'est pas manifestement déséquilibrée entre, d'une part, l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public et, d'autre part, l'inviolabilité du domicile.

(2017-695 QPC, 29 mars 2018, cons. 57, 58, 59, 60, 61, 62, 63, 64, 65, 66, JORF n°0075 du 30 mars 2018 texte n° 111)
  • 4. DROITS ET LIBERTÉS
  • 4.5. DROIT AU RESPECT DE LA VIE PRIVÉE (voir également ci-dessous Droits des étrangers et droit d'asile, Liberté individuelle et Liberté personnelle)
  • 4.5.7. Vidéosurveillance, sonorisations, fixations d'images, visites domiciliaires, perquisitions, saisies, captations de données informatiques

En premier lieu, en vertu des dispositions contestées, les visites et saisies ne peuvent être autorisées qu'aux seules fins de prévenir la commission d'actes de terrorisme. En outre, deux conditions cumulatives doivent être réunies. D'une part, il appartient au préfet d'établir qu'il existe des raisons sérieuses de penser qu'un lieu est fréquenté par une personne dont le comportement constitue une menace d'une particulière gravité pour la sécurité et l'ordre publics. Cette menace doit être en lien avec le risque de commission d'un acte de terrorisme. D'autre part, il lui appartient également de prouver soit que cette personne entre en relation de manière habituelle avec des personnes ou des organisations incitant, facilitant ou participant à des actes de terrorisme, soit qu'elle soutient, diffuse, lorsque cette diffusion s'accompagne d'une manifestation d'adhésion à l'idéologie exprimée, ou adhère à des thèses incitant à la commission d'actes de terrorisme ou faisant l'apologie de tels actes. En adoptant les dispositions contestées, le législateur a ainsi poursuivi l'objectif de lutte contre le terrorisme, qui participe de l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public. Il a également défini avec précision les conditions de recours aux visites et saisies et limité leur champ d'application à des personnes soupçonnées de présenter une menace d'une particulière gravité pour l'ordre public.
En deuxième lieu, d'une part, le législateur a soumis toute visite et saisie à l'autorisation préalable du juge des libertés et de la détention, qui doit être saisi par une requête motivée du préfet et statuer par une ordonnance écrite et motivée, après avis du procureur de la République. D'autre part, les visites et saisies ne peuvent concerner les lieux affectés à l'exercice d'un mandat parlementaire ou à l'activité professionnelle des avocats, des magistrats ou des journalistes et les domiciles de ces personnes.
En troisième lieu, la visite doit être effectuée en présence de l'occupant des lieux ou de son représentant et lui permet de se faire assister d'un conseil de son choix. En l'absence de l'occupant, les agents ne peuvent procéder à la visite qu'en présence de deux témoins qui ne sont pas placés sous leur autorité.
En quatrième lieu, si les dispositions contestées permettent aux agents chargés d'une visite, en cas de découverte d'éléments révélant l'existence d'autres lieux répondant aux conditions précitées, de procéder sans délai à la visite de ces lieux sur autorisation du juge des libertés et de la détention, ces dispositions ne dispensent pas du respect des autres conditions prévues à l'article L. 229-2 du code de la sécurité intérieure. Les voies de recours prévues à l'article L. 229-3 sont également applicables.
En cinquième lieu, la mesure de retenue sur place prévue par les dispositions contestées ne peut s'appliquer qu'à la personne pour laquelle il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace d'une particulière gravité et à la condition qu'elle soit susceptible de fournir des renseignements sur les objets, documents et données présents sur le lieu de la visite ayant un lien avec la finalité de prévention de la commission d'actes de terrorisme ayant justifié cette visite. Cette retenue, dont la durée est limitée à quatre heures et qui ne peut concerner que la personne fréquentant le lieu visité, est précédée de l'information sans délai du juge des libertés et de la détention, qui peut y mettre fin à tout moment. Lorsqu'il s'agit d'un mineur, la retenue fait l'objet d'un accord exprès du juge des libertés et de la détention.
En dernier lieu, d'une part, la copie des données informatiques permise par les dispositions contestées n'est possible que lorsque la visite révèle l'existence de données relatives à la menace d'une particulière gravité pour la sécurité et l'ordre publics que constitue le comportement de la personne. Réalisée en présence de l'officier de police judiciaire, cette copie ne peut être effectuée sans que soit établi un procès-verbal indiquant ses motifs et dressant l'inventaire des données saisies, et sans qu'une copie en soit remise à l'occupant du lieu, à son représentant ou à deux témoins ainsi qu'au juge ayant délivré l'autorisation. D'autre part, l'exploitation des données saisies nécessite l'autorisation préalable du juge des libertés et de la détention, saisi à cette fin par l'autorité administrative à l'issue de la visite. Cette autorisation ne peut porter sur des éléments dépourvus de tout lien avec la finalité de prévention de la commission d'actes de terrorisme ayant justifié la visite. Dans l'attente de la décision du juge, les données sont placées sous la responsabilité du chef du service ayant procédé à la visite et nul ne peut y avoir accès. Si l'ordonnance autorisant l'exploitation des données saisies est prise par le juge des libertés et de la détention sans débat contradictoire ni audience publique, elle est susceptible d'un recours, non suspensif, devant le premier président de la cour d'appel, qui se prononce alors dans les quarante-huit heures.
Il résulte de ce qui précède que le législateur, qui a à la fois strictement borné le champ d'application de la mesure qu'il a instaurée et apporté les garanties nécessaires, a assuré une conciliation qui n'est pas manifestement déséquilibrée entre, d'une part, l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public et, d'autre part, le droit au respect de la vie privée.

(2017-695 QPC, 29 mars 2018, cons. 57, 58, 59, 60, 61, 62, 63, 64, 65, 66, JORF n°0075 du 30 mars 2018 texte n° 111)
  • 4. DROITS ET LIBERTÉS
  • 4.5. DROIT AU RESPECT DE LA VIE PRIVÉE (voir également ci-dessous Droits des étrangers et droit d'asile, Liberté individuelle et Liberté personnelle)
  • 4.5.13. Assignation à résidence et mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance

En vertu de l'article L. 228-1 du code de la sécurité intérieure, une mesure individuelle de contrôle administratif et de surveillance ne peut être prononcée qu'aux fins de prévenir la commission d'un acte de terrorisme. En outre, deux conditions cumulatives doivent être réunies. D'une part, il appartient au ministre de l'intérieur d'établir qu'il existe des raisons sérieuses de penser que le comportement de la personne visée par la mesure constitue une menace d'une particulière gravité pour la sécurité et l'ordre publics. Cette menace doit être nécessairement en lien avec le risque de commission d'un acte de terrorisme. D'autre part, il lui appartient également de prouver soit que cette personne « entre en relation de manière habituelle avec des personnes ou des organisations incitant, facilitant ou participant à des actes de terrorisme », soit qu'elle « soutient, diffuse, lorsque cette diffusion s'accompagne d'une manifestation d'adhésion à l'idéologie exprimée, ou adhère à des thèses incitant à la commission d'actes de terrorisme ou faisant l'apologie de tels actes ». En adoptant les dispositions contestées, le législateur a défini avec précision les conditions de recours aux mesures de contrôle administratif ou de surveillance. Absence d'incompétence négative dans des conditions de nature à affecter le droit au respect de la vie privée.

