Décision n° 2010-617 DC du 9 novembre 2010
Le Conseil constitutionnel a été saisi, dans les conditions prévues à l'article 61, deuxième alinéa, de la Constitution, de la loi portant réforme des retraites, le 2 novembre 2010, par M. Jean-Marc AYRAULT, Mmes Patricia ADAM, Sylvie ANDRIEUX, MM. Jean-Paul BACQUET, Dominique BAERT, Jean-Pierre BALLIGAND, Gérard BAPT, Claude BARTOLONE, Jacques BASCOU, Christian BATAILLE, Mmes Delphine BATHO, Marie-Noëlle BATTISTEL, Chantal BERTHELOT, M. Jean-Louis BIANCO, Mme Gisèle BIÉMOURET, MM. Serge BLISKO, Patrick BLOCHE, Daniel BOISSERIE, Maxime BONO, Jean-Michel BOUCHERON, Mme Marie-Odile BOUILLÉ, M. Christophe BOUILLON, Mme Monique BOULESTIN, M. Pierre BOURGUIGNON, Mme Danièle BOUSQUET, MM. François BROTTES, Alain CACHEUX, Jérôme CAHUZAC, Jean-Christophe CAMBADÉLIS, Thierry CARCENAC, Christophe CARESCHE, Mme Martine CARRILLON-COUVREUR, MM. Laurent CATHALA, Bernard CAZENEUVE, Guy CHAMBEFORT, Jean-Paul CHANTEGUET, Gérard CHARASSE, Alain CLAEYS, Jean-Michel CLÉMENT, Mme Marie-Françoise CLERGEAU, MM. Gilles COCQUEMPOT, Pierre COHEN, Mmes Catherine COUTELLE, Pascale CROZON, M. Frédéric CUVILLIER, Mme Claude DARCIAUX, M. Pascal DEGUILHEM, Mme Michèle DELAUNAY, MM. Guy DELCOURT, Michel DELEBARRE, François DELUGA, Bernard DEROSIER, Michel DESTOT, René DOSIÈRE, Julien DRAY, Tony DREYFUS, Jean-Pierre DUFAU, William DUMAS, Jean-Louis DUMONT, Mme Laurence DUMONT, MM. Jean-Paul DUPRÉ, Yves DURAND, Mme Odette DURIEZ, MM. Philippe DURON, Olivier DUSSOPT, Christian ECKERT, Henri EMMANUELLI, Mme Corinne ERHEL, MM. Laurent FABIUS, Albert FACON, Mme Martine FAURE, M. Hervé FÉRON, Mmes Aurélie FILIPETTI, Geneviève FIORASO, M. Pierre FORGUES, Mme Valérie FOURNEYRON, MM. Michel FRANÇAIX, Jean-Claude FRUTEAU, Jean-Louis GAGNAIRE, Mme Geneviève GAILLARD, MM. Guillaume GAROT, Jean GAUBERT, Mme Catherine GÉNISSON, MM. Paul GIACOBBI, Jean-Patrick GILLE, Mme Annick GIRARDIN, MM. Joël GIRAUD, Jean GLAVANY, Daniel GOLDBERG, Gaëtan GORCE, Mme Pascale GOT, MM. Marc GOUA, Jean GRELLIER, Mme Élisabeth GUIGOU, M. David HABIB, Mme Danièle HOFFMAN-RISPAL, M. François HOLLANDE, Mme Sandrine HUREL, M. Christian HUTIN, Mme Monique IBORRA, M. Jean-Louis IDIART, Mme Françoise IMBERT, MM. Michel ISSINDOU, Éric JALTON, Serge JANQUIN, Henri JIBRAYEL, Régis JUANICO, Armand JUNG, Mme Marietta KARAMANLI, M. Jean-Pierre KUCHEIDA, Mme Conchita LACUEY, MM. Jérôme LAMBERT, François LAMY, Jack LANG, Mme Colette LANGLADE, MM. Jean LAUNAY, Jean-Yves LE BOUILLONNEC, Gilbert LE BRIS, Jean-Yves LE DÉAUT, Jean-Marie LE GUEN, Mme Annick LE LOCH, M. Bruno LE ROUX, Mme Marylise LEBRANCHU, MM. Patrick LEBRETON, Michel LEFAIT, Patrick LEMASLE, Mmes Catherine LEMORTON, Annick LEPETIT, MM. Jean-Claude LEROY, Bernard LESTERLIN, Serge LETCHIMY, Michel LIEBGOTT, Mme Martine LIGNIÈRES-CASSOU, MM. Albert LIKUVALU, François LONCLE, Victorin LUREL, Jean MALLOT, Louis-Joseph MANSCOUR, Mmes Jacqueline MAQUET, Jeanny MARC, Marie-Lou MARCEL, MM. Jean-René MARSAC, Philippe MARTIN, Mmes Martine MARTINEL, Frédérique MASSAT, MM. Gilbert MATHON, Didier MATHUS, Mme Sandrine MAZETIER, MM. Michel MÉNARD, Kléber MESQUIDA, Jean MICHEL, Arnaud MONTEBOURG, Pierre MOSCOVICI, Pierre-Alain MUET, Philippe NAUCHE, Henri NAYROU, Alain