Décision n° 2005-516 DC du 7 juillet 2005
Le Conseil constitutionnel a été saisi, dans les conditions prévues par l'article 61, alinéa 2, de la Constitution, de la loi de programme fixant les orientations de la politique énergétique, le 29 juin 2005, par M. Jean-Marc AYRAULT, Mmes Patricia ADAM, Sylvie ANDRIEUX, MM. Jean-Marie AUBRON, Jean-Paul BACQUET, Jean-Pierre BALLIGAND, Gérard BAPT, Claude BARTOLONE, Jacques BASCOU, Christian BATAILLE, Jean-Claude BATEUX, Jean-Claude BEAUCHAUD, Éric BESSON, Jean-Louis BIANCO, Jean-Pierre BLAZY, Serge BLISKO, Jean-Claude BOIS, Daniel BOISSERIE, Maxime BONO, Augustin BONREPAUX, Jean-Michel BOUCHERON, Pierre BOURGUIGNON, Mme Danielle BOUSQUET, MM. François BROTTES, Jean-Christophe CAMBADÉLIS, Thierry CARCENAC, Christophe CARESCHE, Mme Martine CARILLON-COUVREUR, MM. Laurent CATHALA, Jean-Paul CHANTEGUET, Michel CHARZAT, Alain CLAEYS, Mme Marie-Françoise CLERGEAU, MM. Gilles COCQUEMPOT, Pierre COHEN, Mme Claude DARCIAUX, M. Michel DASSEUX, Mme Martine DAVID, MM. Marcel DEHOUX, Michel DELEBARRE, Jean DELOBEL, Bernard DEROSIER, Michel DESTOT, Marc DOLEZ, François DOSÉ, René DOSIÈRE, Julien DRAY, Tony DREYFUS, Pierre DUCOUT, Jean-Pierre DUFAU, William DUMAS, Jean-Paul DUPRÉ, Yves DURAND, Mme Odette DURIEZ, MM. Henri EMMANUELLI, Claude ÉVIN, Laurent FABIUS, Albert FACON, Jacques FLOCH, Pierre FORGUES, Michel FRANÇAIX, Jean GAUBERT, Mmes Nathalie GAUTIER, Catherine GÉNISSON, MM. Jean GLAVANY, Gaétan GORCE, Alain GOURIOU, Mmes Elisabeth GUIGOU, Paulette GUINCHARD-KUNSTLER, M. David HABIB, Mme Danièle HOFFMAN-RISPAL, MM. François HOLLANDE, Jean-Louis IDIART, Mme Françoise IMBERT, MM. Serge JANQUIN, Armand JUNG, Jean-Pierre KUCHEIDA, Mme Conchita LACUEY, MM. Jérôme LAMBERT, François LAMY, Jack LANG, Jean LAUNAY, Jean-Yves LE BOUILLONNEC, Gilbert LE BRIS, Jean-Yves LE DÉAUT, Jean-Yves LE DRIAN, Jean LE GARREC, Jean-Marie LE GUEN, Michel LIEBGOTT, Mme Martine LIGNIÈRES-CASSOU, MM. François LONCLE, Victorin LUREL, Bernard MADRELLE, Bruno LE ROUX, Mme Marylise LEBRANCHU, MM. Michel LEFAIT, Patrick LEMASLE, Guy LENGAGNE, Mme Annick LEPETIT, MM. Louis-Joseph MANSCOUR, Philippe MARTIN, Christophe MASSE, Didier MATHUS, Kléber MESQUIDA, Jean MICHEL, Didier MIGAUD, Mme Hélène MIGNON, MM. Arnaud MONTEBOURG, Henri NAYROU, Alain NÉRI, Mme Marie-Renée OGET, MM. Michel PAJON, Christian PAUL, Germinal PEIRO, Jean-Claude PEREZ, Mmes Marie-Françoise PÉROL-DUMONT, Geneviève PERRIN-GAILLARD, MM. Jean-Jack QUEYRANNE, Paul QUILÈS, Bernard ROMAN, René ROUQUET, Patrick ROY, Mme Ségolène ROYAL, M. Michel SAINTE-MARIE, Mme Odile SAUGUES, MM. Henri SICRE, Dominique STRAUSS-KAHN, Pascal TERRASSE, Philippe TOURTELIER, Daniel VAILLANT, André VALLINI, Manuel VALLS, Michel VERGNIER, Alain VIDALIES, Jean-Claude VIOLLET, Philippe VUILQUE, Eric JALTON, Jean-Pierre DEFONTAINE, Paul GIACOBBI, Simon RENUCCI, Mmes Chantal ROBIN-RODRIGO et Christiane TAUBIRA, députés ;
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL,
Vu la Constitution ;
Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée, portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
Vu la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances, notamment son article 67 portant abrogation de l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 ;
Vu le code de l'environnement ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 modifiée, relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité ;
Vu la loi n° 2003-8 du 3 janvier 2003 modifiée, relative aux marchés du gaz et de l'électricité et au service public de l'énergie ;
Vu les observations du Gouvernement, enregistrées le 4 juillet 2005 ;
Le rapporteur ayant été entendu ;
1. Considérant que les députés requérants défèrent au Conseil constitutionnel la loi de programme fixant les orientations de la politique énergétique ; qu'ils contestent notamment la conformité à la Constitution de ses articles 1er à 6, 37, 40, 58 et 67 ;
- SUR LES ARTICLES 1ER À 6 :
2. Considérant que les articles 1er à 6 de la loi déférée déterminent les objectifs de l'action de l'Etat en matière de politique énergétique ;