(2017-695 QPC, 29 mars 2018, cons. 46, 47, JORF n°0075 du 30 mars 2018 texte n° 111)

L'article L. 228-5 du code de la sécurité intérieure permet au ministre de l'intérieur d'interdire à toute personne mentionnée à l'article L. 228-1 de se trouver en relation directe ou indirecte avec certaines personnes, nommément désignées, dont il existe des raisons sérieuses de penser que leur comportement constitue une menace pour la sécurité publique. Ces dispositions portent donc atteinte au droit de mener une vie familiale normale, au droit au respect de la vie privée et à la liberté d'aller et de venir.
En premier lieu, toutefois, la mesure prévue à l'article L. 228–5 n'est susceptible de s'appliquer que si les conditions fixées à l'article L. 228-1 sont remplies. En adoptant ces dispositions, le législateur a poursuivi l'objectif de lutte contre le terrorisme, qui participe de l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public, et a limité le champ d'application de cette mesure aux personnes soupçonnées de présenter une menace d'une particulière gravité pour l'ordre public.
En deuxième lieu, compte tenu des conditions ainsi retenues par le législateur, la menace présentée par les personnes nommément désignées, dont la fréquentation est interdite, doit être en lien avec le risque de commission d'actes de terrorisme.
En troisième lieu, il appartient au ministre de l'intérieur de tenir compte, dans la détermination des personnes dont la fréquentation est interdite, des liens familiaux de l'intéressé et de s'assurer en particulier que la mesure d'interdiction de fréquentation ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit de mener une vie familiale normale.
En quatrième lieu, le législateur a limité la durée de la mesure prévue à l'article L. 228-5. Elle ne peut être initialement prononcée ou renouvelée que pour une durée maximale de six mois. Au-delà d'une durée cumulée de six mois, son renouvellement est subordonné à la production par le ministre de l'intérieur d'éléments nouveaux ou complémentaires. La durée totale cumulée de l'interdiction de fréquenter ne peut excéder douze mois. Compte tenu de sa rigueur, cette mesure ne saurait, sans méconnaître les exigences constitutionnelles précitées, excéder, de manière continue ou non, une durée totale cumulée de douze mois.
En dernier lieu, d'une part, la mesure prévue à l'article L. 228–5, qui peut faire l'objet d'un recours en référé sur le fondement des articles L. 521–1 et L. 521-2 du code de justice administrative, est susceptible d'être contestée par la voie du recours pour excès de pouvoir, dans un délai de deux mois après sa notification ou la notification de son renouvellement, devant le tribunal administratif. Ce dernier doit alors se prononcer dans un délai de quatre mois. Toutefois, compte tenu de l'atteinte qu'une telle mesure porte aux droits de l'intéressé, en laissant au juge un délai de quatre mois pour statuer, le législateur a opéré une conciliation manifestement déséquilibrée entre les exigences constitutionnelles précitées et l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public. Par conséquent, la deuxième phrase du dernier alinéa de l'article L. 228-5 du code de la sécurité intérieure doit être déclarée contraire à la Constitution. En outre, le droit à un recours juridictionnel effectif impose que le juge administratif soit tenu de statuer sur la demande d'annulation de la mesure dans de brefs délais. D'autre part, toute décision de renouvellement de la mesure étant notifiée à la personne en cause au plus tard cinq jours avant son entrée en vigueur, celle-ci peut saisir, dans les quarante-huit heures, le juge des référés du tribunal administratif, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, afin qu'il ordonne toutes les mesures nécessaires à la sauvegarde de ses droits et libertés. Ce recours est suspensif. Aux termes du même article L. 521-2, le contrôle mis en œuvre par le juge des référés est limité aux atteintes graves et manifestement illégales. En permettant que la mesure contestée soit renouvelée au-delà de six mois sans qu'un juge ait préalablement statué, à la demande de la personne en cause, sur la régularité et le bien-fondé de la décision de renouvellement, le législateur a opéré une conciliation manifestement déséquilibrée entre les exigences constitutionnelles précitées et l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public. Dès lors, les mots « sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative » figurant à la deuxième phrase de l'avant-dernier alinéa de l'article L. 228-5 du code de la sécurité intérieure doivent être déclarés contraires à la Constitution. 
Sous les réserves énoncées aux troisième, quatrième et dernier lieux, en adoptant le reste des dispositions contestées, le législateur, qui a à la fois strictement borné le champ d'application de la mesure qu'il a instaurée et apporté les garanties nécessaires, a assuré une conciliation qui n'est pas manifestement déséquilibrée entre, d'une part, l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public et, d'autre part, le droit de mener une vie familiale normale, le droit au respect de la vie privée et la liberté d'aller et de venir.

(2017-695 QPC, 29 mars 2018, cons. 48, 49, 50, 51, 52, 53, 54, 55, 56, JORF n°0075 du 30 mars 2018 texte n° 111)
  • 4. DROITS ET LIBERTÉS
  • 4.5. DROIT AU RESPECT DE LA VIE PRIVÉE (voir également ci-dessous Droits des étrangers et droit d'asile, Liberté individuelle et Liberté personnelle)
  • 4.5.16. Contrôles d'identité, fouilles, visites de véhicule