NÉRI, Mmes Marie-Renée OGET, Françoise OLIVIER-COUPEAU, Dominique ORLIAC, MM. Michel PAJON, Christian PAUL, Mme George PAU-LANGEVIN, MM. Germinal PEIRO, Jean-Luc PÉRAT, Jean-Claude PEREZ, Mmes Marie-Françoise PÉROL-DUMONT, Sylvia PINEL, Martine PINVILLE, MM. Philippe PLISSON, François PUPPONI, Mme Catherine QUÉRÉ, MM. Jean-Jack QUEYRANNE, Dominique RAIMBOURG, Simon RENUCCI, Mmes Marie-Line REYNAUD, Chantal ROBIN-RODRIGO, MM. Alain RODET, Marcel ROGEMONT, Bernard ROMAN, René ROUQUET, Alain ROUSSET, Patrick ROY, Michel SAINTE-MARIE, Michel SAPIN, Mme Odile SAUGUES, M. Christophe SIRUGUE, Mme Christiane TAUBIRA, M. Pascal TERRASSE, Mme Marisol TOURAINE, MM. Jean-Louis TOURAINE, Philippe TOURTELIER, Jean-Jacques URVOAS, Daniel VAILLANT, Jacques VALAX, André VALLINI, Manuel VALLS, Michel VAUZELLE, Michel VERGNIER, André VÉZINHET, Alain VIDALIES, Jean-Michel VILLAUMÉ, Jean-Claude VIOLLET et Philippe VUILQUE, députés ;
et, le même jour, par M. Jean Pierre BEL, Mmes Jacqueline ALQUIER, Michèle ANDRÉ, MM. Bernard ANGELS, Alain ANZIANI, David ASSOULINE, Robert BADINTER, Claude BÉRIT-DÉBAT, Jean BESSON, Mmes Marie-Christine BLANDIN, Maryvonne BLONDIN, M. Yannick BODIN, Mme Nicole BONNEFOY, MM. Yannick BOTREL, Didier BOULAUD, Mme Alima BOUMEDIENE-THIERY, M. Martial BOURQUIN, Mme Bernadette BOURZAI, M. Michel BOUTANT, Mme Nicole BRICQ, M. Jean-Pierre CAFFET, Mme Claire-Lise CAMPION, M. Jean-Louis CARRÈRE, Mme Françoise CARTRON, MM. Bernard CAZEAU, Yves CHASTAN, Pierre-Yves COLLOMBAT, Roland COURTEAU, Yves DAUDIGNY, Yves DAUGE, Marc DAUNIS, Jean-Pierre DEMERLIAT, Mme Christiane DEMONTÈS, MM. Jean DESESSARD, Claude DOMEIZEL, Mme Josette DURRIEU, MM. Alain FAUCONNIER, Jean-Luc FICHET, Jean-Claude FRÉCON, Bernard FRIMAT, Charles GAUTIER, Mme Samia GHALI, MM. Serge GODARD, Jean-Pierre GODEFROY, Jean-Noël GUÉRINI, Didier GUILLAUME, Claude HAUT, Edmond HERVÉ, Mmes Odette HERVIAUX, Annie JARRAUD-VERGNOLLE, MM. Claude JEANNEROT, Ronan KERDRAON, Mmes Bariza KHIARI, Virginie KLÈS, MM. Yves KRATTINGER, Serge LAGAUCHE, Jacky LE MENN, Mmes Raymonde LE TEXIER, Claudine LEPAGE, MM. Jean-Jacques LOZACH, Philippe MADRELLE, Jacques MAHÉAS, François MARC, Pierre MAUROY, Rachel MAZUIR, Louis MERMAZ, Jean-Pierre MICHEL, Gérard MIQUEL, Jean-Jacques MIRASSOU, Mme Renée NICOUX, MM. François PATRIAT, Jean Claude PEYRONNET, Bernard PIRAS, Mme Gisèle PRINTZ, MM. Marcel RAINAUD, Daniel RAOUL, François REBSAMEN, Daniel REINER, Mme Patricia SCHILLINGER, MM. Michel SERGENT, Jean Pierre SUEUR, Simon SUTOUR, Mme Catherine TASCA, MM. Michel TESTON, René TEULADE, Jean-Marc TODESCHINI, André VANTOMME, M. Richard YUNG, Mme Anne-Marie ESCOFFIER, MM. Jean MILHAU, Jacques MÉZARD, Jean-Michel BAYLET, François FORTASSIN, Jean-Pierre PLANCADE, Yvon COLLIN, Mmes Nicole BORVO COHEN-SEAT, Éliane ASSASSI, M. François AUTAIN, Mme Marie-France BEAUFILS, MM. Michel BILLOUT, Jean-Claude DANGLOT, Mmes Annie DAVID, Michelle DEMESSINE, Évelyne DIDIER, MM. Guy FISCHER, Thierry FOUCAUD, Mmes Brigitte GONTHIER-MAURIN, Gélita HOARAU, M. Robert HUE, Mme Marie-Agnès LABARRE, M. Gérard LE CAM, Mmes Josiane MATHON-POINAT, Isabelle PASQUET, MM. Jack RALITE, Ivan RENAR, Mmes Mireille SCHURCH, Odette TERRADE, MM. Bernard VERA et Jean-François VOGUET, sénateurs.
