Décision n° 97-2221 AN du 23 janvier 1998
Le Conseil constitutionnel,
Vu la requête présentée par M. Pierre CASTAGNOU demeurant à Paris 14ème, enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 12 juin 1997, et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 25 mai et 1er juin 1997 dans la 11ème circonscription de Paris pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;
Vu les observations présentées par le ministre de l'intérieur, enregistrées comme ci-dessus les 19 juin et 20 octobre 1997 ;
Vu le mémoire en défense présenté par Mme Nicole CATALA député, enregistré comme ci-dessus le 30 juillet 1997, comportant notamment la demande d'audition présentée par son avocat ;
Vu le mémoire en réplique présenté par M. CASTAGNOU, enregistré comme ci-dessus le 22 octobre 1997 ;
Vu la décision de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques enregistrée comme ci-dessus le 10 novembre 1997, approuvant le compte de campagne de Mme CATALA ;
Vu l'article 59 de la Constitution ;
Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
Vu le code électoral ;
Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Le rapporteur ayant été entendu ;
sur la distribution entre les deux tours d'une lettre circulaire aux électeurs de la circonscription :
1. Considérant que le requérant soutient qu'en faisant massivement diffuser une lettre circulaire aux électeurs de la circonscription entre le 28 et le 30 mai 1997, Mme CATALA aurait rompu l'égalité entre les candidats ; qu'en reprochant au gouvernement socialiste d'avoir décidé la fermeture, en 1992, de l'hôpital Broussais, elle aurait introduit dans le débat électoral un argument nouveau à une date ne permettant plus à M. CASTAGNOU d'y répondre utilement ; qu'enfin, du fait de son coût, cette circulaire aurait conduit Mme CATALA à excéder le plafond des dépenses électorales applicable à la circonscription ;
2. Considérant, en premier lieu, qu'il n'est pas contesté que la diffusion de cette circulaire a concerné la quasi totalité des électeurs de la circonscription, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 165 du code électoral ; que, toutefois, il résulte de l'instruction qu'aux mêmes dates le requérant, en méconnaissance des mêmes dispositions, faisait distribuer tout aussi massivement des tracts appelant à voter pour lui ; que les termes de la circulaire en cause n'excédaient pas les limites admises de la propagande électorale ; que, compte tenu des dates auxquelles cette circulaire a été diffusée, le requérant a disposé du temps nécessaire pour y répondre ; qu'ainsi, le grief tiré de la rupture d'égalité entre les candidats n'est pas fondé ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction que la question de la fermeture de l'hôpital Broussais a été évoquée à de nombreuses reprises tout au long de la campagne électorale ; qu'ainsi le moyen tiré de ce qu'il se serait agi d'un élément nouveau de la campagne manque en fait ;
4. Considérant, en dernier lieu, que le coût de la fabrication et de la diffusion de cette circulaire a bien figuré dans le compte de campagne de Mme CATALA ; qu'il n'est ni soutenu, ni même allégué, que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques se serait livrée à une appréciation inexacte des dépenses de Mme CATALA dans sa décision susvisée ; que, par suite, le grief tiré du dépassement du plafond des dépenses électorales ne peut être accueilli ;
sur les avantages indus DONT AURAIT BENEFICIE Mme CATALA, en méconnaissance des dispositions de l'article l.52-8 du code électoral :
5. Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 52-8 du code électoral : « Les personnes morales, à l'exception des partis ou groupements politiques, ne peuvent participer au financement de la campagne électorale d'un candidat, ni en lui consentant des dons sous quelque forme que ce soit, ni en lui fournissant des biens ou services ou autres avantages directs ou indirects à des prix inférieurs à ceux qui sont habituellement pratiqués »
6. Considérant que le requérant estime que les dispositions précitées ont été méconnues du fait de la diffusion, par la municipalité, d'un guide du XIVème arrondissement de Paris, comportant notamment un texte intitulé « le mot de votre député », et en raison de l'organisation à la mairie annexe du XIVème arrondissement de Paris, le 30 mai 1997, d'une représentation théâtrale suivie d'une réception auxquelles Mme CATALA était associée ;
7. Considérant qu'il est constant que le guide du XIVème arrondissement de Paris a été diffusé régulièrement depuis plusieurs années ; que l'édition 1997 ne se différencie en rien des éditions précédentes ; qu'il résulte de l'instruction que cette publication a été livrée à la municipalité le 28 mars 1997 ; qu'ainsi cette brochure ne présentait aucun caractère de propagande électorale ;
8. Considérant qu'il est non moins constant que le principe de la représentation théâtrale critiquée a été arrêté au mois de septembre 1996 et ses modalités définitivement fixées plus d'un mois avant la dissolution de l'Assemblée nationale ; qu'il n'est pas contesté que l'association organisatrice de cette manifestation n'a aucune attache partisane ; qu'ainsi, la soirée du 30 mai 1997 n'a pas présenté de caractère électoral ; qu'au surplus, ni Mme CATALA, ni le maire du XIVème arrondissement n'y ont assisté ;
9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de la méconnaissance alléguée des dispositions de l'article L. 52-8 du code électoral ne peut être accueilli ;
10. Considérant, dès lors, et sans qu'il soit besoin de procéder à l'audition demandée par l'avocat de Mme CATALA, que la requête de M. CASTAGNOU doit être rejetée,
Décide :
Article premier :
La requête de Monsieur Pierre CASTAGNOU est rejetée.