En permettant au préfet d'instituer des périmètres au sein desquels l'accès et la circulation des personnes sont réglementés et des mesures de contrôle mises en œuvre, les dispositions contestées portent atteinte à la liberté d'aller et de venir et au droit au respect de la vie privée.
En premier lieu, un périmètre de protection ne peut être institué par le préfet, par arrêté motivé, qu'aux fins d'assurer la sécurité d'un lieu ou d'un événement exposé à un risque d'actes de terrorisme à raison de sa nature et de l'ampleur de sa fréquentation. En outre, ce périmètre doit être limité aux lieux exposés à la menace et à leurs abords. Enfin, son étendue et sa durée doivent être adaptées et proportionnées aux nécessités que font apparaître les circonstances. En adoptant les dispositions contestées, le législateur a ainsi poursuivi l'objectif de lutte contre le terrorisme, qui participe de l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public. Il a également défini avec précision les conditions de mise en place d'un périmètre de protection et a limité le champ d'application d'un tel dispositif.
En deuxième lieu, les règles d'accès et de circulation au sein du périmètre, définies par l'arrêté préfectoral, doivent être adaptées aux impératifs de la vie privée, professionnelle et familiale des personnes. Cet arrêté détermine également les mesures de vérification, limitativement définies par les dispositions contestées, auxquelles les personnes peuvent être soumises pour y accéder ou y circuler. Ces mesures correspondent à des palpations de sécurité, des inspections visuelles et fouilles de bagages et des visites de véhicules. Elles ne peuvent être opérées que par des autorités de police judiciaire ou, en leur présence et sous leur contrôle effectif, par des agents de police municipale ou des agents agréés exerçant une activité privée de sécurité, avec le consentement des personnes faisant l'objet de ces vérifications. Toutefois, s'il était loisible au législateur de ne pas fixer les critères en fonction desquels sont mises en œuvre, au sein des périmètres de protection, les opérations de contrôle de l'accès et de la circulation, de palpations de sécurité, d'inspection et de fouille des bagages et de visite de véhicules, la mise en œuvre de ces vérifications ainsi confiées par la loi à des autorités de police judiciaire ou sous leur responsabilité ne saurait s'opérer, conformément aux droits et libertés mentionnés ci-dessus, qu'en se fondant sur des critères excluant toute discrimination de quelque nature que ce soit entre les personnes.
En dernier lieu, les dispositions contestées limitent à un mois la durée de validité de l'arrêté préfectoral. Celui-ci ne peut être renouvelé que si les conditions justifiant l'institution du périmètre de protection continuent d'être réunies. Ce renouvellement est ainsi subordonné à la nécessité d'assurer la sécurité du lieu ou de l'événement et à la condition qu'il demeure exposé à un risque d'actes de terrorisme, à raison de sa nature et de l'ampleur de sa fréquentation. Toutefois, compte tenu de la rigueur des mesures prévues par les dispositions contestées, un tel renouvellement ne saurait, sans méconnaître la liberté d'aller et de venir et le droit au respect de la vie privée, être décidé par le préfet sans que celui-ci établisse la persistance du risque.
Sous les réserves énoncées précédemment, en adoptant les dispositions contestées, le législateur, qui a à la fois strictement borné le champ d'application de la mesure qu'il a instaurée et apporté les garanties nécessaires, a assuré une conciliation qui n'est pas manifestement déséquilibrée entre, d'une part, l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public et, d'autre part, le droit au respect de la vie privée.

(2017-695 QPC, 29 mars 2018, cons. 30, 31, 32, 33, 34, 35, JORF n°0075 du 30 mars 2018 texte n° 111)
  • 4. DROITS ET LIBERTÉS
  • 4.6. DROIT DE MENER UNE VIE FAMILIALE NORMALE
  • 4.6.4. Contrôle des garanties légales de ce droit
  • 4.6.4.1. Garanties légales suffisantes

En vertu de l'article L. 228-1 du code de la sécurité intérieure, une mesure individuelle de contrôle administratif et de surveillance ne peut être prononcée qu'aux fins de prévenir la commission d'un acte de terrorisme. En outre, deux conditions cumulatives doivent être réunies. D'une part, il appartient au ministre de l'intérieur d'établir qu'il existe des raisons sérieuses de penser que le comportement de la personne visée par la mesure constitue une menace d'une particulière gravité pour la sécurité et l'ordre publics. Cette menace doit être nécessairement en lien avec le risque de commission d'un acte de terrorisme. D'autre part, il lui appartient également de prouver soit que cette personne « entre en relation de manière habituelle avec des personnes ou des organisations incitant, facilitant ou participant à des actes de terrorisme », soit qu'elle « soutient, diffuse, lorsque cette diffusion s'accompagne d'une manifestation d'adhésion à l'idéologie exprimée, ou adhère à des thèses incitant à la commission d'actes de terrorisme ou faisant l'apologie de tels actes ». En adoptant les dispositions contestées, le législateur a défini avec précision les conditions de recours aux mesures de contrôle administratif ou de surveillance. Absence d'incompétence négative dans des conditions de nature à affecter le droit de mener une vie familiale normale.

(2017-695 QPC, 29 mars 2018, cons. 46, 47, JORF n°0075 du 30 mars 2018 texte n° 111)

L'article L. 228-5 du code de la sécurité intérieure permet au ministre de l'intérieur d'interdire à toute personne mentionnée à l'article L. 228-1 de se trouver en relation directe ou indirecte avec certaines personnes, nommément désignées, dont il existe des raisons sérieuses de penser que leur comportement constitue une menace pour la sécurité publique. Ces dispositions portent donc atteinte au droit de mener une vie familiale normale, au droit au respect de la vie privée et à la liberté d'aller et de venir.
En premier lieu, toutefois, la mesure prévue à l'article L. 228–5 n'est susceptible de s'appliquer que si les conditions fixées à l'article L. 228-1 sont remplies. En adoptant ces dispositions, le législateur a poursuivi l'objectif de lutte contre le terrorisme, qui participe de l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public, et a limité le champ d'application de cette mesure aux personnes soupçonnées de présenter une menace d'une particulière gravité pour l'ordre public.
En deuxième lieu, compte tenu des conditions ainsi retenues par le législateur, la menace présentée par les personnes nommément désignées, dont la fréquentation est interdite, doit être en lien avec le risque de commission d'actes de terrorisme.
En troisième lieu, il appartient au ministre de l'intérieur de tenir compte, dans la détermination des personnes dont la fréquentation est interdite, des liens familiaux de l'intéressé et de s'assurer en particulier que la mesure d'interdiction de fréquentation ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit de mener une vie familiale normale.
En quatrième lieu, le législateur a limité la durée de la mesure prévue à l'article L. 228-5. Elle ne peut être initialement prononcée ou renouvelée que pour une durée maximale de six mois. Au-delà d'une durée cumulée de six mois, son renouvellement est subordonné à la production par le ministre de l'intérieur d'éléments nouveaux ou complémentaires. La durée totale cumulée de l'interdiction de fréquenter ne peut excéder douze mois. Compte tenu de sa rigueur, cette mesure ne saurait, sans méconnaître les exigences constitutionnelles précitées, excéder, de manière continue ou non, une durée totale cumulée de douze mois.
En dernier lieu, d'une part, la mesure prévue à l'article L. 228–5, qui peut faire l'objet d'un recours en référé sur le fondement des articles L. 521–1 et L. 521-2 du code de justice administrative, est susceptible d'être contestée par la voie du recours pour excès de pouvoir, dans un délai de deux mois après sa notification ou la notification de son renouvellement, devant le tribunal administratif. Ce dernier doit alors se prononcer dans un délai de quatre mois. Toutefois, compte tenu de l'atteinte qu'une telle mesure porte aux droits de l'intéressé, en laissant au juge un délai de quatre mois pour statuer, le législateur a opéré une conciliation manifestement déséquilibrée entre les exigences constitutionnelles précitées et l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public. Par conséquent, la deuxième phrase du dernier alinéa de l'article L. 228-5 du code de la sécurité intérieure doit être déclarée contraire à la Constitution. En outre, le droit à un recours juridictionnel effectif impose que le juge administratif soit tenu de statuer sur la demande d'annulation de la mesure dans de brefs délais. D'autre part, toute décision de renouvellement de la mesure étant notifiée à la personne en cause au plus tard cinq jours avant son entrée en vigueur, celle-ci peut saisir, dans les quarante-huit heures, le juge des référés du tribunal administratif, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, afin qu'il ordonne toutes les mesures nécessaires à la sauvegarde de ses droits et libertés. Ce recours est suspensif. Aux termes du même article L. 521-2, le contrôle mis en œuvre par le juge des référés est limité aux atteintes graves et manifestement illégales. En permettant que la mesure contestée soit renouvelée au-delà de six mois sans qu'un juge ait préalablement statué, à la demande de la personne en cause, sur la régularité et le bien-fondé de la décision de renouvellement, le législateur a opéré une conciliation manifestement déséquilibrée entre les exigences constitutionnelles précitées et l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public. Dès lors, les mots « sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative » figurant à la deuxième phrase de l'avant-dernier alinéa de l'article L. 228-5 du code de la sécurité intérieure doivent être déclarés contraires à la Constitution. 
Sous les réserves énoncées aux troisième, quatrième et dernier lieux, en adoptant le reste des dispositions contestées, le législateur, qui a à la fois strictement borné le champ d'application de la mesure qu'il a instaurée et apporté les garanties nécessaires, a assuré une conciliation qui n'est pas manifestement déséquilibrée entre, d'une part, l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public et, d'autre part, le droit de mener une vie familiale normale, le droit au respect de la vie privée et la liberté d'aller et de venir.