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL,
Vu la Constitution ;
Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
Vu la loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009 relative à l'application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution, ensemble la décision du Conseil constitutionnel n° 2009-579 DC du 9 avril 2009 ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
Vu le code rural et de la pêche maritime ;
Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
Vu la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 relative à la limite d'âge dans la fonction publique et le secteur public ;
Vu la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites ;
Vu les observations du Gouvernement, enregistrées le 4 novembre 2010 ;
Le rapporteur ayant été entendu ;
1. Considérant que les députés et sénateurs requérants défèrent au Conseil constitutionnel la loi portant réforme des retraites ; qu'ils contestent sa conformité à la Constitution en tant qu'elle porte, en principe, à soixante-deux ans l'âge d'ouverture du droit à une pension de retraite et à soixante-sept ans la limite d'âge ouvrant droit à une pension de retraite sans décote ; que les députés requérants contestent, en outre, la procédure législative dans son ensemble ;
- SUR LA PROCÉDURE :
2. Considérant que, selon les députés requérants, la combinaison de la réunion à « huis clos » de la commission saisie au fond et du temps législatif programmé, défini par l'article 49, alinéas 5 à 13, du règlement de l'Assemblée nationale, a porté une atteinte inconstitutionnelle aux exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire ; que la méconnaissance du treizième alinéa de l'article 49 de ce même règlement, aux termes duquel : « Chaque député peut prendre la parole, à l'issue du vote du dernier article du texte en discussion, pour une explication de vote personnelle de cinq minutes. Le temps consacré à ces explications de vote n'est pas décompté du temps global réparti entre les groupes », aurait également porté atteinte à ces exigences ;
3. Considérant, d'une part, que les exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire, qui s'appliquent aux travaux des commissions, imposent qu'il soit précisément rendu compte des interventions faites devant celles-ci, des motifs des modifications proposées aux textes dont elles sont saisies et des votes émis en leur sein ; qu'en l'espèce, il a été précisément rendu compte de l'ensemble de ces travaux ;
4. Considérant, d'autre part, que les règlements des assemblées parlementaires n'ont pas par eux-mêmes une valeur constitutionnelle ; qu'ainsi, la méconnaissance alléguée des dispositions de l'article 49, alinéa 13, du même règlement ne saurait avoir pour effet, à elle seule, de rendre la procédure législative contraire à la Constitution ; qu'en l'espèce, la décision du président de l'Assemblée nationale d'interrompre les explications de vote personnelles n'a pas porté atteinte aux exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire ;
- SUR LE REPORT À SOIXANTE-DEUX ANS DE L'ÂGE D'OUVERTURE DU DROIT À UNE PENSION DE RETRAITE :
5. Considérant que l'article 18 de la loi déférée insère dans le code de la sécurité sociale un article L. 161-17-2 ainsi rédigé : « L'âge d'ouverture du droit à une pension de retraite mentionné au premier alinéa de l'article L. 351-1 du présent code, à l'article L. 732-18 du code rural et de la pêche maritime, au 1 ° du I de l'article L. 24 et au 1 ° de l'article L. 25 du code des pensions civiles et militaires de retraite est fixé à soixante-deux ans pour les assurés nés à compter du 1er janvier 1956._ - Cet âge est fixé par décret, de manière croissante à raison de quatre mois par génération et dans la limite de l'âge mentionné au premier alinéa du présent article, pour les assurés nés avant le 1er janvier 1956 » ;
6. Considérant que, selon les requérants, ces dispositions sont manifestement inappropriées aux exigences énoncées par le onzième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 et méconnaissent le principe d'égalité ;
. En ce qui concerne le grief tiré de la méconnaissance du onzième alinéa du Préambule de 1946 :
7. Considérant qu'aux termes du onzième alinéa du Préambule de 1946, la Nation « garantit à tous, notamment à l'enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs. Tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l'incapacité de travailler a le droit d'obtenir de la collectivité des moyens convenables d'existence » ;