3. Considérant que, selon les requérants, ces objectifs seraient dénués de portée normative ; qu'ils estiment que le législateur a cherché à « contourner » la jurisprudence du Conseil constitutionnel « en matière de textes dénués de portée normative » en requalifiant la loi, au cours de son examen, en « loi de programme » ; qu'ils observent que, pour autant, les dispositions en cause n'avaient pas été soumises pour avis au Conseil économique et social comme le prévoit l'article 70 de la Constitution ; qu'ils soutiennent qu'elles ne respectent pas davantage le principe de clarté et l'objectif de valeur constitutionnelle d'intelligibilité et d'accessibilité de la loi ;
4. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : « La loi est l'expression de la volonté générale... » ; qu'il résulte de cet article comme de l'ensemble des autres normes de valeur constitutionnelle relatives à l'objet de la loi que, sous réserve de dispositions particulières prévues par la Constitution, la loi a pour vocation d'énoncer des règles et doit par suite être revêtue d'une portée normative ;
5. Considérant qu'aux termes de l'avant-dernier alinéa de l'article 34 de la Constitution, qui figure au nombre des dispositions particulières ainsi réservées : « Des lois de programme déterminent les objectifs de l'action économique et sociale de l'Etat » ; que l'article 1er de l'ordonnance du 2 janvier 1959 susvisée, qui prévoyait que « les autorisations de programme peuvent être groupées dans des lois dites »lois de programme" ", a été abrogé à compter du 1er janvier 2005 par la loi organique du 1er août 2001 susvisée ; qu'en vertu de l'article 70 de la Constitution, « tout projet de loi de programme à caractère économique ou social » est soumis pour avis au Conseil économique et social ;
6. Considérant, en premier lieu, que, à la date du dépôt du projet dont est issue la loi déférée sur le bureau de la première assemblée saisie, l'article 1er de l'ordonnance du 2 janvier 1959 précité était encore en vigueur ; qu'en vertu des dispositions combinées du dernier alinéa de cet article et des articles 34 et 70 de la Constitution, devait alors être entendue comme « loi de programme à caractère économique ou social » une loi qui, non seulement définissait des objectifs à moyen ou long terme en matière économique et sociale, mais comportait, en outre, des prévisions de dépenses chiffrées pour la réalisation de ces objectifs ; que tel n'était pas le cas du projet, intitulé « loi d'orientation sur l'énergie », dont est issue la loi déférée ; que celui-ci n'avait pas, à la date de son dépôt, le caractère d'un projet de loi de programme ; que, dès lors, le Gouvernement n'était pas tenu de le soumettre pour avis au Conseil économique et social ;
7. Considérant, en second lieu, que la catégorie des lois de programme à caractère économique et social est définie, depuis le 1er janvier 2005, par le seul avant-dernier alinéa de l'article 34 de la Constitution ; que les dispositions des articles 1er à 6 de la loi déférée qui fixent des objectifs à l'action de l'Etat dans le domaine énergétique sont de celles qui peuvent désormais trouver leur place dans cette catégorie ; qu'il s'ensuit que le grief tiré de leur défaut de portée normative ne peut être utilement soulevé à leur encontre ; que ne saurait davantage être invoqué le grief tiré de leur imprécision ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les griefs dirigés contre les articles 1er à 6 doivent être écartés ;
- SUR L'ARTICLE 37 :
9. Considérant que l'article 37 de la loi déférée est relatif à la création de zones de développement de l'éolien ainsi qu'à l'obligation d'achat d'électricité prévue par l'article 10 de la loi du 10 février 2000 susvisée ; que, selon les requérants, il méconnaît les articles 34, 72 et 72-2 de la Constitution, ainsi que le principe d'égalité ;
. En ce qui concerne la création de zones de développement de l'éolien :