(2017-695 QPC, 29 mars 2018, cons. 48, 49, 50, 51, 52, 53, 54, 55, JORF n°0075 du 30 mars 2018 texte n° 111)
  • 4. DROITS ET LIBERTÉS
  • 4.7. DROIT DE PROPRIÉTÉ
  • 4.7.5. Contrôle des atteintes à l'exercice du droit de propriété
  • 4.7.5.2. Atteinte au droit de propriété contraire à la Constitution

Les dispositions contestées permettent la saisie, au cours d'une visite de police administrative aux fins de prévention du terrorisme, non seulement de données et des systèmes informatiques et équipements terminaux qui en sont le support, mais aussi de « documents » et d'« objets ». Toutefois, à la différence du régime qu'il a défini pour les données et les supports informatiques, le législateur n'a fixé aucune règle encadrant l'exploitation, la conservation et la restitution des documents et objets saisis au cours de la visite. Les dispositions contestées méconnaissent le droit de propriété. Censure.

(2017-695 QPC, 29 mars 2018, cons. 67, 68, 69, 70, JORF n°0075 du 30 mars 2018 texte n° 111)
  • 4. DROITS ET LIBERTÉS
  • 4.17. LIBERTÉ DE CONSCIENCE ET D'OPINION
  • 4.17.1. Liberté de conscience

L'article L. 227-1 du code de la sécurité intérieure autorise le préfet, aux fins de prévenir la commission d'actes de terrorisme, à fermer provisoirement des lieux de culte sous certaines conditions. Cette disposition porte donc atteinte à la liberté de conscience et au libre exercice des cultes.
En premier lieu, la mesure de fermeture d'un lieu de culte ne peut être prononcée qu'aux fins de prévenir la commission d'un acte de terrorisme. En outre, une seconde condition doit être remplie : les propos tenus en ce lieu, les idées ou théories qui y sont diffusées ou les activités qui s'y déroulent doivent soit provoquer à la violence, à la haine ou à la discrimination soit provoquer à la commission d'actes de terrorisme ou en faire l'apologie. Il résulte de la combinaison de ces deux conditions, que, lorsque la justification de cette mesure repose sur la provocation à la violence, à la haine ou à la discrimination, il appartient au préfet d'établir que cette provocation est bien en lien avec le risque de commission d'actes de terrorisme. En autorisant l'adoption d'une telle mesure de fermeture provisoire d'un lieu de culte, le législateur a ainsi poursuivi l'objectif de lutte contre le terrorisme, qui participe de l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public.
En deuxième lieu, le législateur a limité à six mois la durée de la mesure prévue à l'article L. 227-1 du code de la sécurité intérieure et n'a pas prévu qu'elle puisse être renouvelée. L'adoption ultérieure d'une nouvelle mesure de fermeture ne peut que reposer sur des faits intervenus après la réouverture du lieu de culte.
En troisième lieu, la mesure de fermeture du lieu de culte doit être justifiée et proportionnée, notamment dans sa durée, aux raisons l'ayant motivée. À ce titre, il appartient au préfet de tenir compte des conséquences d'une telle mesure pour les personnes fréquentant habituellement le lieu de culte et de la possibilité qui leur est offerte ou non de pratiquer leur culte en un autre lieu. Le juge administratif est chargé de s'assurer que cette mesure est adaptée, nécessaire et proportionnée à la finalité qu'elle poursuit.
En dernier lieu, la mesure de fermeture d'un lieu de culte peut faire l'objet d'un recours en référé sur le fondement des articles L. 521-1 et L. 521-2 du code de justice administrative. Elle est alors suspendue jusqu'à la décision du juge de tenir ou non une audience publique. S'il décide de tenir cette audience, la suspension de la mesure se prolonge jusqu'à sa décision sur le référé, qui doit intervenir dans les quarante-huit heures.
Le législateur a assuré une conciliation qui n'est pas manifestement déséquilibrée entre, d'une part, l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public et, d'autre part, la liberté de conscience et le libre exercice des cultes.

(2017-695 QPC, 29 mars 2018, cons. 38, 39, 40, 41, 42, 43, JORF n°0075 du 30 mars 2018 texte n° 111)
  • 4. DROITS ET LIBERTÉS
  • 4.19. LIBERTÉ PERSONNELLE
  • 4.19.3. Liberté personnelle et police administrative

