Décision

Décision n° 2017-5313 AN du 4 mai 2018

A.N., La Réunion 4ème circ.
Inéligibilité

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 9 novembre 2017 par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (décision du 30 octobre 2017), dans les conditions prévues au troisième alinéa de l'article L. 52-15 du code électoral. Cette saisine est relative à la situation de Mme Anaïs PATEL, candidate aux élections qui se sont déroulées les 11 et 18 juin 2017 dans la 4ème circonscription du département de La Réunion, en vue de la désignation d'un député à l'Assemblée nationale. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2017-5313 AN.

Au vu des textes suivants :

  • la Constitution, notamment son article 59 ;

  • l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

  • le code électoral, notamment ses articles L.O. 136-1 et L. 52-12 ;

  • le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ;

Au vu des pièces suivantes :

  • les observations présentées Mme PATEL, enregistrées le 4 décembre 2017 ;

  • les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Et après avoir entendu le rapporteur ;

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT :

1. Il ressort de l'article L. 52-4 du code électoral qu'il appartient au mandataire financier désigné par le candidat de régler les dépenses engagées en vue de l'élection et antérieures à la date du tour de scrutin où elle a été acquise, à l'exception des dépenses prises en charge par un parti ou groupement politique. Si, pour des raisons pratiques, il peut être toléré que le candidat ou un tiers règle à son profit directement de menues dépenses postérieurement à la désignation de son mandataire, ce n'est que dans la mesure où leur montant global est faible par rapport au total des dépenses du compte de campagne et négligeable au regard du plafond de dépenses autorisées fixé par l'article L. 52-11 du même code.

2. Le compte de campagne de Mme Anaïs PATEL a été rejeté par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques aux motifs que la candidate et le mandataire financier ont payé directement certaines dépenses.

3. Il résulte de l'instruction que la candidate a réglé, entre le 24 mai et le 2 juin 2017, sur ses deniers personnels, quatre factures. Par ailleurs, une dépense a été payée par le mandataire financier à partir de son compte bancaire personnel. Le règlement de ces dépenses de campagne doit être regardé comme contrevenant aux dispositions de l'article L. 52-4 mentionné ci-dessus. Si la candidate invoque le fait que le chéquier de son mandataire n'a jamais été délivré par l'établissement bancaire et l'obligation de régler certaines dépenses en urgence, elle ne justifie pas avoir effectué des démarches auprès de la banque afin d'obtenir ce chéquier et les attestations produites ne permettent pas de connaître le motif ayant justifié cette absence de remise. Dès lors, ces circonstances ne sauraient, eu égard à l'absence d'ambiguïté des dispositions méconnues, faire obstacle à l'application des dispositions de l'article L. 52-4 du code électoral. C'est donc à bon droit que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a rejeté le compte de campagne de Mme PATEL.

4. En vertu du troisième alinéa de l'article L.O. 136-1 du code électoral, le juge de l'élection, saisi par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, déclare inéligible le candidat dont le compte de campagne a été rejeté à bon droit en cas de volonté de fraude ou de manquement d'une particulière gravité aux règles relatives au financement des campagnes électorales.

5. Compte tenu du montant des dépenses engagées et de la nature de cette irrégularité dont Mme PATEL ne pouvait ignorer la portée, il y a lieu de prononcer, en application de l'article L.O. 136-1 du code électoral, une inéligibilité d'une durée d'un an.

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE :

Article 1er. - Mme Anaïs PATEL est déclarée inéligible en application des dispositions de l'article L.O. 136-1 du code électoral pour une durée d'un an à compter de la présente décision.

Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 18 du règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs.

Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 3 mai 2018, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, MM. Michel CHARASSE, Jean-Jacques HYEST, Lionel JOSPIN, Mmes Corinne LUQUIENS, Nicole MAESTRACCI et M. Michel PINAULT.

Rendu public le 4 mai 2018.

JORF n°0106 du 8 mai 2018 texte n° 91
ECLI : FR : CC : 2018 : 2017.5313.AN

Les abstracts

  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.5. Financement
  • 8.3.5.1. Mandataire financier
  • 8.3.5.1.2. Obligation de recourir à un mandataire
  • 8.3.5.1.2.3. Règlement des dépenses

Candidat ayant obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés à l'issue du premier tour de scrutin. Le candidat a engagé des dépenses directement, sans passer par son mandataire financier. En outre, le mandataire a réglé certaines dépenses sans passer par le compte bancaire de campagne. Si le candidat invoque le fait que le chéquier de son mandataire n'a jamais été délivré par l'établissement bancaire et l'obligation de régler certaines dépenses en urgence, il ne justifie pas avoir effectué des démarches auprès de la banque afin d'obtenir ce chéquier et les attestations produites ne permettent pas de connaître le motif ayant justifié cette absence de remise. Dès lors, ces circonstances ne sauraient, eu égard à l'absence d'ambiguïté des dispositions méconnues, faire obstacle à l'application des dispositions de l'article L. 52-4 du code électoral. Compte tenu du montant des dépenses engagées et de la nature de cette irrégularité dont le candidat ne pouvait ignorer la portée, il y a lieu de prononcer une inéligibilité d'une durée d'un an.

(2017-5313 AN, 04 mai 2018, cons. 2, 3, 5, JORF n°0106 du 8 mai 2018 texte n° 91)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.5. Financement
  • 8.3.5.1. Mandataire financier
  • 8.3.5.1.3. Compte bancaire ou postal

Candidat ayant réglé, entre le 24 mai et le 2 juin 2017, sur ses deniers personnels, quatre factures. Par ailleurs, une dépense a été payée par le mandataire financier à partir de son compte bancaire personnel. Si le candidat invoque le fait que le chéquier de son mandataire n'a jamais été délivré par l'établissement bancaire et l'obligation de régler certaines dépenses en urgence, il ne justifie pas avoir effectué des démarches auprès de la banque afin d'obtenir ce chéquier et les attestations produites ne permettent pas de connaître le motif ayant justifié cette absence de remise. Dès lors, ces circonstances ne sauraient, eu égard à l'absence d'ambiguïté des dispositions méconnues, faire obstacle à l'application des dispositions de l'article L. 52-4 du code électoral. Compte tenu du montant des dépenses engagées et de la nature de cette irrégularité dont le candidat ne pouvait ignorer la portée, il y a lieu de prononcer une inéligibilité d'une durée d'un an.

(2017-5313 AN, 04 mai 2018, cons. 2, 3, 5, JORF n°0106 du 8 mai 2018 texte n° 91)
À voir aussi sur le site : Version PDF de la décision.
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