8. Considérant que l'exigence constitutionnelle résultant des dispositions précitées implique la mise en œuvre d'une politique de solidarité nationale en faveur des travailleurs retraités ; qu'il est cependant possible au législateur, pour satisfaire à cette exigence, de choisir les modalités concrètes qui lui paraissent appropriées ; qu'en particulier, il lui est à tout moment loisible, statuant dans le domaine qui lui est réservé par l'article 34 de la Constitution, de modifier des textes antérieurs ou d'abroger ceux-ci en leur substituant, le cas échéant, d'autres dispositions ; qu'il ne lui est pas moins loisible d'adopter, pour la réalisation ou la conciliation d'objectifs de nature constitutionnelle, des modalités nouvelles dont il lui appartient d'apprécier l'opportunité ; que, cependant, l'exercice de ce pouvoir ne saurait aboutir à priver de garanties légales des exigences de caractère constitutionnel ;
9. Considérant qu'en adoptant la loi déférée, le législateur a voulu préserver le système de retraite par répartition, confronté à d'importantes difficultés de financement ; qu'il a notamment tenu compte de l'allongement de l'espérance de vie ; qu'au nombre des mesures qu'il a prises figure le report à soixante-deux ans de l'âge légal de départ à la retraite, applicable, de façon progressive jusqu'en 2018, tant aux salariés du secteur public qu'à ceux du secteur privé ; qu'il a prévu ou maintenu des possibilités de retraite anticipée au bénéfice des personnes ayant eu des carrières longues, de celles ayant un taux d'incapacité de travail fixé par voie réglementaire, de celles exposées à des « facteurs de pénibilité » et atteintes d'incapacité permanente, des travailleurs handicapés ou des personnes exposées à l'amiante ; que, ce faisant, il a pris des mesures qui visent à garantir la sécurité des vieux travailleurs conformément au Préambule de 1946 ; que ces mesures ne sont pas inappropriées à l'objectif qu'il s'est fixé ;
. En ce qui concerne le grief tiré de la méconnaissance du principe d'égalité :
10. Considérant que les requérants soutiennent que, dans la mesure où les personnes remplissant la condition de durée de cotisation pour obtenir une pension de retraite à taux plein avant l'âge de soixante-deux ans devront cotiser plus longtemps pour bénéficier d'une pension de retraite, les dispositions précitées méconnaissent le principe d'égalité ; que, selon les requérants, il en irait de même des dispositions relatives à la pénibilité au travail, dès lors qu'un salarié atteint d'invalidité ne pourra bénéficier d'un départ anticipé à la retraite que s'il a été exposé à des « facteurs de pénibilité » ;
11. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : « La loi est l'expression de la volonté générale. Tous les citoyens ont droit de concourir personnellement, ou par leurs représentants, à sa formation. Elle doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse » ; que si, en règle générale, le principe d'égalité impose de traiter de la même façon des personnes qui se trouvent dans la même situation, il n'en résulte pas pour autant qu'il oblige à traiter différemment des personnes se trouvant dans des situations différentes ;
12. Considérant qu'en l'espèce, le législateur a maintenu, pour les personnes ayant effectué des carrières longues dans le secteur public comme dans le secteur privé, la possibilité de partir à la retraite avant l'âge de soixante ans ; que, dans cette mesure, le grief invoqué manque en fait ; que, pour le surplus, s'agissant d'un système de retraite par répartition, le législateur a pu, sans porter atteinte au principe d'égalité, fixer un âge minimal de départ à la retraite ;
13. Considérant, en second lieu, que le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit ;
14. Considérant que les personnes atteintes d'une incapacité de travail et ayant été exposées à des « facteurs de pénibilité » pendant l'accomplissement de leur travail ne se trouvent pas, au regard des règles de fixation de l'âge d'ouverture du droit à une pension de retraite, dans la même situation que celles n'ayant pas subi cette exposition ; que, par suite, il n'a pas été porté atteinte au principe d'égalité ;
15. Considérant que l'article 18 de la loi déférée n'est pas contraire à la Constitution ;
- SUR LE REPORT À SOIXANTE-SEPT ANS DE LA LIMITE D'ÂGE OUVRANT DROIT À UNE PENSION DE RETRAITE SANS DÉCOTE :
16. Considérant que le paragraphe II de l'article 20 de la loi déférée modifie le 1 ° de l'article L. 351-8 du code de la sécurité sociale ; qu'il dispose que bénéficient du taux plein même s'ils ne justifient pas de la durée requise d'assurance ou de périodes équivalentes dans le régime général et un ou plusieurs autres régimes obligatoires « les assurés qui atteignent l'âge prévu à l'article L. 161-17-2 augmenté de cinq années », soit, en principe, soixante-sept ans ; que le paragraphe II de l'article 21 modifie de façon similaire les articles L. 732-25 et L. 762-30 du code rural et de la pêche maritime ; que les autres dispositions des articles 20 et 21 déterminent les cas dans lesquels le départ à la retraite peut avoir lieu sans décote à l'âge de soixante-cinq ans ;