En permettant au préfet d'instituer des périmètres au sein desquels l'accès et la circulation des personnes sont réglementés et des mesures de contrôle mises en œuvre, les dispositions contestées portent atteinte à la liberté d'aller et de venir et au droit au respect de la vie privée.
En premier lieu, un périmètre de protection ne peut être institué par le préfet, par arrêté motivé, qu'aux fins d'assurer la sécurité d'un lieu ou d'un événement exposé à un risque d'actes de terrorisme à raison de sa nature et de l'ampleur de sa fréquentation. En outre, ce périmètre doit être limité aux lieux exposés à la menace et à leurs abords. Enfin, son étendue et sa durée doivent être adaptées et proportionnées aux nécessités que font apparaître les circonstances. En adoptant les dispositions contestées, le législateur a ainsi poursuivi l'objectif de lutte contre le terrorisme, qui participe de l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public. Il a également défini avec précision les conditions de mise en place d'un périmètre de protection et a limité le champ d'application d'un tel dispositif.
En deuxième lieu, les règles d'accès et de circulation au sein du périmètre, définies par l'arrêté préfectoral, doivent être adaptées aux impératifs de la vie privée, professionnelle et familiale des personnes. Cet arrêté détermine également les mesures de vérification, limitativement définies par les dispositions contestées, auxquelles les personnes peuvent être soumises pour y accéder ou y circuler. Ces mesures correspondent à des palpations de sécurité, des inspections visuelles et fouilles de bagages et des visites de véhicules. Elles ne peuvent être opérées que par des autorités de police judiciaire ou, en leur présence et sous leur contrôle effectif, par des agents de police municipale ou des agents agréés exerçant une activité privée de sécurité, avec le consentement des personnes faisant l'objet de ces vérifications. Toutefois, s'il était loisible au législateur de ne pas fixer les critères en fonction desquels sont mises en œuvre, au sein des périmètres de protection, les opérations de contrôle de l'accès et de la circulation, de palpations de sécurité, d'inspection et de fouille des bagages et de visite de véhicules, la mise en œuvre de ces vérifications ainsi confiées par la loi à des autorités de police judiciaire ou sous leur responsabilité ne saurait s'opérer, conformément aux droits et libertés mentionnés ci-dessus, qu'en se fondant sur des critères excluant toute discrimination de quelque nature que ce soit entre les personnes.
En dernier lieu, les dispositions contestées limitent à un mois la durée de validité de l'arrêté préfectoral. Celui-ci ne peut être renouvelé que si les conditions justifiant l'institution du périmètre de protection continuent d'être réunies. Ce renouvellement est ainsi subordonné à la nécessité d'assurer la sécurité du lieu ou de l'événement et à la condition qu'il demeure exposé à un risque d'actes de terrorisme, à raison de sa nature et de l'ampleur de sa fréquentation. Toutefois, compte tenu de la rigueur des mesures prévues par les dispositions contestées, un tel renouvellement ne saurait, sans méconnaître la liberté d'aller et de venir et le droit au respect de la vie privée, être décidé par le préfet sans que celui-ci établisse la persistance du risque.
Sous les réserves énoncées précédemment, en adoptant les dispositions contestées, le législateur, qui a à la fois strictement borné le champ d'application de la mesure qu'il a instaurée et apporté les garanties nécessaires, a assuré une conciliation qui n'est pas manifestement déséquilibrée entre, d'une part, l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public et, d'autre part, la liberté d'aller et de venir.

(2017-695 QPC, 29 mars 2018, cons. 30, 31, 32, 33, 34, 35, JORF n°0075 du 30 mars 2018 texte n° 111)

En premier lieu, en vertu des dispositions contestées, les visites et saisies ne peuvent être autorisées qu'aux seules fins de prévenir la commission d'actes de terrorisme. En outre, deux conditions cumulatives doivent être réunies. D'une part, il appartient au préfet d'établir qu'il existe des raisons sérieuses de penser qu'un lieu est fréquenté par une personne dont le comportement constitue une menace d'une particulière gravité pour la sécurité et l'ordre publics. Cette menace doit être en lien avec le risque de commission d'un acte de terrorisme. D'autre part, il lui appartient également de prouver soit que cette personne entre en relation de manière habituelle avec des personnes ou des organisations incitant, facilitant ou participant à des actes de terrorisme, soit qu'elle soutient, diffuse, lorsque cette diffusion s'accompagne d'une manifestation d'adhésion à l'idéologie exprimée, ou adhère à des thèses incitant à la commission d'actes de terrorisme ou faisant l'apologie de tels actes. En adoptant les dispositions contestées, le législateur a ainsi poursuivi l'objectif de lutte contre le terrorisme, qui participe de l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public. Il a également défini avec précision les conditions de recours aux visites et saisies et limité leur champ d'application à des personnes soupçonnées de présenter une menace d'une particulière gravité pour l'ordre public.
En deuxième lieu, d'une part, le législateur a soumis toute visite et saisie à l'autorisation préalable du juge des libertés et de la détention, qui doit être saisi par une requête motivée du préfet et statuer par une ordonnance écrite et motivée, après avis du procureur de la République. D'autre part, les visites et saisies ne peuvent concerner les lieux affectés à l'exercice d'un mandat parlementaire ou à l'activité professionnelle des avocats, des magistrats ou des journalistes et les domiciles de ces personnes.
En troisième lieu, la visite doit être effectuée en présence de l'occupant des lieux ou de son représentant et lui permet de se faire assister d'un conseil de son choix. En l'absence de l'occupant, les agents ne peuvent procéder à la visite qu'en présence de deux témoins qui ne sont pas placés sous leur autorité.
En quatrième lieu, si les dispositions contestées permettent aux agents chargés d'une visite, en cas de découverte d'éléments révélant l'existence d'autres lieux répondant aux conditions précitées, de procéder sans délai à la visite de ces lieux sur autorisation du juge des libertés et de la détention, ces dispositions ne dispensent pas du respect des autres conditions prévues à l'article L. 229-2 du code de la sécurité intérieure. Les voies de recours prévues à l'article L. 229-3 sont également applicables.
En cinquième lieu, la mesure de retenue sur place prévue par les dispositions contestées ne peut s'appliquer qu'à la personne pour laquelle il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace d'une particulière gravité et à la condition qu'elle soit susceptible de fournir des renseignements sur les objets, documents et données présents sur le lieu de la visite ayant un lien avec la finalité de prévention de la commission d'actes de terrorisme ayant justifié cette visite. Cette retenue, dont la durée est limitée à quatre heures et qui ne peut concerner que la personne fréquentant le lieu visité, est précédée de l'information sans délai du juge des libertés et de la détention, qui peut y mettre fin à tout moment. Lorsqu'il s'agit d'un mineur, la retenue fait l'objet d'un accord exprès du juge des libertés et de la détention.
En dernier lieu, d'une part, la copie des données informatiques permise par les dispositions contestées n'est possible que lorsque la visite révèle l'existence de données relatives à la menace d'une particulière gravité pour la sécurité et l'ordre publics que constitue le comportement de la personne. Réalisée en présence de l'officier de police judiciaire, cette copie ne peut être effectuée sans que soit établi un procès-verbal indiquant ses motifs et dressant l'inventaire des données saisies, et sans qu'une copie en soit remise à l'occupant du lieu, à son représentant ou à deux témoins ainsi qu'au juge ayant délivré l'autorisation. D'autre part, l'exploitation des données saisies nécessite l'autorisation préalable du juge des libertés et de la détention, saisi à cette fin par l'autorité administrative à l'issue de la visite. Cette autorisation ne peut porter sur des éléments dépourvus de tout lien avec la finalité de prévention de la commission d'actes de terrorisme ayant justifié la visite. Dans l'attente de la décision du juge, les données sont placées sous la responsabilité du chef du service ayant procédé à la visite et nul ne peut y avoir accès. Si l'ordonnance autorisant l'exploitation des données saisies est prise par le juge des libertés et de la détention sans débat contradictoire ni audience publique, elle est susceptible d'un recours, non suspensif, devant le premier président de la cour d'appel, qui se prononce alors dans les quarante-huit heures.
Le législateur, qui a à la fois strictement borné le champ d'application de la mesure qu'il a instaurée et apporté les garanties nécessaires, a assuré une conciliation qui n'est pas manifestement déséquilibrée entre, d'une part, l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public et, d'autre part, la liberté d'aller et de venir.

