Décision

Décision n° 2007-4470 AN du 17 avril 2008

A.N., Charente (4ème circ.)
Inéligibilité

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL,

Vu, enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 1er février 2008, la décision en date du 17 janvier 2008 par laquelle la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques saisit le Conseil constitutionnel de la situation de M. Malek BOUTIH, candidat à l'élection législative qui a eu lieu les 10 et 17 juin 2007 dans la 4ème circonscription du département de la Charente ;

Vu le mémoire en défense présenté par M. BOUTIH, enregistré le 4 mars 2008 ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu la Constitution, notamment son article 59 ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

Vu le code électoral ;

Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ;

Le rapporteur ayant été entendu ;

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 52-4 du code électoral : « Tout candidat à une élection désigne un mandataire au plus tard à la date à laquelle sa candidature est enregistrée. Ce mandataire peut être une association de financement électoral, ou une personne physique... - Le mandataire... règle les dépenses engagées en vue de l'élection et antérieures à la date du tour de scrutin où elle a été acquise, à l'exception des dépenses prises en charge par un parti ou un groupement politique. Les dépenses antérieures à sa désignation payées directement par le candidat ou à son profit font l'objet d'un remboursement par le mandataire et figurent dans son compte bancaire ou postal... » ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 52-15 du code électoral : « La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques approuve et, après procédure contradictoire, rejette ou réforme les comptes de campagne » ; qu'en vertu du second alinéa de l'article L.O. 128 du même code, est inéligible pendant un an celui dont le compte de campagne a été rejeté à bon droit par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que M. BOUTIH a été mis à même, dès le 23 septembre 2007, de produire des observations sur le règlement direct de dépenses électorales, postérieurement à la désignation de son mandataire financier, par lui-même et par des personnes participant à sa campagne électorale ; que, dès lors, le moyen tiré du non respect du caractère contradictoire de la procédure devant la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques manque en fait ;

3. Considérant, en second lieu, que, si, pour des raisons pratiques, il peut être toléré que le candidat règle directement de menues dépenses postérieurement à la désignation de son mandataire, ce n'est que dans la mesure où leur montant global est faible par rapport au total des dépenses du compte de campagne et négligeable au regard du plafond de dépenses autorisées fixé par l'article L. 52-11 du code électoral ;

4. Considérant qu'en admettant même que le local loué par M. BOUTIH à Angoulême n'ait été utilisé, ainsi qu'il le soutient, que pour un tiers de sa surface comme permanence électorale, des dépenses d'un montant total de 1 263 €, exposées pour la campagne électorale de l'intéressé, ont été réglées directement par lui-même ou par des personnes participant à sa campagne après la désignation du mandataire financier et sans l'intervention de celui-ci ; que ces dépenses représentent 4,17 % du total des dépenses de son compte de campagne et 2,11 % du plafond, fixé à 59 784 € pour cette élection ;

5. Considérant que, si M. BOUTIH fait état de sa bonne foi, invoque les délais qui ont été nécessaires pour obtenir l'ouverture du compte bancaire de son mandataire et l'octroi d'un prêt bancaire et fait valoir qu'il n'était pas possible à son mandataire financier d'être en permanence présent auprès des militants, ces circonstances ne sont pas de nature à faire obstacle à l'application des dispositions de l'article L. 52-4, lesquelles ont été méconnues en l'espèce ; que c'est donc à bon droit que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a rejeté son compte de campagne ; que, par suite, il appartient au Conseil constitutionnel, en application de l'article L.O. 136-1 du code électoral, de constater l'inéligibilité de M. BOUTIH pour une durée d'un an à compter de la date de la présente décision,

D É C I D E :
Article premier.- M. Malek BOUTIH est déclaré inéligible en application des dispositions de l'article L.O. 128 du code électoral pour une durée d'un an à compter du 17 avril 2008.
Article 2.- La présente décision sera notifiée à M. BOUTIH, au président de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques et publiée au Journal officiel de la République française.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 17 avril 2008, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, MM. Guy CANIVET, Renaud DENOIX de SAINT MARC et Olivier DUTHEILLET de LAMOTHE, Mme Jacqueline de GUILLENCHMIDT, MM. Pierre JOXE et Jean-Louis PEZANT, Mme Dominique SCHNAPPER et M. Pierre STEINMETZ.

Journal officiel du 25 avril 2008, page 6980, texte n° 153
Recueil, p. 281
ECLI : FR : CC : 2008 : 2007.4470.AN

Les abstracts

  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.5. Financement
  • 8.3.5.5. Dépenses produites au compte de campagne
  • 8.3.5.5.4. Dépenses payées directement

Si, pour des raisons pratiques, il peut être toléré que le candidat règle directement de menues dépenses postérieurement à la désignation de son mandataire, ce n'est que dans la mesure où leur montant global est faible par rapport au total des dépenses du compte de campagne et négligeable au regard du plafond de dépenses autorisées fixé par l'article L. 52-11 du code électoral. En l'espèce, en admettant même que le local loué par le candidat n'ait été utilisé que pour un tiers de sa surface comme permanence électorale, les dépenses exposées pour la campagne de l'intéressé et réglées directement par lui-même ou par des personnes participant à sa campagne après la désignation du mandataire financier et sans l'intervention de celui-ci représentent 4,17 % du total des dépenses du compte de campagne et 2,1 % du plafond. Inopérance de la bonne foi du candidat, des délais nécessaires pour obtenir l'ouverture du compte bancaire du mandataire et du manque de disponibilité de celui-ci. Rejet du compte à bon droit. Inéligibilité.

(2007-4470 AN, 17 avril 2008, cons. 1, 2, 3, 4, 5, Journal officiel du 25 avril 2008, page 6980, texte n° 153)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.5. Financement
  • 8.3.5.7. Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques
  • 8.3.5.7.3. Procédure

Il résulte de l'instruction que le candidat a été mis à même de produire des observations sur le règlement direct, postérieurement à la désignation de son mandataire financier, de dépenses électorales par lui-même et par des personnes participant à sa campagne électorale. Dès lors, le grief tiré du non-respect du caractère contradictoire de la procédure devant la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques manque en fait.

(2007-4470 AN, 17 avril 2008, cons. 2, Journal officiel du 25 avril 2008, page 6980, texte n° 153)
À voir aussi sur le site : Version PDF de la décision.
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