Article 2 :
La présente décision sera notifiée à l'Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 23 janvier 1998, où siégeaient : MM. Roland DUMAS, président, Georges ABADIE, Michel AMELLER, Jean CABANNES, Maurice FAURE, Yves GUÉNA, Alain LANCELOT, Mme Noëlle LENOIR et M. Jacques ROBERT.
Journal officiel du 28 janvier 1998, page 1353
Recueil, p. 86
ECLI : FR : CC : 1998 : 97.2221.AN
Les abstracts
- 8. ÉLECTIONS
- 8.1. PRINCIPES DU DROIT ÉLECTORAL
- 8.1.2. Droits et libertés du candidat
- 8.1.2.2. Égalité
8.1.2.2.2. Égalité des moyens de propagande (voir également ci-dessous : Droits et libertés des partis et organisations politiques)
Principe affirmé de manière constante (voir ci-dessous : Élection présidentielle - Moyens de propagande ; Élections législatives - Moyens de propagande).
- 8. ÉLECTIONS
- 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
- 8.3.3. Campagne électorale - Moyens de propagande
- 8.3.3.3. Circulaires
8.3.3.3.4. Envoi et diffusion des circulaires
Distribution par le candidat d'une lettre circulaire aux électeurs de la circonscription entre le 28 et le 30 mai 1997. Il n'est pas contesté que la diffusion de cette circulaire a concerné la quasi-totalité des électeurs de la circonscription, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 165 du code électoral. Toutefois, il résulte de l'instruction qu'aux mêmes dates le requérant, en méconnaissance des mêmes dispositions, faisait distribuer tout aussi massivement des tracts appelant à voter pour lui. Par ailleurs les termes de la circulaire en cause n'excédaient pas les limites admises de la propagande électorale. Compte tenu des dates auxquelles cette circulaire a été diffusée, le requérant a disposé du temps nécessaire pour y répondre. Le grief tiré de la rupture d'égalité entre les candidats n'est pas fondé. Il résulte en outre de l'instruction que la question de la fermeture de l'hôpital B., abordée par cette circulaire, a été évoquée à de nombreuses reprises tout au long de la campagne électorale. Ainsi le grief tiré de ce qu'il se serait agi d'un élément nouveau de la campagne manque en fait.
- 8. ÉLECTIONS
- 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
- 8.3.5. Financement
- 8.3.5.4. Recettes produites au compte de campagne
- 8.3.5.4.5. Dons consentis à un candidat par une personne morale à l'exception des partis ou groupements politiques (article L. 52-8, alinéa 2, du code électoral)
8.3.5.4.5.3. Absence de don ou d'avantage
Le requérant fait valoir que les dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 52-8 du code électoral ont été méconnues du fait de la diffusion, par la municipalité, d'un guide du Xe arrondissement de la ville de X, comportant notamment un texte intitulé " le mot de votre député ", et en raison de l'organisation à la mairie annexe du Xe arrondissement de la ville de X, le 30 mai 1997, d'une représentation théâtrale suivie d'une réception auxquelles le candidat proclamé élu était associé. Il est constant que le guide du Xe arrondissement de la ville de X a été diffusé régulièrement depuis plusieurs années. L'édition 1997 ne se différencie en rien des éditions précédentes. Il résulte de l'instruction que cette publication a été livrée à la municipalité le 28 mars 1997. Ainsi cette brochure ne présentait aucun caractère de propagande électorale. Il est non moins constant que le principe de la représentation théâtrale critiquée a été arrêté au mois de septembre 1996 et ses modalités définitivement fixées plus d'un mois avant la dissolution de l'Assemblée nationale. Il n'est pas contesté que l'association organisatrice de cette manifestation n'a aucune attache partisane. Ainsi, la soirée du 30 mai 1997 n'a pas présenté de caractère électoral. Au surplus, ni l'élu, ni le maire du X arrondissement n'y ont assisté. Grief rejeté.