(2017-695 QPC, 29 mars 2018, cons. 57, 58, 59, 60, 61, 62, 63, 64, 65, 66, JORF n°0075 du 30 mars 2018 texte n° 111)

En vertu de l'article L. 228-1 du code de la sécurité intérieure, une mesure individuelle de contrôle administratif et de surveillance ne peut être prononcée qu'aux fins de prévenir la commission d'un acte de terrorisme. En outre, deux conditions cumulatives doivent être réunies. D'une part, il appartient au ministre de l'intérieur d'établir qu'il existe des raisons sérieuses de penser que le comportement de la personne visée par la mesure constitue une menace d'une particulière gravité pour la sécurité et l'ordre publics. Cette menace doit être nécessairement en lien avec le risque de commission d'un acte de terrorisme. D'autre part, il lui appartient également de prouver soit que cette personne « entre en relation de manière habituelle avec des personnes ou des organisations incitant, facilitant ou participant à des actes de terrorisme », soit qu'elle « soutient, diffuse, lorsque cette diffusion s'accompagne d'une manifestation d'adhésion à l'idéologie exprimée, ou adhère à des thèses incitant à la commission d'actes de terrorisme ou faisant l'apologie de tels actes ». En adoptant les dispositions contestées, le législateur a défini avec précision les conditions de recours aux mesures de contrôle administratif ou de surveillance. Absence d'incompétence négative dans des conditions de nature à affecter la liberté d'aller et de venir.

(2017-695 QPC, 29 mars 2018, cons. 46, 47, JORF n°0075 du 30 mars 2018 texte n° 111)

L'article L. 228-5 du code de la sécurité intérieure permet au ministre de l'intérieur d'interdire à toute personne mentionnée à l'article L. 228-1 de se trouver en relation directe ou indirecte avec certaines personnes, nommément désignées, dont il existe des raisons sérieuses de penser que leur comportement constitue une menace pour la sécurité publique. Ces dispositions portent donc atteinte au droit de mener une vie familiale normale, au droit au respect de la vie privée et à la liberté d'aller et de venir.
En premier lieu, toutefois, la mesure prévue à l'article L. 228–5 n'est susceptible de s'appliquer que si les conditions fixées à l'article L. 228-1 sont remplies. En adoptant ces dispositions, le législateur a poursuivi l'objectif de lutte contre le terrorisme, qui participe de l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public, et a limité le champ d'application de cette mesure aux personnes soupçonnées de présenter une menace d'une particulière gravité pour l'ordre public.
En deuxième lieu, compte tenu des conditions ainsi retenues par le législateur, la menace présentée par les personnes nommément désignées, dont la fréquentation est interdite, doit être en lien avec le risque de commission d'actes de terrorisme.
En troisième lieu, il appartient au ministre de l'intérieur de tenir compte, dans la détermination des personnes dont la fréquentation est interdite, des liens familiaux de l'intéressé et de s'assurer en particulier que la mesure d'interdiction de fréquentation ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit de mener une vie familiale normale.
En quatrième lieu, le législateur a limité la durée de la mesure prévue à l'article L. 228-5. Elle ne peut être initialement prononcée ou renouvelée que pour une durée maximale de six mois. Au-delà d'une durée cumulée de six mois, son renouvellement est subordonné à la production par le ministre de l'intérieur d'éléments nouveaux ou complémentaires. La durée totale cumulée de l'interdiction de fréquenter ne peut excéder douze mois. Compte tenu de sa rigueur, cette mesure ne saurait, sans méconnaître les exigences constitutionnelles précitées, excéder, de manière continue ou non, une durée totale cumulée de douze mois.
En dernier lieu, d'une part, la mesure prévue à l'article L. 228–5, qui peut faire l'objet d'un recours en référé sur le fondement des articles L. 521–1 et L. 521-2 du code de justice administrative, est susceptible d'être contestée par la voie du recours pour excès de pouvoir, dans un délai de deux mois après sa notification ou la notification de son renouvellement, devant le tribunal administratif. Ce dernier doit alors se prononcer dans un délai de quatre mois. Toutefois, compte tenu de l'atteinte qu'une telle mesure porte aux droits de l'intéressé, en laissant au juge un délai de quatre mois pour statuer, le législateur a opéré une conciliation manifestement déséquilibrée entre les exigences constitutionnelles précitées et l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public. Par conséquent, la deuxième phrase du dernier alinéa de l'article L. 228-5 du code de la sécurité intérieure doit être déclarée contraire à la Constitution. En outre, le droit à un recours juridictionnel effectif impose que le juge administratif soit tenu de statuer sur la demande d'annulation de la mesure dans de brefs délais. D'autre part, toute décision de renouvellement de la mesure étant notifiée à la personne en cause au plus tard cinq jours avant son entrée en vigueur, celle-ci peut saisir, dans les quarante-huit heures, le juge des référés du tribunal administratif, sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, afin qu'il ordonne toutes les mesures nécessaires à la sauvegarde de ses droits et libertés. Ce recours est suspensif. Aux termes du même article L. 521-2, le contrôle mis en œuvre par le juge des référés est limité aux atteintes graves et manifestement illégales. En permettant que la mesure contestée soit renouvelée au-delà de six mois sans qu'un juge ait préalablement statué, à la demande de la personne en cause, sur la régularité et le bien-fondé de la décision de renouvellement, le législateur a opéré une conciliation manifestement déséquilibrée entre les exigences constitutionnelles précitées et l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public. Dès lors, les mots « sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative » figurant à la deuxième phrase de l'avant-dernier alinéa de l'article L. 228-5 du code de la sécurité intérieure doivent être déclarés contraires à la Constitution. 
Sous les réserves énoncées aux troisième, quatrième et dernier lieux, en adoptant le reste des dispositions contestées, le législateur, qui a à la fois strictement borné le champ d'application de la mesure qu'il a instaurée et apporté les garanties nécessaires, a assuré une conciliation qui n'est pas manifestement déséquilibrée entre, d'une part, l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public et, d'autre part, le droit de mener une vie familiale normale, le droit au respect de la vie privée et la liberté d'aller et de venir.

(2017-695 QPC, 29 mars 2018, cons. 48, 49, 50, 51, 52, 53, 54, 55, JORF n°0075 du 30 mars 2018 texte n° 111)
  • 4. DROITS ET LIBERTÉS
  • 4.24. PRINCIPE DE LAÏCITÉ
  • 4.24.1. Portée du principe

Aux termes de l'article 10 de la Déclaration de 1789 : « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la loi ». Il en résulte la liberté de conscience. L'article 1er de la Constitution dispose que « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances ». Il résulte de cet article et de l'article 10 de la Déclaration de 1789 que le principe de laïcité impose notamment que la République garantisse le libre exercice des cultes.

