Décision

Décision n° 2004-3381/3396 SEN du 25 novembre 2004

Sénat, Bas-Rhin
Annulation

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL,

Vu 1 °) la requête n° 2004-3381 présentée par M. Gérard DURINGER, demeurant à Saverne (Bas-Rhin), enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 4 octobre 2004 et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé le 26 septembre 2004 dans le département du Bas-Rhin en vue de la désignation de cinq sénateurs ;

Vu 2 °) la requête n° 2004-3396 présentée par Mme Alice MOREL, demeurant à Bellefosse (Bas-Rhin), déposée auprès de la préfecture du Bas-Rhin le 6 octobre 2004 et tendant à l'annulation des mêmes opérations électorales ;

Vu le mémoire en défense présenté par M. Philippe RICHERT, sénateur, enregistré au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 19 octobre 2004 ;

Vu les mémoires en défense présentés par M. RIES, sénateur, enregistrés comme ci-dessus les 22 octobre et 22 novembre 2004 ;

Vu les observations du ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, enregistrées comme ci-dessus le 22 octobre 2004 ;

Vu le mémoire en réplique présenté par Mme MOREL, enregistré comme ci-dessus le 29 octobre 2004.

Vu le nouveau mémoire présenté par M. RICHERT, enregistré comme ci-dessus le 15 novembre 2004 ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu la Constitution, notamment son article 59 ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

Vu le code électoral ;

Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection, des députés et des sénateurs ;

Le rapporteur ayant été entendu ;

1. Considérant que les requêtes susvisées sont dirigées contre les mêmes opérations électorales ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par une seule décision ;

2. Considérant que l'élection de cinq sénateurs dans le département du Bas-Rhin a eu lieu à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne, en vertu des articles L. 295 et R. 169 du code électoral ; que les deux premiers sièges ont été attribués, par application du quotient électoral, à la liste « La majorité alsacienne, l'Alsace qui avance » conduite par M. RICHERT et soutenue par l'Union pour un mouvement populaire (U.M.P.) ; que, par application de la plus forte moyenne, le troisième siège est revenu à la liste « Rassembler, réussir » conduite par M. RIES, soutenue par le Parti socialiste, et le quatrième à la liste « La majorité alsacienne, l'Alsace qui avance » ; que le cinquième siège a été attribué à cette dernière liste avec une moyenne de 323,5 voix, alors que la liste suivante « Action pour les communes, volonté pour l'Alsace » conduite par M. HOEFFEL, sénateur sortant qui ne bénéficiait pas de l'investiture de l'U.M.P., avait recueilli 321 suffrages ;

-SUR LA REQUÊTE DE M. DURINGER :

3. Considérant que M. DURINGER se borne à des allégations d'ordre général et ne soulève aucun grief précis pouvant être utilement invoqué pour contester des opérations électorales ; que sa requête est dès lors irrecevable ;

- SUR LA REQUÊTE DE MME MOREL :

- Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres griefs de la requête :

4. Considérant qu'aux termes du quatrième alinéa de l'article L. 288 du code électoral, dans les communes de moins de 3 500 habitants, où l'élection des délégués et celle des suppléants se déroulent séparément au scrutin majoritaire : « L'ordre des suppléants est déterminé par le nombre de voix obtenues... » ; qu'aux termes du troisième alinéa de l'article L. 289 du même code, dans les communes de 3 500 habitants et plus, où les suppléants sont élus en même temps que les titulaires au scrutin de liste à la représentation proportionnelle : « L'ordre des suppléants résulte de leur rang de présentation » ; qu'en vertu du quatrième alinéa de ce même article, en cas d'empêchement d'un délégué, « c'est le suppléant de la même liste venant immédiatement après le dernier délégué élu de la liste qui est appelé à le remplacer » ;

5. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le procès-verbal de proclamation des résultats de l'élection des délégués des conseils municipaux et des délégués suppléants fixe l'ordre des suppléants et que, dans les communes de 3 500 habitants et plus, cet ordre est fixé pour chaque liste de candidats élus délégués et suppléants ; que, lorsqu'un délégué inscrit sur la liste d'émargement prévue aux articles L. 314-1 et R. 162 du même code est empêché de voter, le premier suppléant dans l'ordre déterminé par les articles L. 288 et L. 289 et ne figurant pas sur la liste d'émargement vote à sa place, sauf s'il est lui-même empêché ;

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, pour trois conseils municipaux, un délégué empêché, inscrit sur la liste d'émargement, a été remplacé par un suppléant autre que celui qui devait être appelé selon l'ordre fixé par le procès-verbal de l'élection, sans que soit justifié l'empêchement des suppléants précédents ; que les conseils municipaux concernés sont ceux de Natzwiller, commune de moins de 3 500 habitants, Erstein, où tous les délégués appartenaient à une liste unique intitulée « Liste d'entente du conseil municipal », et Strasbourg, en ce qui concerne la liste « Union pour Strasbourg » représentative de la majorité du conseil municipal ;

7. Considérant qu'eu égard aux circonstances de l'espèce, et en particulier au nombre, à la composition et à l'intitulé des listes de candidats aux fonctions de délégués dans les trois communes précitées, les suffrages exprimés par les suppléants irrégulièrement désignés ont pu se porter sur une liste autre que celle qui aurait été choisie par les suppléants qui auraient dû être appelés ; que, dès lors, il y a lieu de procéder à la déduction hypothétique de trois voix du total obtenu par la liste conduite par M. RICHERT, à laquelle a été attribué le dernier siège, et de les ajouter au total obtenu par la liste conduite par M. HOEFFEL ; que cette opération modifie l'attribution des sièges ; qu'il y a lieu, en conséquence, d'annuler les opérations électorales contestées dans leur ensemble,

Décide :
Article premier.- La requête de M. Gérard DURINGER est rejetée.
Article 2.- Les opérations électorales qui se sont déroulées le 26 septembre 2004 dans le département du Bas-Rhin pour la désignation de cinq sénateurs sont annulées.
Article 3.- La présente décision sera notifiée au Président du Sénat et publiée au Journal officiel de la République française.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans la séance du 25 novembre 2004, où siégeaient : M. Pierre MAZEAUD, Président, MM. Jean-Claude COLLIARD et Olivier DUTHEILLET de LAMOTHE, Mme Jacqueline de GUILLENCHMIDT, M. Jean-Louis PEZANT, Mme Dominique SCHNAPPER, M. Pierre STEINMETZ et Mme Simone VEIL.

Journal officiel du 28 novembre 2004, page 20281, texte n° 83
Recueil, p. 182
ECLI : FR : CC : 2004 : 2004.3381.SEN

Les abstracts

  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.4. ÉLECTIONS SÉNATORIALES
  • 8.4.6. Opérations électorales
  • 8.4.6.3. Déroulement du scrutin
  • 8.4.6.3.9. Empêchement des délégués - Suppléants
  • 8.4.6.3.9.2. Justificatifs

Le justificatif présenté le jour du scrutin n'a pas à apporter la preuve absolue de l'empêchement. L'attestation par le maire de l'accident dont a été victime le délégué n'a donc pas besoin d'être accompagnée d'un certificat médical (solution implicite).

(2004-3381/3396 SEN, 25 novembre 2004, cons. 2, 4, 5, 6, 7, Journal officiel du 28 novembre 2004, page 20281, texte n° 83)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.4. ÉLECTIONS SÉNATORIALES
  • 8.4.6. Opérations électorales
  • 8.4.6.3. Déroulement du scrutin
  • 8.4.6.3.9. Empêchement des délégués - Suppléants
  • 8.4.6.3.9.3. Ordre de suppléance

Il résulte du quatrième alinéa de l'article L. 288 du code électoral et des troisième et quatrième alinéa de l'article L. 289 du même code que le procès-verbal de proclamation des résultats de l'élection des délégués des conseils municipaux et des délégués suppléants fixe l'ordre des suppléants et que, dans les communes de 3 500 habitants et plus, cet ordre est fixé pour chaque liste de candidats élus délégués et suppléants. Lorsqu'un délégué inscrit sur la liste d'émargement prévue aux articles L. 314-1 et R. 162 du même code est empêché de voter, le premier suppléant dans l'ordre déterminé par les articles L. 288 et L. 289 et ne figurant pas sur la liste d'émargement vote à sa place, sauf s'il est lui-même empêché.

