Décision n° 2000-30 REF du 28 septembre 2000
Le Conseil constitutionnel, chargé en application de l'article 60 de la Constitution de veiller à la régularité des opérations de référendum est amené, consécutivement au référendum du 24 septembre 2000, à formuler les observations suivantes :
I. - En ce qui concerne les textes applicables au référendum :
Le Conseil constitutionnel estime nécessaire de donner un caractère permanent aux principales règles relatives à l'organisation du référendum et à la campagne en vue du référendum.
Saisi à titre consultatif, en application de l'article 46 de l'ordonnance du 7 novembre 1958, des décrets du 18 juillet 2000 relatifs à l'organisation du référendum du 24 septembre 2000 et à la campagne en vue de ce référendum, ainsi que du décret du 31 août 2000 fixant pour les territoires d'outre-mer, la Nouvelle-Calédonie, Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon les conditions d'application des décrets du 18 juillet 2000, il a en effet constaté que ces textes reconduisaient très largement les décrets de même nature applicables au référendum de 1992. La seule modification substantielle concernait les conditions d'habilitation à la participation à la campagne des partis et groupements politiques.
La pérennisation des règles de portée générale régissant les opérations de référendum présenterait un grand intérêt : d'une part, cette pérennisation répondrait à l'exigence démocratique de stabilité des règles de droit relatives à l'expression du suffrage ; d'autre part, une législation permanente permettrait de simplifier la préparation du scrutin et de limiter le développement de contentieux.
Le droit de suffrage constitue un droit civique dont, en vertu de l'article 34 de la Constitution, la loi fixe les règles. Le Conseil constitutionnel est d'avis que relève de la loi l'édiction de règles permanentes régissant l'organisation des référendums, le pouvoir réglementaire devant se borner à en fixer les modalités d'application.
II. - En ce qui concerne la fixation de la durée des émissions de la campagne officielle :
Même s'il faut sans doute réfléchir à des modalités nouvelles permettant de les rendre plus attractives et, par là, d'en améliorer l'audience, les émissions de la campagne officielle ont le mérite d'offrir à l'ensemble des formations politiques habilitées un accès aux moyens de communication radiotélévisée en répartissant le temps d'antenne à partir de critères objectifs.
Le décret no 2000-667 du 18 juillet 2000 relatif à la campagne en vue du référendum a fixé les règles de répartition de la durée des émissions de la campagne officielle : chaque organisation joint à sa demande d'habilitation la liste des parlementaires qui la représentent et l'indication du groupe parlementaire dont ils relèvent.
Ce dispositif n'a pas empêché l'apparition de doubles comptes dans les effectifs des partis et groupements représentés au Parlement, du fait de l'appartenance de certains parlementaires à deux organisations habilitées. Le Conseil constitutionnel estime que les critères de rattachement devraient exclure qu'un même parlementaire contribue au calcul du temps de parole de plus d'une formation politique.
Quant à l'intervention ultérieure des présidents de groupe, son utilité n'apparaît pas évidente dès lors que leur compétence est liée.
III. - En ce qui concerne les documents envoyés aux électeurs :
De la même manière que, pour les élections, les professions de foi des candidats sont envoyées au domicile des électeurs, il pourrait être envisagé, s'agissant du référendum, de leur faire parvenir les prises de position des partis habilités à participer à la campagne.
IV. - En ce qui concerne la composition des bureaux de vote :
Alors que l'article R. 42 du code électoral exige que trois membres du bureau au moins soient présents pendant tout le cours des opérations électorales, de très nombreux bureaux de vote, notamment dans les grandes villes, n'ont comporté que deux personnes, voire, de façon heureusement momentanée, une seule.
Les difficultés ainsi rencontrées dans la constitution des bureaux de vote ont, à maintes reprises, occasionné des retards, parfois importants, dans l'heure d'ouverture des bureaux aux électeurs.
Le Conseil constitutionnel, s'étant assuré que ces retards ne résultaient pas de manœuvres, n'a pas annulé les résultats des bureaux en cause ; il a considéré que ce manquement aux obligations découlant de l'article R. 42 du code électoral s'expliquait par la faible mobilisation qui a caractérisé le scrutin du 24 septembre 2000.
Il reste qu'une telle marque de désaffection de la part d'élus locaux et d'organisations politiques est préoccupante pour le bon fonctionnement du suffrage universel. Il paraît souhaitable que les pouvoirs publics envisagent les mesures appropriées pour éviter que de tels manquements ne se reproduisent.
V. - En ce qui concerne l'outre-mer :
En Polynésie française, il serait souhaitable, comme pour les élections législatives, que le référendum ait lieu le samedi plutôt que le dimanche afin de permettre aux électeurs de ce territoire de prendre part au scrutin avant que les résultats de métropole ne soient connus.
Par ailleurs, s'agissant des collectivités d'outre-mer, la participation à la campagne et au déroulement du scrutin des partis politiques locaux pourrait être envisagée.
Lorsqu'il s'avère nécessaire d'imprimer les bulletins de vote sur du papier de couleur (Mayotte), il ne suffit pas que toutes précautions soient prises pour que le choix des couleurs soit dépourvu de biais. Afin d'éviter toute polémique, il apparaît en outre indispensable, comme tel fut le cas pour le référendum du 24 septembre 2000, que l'affectation des couleurs choisies aux bulletins portant les mentions « oui » et « non » soit effectuée par tirage au sort.
Journal officiel du 30 septembre 2000, page 15476
Recueil, p. 158
ECLI : FR : CC : 2000 : 2000.30.REF