10. Considérant que le II de l'article 37 de la loi déférée insère dans la loi du 10 février 2000 susvisée un article 10-1 aux termes duquel : « Les zones de développement de l'éolien sont définies par le préfet du département en fonction de leur potentiel éolien, des possibilités de raccordement aux réseaux électriques et de la protection des paysages, des monuments historiques et des sites remarquables et protégés. Elles sont proposées par la ou les communes dont tout ou partie du territoire est compris dans le périmètre proposé... - La décision du préfet du département intervient sur la base de la proposition dans un délai maximal de six mois à compter de la réception de celle-ci, après avis de la commission départementale compétente en matière de nature, de paysages et de sites et des communes limitrophes à celles dont tout ou partie du territoire est compris dans la zone de développement de l'éolien... - Les zones de développement de l'éolien s'imposent au schéma régional éolien défini au I de l'article L. 553-4 du code de l'environnement » ;
11. Considérant que les requérants soutiennent qu'en confiant au préfet du département la définition des zones de développement de l'éolien, ces dispositions méconnaissent le principe de libre administration des collectivités territoriales ainsi que celui selon lequel ces dernières ont vocation à prendre les décisions pour l'ensemble des compétences qui peuvent le mieux être mises en oeuvre à leur échelon ; qu'elles auraient pour effet de soumettre à la tutelle des préfets la gestion de l'espace et de l'environnement communal ainsi que la mise en place des schémas régionaux éoliens ; qu'elles empêcheraient les collectivités territoriales intéressées de développer des activités économiques de nature à leur procurer des ressources propres ;
12. Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 72 de la Constitution : « Les collectivités territoriales ont vocation à prendre les décisions pour l'ensemble des compétences qui peuvent le mieux être mises en oeuvre à leur échelon » ; qu'il résulte de la généralité des termes retenus par le constituant que le choix du législateur d'attribuer une compétence à l'Etat plutôt qu'à une collectivité territoriale ne pourrait être remis en cause, sur le fondement de cette disposition, que s'il était manifeste qu'eu égard à ses caractéristiques et aux intérêts concernés, cette compétence pouvait être mieux exercée par une collectivité territoriale ;
13. Considérant que les dispositions contestées tendent à développer l'énergie éolienne en prenant en compte les possibilités de raccordement aux réseaux électriques ainsi que la préservation des paysages, des monuments historiques et des sites remarquables et protégés ; que, compte tenu de ces finalités, le législateur n'a pas manifestement méconnu les dispositions précitées du deuxième alinéa de l'article 72 de la Constitution en confiant au préfet le soin de définir les zones de développement de l'éolien ; qu'il n'a ni instauré une tutelle de l'Etat sur les communes ou les régions ni porté atteinte à leur libre administration ou à leur autonomie financière ;
. En ce qui concerne l'obligation d'achat d'électricité :
14. Considérant que le I de l'article 37 de la loi déférée modifie l'article 10 de la loi du 10 février 2000 susvisée en ce qui concerne l'énergie éolienne ; qu'il soumet à des conditions nouvelles l'obligation d'achat d'électricité produite par cette énergie ;
15. Considérant que, selon les requérants, en subordonnant l'obligation d'achat prévue à l'article 10 de la loi du 10 février 2000 à l'implantation de l'équipement dans une zone de développement de l'éolien, les dispositions critiquées rompent l'égalité entre producteurs d'énergie renouvelable au détriment des producteurs d'énergie éolienne ;
16. Considérant que le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit ;
17. Considérant qu'eu égard aux caractéristiques et à l'impact sur l'environnement des installations qu'ils utilisent, les producteurs d'énergie éolienne se trouvent dans une situation différente de celle des autres producteurs d'énergie ; que, par suite, le principe d'égalité n'est pas méconnu par l'article 37 de la loi déférée ;
18. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les griefs dirigés contre l'article 37 de la loi déférée doivent être écartés ;
- SUR L'ARTICLE 40 :
19. Considérant que le 2 ° de l'article 40 de la loi déférée modifie l'article L. 553-3 du code de l'environnement ; qu'il impose aux producteurs d'énergie éolienne, dès lors que leurs installations sont situées sur le domaine public maritime, de constituer « dès le début de leur construction » des garanties financières correspondant à l'obligation de démantèlement et de remise en état du site à la fin de l'exploitation ;
20. Considérant que les requérants observent que l'obligation de constitution de garanties financières n'est exigée des autres producteurs d'énergie éolienne qu'au cours de l'exploitation de leurs installations ; qu'ils soutiennent que les dispositions de l'article 40 sont, par suite, contraires au principe d'égalité ;
21. Considérant que l'établissement d'éoliennes sur le domaine public maritime entraîne des contraintes particulières liées tant aux règles relatives à l'occupation de ce domaine qu'à l'importance, à la durée et au coût des travaux de démantèlement et de remise en état du site en fin d'exploitation ; que, par suite, le législateur a pu soumettre les exploitants de telles installations à des obligations plus strictes ; que le grief tiré de la violation du principe d'égalité doit, dès lors, être écarté ;
- SUR L'ARTICLE 58 :
22. Considérant que l'article 58 de la loi déférée insère, après le I de l'article 5 de la loi du 10 février 2000 susvisée, un I bis relatif aux modalités de mise en oeuvre de la « contribution au service public de l'électricité » ; qu'il prévoit que les consommateurs finals d'électricité provenant d'une source d'énergie renouvelable ou de la cogénération peuvent être remboursés d'une partie de cette contribution lorsque l'électricité est importée depuis un autre Etat membre de l'Union européenne ; qu'il assujettit les producteurs et fournisseurs de ce type d'électricité au versement d'une somme calculée de façon analogue lorsqu'ils l'exportent vers un autre Etat membre ;
23. Considérant que les requérants soutiennent qu'en soumettant les seuls producteurs d'électricité provenant d'une source d'énergie renouvelable à une « taxe à l'exportation », le législateur a méconnu tant le principe d'égalité que l'article 6 de la Charte de l'environnement de 2004 ;
24. Considérant qu'en prévoyant, d'une part, le remboursement aux consommateurs d'électricité renouvelable importée de la partie de la contribution au service public de l'électricité correspondant au soutien financier aux énergies renouvelables et, d'autre part, la taxation des exportateurs d'électricité renouvelable, à concurrence de cette même partie, les dispositions critiquées se bornent à tirer les conséquences, dans le cadre des échanges intracommunautaires, des politiques de soutien mises en place par les Etats membres de la Communauté européenne en faveur des énergies renouvelables et de la cogénération ; qu'ainsi ces dispositions tendent à rétablir l'égalité des conditions de concurrence ;
25. Considérant qu'en raison de son objet, l'article 58 de la loi déférée ne méconnaît aucun des intérêts mentionnés à l'article 6 de la Charte de l'environnement aux termes duquel : « Les politiques publiques doivent promouvoir un développement durable. A cet effet, elles concilient la protection et la mise en valeur de l'environnement, le développement économique et le progrès social » ;
26. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les griefs dirigés contre l'article 58 de la loi déférée doivent être rejetés ;
- SUR L'ARTICLE 67 :
27. Considérant qu'aux termes du premier alinéa du I de l'article 67 de la loi déférée : « Sans préjudice des dispositions du I de l'article 5 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 précitée, le montant total dû au titre de la contribution au service public de l'électricité par toute société industrielle consommant plus de 7 gigawattheures d'électricité par an est plafonné à 0,5 % de sa valeur ajoutée » ;