(2004-3381/3396 SEN, 25 novembre 2004, cons. 4, 5, Journal officiel du 28 novembre 2004, page 20281, texte n° 83)

Il résulte de l'instruction que, pour 3 conseils municipaux, un délégué empêché, inscrit sur la liste d'émargement, a été remplacé par un suppléant autre que celui qui devait être appelé selon l'ordre fixé par le procès-verbal de l'élection, sans que soit justifié l'empêchement des suppléants précédents. Eu égard aux circonstances de l'espèce et en particulier au nombre, à la composition et à l'intitulé des listes de candidats aux fonctions de délégués dans les 3 communes précitées, les suffrages exprimés par les suppléants irrégulièrement désignés ont pu se porter sur une liste autre que celle qui aurait été choisie par les suppléants qui auraient dû être appelés. Dès lors, il y a lieu de procéder à la déduction hypothétique de 3 voix du total obtenu par la liste conduite par M. R., à laquelle a été attribué le dernier siège et de les ajouter au total obtenu par la liste conduite par M. H. Cette opération modifie l'attribution des sièges. Annulation de l'ensemble des opérations électorales contestées.

(2004-3381/3396 SEN, 25 novembre 2004, cons. 6, 7, Journal officiel du 28 novembre 2004, page 20281, texte n° 83)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.4. ÉLECTIONS SÉNATORIALES
  • 8.4.10. Contentieux - Instruction
  • 8.4.10.1. Pouvoirs généraux d'instruction
  • 8.4.10.1.1. Rejet sans instruction contradictoire préalable

Est irrecevable une requête qui se borne à des allégations d'ordre général et ne soulève aucun grief précis pouvant être utilement invoqué pour contester des opérations électorales.

(2004-3381/3396 SEN, 25 novembre 2004, cons. 3, Journal officiel du 28 novembre 2004, page 20281, texte n° 83)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.4. ÉLECTIONS SÉNATORIALES
  • 8.4.11. Contentieux - Appréciation des faits par le Conseil constitutionnel
  • 8.4.11.2. Irrégularités donnant lieu à rectifications
  • 8.4.11.2.2. Annulation de l'élection

Il résulte de l'instruction que, pour trois conseils municipaux, un délégué empêché, inscrit sur la liste d'émargement, a été remplacé par un suppléant autre que celui qui devait être appelé selon l'ordre fixé par le procès-verbal de l'élection, sans que soit justifié l'empêchement des suppléants précédents. Eu égard aux circonstances de l'espèce, et en particulier au nombre, à la composition et à l'intitulé des listes de candidats aux fonctions de délégués dans les trois communes précitées, les suffrages exprimés par les suppléants irrégulièrement désignés ont pu se porter sur une liste autre que celle qui aurait été choisie par les suppléants qui auraient dû être appelés. Dès lors, il y a lieu de procéder à la déduction hypothétique de 3 voix du total obtenu par la liste conduite par M. R., à laquelle a été attribué le dernier siège, et de les ajouter au total obtenu par la liste conduite par M. H. Cette opération modifie l'attribution des sièges. Annulation de l'enseble des opérations électorales contestées.

(2004-3381/3396 SEN, 25 novembre 2004, cons. 6, 7, Journal officiel du 28 novembre 2004, page 20281, texte n° 83)
À voir aussi sur le site : Communiqué de presse, Commentaire, Dossier documentaire, Références doctrinales, Version PDF de la décision.
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