17. Considérant qu'aux termes du paragraphe I de l'article 28 de la loi déférée : « Pour les fonctionnaires relevant de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée dont la limite d'âge était de soixante-cinq ans en application des dispositions législatives et réglementaires antérieures à l'entrée en vigueur de la présente loi et nés à compter du 1er janvier 1956, la limite d'âge est fixée à soixante-sept ans » ; que le paragraphe I de l'article 29 de la loi déférée modifie la loi du 13 septembre 1984 susvisée pour poser le principe de la fixation à soixante-sept ans de la limite d'âge ;
18. Considérant que les requérants soutiennent que ces dispositions méconnaissent le principe d'égalité entre les femmes et les hommes ;
19. Considérant que le législateur a fixé des règles identiques pour les femmes et les hommes ; qu'ainsi, les articles 20, 21 et 28 de la loi déférée maintiennent le bénéfice de la retraite à taux plein à soixante-cinq ans, quelle que soit la durée d'assurance, pour le parent de trois enfants âgé de cinquante-cinq ans ou plus qui a interrompu sa carrière pour s'occuper d'un de ses enfants ; que les articles 20, 21, 23 et 28 font de même pour la personne ayant interrompu son activité professionnelle pour s'occuper de son enfant handicapé ou d'un membre de sa famille en qualité d'aidant familial ; qu'il s'ensuit que le report à soixante-sept ans de la limite d'âge ouvrant droit à une pension de retraite sans décote n'est pas contraire au principe d'égalité entre les femmes et les hommes ;
20. Considérant que les articles 20, 21, 28 et 29 de la loi déférée ne sont pas contraires à la Constitution ;
- SUR LA PLACE DE CERTAINES DISPOSITIONS DANS LA LOI DÉFÉRÉE :
21. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 45 de la Constitution : « Sans préjudice de l'application des articles 40 et 41, tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu'il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis » ;
22. Considérant que le projet de loi comportait trente-trois articles lors de son dépôt sur le bureau de l'Assemblée nationale, première assemblée saisie ; que son titre Ier comportait les dispositions générales relatives au pilotage des régimes de retraite et à la durée d'assurance ou de service et bonifications ; que son titre II fixait celles applicables à l'ensemble des régimes de retraite ; que son titre III prévoyait des mesures de rapprochement entre régimes de retraite ; que son titre IV relatif à la pénibilité donnait une valeur législative au dossier médical, posait la base législative de la définition de l'exposition aux « facteurs de risques professionnels », instituait et organisait le financement d'une prise en compte par la retraite de cette pénibilité ; que son titre V concernait plusieurs mesures de solidarité ; que son titre VI fixait les conditions d'entrée en vigueur de ces dispositions ;
23. Considérant que les articles 63, 65, 66, 68, 69, 70, 71, 72 et 75 de la loi déférée, insérés dans le projet de loi par des amendements adoptés en première lecture par l'Assemblée nationale, sont relatifs respectivement à la réforme de l'organisation des services de santé au travail, à l'administration des services de santé au travail interentreprises et à l'élaboration par ces services d'un projet de service pluriannuel, aux dérogations par voie d'accord collectif de branche aux règles de suivi médical au travail pour certaines catégories de travailleurs, au contrôle des conventions par le conseil d'administration du service de santé interentreprises, aux conditions de recrutement temporaire d'un interne par un service de santé au travail, au rôle du directeur du service de santé au travail interentreprises, aux dérogations réglementaires aux règles de suivi médical au travail, ainsi qu'aux conditions d'organisation et de fonctionnement du service de santé au travail en agriculture ; que les articles 64, 67, 73 et 74, insérés dans le projet de loi par des amendements adoptés en première lecture par le Sénat, ont pour objet respectivement de préciser la procédure d'échanges d'informations entre le médecin du travail et l'employeur, de définir l'articulation entre la commission de projet créée par l'article 66 et la commission médico-technique au sein des services de santé au travail interenterprises, d'adapter l'organisation de ces services au secteur agricole et de procéder dans le code du travail à diverses mesures de coordination rédactionnelle liées à l'adoption de certaines de ces dispositions ;
24. Considérant que ces dispositions ne présentent pas de lien même indirect avec celles qui figuraient dans le projet de loi portant réforme des retraites ; qu'elles ont été adoptées selon une procédure contraire à l'article 45 de la Constitution ; qu'il s'ensuit que les articles 63 à 75 de la loi déférée doivent être déclarés contraires à la Constitution ;
25. Considérant qu'il n'y a lieu, pour le Conseil constitutionnel, de soulever d'office aucune autre question de conformité à la Constitution,
D É C I D E :
Article 1er.- Les articles 63 à 75 de la loi portant réforme des retraites sont contraires à la Constitution.
