Décision

Décision n° 2017-5312 AN du 4 mai 2018

A.N., Paris 5ème circ.
Inéligibilité

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 20 octobre 2017 par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (décision du 11 octobre 2017), dans les conditions prévues au troisième alinéa de l'article L. 52-15 du code électoral. Cette saisine est relative à la situation de M. Raymond BASSIL, candidat aux élections qui se sont déroulées les 11 et 18 juin 2017 dans la 5ème circonscription du département de Paris, en vue de la désignation d'un député à l'Assemblée nationale. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le numéro 2017- 5312 AN.

Au vu des textes suivants :

  • la Constitution, notamment son article 59 ;

  • l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

  • le code électoral, notamment ses articles L.O. 136-1 et L. 52-12 ;

  • le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ;

Au vu des pièces suivantes :

  • les pièces du dossier desquelles il résulte que communication de la saisine de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a été donnée à M. BASSIL ;

  • les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Et après avoir entendu le rapporteur ;

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT :

1. Il ressort de l'article L. 52-4 du code électoral qu'il appartient au mandataire financier désigné par le candidat de régler les dépenses engagées en vue de l'élection et antérieures à la date du tour de scrutin où elle a été acquise, à l'exception des dépenses prises en charge par un parti ou groupement politique. Si, pour des raisons pratiques, il peut être toléré que le candidat ou un tiers règle à son profit directement de menues dépenses postérieurement à la désignation de son mandataire, ce n'est que dans la mesure où leur montant global est faible par rapport au total des dépenses du compte de campagne et négligeable au regard du plafond de dépenses autorisées fixé par l'article L. 52-11 du même code.

2. Les dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 52-8 du même code interdisent aux personnes morales, à l'exception des partis ou groupements politiques, de participer au financement de la campagne électorale d'un candidat.

3. Le compte de campagne de M. BASSIL a été rejeté par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques dans sa décision du 11 octobre 2017 aux motifs que le mandataire financier a payé directement certaines dépenses et qu'une personne morale a participé au financement de sa campagne électorale.

4. Il résulte de l'instruction que le mandataire financier a réglé deux factures, les 24 mai et 6 juin 2017, sur ses deniers personnels, avant de se rembourser à partir du compte bancaire ouvert pour la campagne électorale. Par ailleurs, une facture correspondant à une dépense de campagne a été réglée, le 24 mai 2017, par une société commerciale, avant de faire l'objet d'un remboursement à partir du compte bancaire du mandataire financier. Le règlement de ces dépenses de campagne doit être regardé comme contrevenant aux dispositions des articles L. 52-4 et L. 52-8 précitées. C'est donc à bon droit que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a rejeté le compte de campagne de M. BASSIL.

5. En vertu du troisième alinéa de l'article L.O. 136-1 du code électoral, le juge de l'élection, saisi par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, déclare inéligible le candidat dont le compte de campagne a été rejeté à bon droit en cas de volonté de fraude ou de manquement d'une particulière gravité aux règles relatives au financement des campagnes électorales.

6. Nonobstant le caractère substantiel de l'obligation de faire payer les dépenses électorales par le mandataire financier, dont M. BASSIL ne pouvait ignorer la portée, si les dépenses acquittées directement par le candidat représentent 11 % du montant total des dépenses, elles ne correspondent qu'à 4 % du plafond de dépenses autorisées. Cette seule irrégularité ne justifie donc pas le prononcé d'une inéligibilité. En revanche, la méconnaissance des dispositions de l'article L. 52-8 du code électoral justifie de prononcer, en application de l'article L.O. 136-1 du code électoral, une inéligibilité d'une durée d'un an.

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE :

Article 1er. - M. Raymond BASSIL est déclaré inéligible en application des dispositions de l'article L.O. 136-1 du code électoral pour une durée d'un an à compter de la présente décision.

Article 2. - . Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 18 du règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs.

Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 3 mai 2018, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, MM. Michel CHARASSE, Jean-Jacques HYEST, Lionel JOSPIN, Mmes Corinne LUQUIENS, Nicole MAESTRACCI et M. Michel PINAULT.

Rendu public le 4 mai 2018 .

JORF n°0106 du 8 mai 2018 texte n° 90
ECLI : FR : CC : 2018 : 2017.5312.AN

Les abstracts

  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.5. Financement
  • 8.3.5.1. Mandataire financier
  • 8.3.5.1.3. Compte bancaire ou postal

Candidat dont le mandataire financier a réglé deux factures, les 24 mai et 6 juin 2017, sur ses deniers personnels, avant de se rembourser à partir du compte bancaire ouvert pour la campagne électorale. Par ailleurs, une facture correspondant à une dépense de campagne a été réglée, le 24 mai 2017, par une société commerciale, avant de faire l'objet d'un remboursement à partir du compte bancaire du mandataire financier. Le règlement de ces dépenses de campagne doit être regardé comme contrevenant aux dispositions des articles L. 52-4 et L. 52-8 précitées. Nonobstant le caractère substantiel de l'obligation de faire payer les dépenses électorales par le mandataire financier, dont le candidat ne pouvait ignorer la portée, si les dépenses acquittées directement par le candidat représentent 11 % du montant total des dépenses, elles ne correspondent qu'à 4 % du plafond de dépenses autorisées. Cette seule irrégularité ne justifie donc pas le prononcé d'une inéligibilité. En revanche, la méconnaissance des dispositions de l'article L. 52-8 du code électoral justifie de prononcer une inéligibilité d'une durée d'un an.

(2017-5312 AN, 04 mai 2018, cons. 3, 4, 6, JORF n°0106 du 8 mai 2018 texte n° 90)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.5. Financement
  • 8.3.5.4. Recettes produites au compte de campagne
  • 8.3.5.4.5. Dons consentis à un candidat par une personne morale à l'exception des partis ou groupements politiques (article L. 52-8, alinéa 2, du code électoral)
  • 8.3.5.4.5.5. Bénéfice d'un don ou d'un avantage entraînant le rejet du compte

Candidat dont le compte de campagne a été rejeté par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques aux motifs qu'une société commerciale a participé au financement de sa campagne, en réglant une facture de 1 507 euros correspondant à une dépense de campagne du candidat, avant d'être remboursée par le mandataire financier du candidat au moyen du compte bancaire de campagne. En outre, le candidat a réglé directement certaines dépenses de sa campagne, sans passer par l'intermédiaire de son mandataire financier. Enfin, le mandataire financier a réglé deux factures sur ses deniers personnels, avant de se rembourser à partir du compte bancaire ouvert pour la campagne électorale. Nonobstant le caractère substantiel de l'obligation de faire payer les dépenses électorales par le mandataire financier, dont le candidat ne pouvait ignorer la portée, si les dépenses acquittées directement par le candidat représentent 11 % du montant total des dépenses, elles ne correspondent qu'à 4 % du plafond de dépenses autorisées. Cette seule irrégularité ne justifie donc pas le prononcé d'une inéligibilité. En revanche, la méconnaissance des dispositions de l'article L. 52-8 du code électoral, relatives à l'interdiction de dons de personnes morales, justifie de prononcer une inéligibilité d'une durée d'un an.

(2017-5312 AN, 04 mai 2018, cons. 3, 4, 6, JORF n°0106 du 8 mai 2018 texte n° 90)
À voir aussi sur le site : Version PDF de la décision.
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