28. Considérant que, selon les requérants, cette mesure, qui ne bénéficiera qu'à certains consommateurs d'électricité, serait contraire au principe d'égalité ;
29. Considérant que le plafond prévu par l'article contesté a été établi en fonction d'un critère objectif, relatif au montant de la valeur ajoutée dégagée par les entreprises assujetties ; qu'il a pour objet, comme il ressort des travaux parlementaires, de préserver la compétitivité des entreprises petites et moyennes fortement consommatrices d'énergie électrique et d'en sauvegarder les emplois ; que, compte tenu du plafond en valeur absolue déjà fixé par le I de l'article 5 de la loi du 10 février 2000 susvisée, il tend également à rétablir l'égalité des conditions de concurrence, dans un même secteur, entre petites, moyennes et grandes entreprises fortement consommatrices d'électricité ; que, dès lors, le grief invoqué doit être écarté ;
30. Considérant qu'il n'y a lieu, pour le Conseil constitutionnel, de soulever d'office aucune question de conformité à la Constitution,
Décide :
Article premier.- Ne sont pas contraires à la Constitution les articles 1er à 6, 37, 40, 58 et 67 de la loi de programme fixant les orientations de la politique énergétique.
Article 2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française.Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 7 juillet 2005, où siégeaient : M. Pierre MAZEAUD, Président, MM. Jean-Claude COLLIARD et Olivier DUTHEILLET de LAMOTHE, Mme Jacqueline de GUILLENCHMIDT, M. Pierre JOXE, Mme Dominique SCHNAPPER, M. Pierre STEINMETZ et Mme Simone VEIL.
Journal officiel du 14 juillet 2005, page 11589, texte n° 3
Recueil, p. 102
ECLI : FR : CC : 2005 : 2005.516.DC
Les abstracts
- 1. NORMES CONSTITUTIONNELLES
- 1.6. CHARTE DE L'ENVIRONNEMENT
1.6.8. Article 6 - Exigence de promotion du développement durable
- 1. NORMES CONSTITUTIONNELLES
- 1.8. AUTRES PRINCIPES CONSTITUTIONNELS RÉSULTANT DE LA COMBINAISON DE PLUSIEURS DISPOSITIONS
1.8.16. Principe de normativité de la loi
Aux termes de l'article 6 de la Déclaration de 1789 : " La loi est l'expression de la volonté générale ". Il résulte de cet article comme de l'ensemble des autres normes de valeur constitutionnelle relatives à l'objet de la loi que, sous réserve de dispositions particulières prévues par la Constitution, la loi a pour vocation d'énoncer des règles et doit par suite être revêtue d'une portée normative.
- 4. DROITS ET LIBERTÉS
- 4.11. ENVIRONNEMENT
4.11.5. Promotion du développement durable
L'article 58 de la loi de programme fixant les orientations de la politique énergétique, relatif à la mise en œuvre de la " contribution au service public de l'électricité ", se borne à tirer les conséquences, dans le cadre des échanges intracommunautaires, des politiques de soutien mises en place par les États membres de la Communauté européenne en faveur des énergies renouvelables et de la cogénération. En raison de son objet, il ne méconnaît aucun des intérêts mentionnés à l'article 6 de la Charte de l'environnement aux termes duquel : " Les politiques publiques doivent promouvoir un développement durable. À cet effet, elles concilient la protection et la mise en valeur de l'environnement, le développement économique et le progrès social ".
- 5. ÉGALITÉ
- 5.1. ÉGALITÉ DEVANT LA LOI
5.1.1. Principe
Le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit.
- 5. ÉGALITÉ
- 5.1. ÉGALITÉ DEVANT LA LOI
- 5.1.4. Respect du principe d'égalité : différence de traitement justifiée par une différence de situation
5.1.4.13. Droit de l'environnement
Eu égard aux caractéristiques et à l'impact sur l'environnement des installations qu'ils utilisent, les producteurs d'énergie éolienne se trouvent dans une situation différente de celle des autres producteurs d'énergie. Par suite, le principe d'égalité n'est pas méconnu par une disposition qui soumet à des conditions nouvelles l'obligation d'achat d'électricité produite par cette énergie.