(2017-695 QPC, 29 mars 2018, cons. 37, JORF n°0075 du 30 mars 2018 texte n° 111)
  • 4. DROITS ET LIBERTÉS
  • 4.24. PRINCIPE DE LAÏCITÉ
  • 4.24.2. Applications

L'article L. 227-1 du code de la sécurité intérieure autorise le préfet, aux fins de prévenir la commission d'actes de terrorisme, à fermer provisoirement des lieux de culte sous certaines conditions. Cette disposition porte donc atteinte à la liberté de conscience et au libre exercice des cultes.
En premier lieu, la mesure de fermeture d'un lieu de culte ne peut être prononcée qu'aux fins de prévenir la commission d'un acte de terrorisme. En outre, une seconde condition doit être remplie : les propos tenus en ce lieu, les idées ou théories qui y sont diffusées ou les activités qui s'y déroulent doivent soit provoquer à la violence, à la haine ou à la discrimination soit provoquer à la commission d'actes de terrorisme ou en faire l'apologie. Il résulte de la combinaison de ces deux conditions, que, lorsque la justification de cette mesure repose sur la provocation à la violence, à la haine ou à la discrimination, il appartient au préfet d'établir que cette provocation est bien en lien avec le risque de commission d'actes de terrorisme. En autorisant l'adoption d'une telle mesure de fermeture provisoire d'un lieu de culte, le législateur a ainsi poursuivi l'objectif de lutte contre le terrorisme, qui participe de l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public.
En deuxième lieu, le législateur a limité à six mois la durée de la mesure prévue à l'article L. 227-1 du code de la sécurité intérieure et n'a pas prévu qu'elle puisse être renouvelée. L'adoption ultérieure d'une nouvelle mesure de fermeture ne peut que reposer sur des faits intervenus après la réouverture du lieu de culte.
En troisième lieu, la mesure de fermeture du lieu de culte doit être justifiée et proportionnée, notamment dans sa durée, aux raisons l'ayant motivée. À ce titre, il appartient au préfet de tenir compte des conséquences d'une telle mesure pour les personnes fréquentant habituellement le lieu de culte et de la possibilité qui leur est offerte ou non de pratiquer leur culte en un autre lieu. Le juge administratif est chargé de s'assurer que cette mesure est adaptée, nécessaire et proportionnée à la finalité qu'elle poursuit.
En dernier lieu, la mesure de fermeture d'un lieu de culte peut faire l'objet d'un recours en référé sur le fondement des articles L. 521-1 et L. 521-2 du code de justice administrative. Elle est alors suspendue jusqu'à la décision du juge de tenir ou non une audience publique. S'il décide de tenir cette audience, la suspension de la mesure se prolonge jusqu'à sa décision sur le référé, qui doit intervenir dans les quarante-huit heures.
Le législateur a assuré une conciliation qui n'est pas manifestement déséquilibrée entre, d'une part, l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public et, d'autre part, la liberté de conscience et le libre exercice des cultes.

(2017-695 QPC, 29 mars 2018, cons. 38, 39, 40, 41, 42, 43, JORF n°0075 du 30 mars 2018 texte n° 111)
  • 5. ÉGALITÉ
  • 5.1. ÉGALITÉ DEVANT LA LOI
  • 5.1.2. Discriminations interdites

S'il était loisible au législateur de ne pas fixer les critères en fonction desquels sont mises en œuvre, au sein des périmètres de protection, les opérations de contrôle de l'accès et de la circulation, de palpations de sécurité, d'inspection et de fouille des bagages et de visite de véhicules, la mise en œuvre de ces vérifications ainsi confiées par la loi à des autorités de police judiciaire ou sous leur responsabilité ne saurait s'opérer, conformément à la liberté d'aller et de venir, au droit au respect de la vie privée et au principe d'égalité devant la loi, qu'en se fondant sur des critères excluant toute discrimination de quelque nature que ce soit entre les personnes.

(2017-695 QPC, 29 mars 2018, cons. 33, JORF n°0075 du 30 mars 2018 texte n° 111)
  • 11. CONSEIL CONSTITUTIONNEL ET CONTENTIEUX DES NORMES
  • 11.6. QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITÉ
  • 11.6.3. Procédure applicable devant le Conseil constitutionnel
  • 11.6.3.2. Grief soulevé d'office par le Conseil constitutionnel

Le Conseil constitutionnel a relevé d'office, d'une part, le grief tiré de ce que, en ne précisant pas les critères en fonction desquels sont mises en œuvre, au sein des périmètres de protection, les opérations de contrôle de l'accès et de la circulation, de palpations de sécurité, d'inspection et de fouille des bagages et de visites de véhicules, les dispositions de l'article L. 226-1 du code de la sécurité intérieure sont susceptibles de méconnaître le principe d'égalité devant la loi. Il a relevé d'office, d'autre part, le grief tiré de ce que, en permettant de confier à des agents exerçant des activités privées de sécurité la mise en œuvre de certaines opérations de contrôle au sein des périmètres de protection, ces dispositions sont susceptibles de méconnaître les exigences résultant de l'article 12 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789.

(2017-695 QPC, 29 mars 2018, cons. 17, JORF n°0075 du 30 mars 2018 texte n° 111)

Le Conseil constitutionnel a relevé d'office le grief tiré de ce que, en permettant, au cours d'une visite prévue à l'article L. 229-1 du code de la sécurité intérieure, la saisie de « documents » et d'« objets », sans prévoir de règles encadrant leur exploitation, leur conservation et leur restitution, les dispositions de l'article L. 229-5 du même code sont susceptibles de méconnaître le droit de propriété.

(2017-695 QPC, 29 mars 2018, cons. 21, JORF n°0075 du 30 mars 2018 texte n° 111)
  • 11. CONSEIL CONSTITUTIONNEL ET CONTENTIEUX DES NORMES
  • 11.6. QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITÉ
  • 11.6.3. Procédure applicable devant le Conseil constitutionnel
  • 11.6.3.5. Détermination de la disposition soumise au Conseil constitutionnel
  • 11.6.3.5.1. Délimitation plus étroite de la disposition législative soumise au Conseil constitutionnel

Saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité portant sur l'article L. 226-1, les mots « ou à celle des périmètres de protection institués en application de l'article L. 226-1 » figurant au sixième alinéa de l'article L. 511-1, les mots « y compris dans les périmètres de protection institués en application de l'article L. 226-1 » figurant au premier alinéa de l'article L. 613-1, les mots « ou lorsqu'un périmètre de protection a été institué en application de l'article L. 226-1 » figurant à la première phrase du second alinéa de l'article L. 613-2 et des articles L. 227-1, L. 228-1, L. 228-2, L. 228-3, L. 228-4, L. 228-5, L. 228-6, L. 229-1, L. 229-2, L. 229-4 et L. 229-5 du code de la sécurité intérieure, le Conseil constitutionnel juge qu'elle porte uniquement sur l'article L. 226-1, les mots « ou à celle des périmètres de protection institués en application de l'article L. 226-1 » figurant au sixième alinéa de l'article L. 511-1, les mots « y compris dans les périmètres de protection institués en application de l'article L. 226-1 » figurant au premier alinéa de l'article L. 613-1, les mots « ou lorsqu'un périmètre de protection a été institué en application de l'article L. 226-1 » figurant  à la première phrase du second alinéa de l'article L. 613-2, les articles L. 227-1, L. 228-1, L. 228-2, L. 228-5, L. 229-1, les troisième et dixième alinéas de l'article L. 229-2, le premier alinéa du paragraphe I de l'article L. 229-4 et l'article L. 229-5.

