Décision n° 2015-4919 SEN du 18 juin 2015
Le Conseil constitutionnel a été saisi le 3 février 2015, par une décision de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (décision du 26 janvier 2015) enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2015-4919 SEN, de la situation de Mme Anne-Marie ESCOFFIER, candidate aux élections qui se sont déroulées le 28 septembre 2014 dans le département de l'Aveyron pour la désignation de deux sénateurs.
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL,
Vu la Constitution, notamment son article 59 ;
Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
Vu le code électoral, notamment ses articles L. 52-4, L.O. 136-1 et L. 308-1 ;
Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ;
Vu les observations présentées par Mme ESCOFFIER, enregistrées le 25 février 2015 ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Le rapporteur ayant été entendu ;
1. Considérant qu'aux termes des quatre premiers alinéas de l'article L.O. 136-1 du code électoral : « Saisi d'une contestation formée contre l'élection ou dans les conditions prévues au troisième alinéa de l'article L. 52-15, le Conseil constitutionnel peut déclarer inéligible le candidat dont le compte de campagne, le cas échéant après réformation, fait apparaître un dépassement du plafond des dépenses électorales.
« Saisi dans les mêmes conditions, le Conseil constitutionnel peut déclarer inéligible le candidat qui n'a pas déposé son compte de campagne dans les conditions et le délai prescrits à l'article L. 52-12.
« Il prononce également l'inéligibilité du candidat dont le compte de campagne a été rejeté à bon droit en cas de volonté de fraude ou de manquement d'une particulière gravité aux règles relatives au financement des campagnes électorales.
« L'inéligibilité déclarée sur le fondement des trois premiers alinéas du présent article est prononcée pour une durée maximale de trois ans et s'applique à toutes les élections. Toutefois, elle n'a pas d'effet sur les mandats acquis antérieurement à la date de la décision » ;
2. Considérant qu'aux termes du troisième alinéa de l'article L. 52-4 du même code, rendu applicable aux candidats aux élections sénatoriales par l'article L. 308-1 du même code, le mandataire financier « règle les dépenses engagées en vue de l'élection et antérieures à la date du tour de scrutin où elle a été acquise, à l'exception des dépenses prises en charge par un parti ou groupement politique. Les dépenses antérieures à sa désignation payées directement par le candidat ou à son profit (…) font l'objet d'un remboursement par le mandataire et figurent dans son compte bancaire ou postal » ; que si, pour des raisons pratiques, il peut être toléré que le candidat règle directement de menues dépenses postérieurement à la désignation de son mandataire, ce n'est que dans la mesure où leur montant global est faible par rapport au total des dépenses du compte de campagne et négligeable au regard du plafond de dépenses autorisées fixé par l'article L. 308-1 du code électoral ;
3. Considérant que le compte de campagne de Mme Anne-Marie ESCOFFIER, candidate aux élections qui se sont déroulées le 28 septembre 2014 en vue de la désignation de deux sénateurs dans le département de l'Aveyron, a été rejeté par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques dans sa décision du 26 janvier 2015 au motif que la candidate avait réglé directement une part substantielle des dépenses inscrites à son compte de campagne en méconnaissance du troisième alinéa de l'article L. 52-4 du code électoral ;
4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les dépenses de campagne électorale réglées directement par la candidate après la désignation de son mandataire financier ont représenté 20,7 % du montant total de ses dépenses et 3,7 % du plafond des dépenses autorisées, en méconnaissance des dispositions du troisième alinéa de l'article L. 52-4 du code électoral ; que la circonstance qu'une part importante de ces dépenses correspond à des frais de restauration d'un montant unitaire modeste est dépourvue d'incidence sur leur caractère irrégulier ; que le montant global des dépenses engagées par la candidate en méconnaissance de l'article L. 52-4 du code électoral est élevé au regard des dépenses du compte de campagne ; que c'est par suite à bon droit que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a rejeté son compte de campagne ;
5. Considérant que, nonobstant le caractère substantiel de l'obligation méconnue, dont Mme ESCOFFIER ne pouvait ignorer la portée, les dépenses acquittées directement par la candidate, pour un montant de 1 083 euros, ne représentent que 3,7 % du plafond de dépenses autorisées ; que, dans les circonstances particulières de l'espèce, le manquement n'est pas d'une particulière gravité ; qu'il n'y a pas lieu, en application de l'article L.O. 136-1 du code électoral, de prononcer l'inéligibilité de Mme ESCOFFIER,
D É C I D E :
Article 1er.- Il n'y a pas lieu de déclarer Mme Anne-Marie ESCOFFIER inéligible en application de l'article L.O. 136-1 du code électoral.
Article 2.- La présente décision sera notifiée à Mme Anne-Marie ESCOFFIER et au président de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques et publiée au Journal officiel de la République française.
Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 18 juin 2015, où siégeaient : M. Lionel JOSPIN, exerçant les fonctions de Président, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC et Mme Nicole MAESTRACCI.
JORF n°0142 du 21 juin 2015 page 10249, texte n° 62
ECLI : FR : CC : 2015 : 2015.4919.SEN
Les abstracts
- 8. ÉLECTIONS
- 8.4. ÉLECTIONS SÉNATORIALES
- 8.4.14. Financement
- 8.4.14.5. Dépenses produites au compte de campagne
- 8.4.14.5.4. Dépenses payées directement
8.4.14.5.4.2. Dépenses postérieures à la désignation du mandataire financier
Si, pour des raisons pratiques, il peut être toléré que le candidat règle directement de menues dépenses postérieurement à la désignation de son mandataire, ce n'est que dans la mesure où leur montant global est faible par rapport au total des dépenses du compte de campagne et négligeable au regard du plafond de dépenses autorisées fixé par l'article L. 308-1 du code électoral.
Les dépenses de campagne électorale réglées directement par la candidate après la désignation de son mandataire financier ont représenté 20,7 % du montant total de ses dépenses et 3,7 % du plafond des dépenses autorisées, en méconnaissance des dispositions du troisième alinéa de l'article L. 52-4 du code électoral. La circonstance qu'une part importante de ces dépenses correspond à des frais de restauration d'un montant unitaire modeste est dépourvue d'incidence sur leur caractère irrégulier. Le montant global des dépenses engagées par la candidate en méconnaissance de l'article L. 52-4 du code électoral est élevé au regard des dépenses du compte de campagne. Rejet à bon droit du compte de campagne.
Nonobstant le caractère substantiel de l'obligation méconnue, dont la candidate ne pouvait ignorer la portée, les dépenses acquittées directement par la candidate, pour un montant de 1 083 euros, ne représentent que 3,7 % du plafond de dépenses autorisées. Dans les circonstances particulières de l'espèce, le manquement n'est pas d'une particulière gravité. Il n'y a pas lieu de prononcer l'inéligibilité.