Article 2.- Les articles 18, 20, 21, 28 et 29 de la même loi sont conformes à la Constitution.
Article 3.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française.
Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 9 novembre 2010, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mme Claire BAZY MALAURIE, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Jacques CHIRAC, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Valéry GISCARD d'ESTAING, Mme Jacqueline de GUILLENCHMIDT, MM. Hubert HAENEL et Pierre STEINMETZ.
Journal officiel du 10 novembre 2010, page 20056, texte n° 2
Recueil, p. 310
ECLI : FR : CC : 2010 : 2010.617.DC
Les abstracts
- 1. NORMES CONSTITUTIONNELLES
- 1.3. PRINCIPES AFFIRMÉS PAR LE PRÉAMBULE DE LA CONSTITUTION DE 1946
- 1.3.12. Alinéa 11
- 1.3.12.1. Droit à des moyens convenables d'existence, protection de la santé et de la sécurité matérielle
1.3.12.1.2. Politique de solidarité nationale en faveur des travailleurs retraités
L'exigence constitutionnelle résultant du onzième alinéa du Préambule de 1946 implique la mise en œuvre d'une politique de solidarité nationale en faveur des travailleurs retraités. Il est cependant possible au législateur, pour satisfaire à cette exigence, de choisir les modalités concrètes qui lui paraissent appropriées. En particulier, il lui est à tout moment loisible, statuant dans le domaine qui lui est réservé par l'article 34 de la Constitution, de modifier des textes antérieurs ou d'abroger ceux-ci en leur substituant, le cas échéant, d'autres dispositions. Il ne lui est pas moins loisible d'adopter, pour la réalisation ou la conciliation d'objectifs de nature constitutionnelle, des modalités nouvelles dont il lui appartient d'apprécier l'opportunité. Cependant, l'exercice de ce pouvoir ne saurait aboutir à priver de garanties légales des exigences de caractère constitutionnel.
- 4. DROITS ET LIBERTÉS
- 4.10. AUTRES DROITS ET PRINCIPES SOCIAUX
- 4.10.1. Droit à la protection sociale (alinéa 11 du Préambule de la Constitution de 1946)
- 4.10.1.1. Champ d'application
4.10.1.1.3. Vieillesse
En adoptant la loi portant réforme des retraites, le législateur a voulu préserver le système de retraite par répartition, confronté à d'importantes difficultés de financement. Il a notamment tenu compte de l'allongement de l'espérance de vie. Au nombre des mesures qu'il a prises figure le report à soixante-deux ans de l'âge légal de départ à la retraite, applicable, de façon progressive jusqu'en 2018, tant aux salariés du secteur public qu'à ceux du secteur privé. Il a prévu ou maintenu des possibilités de retraite anticipée au bénéfice des personnes ayant eu des carrières longues, de celles ayant un taux d'incapacité de travail fixé par voie réglementaire, de celles exposées à des " facteurs de pénibilité " et atteintes d'incapacité permanente, des travailleurs handicapés ou des personnes exposées à l'amiante. Ce faisant, il a pris des mesures qui visent à garantir la sécurité des vieux travailleurs conformément au Préambule de 1946. Ces mesures ne sont pas inappropriées à l'objectif qu'il s'est fixé.
- 5. ÉGALITÉ
- 5.1. ÉGALITÉ DEVANT LA LOI
5.1.1. Principe
Aux termes de l'article 6 de la Déclaration de 1789 : " La loi est l'expression de la volonté générale. Tous les citoyens ont droit de concourir personnellement, ou par leurs représentants, à sa formation. Elle doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse ". Si, en règle générale, le principe d'égalité impose de traiter de la même façon des personnes qui se trouvent dans la même situation, il n'en résulte pas pour autant qu'il oblige à traiter différemment des personnes se trouvant dans des situations différentes.
- 5. ÉGALITÉ
- 5.1. ÉGALITÉ DEVANT LA LOI
- 5.1.3. Respect du principe d'égalité : absence de différence de traitement
- 5.1.3.9. Droit social
5.1.3.9.8. Retraite
Le législateur a maintenu, pour les personnes ayant effectué des carrières longues dans le secteur public comme dans le secteur privé, la possibilité de partir à la retraite avant l'âge de soixante ans. Dans cette mesure, le grief tiré de la violation du principe d'égalité en raison du report à soixante-deux ans de l'âge d'ouverture du droit à une pension de retraite, manque en fait. Pour le surplus, s'agissant d'un système de retraite par répartition, le législateur a pu, sans porter atteinte au principe d'égalité, fixer un âge minimal de départ à la retraite.