(2017-695 QPC, 29 mars 2018, cons. 22, JORF n°0075 du 30 mars 2018 texte n° 111)
  • 11. CONSEIL CONSTITUTIONNEL ET CONTENTIEUX DES NORMES
  • 11.8. SENS ET PORTÉE DE LA DÉCISION
  • 11.8.6. Portée des décisions dans le temps
  • 11.8.6.2. Dans le cadre d'un contrôle a posteriori (article 61-1)
  • 11.8.6.2.2. Abrogation
  • 11.8.6.2.2.1. Abrogation à la date de la publication de la décision

Aucun motif ne justifie de reporter les effets des déclarations d'inconstitutionnalité de la la deuxième phrase du dernier alinéa de l'article L. 228-5 du code de la sécurité intérieure et de certaines des dispositions des articles L. 229-1, L. 229-4 et L. 229-5 du même code. Celles-ci interviennent donc à compter de la date de publication de la décision.

(2017-695 QPC, 29 mars 2018, cons. 73, JORF n°0075 du 30 mars 2018 texte n° 111)
  • 16. RÉSERVES D'INTERPRÉTATION
  • 16.20. ORDRE PUBLIC ET DROIT PÉNAL
  • 16.20.19. Code de la sécurité intérieure
  • 16.20.19.2. Article L. 226-1 (périmètres de protection)

Les dispositions contestées confèrent aux agents de la force publique la possibilité de se faire assister, au sein des périmètres de protection, pour la mise en œuvre des palpations de sécurité et des inspections et fouilles de bagages, par des agents agréés exerçant une activité privée de sécurité. Ce faisant, le législateur a permis d'associer des personnes privées à l'exercice de missions de surveillance générale de la voie publique. Il résulte des dispositions contestées que ces personnes ne peuvent toutefois qu'assister les agents de police judiciaire et sont placées « sous l'autorité d'un officier de police judiciaire ». Il appartient aux autorités publiques de prendre les dispositions afin de s'assurer que soit continûment garantie l'effectivité du contrôle exercé sur ces personnes par les officiers de police judiciaire. Sous cette réserve, ces dispositions ne méconnaissent pas les exigences découlant de l'article 12 de la Déclaration de 1789.

(2017-695 QPC, 29 mars 2018, cons. 27, JORF n°0075 du 30 mars 2018 texte n° 111)

S'il était loisible au législateur de ne pas fixer les critères en fonction desquels sont mises en œuvre, au sein des périmètres de protection, les opérations de contrôle de l'accès et de la circulation, de palpations de sécurité, d'inspection et de fouille des bagages et de visite de véhicules, la mise en œuvre de ces vérifications ainsi confiées par la loi à des autorités de police judiciaire ou sous leur responsabilité ne saurait s'opérer, conformément à la liberté d'aller et de venir, au droit au respect de la vie privée et au principe d'égalité devant la loi, qu'en se fondant sur des critères excluant toute discrimination de quelque nature que ce soit entre les personnes.

(2017-695 QPC, 29 mars 2018, cons. 33, JORF n°0075 du 30 mars 2018 texte n° 111)

Les dispositions contestées limitent à un mois la durée de validité de l'arrêté préfectoral instituant un périmètre de protection. Celui-ci ne peut être renouvelé que si les conditions justifiant l'institution d'un tel périmètre continuent d'être réunies. Ce renouvellement est ainsi subordonné à la nécessité d'assurer la sécurité du lieu ou de l'événement et à la condition qu'il demeure exposé à un risque d'actes de terrorisme, à raison de sa nature et de l'ampleur de sa fréquentation. Toutefois, compte tenu de la rigueur des mesures prévues par les dispositions contestées, un tel renouvellement ne saurait, sans méconnaître la liberté d'aller et de venir et le droit au respect de la vie privée, être décidé par le préfet sans que celui-ci établisse la persistance du risque.

(2017-695 QPC, 29 mars 2018, cons. 34, JORF n°0075 du 30 mars 2018 texte n° 111)
  • 16. RÉSERVES D'INTERPRÉTATION
  • 16.20. ORDRE PUBLIC ET DROIT PÉNAL
  • 16.20.19. Code de la sécurité intérieure
  • 16.20.19.3. Article L. 228-5 (Interdiction de fréquenter)

L'article L. 228-5 du code de la sécurité intérieure permet au ministre de l'intérieur d'interdire à toute personne mentionnée à l'article L. 228-1 de se trouver en relation directe ou indirecte avec certaines personnes, nommément désignées, dont il existe des raisons sérieuses de penser que leur comportement constitue une menace pour la sécurité publique. Ces dispositions portent donc atteinte au droit de mener une vie familiale normale, au droit au respect de la vie privée et à la liberté d'aller et de venir.
En premier lieu, il appartient au ministre de l'intérieur de tenir compte, dans la détermination des personnes dont la fréquentation est interdite, des liens familiaux de l'intéressé et de s'assurer en particulier que la mesure d'interdiction de fréquentation ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit de mener une vie familiale normale.
En deuxième lieu, le législateur a limité la durée de la mesure prévue à l'article L. 228-5. Elle ne peut être initialement prononcée ou renouvelée que pour une durée maximale de six mois. Au-delà d'une durée cumulée de six mois, son renouvellement est subordonné à la production par le ministre de l'intérieur d'éléments nouveaux ou complémentaires. La durée totale cumulée de l'interdiction de fréquenter ne peut excéder douze mois. Compte tenu de sa rigueur, cette mesure ne saurait, sans méconnaître les exigences constitutionnelles précitées, excéder, de manière continue ou non, une durée totale cumulée de douze mois.
En dernier lieu, le délai de quatre mois laissé au juge pour se prononcer sur le recours en référé contre la mesure prévue à l'article L. 228-5 ayant été censuré par le Conseil constitutionnel, ce dernier précise que le droit à un recours juridictionnel effectif impose que le juge administratif soit tenu de statuer sur la demande d'annulation de la mesure dans de brefs délais.
Sous ses réserves, le législateur a assuré une conciliation qui n'est pas manifestement déséquilibrée entre, d'une part, l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public et, d'autre part, le droit de mener une vie familiale normale, le droit au respect de la vie privée et la liberté d'aller et de venir et il n'a pas méconnu le droit à un recours juridictionnel effectif.

(2017-695 QPC, 29 mars 2018, cons. 51, 52, 53, JORF n°0075 du 30 mars 2018 texte n° 111)
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