L'établissement d'éoliennes sur le domaine public maritime entraîne des contraintes particulières liées tant aux règles relatives à l'occupation de ce domaine qu'à l'importance, à la durée et au coût des travaux de démantèlement et de remise en état du site en fin d'exploitation. Par suite, le législateur a pu soumettre les exploitants de telles installations à des obligations de constitution de garanties financières plus strictes que celles exigées des autres producteurs d'énergie éolienne. Absence de violation du principe d'égalité.
- 5. ÉGALITÉ
- 5.4. ÉGALITÉ DEVANT LES CHARGES PUBLIQUES
- 5.4.2. Champ d'application du principe
- 5.4.2.2. Égalité en matière d'impositions de toutes natures
5.4.2.2.15. Contribution sur la consommation d'énergie (CSPE)
Le plafonnement du montant dû au titre de la contribution au service public de l'électricité a été établi en fonction d'un critère objectif, relatif au montant de la valeur ajoutée dégagée par les entreprises assujetties. Il a pour objet, comme il ressort des travaux parlementaires, de préserver la compétitivité des entreprises petites et moyennes fortement consommatrices d'énergie électrique et d'en sauvegarder les emplois. Compte tenu du plafond en valeur absolue déjà fixé par le I de l'article 5 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000, il tend également à rétablir l'égalité des conditions de concurrence, dans un même secteur, entre petites, moyennes et grandes entreprises fortement consommatrices d'électricité. Dès lors, le grief invoqué doit être écarté.
- 10. PARLEMENT
- 10.3. FONCTION LEGISLATIVE
- 10.3.10. Qualité de la loi
10.3.10.1. Principe de clarté de la loi
Le grief de l'imprécision ne peut être utilement invoqué à l'encontre de dispositions dénuées de portée normative.
- 10. PARLEMENT
- 10.3. FONCTION LEGISLATIVE
- 10.3.10. Qualité de la loi
10.3.10.3. Objectif d'accessibilité et d'intelligibilité (voir également ci-dessus Principe de clarté de la loi)
Le grief de l'imprécision ne peut être utilement invoqué à l'encontre de dispositions dénuées de portée normative.
- 10. PARLEMENT
- 10.3. FONCTION LEGISLATIVE
- 10.3.10. Qualité de la loi
- 10.3.10.4. Exigence de précision de la loi
10.3.10.4.1. Principe
Le grief de l'imprécision ne peut être utilement invoqué à l'encontre de dispositions dénuées de portée normative.
- 10. PARLEMENT
- 10.3. FONCTION LEGISLATIVE
- 10.3.10. Qualité de la loi
- 10.3.10.6. Exigence de normativité de la loi
10.3.10.6.2. Exceptions
Aux termes de l'article 6 de la Déclaration de 1789, " la loi est l'expression de la volonté générale... ". Il résulte de cet article comme de l'ensemble des autres normes de valeur constitutionnelle relatives à l'objet de la loi que, sous réserve de dispositions particulières prévues par la Constitution, la loi a pour vocation d'énoncer des règles et doit par suite être revêtue d'une portée normative. Figure au nombre des dispositions particulières ainsi réservées par la Constitution l'avant-dernier alinéa de son article 34 aux termes duquel " des lois de programme déterminent les objectifs de l'action économique et sociale de l'État ". En l'espèce, les dispositions des articles 1er à 6 de la loi de programme qui fixent des objectifs à l'action de l'État dans le domaine énergétique sont de celles qui peuvent trouver leur place dans la catégorie des lois de programme à caractère économique et social définie par l'avant-dernier alinéa de l'article 34 de la Constitution. Le grief tiré de leur défaut de portée normative ne peut donc être utilement soulevé à leur encontre.