Le législateur a fixé des règles identiques pour les femmes et les hommes. Ainsi, les articles 20, 21 et 28 de la loi déférée maintiennent le bénéfice de la retraite à taux plein à soixante-cinq ans, quelle que soit la durée d'assurance, pour le parent de trois enfants âgé de cinquante-cinq ans ou plus qui a interrompu sa carrière pour s'occuper d'un de ses enfants. Les articles 20, 21, 23 et 28 font de même pour la personne ayant interrompu son activité professionnelle pour s'occuper de son enfant handicapé ou d'un membre de sa famille en qualité d'aidant familial. Il s'ensuit que le report à soixante-sept ans de la limite d'âge ouvrant droit à une pension de retraite sans décote n'est pas contraire au principe d'égalité entre les femmes et les hommes.
- 5. ÉGALITÉ
- 5.1. ÉGALITÉ DEVANT LA LOI
- 5.1.4. Respect du principe d'égalité : différence de traitement justifiée par une différence de situation
- 5.1.4.10. Droit social
5.1.4.10.11. Législation sur les retraites
Les personnes atteintes d'une incapacité de travail et ayant été exposées à des " facteurs de pénibilité " pendant l'accomplissement de leur travail ne se trouvent pas, au regard des règles de fixation de l'âge d'ouverture du droit à une pension de retraite, dans la même situation que celles n'ayant pas subi cette exposition. Par suite, il n'a pas été porté atteinte au principe d'égalité.
- 10. PARLEMENT
- 10.3. FONCTION LEGISLATIVE
- 10.3.2. Examen en commission
- 10.3.2.1. Réunions
10.3.2.1.5. Publicité des travaux
Selon les députés requérants, la combinaison de la réunion à " huis clos " de la commission saisie au fond et du temps législatif programmé, défini par l'article 49, alinéas 5 à 13, du règlement de l'Assemblée nationale, a porté une atteinte inconstitutionnelle aux exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire. Ces exigences, qui s'appliquent aux travaux des commissions, imposent qu'il soit précisément rendu compte des interventions faites devant celles-ci, des motifs des modifications proposées aux textes dont elles sont saisies et des votes émis en leur sein. En l'espèce, il a été précisément rendu compte de l'ensemble de ces travaux.
- 10. PARLEMENT
- 10.3. FONCTION LEGISLATIVE
- 10.3.3. Organisation des débats
10.3.3.5. Clôture de la discussion
Selon les députés requérants, la combinaison de la réunion à " huis clos " de la commission saisie au fond et du temps législatif programmé, défini par l'article 49, alinéas 5 à 13, du règlement de l'Assemblée nationale, a porté une atteinte inconstitutionnelle aux exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire. La méconnaissance du treizième alinéa de l'article 49 de ce même règlement, aux termes duquel : " Chaque député peut prendre la parole, à l'issue du vote du dernier article du texte en discussion, pour une explication de vote personnelle de cinq minutes. Le temps consacré à ces explications de vote n'est pas décompté du temps global réparti entre les groupes ", aurait également porté atteinte à ces exigences. D'une part, les exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire, qui s'appliquent aux travaux des commissions, imposent qu'il soit précisément rendu compte des interventions faites devant celles-ci, des motifs des modifications proposées aux textes dont elles sont saisies et des votes émis en leur sein. En l'espèce, il a été précisément rendu compte de l'ensemble de ces travaux. D'autre part, les règlements des assemblées parlementaires n'ont pas par eux-mêmes une valeur constitutionnelle. Ainsi, la méconnaissance alléguée des dispositions de l'article 49, alinéa 13, du même règlement ne saurait avoir pour effet, à elle seule, de rendre la procédure législative contraire à la Constitution. En l'espèce, la décision du président de l'Assemblée nationale d'interrompre les explications de vote personnelles n'a pas porté atteinte aux exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire.