- 11. CONSEIL CONSTITUTIONNEL ET CONTENTIEUX DES NORMES
- 11.8. SENS ET PORTÉE DE LA DÉCISION
- 11.8.1. Dispositions de loi dépourvues d'effet normatif
11.8.1.2. Exigence de normativité de la loi
Aux termes de l'article 6 de la Déclaration de 1789 : " La loi est l'expression de la volonté générale ". Il résulte de cet article comme de l'ensemble des autres normes de valeur constitutionnelle relatives à l'objet de la loi que, sous réserve de dispositions particulières prévues par la Constitution, la loi a pour vocation d'énoncer des règles et doit par suite être revêtue d'une portée normative.
Aux termes de l'avant-dernier alinéa de l'article 34 de la Constitution : " Des lois de programme déterminent les objectifs de l'action économique et sociale de l'État ". En l'espèce, les dispositions des articles 1er à 6 de la loi de programme qui fixent des objectifs à l'action de l'État dans le domaine énergétique sont de celles qui peuvent trouver leur place dans la catégorie des lois de programme à caractère économique et social définie par l'avant-dernier alinéa de l'article 34 de la Constitution. Le grief tiré de leur défaut de portée normative ne peut donc être utilement soulevé à leur encontre.
- 13. CONSEIL ÉCONOMIQUE, SOCIAL ET ENVIRONNEMENTAL
- 13.3. ATTRIBUTIONS
- 13.3.1. Consultation obligatoire
- 13.3.1.1. Consultation sur les projets de loi de programme ou de plans à caractère économique et social
13.3.1.1.1. Notion de loi de programme à caractère économique et social
Aux termes de l'avant-dernier alinéa de l'article 34 de la Constitution, " des lois de programme déterminent les objectifs de l'action économique et sociale de l'État ". L'article 1er de l'ordonnance du 2 janvier 1959, qui prévoyait que " les autorisations de programme peuvent être groupées dans des lois dites "lois de programme ", a été abrogé à compter du 1er janvier 2005 par la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances. L'article 70 de la Constitution dispose que " tout projet de loi de programme à caractère économique ou social " est soumis pour avis au Conseil économique et social. En vertu des dispositions combinées du dernier alinéa de l'article 1er de l'ordonnance du 2 janvier 1959 et des articles 34 et 70 de la Constitution, devait être entendue, avant le 1er janvier 2005, comme " loi de programme à caractère économique ou social ", une loi qui, non seulement définissait des objectifs à moyen ou long terme en matière économique et sociale, mais comportait, en outre, des prévisions de dépenses chiffrées pour la réalisation de ces objectifs. À la date du dépôt du projet dont est issue la loi déférée sur le bureau de la première assemblée saisie, qui est antérieure à l'abrogation de l'article 1er de l'ordonnance du 2 janvier 1959, celui-ci ne comportait pas de prévisions de dépenses chiffrées et n'avait donc pas le caractère d'un projet de loi de programme. Dès lors, le Gouvernement n'était pas tenu de le soumettre pour avis au Conseil économique et social.
- 14. ORGANISATION DÉCENTRALISÉE DE LA RÉPUBLIQUE
- 14.2. COMPÉTENCES DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES
14.2.2. Principe de " subsidiarité " (article 72, alinéa 2)
Aux termes du deuxième alinéa de l'article 72 de la Constitution : " Les collectivités territoriales ont vocation à prendre les décisions pour l'ensemble des compétences qui peuvent le mieux être mises en œuvre à leur échelon ". Il résulte de la généralité des termes retenus par le constituant que le choix du législateur d'attribuer une compétence à l'État plutôt qu'à une collectivité territoriale ne pourrait être remis en cause, sur le fondement de cette disposition, que s'il était manifeste qu'eu égard à ses caractéristiques et aux intérêts concernés, cette compétence pouvait être mieux exercée par une collectivité territoriale. La définition par le préfet des zones de développement de l'éolien tend à développer l'énergie éolienne en prenant en compte les possibilités de raccordement aux réseaux électriques ainsi que la préservation des paysages, des monuments historiques et des sites remarquables et protégés. Compte tenu de ces finalités, le législateur n'a pas manifestement méconnu les dispositions précitées du deuxième alinéa de l'article 72 de la Constitution en confiant au préfet le soin de définir les zones de développement de l'éolien. Il n'a ni instauré une tutelle de l'État sur les communes ou les régions ni porté atteinte à leur libre administration ou à leur autonomie financière.