- 10. PARLEMENT
- 10.3. FONCTION LEGISLATIVE
- 10.3.5. Droit d'amendement
- 10.3.5.2. Recevabilité
- 10.3.5.2.5. Recevabilité en première lecture
10.3.5.2.5.4. Absence de lien indirect
Les articles 63, 65, 66, 68, 69, 70, 71, 72 et 75 de la loi portant réforme des retraites, insérés dans le projet de loi par des amendements adoptés en première lecture par l'Assemblée nationale, sont relatifs respectivement à la réforme de l'organisation des services de santé au travail, à l'administration des services de santé au travail interentreprises et à l'élaboration par ces services d'un projet de service pluriannuel, aux dérogations par voie d'accord collectif de branche aux règles de suivi médical au travail pour certaines catégories de travailleurs, au contrôle des conventions par le conseil d'administration du service de santé interentreprises, aux conditions de recrutement temporaire d'un interne par un service de santé au travail, au rôle du directeur du service de santé au travail interentreprises, aux dérogations réglementaires aux règles de suivi médical au travail, ainsi qu'aux conditions d'organisation et de fonctionnement du service de santé au travail en agriculture. Les articles 64, 67, 73 et 74, insérés dans le projet de loi par des amendements adoptés en première lecture par le Sénat, ont pour objet respectivement de préciser la procédure d'échanges d'informations entre le médecin du travail et l'employeur, de définir l'articulation entre la commission de projet créée par l'article 66 et la commission médico-technique au sein des services de santé au travail interenterprises, d'adapter l'organisation de ces services au secteur agricole et de procéder dans le code du travail à diverses mesures de coordination rédactionnelle liées à l'adoption de certaines de ces dispositions. Ces dispositions ne présentent pas de lien même indirect avec celles qui figuraient dans le projet de loi portant réforme des retraites.
- 10. PARLEMENT
- 10.3. FONCTION LEGISLATIVE
- 10.3.7. Vote
10.3.7.1. Explication de vote
Les règlements des assemblées parlementaires n'ont pas par eux-mêmes une valeur constitutionnelle. Ainsi, la méconnaissance alléguée des dispositions de l'article 49, alinéa 13, du règlement de l'Assemblée nationale qui permet aux députés, lorsqu'un débat est soumis au temps législatif programmé, de faire une explication de vote personnelle qui n'est pas décompté dans le temps global imparti à leur groupe, ne saurait avoir pour effet, à elle seule, de rendre la procédure législative contraire à la Constitution. En l'espèce, la décision du président de l'Assemblée nationale d'interrompre les explications de vote personnelles n'a pas porté atteinte aux exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire.
- 10. PARLEMENT
- 10.3. FONCTION LEGISLATIVE
- 10.3.9. Procédures particulières
10.3.9.7. Procédures programmées
Selon les députés requérants, la combinaison de la réunion à " huis clos " de la commission saisie au fond et du temps législatif programmé, défini par l'article 49, alinéas 5 à 13, du règlement de l'Assemblée nationale, a porté une atteinte inconstitutionnelle aux exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire, de même que la méconnaissance du treizième alinéa de l'article 49 de ce même règlement, aux termes duquel : " Chaque député peut prendre la parole, à l'issue du vote du dernier article du texte en discussion, pour une explication de vote personnelle de cinq minutes. Le temps consacré à ces explications de vote n'est pas décompté du temps global réparti entre les groupes ", aurait également porté atteinte à ces exigences. Les règlements des assemblées parlementaires n'ont pas par eux-mêmes une valeur constitutionnelle. Ainsi, la méconnaissance alléguée des dispositions de l'article 49, alinéa 13, du même règlement ne saurait avoir pour effet, à elle seule, de rendre la procédure législative contraire à la Constitution. En l'espèce, la décision du président de l'Assemblée nationale d'interrompre les explications de vote personnelles n'a pas porté atteinte aux exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire.
- 10. PARLEMENT
- 10.3. FONCTION LEGISLATIVE
- 10.3.10. Qualité de la loi
10.3.10.2. Principe de clarté et de sincérité des débats parlementaires
Selon les députés requérants, la combinaison de la réunion à " huis clos " de la commission saisie au fond et du temps législatif programmé, défini par l'article 49, alinéas 5 à 13, du règlement de l'Assemblée nationale, a porté une atteinte inconstitutionnelle aux exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire. La méconnaissance du treizième alinéa de l'article 49 de ce même règlement, aux termes duquel : " Chaque député peut prendre la parole, à l'issue du vote du dernier article du texte en discussion, pour une explication de vote personnelle de cinq minutes. Le temps consacré à ces explications de vote n'est pas décompté du temps global réparti entre les groupes ", aurait également porté atteinte à ces exigences. D'une part, les exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire, qui s'appliquent aux travaux des commissions, imposent qu'il soit précisément rendu compte des interventions faites devant celles-ci, des motifs des modifications proposées aux textes dont elles sont saisies et des votes émis en leur sein. En l'espèce, il a été précisément rendu compte de l'ensemble de ces travaux. D'autre part, les règlements des assemblées parlementaires n'ont pas par eux-mêmes une valeur constitutionnelle. Ainsi, la méconnaissance alléguée des dispositions de l'article 49, alinéa 13, du même règlement ne saurait avoir pour effet, à elle seule, de rendre la procédure législative contraire à la Constitution. En l'espèce, la décision du président de l'Assemblée nationale d'interrompre les explications de vote personnelles n'a pas porté atteinte aux exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire.