Décision

Décision n° 97-394 DC du 31 décembre 1997

Traité d'Amsterdam modifiant le Traité sur l'Union européenne, les Traités instituant les Communautés européennes et certains actes connexes
Non conformité partielle

Le Conseil constitutionnel a été saisi, le 4 décembre 1997, par le Président de la République et le Premier ministre, conformément à l'article 54 de la Constitution, de la question de savoir si, compte tenu des engagements souscrits par la France et des modalités de leur entrée en vigueur, l'autorisation de ratifier le traité d'Amsterdam modifiant le traité sur l'Union européenne, les traités instituant les communautés européennes et certains actes connexes, signé le 2 octobre 1997, doit être précédée d'une révision de la Constitution ;

Le Conseil constitutionnel,

Vu la Constitution du 4 octobre 1958, notamment son titre XV : « Des communautés européennes et de l'Union européenne » ;

Vu le Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment ses articles 18, alinéa 2, 19 et 20 ;

Vu la loi n° 52-387 du 10 avril 1952 autorisant à ratifier le traité signé à Paris le 18 avril 1951 et instituant une Communauté européenne du charbon et de l'acier, ensemble le décret n° 52-993 du 20 août 1952 portant publication de ce traité ;

Vu la loi n° 57-880 du 2 août 1957 autorisant à ratifier : 1 ° le traité instituant une Communauté économique européenne et ses annexes ;

2 ° le traité instituant la Communauté européenne de l'énergie atomique ;

3 ° la convention relative à certaines institutions communes aux communautés européennes, signés à Rome le 25 mars 1957, ensemble le décret n° 58-84 du 28 janvier 1958 portant publication de ces engagements internationaux ;

Vu la loi n° 65-506 du 30 juin 1965 autorisant la ratification du traité instituant un conseil unique et une commission unique des communautés européennes et du protocole sur les privilèges et immunités des communautés européennes, ensemble le décret n° 67-606 du 28 juillet 1967 portant publication de ces engagements internationaux ;

Vu la loi n° 70-583 du 8 juillet 1970 autorisant l'approbation de la décision du Conseil des communautés européennes, du 21 avril 1970, relative au remplacement des contributions financières des Etats membres par des ressources propres aux communautés, ensemble le décret n° 71-168 du 26 février 1971 portant publication de cette décision ;

Vu la loi n° 70-584 du 8 juillet 1970 autorisant la ratification du traité portant modification de certaines dispositions budgétaires des traités instituant les communautés européennes et du traité instituant un conseil unique et une commission unique des communautés européennes, signé à Luxembourg le 22 avril 1970, ensemble le décret n° 71-169 du 26 février 1971 portant publication de ce traité ;

Vu la loi n° 72-339 du 3 mai 1972 autorisant la ratification du traité relatif à l'adhésion à la Communauté économique européenne et à la Communauté européenne de l'énergie atomique du Royaume de Danemark, le l'Irlande, du Royaume de Norvège et du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord, signé à Bruxelles le 22 janvier 1972, ensemble le décret du 5 avril 1972 décidant de soumettre ce projet de loi au référendum ;

Vu la loi n° 76-1196 du 24 décembre 1976 autorisant la ratification du traité portant modification de certaines dispositions financières des traités instituant les communautés européennes et du traité instituant un conseil unique et une commission unique des communautés européennes ;

Vu la loi n° 77-680 du 30 juin 1977 autorisant l'approbation des dispositions annexées à la décision du Conseil des communautés européennes du 20 septembre 1976 et relatives à l'élection des représentants à l'Assemblée des communautés européennes au suffrage universel direct, ensemble le décret n° 79-92 du 30 janvier 1979 portant publication ;

Vu la loi n° 77-710 du 5 juillet 1977 autorisant la ratification du traité portant modification de certaines dispositions du protocole sur les statuts de la Banque européenne d'investissement, signé à Bruxelles le 10 juillet 1975 ;

Vu la loi n° 79-1112 du 22 décembre 1979 autorisant la ratification du traité d'adhésion de la République hellénique à la Communauté économique européenne et à la Communauté européenne de l'énergie atomique, ensemble le décret n° 81-35 du 2 janvier 1981 portant publication de ce traité ;

Vu la loi n° 85-1 du 2 janvier 1985 autorisant l'approbation de l'accord intervenu, au sein du Conseil des communautés européennes les 2 et 3 octobre 1984, entre les représentants des gouvernements des Etats membres et portant sur le financement du budget rectificatif et supplémentaire n° 1 des communautés ;

Vu la loi n° 85-1334 du 18 décembre 1985 autorisant la ratification du traité entre le Royaume de Belgique, le Royaume de Danemark, la République fédérale d'Allemagne, la République hellénique, la République française, l'Irlande, la République italienne, le Grand-Duché de Luxembourg, le Royaume des Pays-Bas, le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord, Etats membres des Communautés européennes, et le Royaume d'Espagne et la République du Portugal, relatif à l'adhésion à la Communauté économique européenne et à la Communauté européenne de l'énergie atomique du Royaume d'Espagne et de la République du Portugal, ensemble le décret n° 86-415 du 11 mars 1986 portant publication de ce traité ;

Vu la loi n° 85-1335 du 18 décembre 1985 autorisant l'approbation de la décision du Conseil des communautés européennes du 7 mai 1985 relative au système des ressources propres des communautés ;

Vu la loi n° 86-1275 du 16 décembre 1986 autorisant la ratification de l'Acte unique européen, ensemble le décret n° 87-990 du 4 décembre 1987 portant publication de ce traité ;

Vu la loi n° 88-1253 du 30 décembre 1988 autorisant l'approbation d'une décision du Conseil des communautés européennes relative au système des ressources propres des communautés ;

Vu la loi n° 91-642 du 10 juillet 1991 autorisant l'approbation de l'accord d'adhésion de la République italienne à la convention d'application de l'accord de Schengen du 14 juin 1985 entre les gouvernements des Etats de l'Union économique Benelux, de la République fédérale d'Allemagne et de la République française relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes, signée à Schengen le 19 juin 1990, ensemble le décret n° 97-970 du 15 octobre 1997 portant publication de cet accord ;

Vu la loi n° 91-737 du 30 juillet 1991 autorisant l'approbation de la convention d'application de l'accord de Schengen du 14 juin 1985 entre les gouvernements des Etats de l'Union économique Benelux, de la République fédérale d'Allemagne et de la République française relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes, ensemble les décrets n° 86-907 du 30 juillet 1986 portant publication de l'accord et n° 95-304 du 21 mars 1995 portant publication de la convention ;

Vu la loi n° 92-1017 du 24 septembre 1992 autorisant la ratification du traité sur l'Union européenne, ensemble le décret n° 94-80 du 18 janvier 1994 portant publication de ce traité ;

Vu la loi n° 93-1421 du 31 décembre 1993 autorisant l'approbation de l'accord d'adhésion du Royaume d'Espagne à la convention d'application de l'accord de Schengen du 14 juin 1985 entre les Gouvernements des Etats de l'Union économique Benelux, de la République fédérale d'Allemagne et de la République française relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes signée à Schengen le 19 juin 1990, à laquelle a adhéré la République italienne par l'accord signé à Paris le 27 novembre 1990, ensemble le décret n° 95-305 du 21 mars 1995 portant publication de cet accord ;

Vu la loi n° 93-1422 du 31 décembre 1993 autorisant l'approbation de l'accord d'adhésion de la République portugaise à la convention d'application de l'accord de Schengen du 14 juin 1985 entre les Gouvernements des Etats de l'Union économique Benelux, de la République fédérale d'Allemagne et de la République française relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes, signée à Schengen le 19 juin 1990, à laquelle a adhéré la République italienne par l'accord signé à Paris le 27 novembre 1990, ensemble le décret n° 95-306 du 21 mars 1995 portant publication de cet accord ;

Vu la loi n° 94-1099 du 19 décembre 1994 autorisant la ratification du traité entre le Royaume de Belgique, le Royaume de Danemark, la République fédérale d'Allemagne, la République hellénique, le Royaume d'Espagne, la République française, l'Irlande, la République italienne, le Grand-Duché de Luxembourg, le Royaume des Pays-Bas, la République portugaise, le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord (Etats membres de l'Union européenne) et le Royaume de Norvège, la République d'Autriche, la République de Finlande, le Royaume de Suède, relatif à l'adhésion du Royaume de Norvège, de la République d'Autriche, de la République de Finlande et du Royaume de Suède à l'Union européenne, ensemble le décret n° 95-224 du 21 février 1995 portant publication de ce traité ;

Vu la loi n° 94-1205 du 30 décembre 1994 autorisant l'approbation de la décision du Conseil de l'Union européenne relative au système de ressources propres des Communautés européennes, adoptée à Luxembourg le 31 octobre 1994 ;

Vu la loi n° 97-966 du 21 octobre 1997 autorisant l'approbation de l'accord d'adhésion de la République d'Autriche à la convention de l'accord de Schengen du 14 juin 1985 entre les gouvernements des Etats de l'Union économique Benelux, de la République fédérale d'Allemagne et de la République française relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes, signée à Schengen le 19 juin 1990, à laquelle ont adhéré la République italienne, le Royaume d'Espagne et la République portugaise et la République hellénique par les accords signés respectivement le 27 novembre 1990, le 25 juin 1991 et le 6 novembre 1992 ;

Vu la loi n° 97-967 du 21 octobre 1997 autorisant l'approbation de l'accord d'adhésion de la République hellénique à la convention de l'accord de Schengen du 14 juin 1985 entre les gouvernements des Etats de l'Union économique Benelux, de la République fédérale d'Allemagne et de la République française relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes, signée à Schengen le 19 juin 1990, à laquelle ont adhéré la République italienne par l'accord signé à Paris le 27 novembre 1990 et le Royaume d'Espagne et la République portugaise par les accords signés à Bonn le 25 juin 1991 ;

Vu le décret n° 53-192 du 14 mars 1953 relatif à la ratification et à la publication des engagements internationaux souscrits par la France modifié par le décret n° 86-707 du 11 avril 1986, notamment son article 3 ;

Le rapporteur ayant été entendu,

SUR LES NORMES DE REFERENCE APPLICABLES :

1. Considérant que le peuple français a, par le préambule de la Constitution de 1958, proclamé solennellement « son attachement aux droits de l'homme et aux principes de la souveraineté nationale tels qu'ils ont été définis par la Déclaration de 1789, confirmée et complétée par le préambule de la Constitution de 1946 » ;

2. Considérant que, dans son article 3, la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen énonce que « le principe de toute souveraineté réside essentiellement dans la nation » ; que l'article 3 de la Constitution de 1958 dispose, dans son premier alinéa, que « la souveraineté nationale appartient au peuple qui l'exerce par ses représentants et par la voie du référendum » ;

3. Considérant que le préambule de la Constitution de 1946 proclame, dans son quatorzième alinéa, que la République française se « conforme aux règles du droit public international » et, dans son quinzième alinéa, que « sous réserve de réciprocité, la France consent aux limitations de souveraineté nécessaires à l'organisation et à la défense de la paix » ;

4. Considérant que, dans son article 53, la Constitution de 1958 consacre, comme le faisait l'article 27 de la Constitution de 1946, l'existence de « traités ou accords relatifs à l'organisation internationale » ; que ces traités ou accords ne peuvent être ratifiés ou approuvés par le Président de la République qu'en vertu d'une loi ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article 88-1, résultant de la loi constitutionnelle du 25 juin 1992 : « La République participe aux Communautés européennes et à l'Union européenne, constituées d'Etats qui ont choisi librement, en vertu des traités qui les ont instaurées, d'exercer en commun certaines de leurs compétences » ;

6. Considérant qu'il résulte de ces textes de valeur constitutionnelle que le respect de la souveraineté nationale ne fait pas obstacle à ce que, sur le fondement des dispositions précitées du préambule de la Constitution de 1946, la France puisse conclure , sous réserve de réciprocité, des engagements internationaux en vue de participer à la création ou au développement d'une organisation internationale permanente, dotée de la personnalité juridique et investie de pouvoirs de décision par l'effet de transferts de compétences consentis par les Etats membres ;

7. Considérant, toutefois, qu'au cas où des engagements internationaux souscrits à cette fin contiennent une clause contraire à la Constitution ou portent atteinte aux conditions essentielles d'exercice de la souveraineté nationale, l'autorisation de les ratifier appelle une révision constitutionnelle ;

8. Considérant que c'est au regard de ces principes qu'il revient au Conseil constitutionnel de procéder à l'examen du traité signé à Amsterdam le 2 octobre 1997 ;

- SUR LES MESURES RELATIVES AUX VISAS, A L'ASILE ET A LA LIBRE CIRCULATION DES PERSONNES :

9. Considérant qu'aux termes de l'article 88-2, ajouté à la Constitution par la loi constitutionnelle du 25 juin 1992 : « Sous réserve de réciprocité et selon les modalités prévues par le Traité sur l'Union européenne signé le 7 février 1992, la France consent aux transferts de compétences nécessaires à l'établissement de l'union économique et monétaire européenne ainsi qu'à la détermination des règles relatives au franchissement des frontières extérieures des Etats membres de la Communauté européenne » ; qu'il résulte de cette disposition qu'appellent une nouvelle révision constitutionnelle les clauses du traité d'Amsterdam qui opèrent, au profit de la Communauté européenne, des transferts de compétences qui mettent en cause les conditions essentielles d'exercice de la souveraineté nationale, soit que ces transferts interviennent dans un domaine autre que l'établissement de l'union économique et monétaire européenne ou que le franchissement des frontières extérieures communes, soit que ces clauses fixent d'autres modalités que celles prévues par le traité sur l'Union européenne signé le 7 février 1992 pour l'exercice des compétences dont le transfert a été autorisé par l'article 88-2 précité ;

10. Considérant que l'article 2 du traité d'Amsterdam insère dans le traité instituant la Communauté européenne un titre III A intitulé : « Visas, asile, immigration et autres politiques liées à la libre circulation des personnes » ;

11. Considérant que, s'agissant de la libre circulation des personnes, le nouveau titre comprend un article 73 J qui autorise le Conseil, statuant conformément à la procédure prévue à l'article 73 O du même titre, à prendre, dans les cinq ans qui suivent l'entrée en vigueur du traité d'Amsterdam, un certain nombre de mesures, qu'il énumère, relatives au franchissement des frontières intérieures et extérieures des Etats membres, ainsi qu'à la circulation des ressortissants des pays tiers sur leur territoire ;

12. Considérant que les mesures relatives au franchissement des frontières intérieures comprennent des « mesures visant, conformément à l'article 7 A, à assurer l'absence de tout contrôle des personnes, qu'il s'agisse de citoyens de l'Union ou de ressortissants des pays tiers, lorsqu'elles franchissent les frontières intérieures » ;

13. Considérant que les mesures relatives au franchissement des frontières extérieures des Etats membres fixent « les normes et les modalités auxquelles doivent se conformer les Etats membres pour effectuer les contrôles des personnes aux frontières extérieures » et « les règles relatives aux visas pour les séjours prévus d'une durée maximale de trois mois » ; que ces dernières règles comprennent, notamment, « la liste des pays tiers dont les ressortissants sont soumis à l'obligation de visa... », les « procédures et conditions de délivrance des visas par les Etats membres », la définition d'un « modèle type de visa », ainsi que les règles applicables « en matière de visa uniforme » ;

14. Considérant, enfin, que les mesures relatives à la circulation des ressortissants des pays tiers fixent les conditions dans lesquelles ces ressortissants peuvent circuler librement sur le territoire des Etats membres pendant une durée maximale de trois mois ;

15. Considérant que, s'agissant des politiques de l'asile et de l'immigration, le nouveau titre III A comprend en outre un article 73 K énonçant que le Conseil, statuant conformément à la procédure prévue à l'article 73 O, peut également prendre, dans les cinq ans qui suivent l'entrée en vigueur du traité d'Amsterdam, un certain nombre de mesures relatives à l'asile, aux réfugiés et à l'immigration ;

16. Considérant que les mesures relatives à l'asile portent sur les « critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des Etats membres par un ressortissant d'un pays tiers », sur les « normes minimales régissant l'accueil des demandeurs d'asile dans les Etats membres », sur les « normes minimales concernant les conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers pour pouvoir prétendre au statut de réfugié » ou encore sur les « normes minimales concernant la procédure d'octroi ou de retrait du statut de réfugié dans les Etats membres » ;

17. Considérant que les mesures relatives aux réfugiés et aux personnes déplacées auront trait aux « normes minimales relatives à l'octroi d'une protection temporaire » de ces personnes et aux « mesures tendant à assurer un équilibre entre les efforts consentis par les Etats membres » pour les accueillir et « supporter les conséquences de cet accueil » ;

18. Considérant que les mesures relatives à la politique d'immigration porteront sur « les conditions d'entrée et de séjour », sur les « normes concernant les procédures de délivrance par les Etats membres de visas et de titres de séjour de longue durée, y compris aux fins de regroupement familial », ainsi que sur « l'immigration clandestine » et le « séjour irrégulier, y compris le rapatriement des personnes en séjour irrégulier » ;

19. Considérant, enfin, que sont également envisagées « des mesures définissant les droits des ressortissants des pays tiers en situation régulière de séjour dans un État membre de séjourner dans les autres Etats membres et les conditions dans lesquelles ils peuvent le faire » ; qu'il est par ailleurs précisé à l'avant-dernier alinéa de l'article 73 K que les mesures adoptées par le Conseil en matière d'immigration et de droit de séjour dans les Etats membres « n'empêchent pas un État membre de maintenir ou d'introduire, dans les domaines concernés, des dispositions nationales compatibles avec le présent traité et avec les accords internationaux » ;

20. Considérant que l'article 73 O prévoit les modalités d'adoption, par le Conseil, des décisions qui font l'objet du titre III A ; qu'il est stipulé, en son premier paragraphe, que « pendant une période transitoire de cinq ans après l'entrée en vigueur du traité d'Amsterdam, le Conseil statue à l'unanimité sur proposition de la Commission ou à l'initiative d'un État membre et après consultation du Parlement européen » ; qu'il est ajouté, au deuxième paragraphe, qu'« après cette période de cinq ans, le Conseil statue sur des propositions de la Commission », celle-ci étant toutefois tenue d'examiner « toute demande d'un État membre visant à ce qu'elle soumette une proposition au Conseil », et que « le Conseil, statuant à l'unanimité après consultation du Parlement européen, prend une décision en vue de rendre la procédure visée à l'article 189 B applicable à tous les domaines couverts par le présent titre ou à certains d'entre eux et d'adapter les dispositions relatives à la compétence de la Cour de justice » ; qu'il est précisé, au troisième paragraphe, que, par dérogation aux règles prévues aux deux premiers, les règles relatives à la liste des pays tiers dont les ressortissants sont soumis à l'obligation de visa de court séjour et concernant le modèle type de visa seront, dès l'entrée en vigueur du traité d'Amsterdam, « arrêtées par le Conseil, statuant à la majorité qualifiée sur proposition de la Commission et après consultation du Parlement européen » ; qu'il est enfin prévu au quatrième paragraphe que, par dérogation au deuxième, les mesures concernant les procédures et conditions de délivrance de ces mêmes visas, ainsi que les règles en matière de visa uniforme, seront, au terme d'une période de cinq ans suivant l'entrée en vigueur du traité, « arrêtées par le Conseil, statuant conformément à la procédure visée à l'article 189 B » ;

. En ce qui concerne les mesures relatives à l'asile, à l'immigration et au franchissement des frontières intérieures des Etats membres :

21. Considérant que les premier et troisième paragraphes de l'article 73 J et l'article 73 K prévoient, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, des transferts de compétences au profit de la Communauté dans les domaines de l'asile, de l'immigration et du franchissement des frontières intérieures qui intéressent l'exercice de la souveraineté nationale et n'entrent pas dans le champ de l'habilitation prévue par l'article 88-2 de la Constitution ;

22. Considérant, il est vrai, que, s'agissant de domaines ne relevant pas de la compétence exclusive de la Communauté, le respect du principe de subsidiarité, énoncé par l'article 3 B du traité instituant la Communauté européenne et dont les conditions de mise en oeuvre sont précisées par un protocole annexé au traité d'Amsterdam, implique que la Communauté n'intervient que si, et dans la mesure où, les objectifs de l'action envisagée ne peuvent pas être réalisés de manière suffisante par les Etats membres ; que, toutefois, la seule mise en oeuvre de ce principe pourrait ne pas faire obstacle à ce que les transferts de compétence autorisés par le traité soumis à l'examen du Conseil constitutionnel revêtent une ampleur et interviennent selon des modalités telles que puissent être affectées les conditions essentielles d'exercice de la souveraineté nationale ;

23. Considérant que les conditions essentielles d'exercice de la souveraineté nationale ne seront pas affectées pendant la période transitoire de cinq ans à compter de l'entrée en vigueur du traité, au cours de laquelle, en application du premier paragraphe de l'article 73 O, les décisions du Conseil seront prises à l'unanimité et où les Etats membres conserveront le pouvoir d'initiative ;

24. Considérant, en revanche, qu'au terme de cette période transitoire, en vertu du deuxième paragraphe de l'article 73 O, le Conseil statue sur proposition de la seule Commission, les Etats membres perdant ainsi le pouvoir d'initiative ; que, surtout, sur simple décision du Conseil prise à l'unanimité, l'ensemble des mesures intervenant dans les domaines précités, ou certaines d'entre elles, pourront être prises à la majorité qualifiée selon la procédure dite de « codécision » prévue par l'article 189 B du traité instituant la Communauté européenne ; qu'un tel passage de la règle de l'unanimité à celle de la majorité qualifiée et à la procédure de « codécision » ne nécessitera, le moment venu, aucun acte de ratification ou d'approbation nationale, et ne pourra ainsi pas faire l'objet d'un contrôle de constitutionnalité sur le fondement de l'article 54 ou de l'article 61, alinéa 2, de la Constitution ;

25. Considérant que, dans ces conditions, et nonobstant les dispositions de l'avant-dernier alinéa de l'article 73 K, l'application des dispositions du deuxième paragraphe de l'article 73 O pourrait conduire à ce que se trouvent affectées les conditions essentielles d'exercice de la souveraineté nationale ;

26. Considérant qu'il suit de là que doivent être déclarées contraires à la Constitution les dispositions du deuxième paragraphe de l'article 73 O, ajouté au traité instituant la Communauté européenne par l'article 2 du traité d'Amsterdam, en tant qu'elles s'appliquent aux mesures prévues par les premier et troisième paragraphe de l'article 73 J et par l'article 73 K du traité instituant la Communauté européenne ;

. En ce qui concerne les mesures relatives au franchissement des frontières extérieures des Etats membres :

27. Considérant que, dans sa décision du 2 septembre 1992, le Conseil constitutionnel a déclaré conformes à la Constitution, et notamment à son article 88-2, les stipulations de l'article 100 C du traité instituant la Communauté européenne relatives à la liste des pays tiers dont les ressortissants sont soumis à obligation de visa et relatives à l'instauration d'un modèle type de visa ; que l'autorité qui s'attache à la chose jugée par le Conseil constitutionnel s'oppose à ce que soient remises en cause les dispositions du troisième paragraphe de l'article 73 O qui se bornent à reprendre les règles de décision prévues par l'article 100 C précité ;

28. Considérant, en revanche, que le passage automatique à la règle de la majorité qualifiée et à la procédure de « codécision », au terme d'une période de cinq ans après l'entrée en vigueur du traité d'Amsterdam, pour la détermination des procédures et conditions de délivrance des visas de court séjour par les Etats membres et des règles applicables en matière de visa uniforme, prévu par le quatrième paragraphe de l'article 73 O, constitue, au regard du traité sur l'Union européenne, une modalité nouvelle de transfert de compétences dans des domaines où est en cause la souveraineté nationale ; que le passage de la règle de l'unanimité à celle de la majorité qualifiée et à la procédure de « codécision », dans de telles matières, pourrait conduire à ce que se trouvent affectées les conditions essentielles d'exercice de la souveraineté nationale ;

29. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le quatrième paragraphe de l'article 73 O, ajouté au traité instituant la Communauté européenne par l'article 2 du traité d'Amsterdam, doit être déclaré contraire à la Constitution ;

30. Considérant, enfin, que le passage à la majorité qualifiée et à la procédure de « codécision », sur simple décision du Conseil, selon la procédure prévue au deuxième paragraphe de l'article 73 O, s'agissant des mesures visées au a) du deuxième paragraphe de l'article 73 J, qui fixent les « normes et modalités auxquelles doivent se conformer les Etats membres pour effectuer les contrôles des personnes aux frontières extérieures », porte atteinte, pour les motifs ci-dessus énoncés, aux conditions essentielles d'exercice de la souveraineté nationale ; qu'il y a lieu, dès lors, de déclarer contraires à la Constitution les dispositions du deuxième paragraphe de l'article 73 O en tant qu'elles s'appliquent aux mesures prévues par le a) du deuxième paragraphe de l'article 73 J ;

- SUR L'ENSEMBLE DE L'ENGAGEMENT INTERNATIONAL SOUMIS A L'EXAMEN DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL :

31. Considérant qu'aucune des autres dispositions de l'engagement international soumis au Conseil constitutionnel au titre de l'article 54 de la Constitution n'est contraire à celle-ci ;

32. Considérant que, pour les motifs ci-dessus énoncés, l'autorisation de ratifier, en vertu d'une loi, le traité d'Amsterdam exige une révision de la Constitution ;

Décide :
Article premier :
L'autorisation de ratifier en vertu d'une loi le traité d'Amsterdam ne peut intervenir qu'après révision de la Constitution.
Article 2 :
La présente décision sera notifiée au Président de la République, ainsi qu'au Premier ministre, et publiée au Journal officiel de la République française.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 31 décembre 1997, où siégeaient : MM Roland DUMAS, président, Georges ABADIE, Michel AMELLER, Jean CABANNES, Maurice FAURE, Yves GUÉNA, Alain LANCELOT, Mme Noëlle LENOIR et M Jacques ROBERT.
Le président,
Roland DUMAS

Journal officiel du 3 janvier 1998, page 165
Recueil, p. 344
ECLI : FR : CC : 1997 : 97.394.DC

Les abstracts

  • 1. NORMES CONSTITUTIONNELLES
  • 1.3. PRINCIPES AFFIRMÉS PAR LE PRÉAMBULE DE LA CONSTITUTION DE 1946
  • 1.3.18. Alinéa 15 - Principe de réciprocité

Référence expresse au Préambule de la Constitution de 1946.

(97-394 DC, 31 décembre 1997, cons. 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, Journal officiel du 3 janvier 1998, page 165)
  • 7. DROIT INTERNATIONAL ET DROIT DE L'UNION EUROPÉENNE
  • 7.2. RATIFICATION OU APPROBATION DES TRAITÉS ET ACCORDS INTERNATIONAUX
  • 7.2.4. Caractéristiques du contrôle de constitutionnalité a priori
  • 7.2.4.1. Fondements du contrôle
  • 7.2.4.1.1. Contrôle direct (article 54 C)

Le traité d'Amsterdam prévoit, qu'au-delà d'une période transitoire de cinq ans à compter de son entrée en vigueur, sur simple décision du Conseil prise à l'unanimité, certaines mesures relatives à l'asile, à l'immigration et au franchissement des frontières intérieures et extérieures des États-membres pourront être prises à la majorité qualifiée selon la procédure dite de " codécision " prévue par l'article 189 B du traité instituant la Communauté européenne. Une telle décision ne pourra faire l'objet d'un contrôle de constitutionnalité ni sur le fondement de l'article 54 de la Constitution, ni sur celui de l'article 61, alinéa 2.

(97-394 DC, 31 décembre 1997, cons. 24, Journal officiel du 3 janvier 1998, page 165)
  • 7. DROIT INTERNATIONAL ET DROIT DE L'UNION EUROPÉENNE
  • 7.2. RATIFICATION OU APPROBATION DES TRAITÉS ET ACCORDS INTERNATIONAUX
  • 7.2.4. Caractéristiques du contrôle de constitutionnalité a priori
  • 7.2.4.6. Sens et portée de la décision
  • 7.2.4.6.1. Autorité des décisions antérieures du Conseil constitutionnel
  • 7.2.4.6.1.1. Hypothèse ou l'autorité de la chose jugée est opposée

Dans sa décision du 2 septembre 1992, le Conseil constitutionnel a déclaré conformes à la Constitution, et notamment à son article 88-2, les stipulations de l'article 100 C du traité instituant la Communauté européenne relatives à la liste des pays tiers dont les ressortissants sont soumis à obligation de visa et relatives à l'instauration d'un modèle type de visa. L'autorité qui s'attache à la chose jugée par le Conseil constitutionnel s'oppose à ce que soient remises en cause les dispositions du Traité d'Amsterdam concernant les règles relatives à la liste des pays tiers dont les ressortissants sont soumis à l'obligation de visa de court séjour et au modèle type de visa, qui se bornent à reprendre les règles de décision prévues par l'article 100 C précité.

(97-394 DC, 31 décembre 1997, cons. 27, Journal officiel du 3 janvier 1998, page 165)

Refus d'opposer l'autorité de la chose jugée par la décision n° 2004-505 DC, 19 novembre 2004 aux stipulations du traité de Lisbonne qui reprennent celles du traité établissant une Constitution pour l'Europe, lequel n'a pas été ratifié.

(97-394 DC, 31 décembre 1997, cons. 27, Journal officiel du 3 janvier 1998, page 165)
  • 7. DROIT INTERNATIONAL ET DROIT DE L'UNION EUROPÉENNE
  • 7.2. RATIFICATION OU APPROBATION DES TRAITÉS ET ACCORDS INTERNATIONAUX
  • 7.2.5. Examen de la conformité à la Constitution
  • 7.2.5.1. Nécessité d'une révision de la Constitution
  • 7.2.5.1.2. Transferts de compétence portant atteinte aux conditions d'exercice de la souveraineté nationale
  • 7.2.5.1.2.1. Principe

Le peuple français a, par le Préambule de la Constitution de 1958, proclamé solennellement "son attachement aux droits de l'homme et aux principes de la souveraineté nationale tels qu'ils ont été définis par la Déclaration de 1789, confirmée et complétée par le Préambule de la Constitution de 1946 ". Dans son article 3, la Déclaration de 1789 énonce que "le principe de toute souveraineté réside essentiellement dans la Nation ". L'article 3 de la Constitution de 1958 dispose, dans son premier alinéa, que "la souveraineté nationale appartient au peuple qui l'exerce par ses représentants et par la voie du référendum ". Le Préambule de la Constitution de 1946 proclame, dans son quatorzième alinéa, que la République française se "conforme aux règles du droit public international" et, dans son quinzième alinéa, que "sous réserve de réciprocité, la France consent aux limitations de souveraineté nécessaires à l'organisation et à la défense de la paix ". Dans son article 53, la Constitution de 1958 consacre, comme le faisait l'article 27 de la Constitution de 1946, l'existence de "traités ou accords relatifs à l'organisation internationale ". Ces traités ou accords ne peuvent être ratifiés ou approuvés par le Président de la République qu'en vertu d'une loi. Aux termes de l'article 88-1, résultant de la loi constitutionnelle du 25 juin 1992 : " La République participe aux Communautés européennes et à l'Union européenne, constituées d'États qui ont choisi librement, en vertu des traités qui les ont instaurées, d'exercer en commun certaines de leurs compétences ". Il résulte de ces textes de valeur constitutionnelle que le respect de la souveraineté nationale ne fait pas obstacle à ce que, sur le fondement des dispositions précitées du Préambule de la Constitution de 1946, la France puisse conclure, sous réserve de réciprocité, des engagements internationaux en vue de participer à la création ou au développement d'une organisation internationale permanente, dotée de la personnalité juridique et investie de pouvoirs de décision par l'effet de transferts de compétences consentis par les États membres. Toutefois, au cas où des engagements internationaux souscrits à cette fin contiennent une clause contraire à la Constitution ou portent atteinte aux conditions essentielles d'exercice de la souveraineté nationale, l'autorisation de les ratifier appelle une révision constitutionnelle.

(97-394 DC, 31 décembre 1997, cons. 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, Journal officiel du 3 janvier 1998, page 165)
  • 7. DROIT INTERNATIONAL ET DROIT DE L'UNION EUROPÉENNE
  • 7.2. RATIFICATION OU APPROBATION DES TRAITÉS ET ACCORDS INTERNATIONAUX
  • 7.2.5. Examen de la conformité à la Constitution
  • 7.2.5.1. Nécessité d'une révision de la Constitution
  • 7.2.5.1.2. Transferts de compétence portant atteinte aux conditions d'exercice de la souveraineté nationale
  • 7.2.5.1.2.2. Incidence du principe de subsidiarité

S'agissant de domaines ne relevant pas de la compétence exclusive de la Communauté, le respect du principe de subsidiarité, énoncé par l'article 3 B du traité instituant la Communauté européenne et dont les conditions de mise en œuvre sont précisées par un protocole annexé au traité d'Amsterdam, implique que la Communauté n'intervient que si, et dans la mesure où, les objectifs de l'action envisagée ne peuvent pas être réalisés de manière suffisante par les États membres. Toutefois, la seule mise en œuvre de ce principe pourrait ne pas faire obstacle à ce que les transferts de compétence autorisés par le traité soumis à l'examen du Conseil constitutionnel revêtent une ampleur et interviennent selon des modalités telles que puissent être affectées les conditions essentielles d'exercice de la souveraineté nationale.

(97-394 DC, 31 décembre 1997, cons. 22, Journal officiel du 3 janvier 1998, page 165)
  • 7. DROIT INTERNATIONAL ET DROIT DE L'UNION EUROPÉENNE
  • 7.2. RATIFICATION OU APPROBATION DES TRAITÉS ET ACCORDS INTERNATIONAUX
  • 7.2.5. Examen de la conformité à la Constitution
  • 7.2.5.1. Nécessité d'une révision de la Constitution
  • 7.2.5.1.2. Transferts de compétence portant atteinte aux conditions d'exercice de la souveraineté nationale
  • 7.2.5.1.2.3. Souveraineté nationale en matière monétaire

Aux termes de l'article 88-2, ajouté à la Constitution par la loi constitutionnelle du 25 juin 1992 : "Sous réserve de réciprocité et selon les modalités prévues par le Traité sur l'Union européenne signé le 7 février 1992, la France consent aux transferts de compétences nécessaires à l'établissement de l'union économique et monétaire européenne ainsi qu'à la détermination des règles relatives au franchissement des frontières extérieures des États membres de la Communauté européenne ". Il résulte de cette disposition qu'appellent une nouvelle révision constitutionnelle les clauses du traité d'Amsterdam qui opèrent, au profit de la Communauté européenne, des transferts de compétences qui mettent en cause les conditions essentielles d'exercice de la souveraineté nationale, soit que ces transferts interviennent dans un domaine autre que l'établissement de l'union économique et monétaire européenne ou que le franchissement des frontières extérieures communes, soit que ces clauses fixent d'autres modalités que celles prévues par le traité sur l'Union européenne signé le 7 février 1992 pour l'exercice des compétences dont le transfert a été autorisé par l'article 88-2 précité.

(97-394 DC, 31 décembre 1997, cons. 9, Journal officiel du 3 janvier 1998, page 165)
  • 7. DROIT INTERNATIONAL ET DROIT DE L'UNION EUROPÉENNE
  • 7.2. RATIFICATION OU APPROBATION DES TRAITÉS ET ACCORDS INTERNATIONAUX
  • 7.2.5. Examen de la conformité à la Constitution
  • 7.2.5.1. Nécessité d'une révision de la Constitution
  • 7.2.5.1.3. Modification des modalités d'exercice des compétences transférées, dans des conditions portant atteinte aux conditions d'exercice de la souveraineté nationale
  • 7.2.5.1.3.2. Passage de la règle de l'unanimité à celle de la majorité qualifiée (entrée et séjour des étrangers)

Le Traité d'Amsterdam prévoit des transferts de compétences au profit de la Communauté dans les domaines de l'asile, de l'immigration et du franchissement des frontières intérieures qui intéressent l'exercice de la souveraineté nationale et n'entrent pas dans le champ de l'habilitation prévue par l'article 88-2 de la Constitution. Les conditions essentielles d'exercice de la souveraineté nationale ne seront pas affectées pendant la période transitoire de cinq ans à compter de l'entrée en vigueur du traité, au cours de laquelle les décisions du Conseil seront prises à l'unanimité et où les États membres conserveront le pouvoir d'initiative. En revanche, au terme de cette période transitoire, le Conseil statue sur proposition de la seule Commission, les États membres perdant ainsi le pouvoir d'initiative. Surtout, sur simple décision du Conseil prise à l'unanimité, l'ensemble des mesures intervenant dans les domaines précités, ou certaines d'entre elles, pourront être prises à la majorité qualifiée selon la procédure dite de "codécision" prévue par l'article 189 B du traité instituant la Communauté européenne. Un tel passage de la règle de l'unanimité à celle de la majorité qualifiée et à la procédure de "codécision" ne nécessitera, le moment venu, aucun acte de ratification ou d'approbation nationale, et ne pourra ainsi pas faire l'objet d'un contrôle de constitutionnalité sur le fondement de l'article 54 ou de l'article 61, alinéa 2, de la Constitution. Dans ces conditions, l'application de ces dernières dispositions pourrait conduire à ce que se trouvent affectées les conditions essentielles d'exercice de la souveraineté nationale. Contrariété à la Constitution des dispositions de procédure applicables au-delà d'une période de cinq ans en tant qu'elles concernent les mesures relatives à l'asile, à l'immigration et au franchissement des frontières intérieures.

(97-394 DC, 31 décembre 1997, cons. 21, 22, 23, 24, 25, 26, Journal officiel du 3 janvier 1998, page 165)

Le passage automatique à la règle de la majorité qualifiée et à la procédure de " codécision ", au terme d'une période de cinq ans après l'entrée en vigueur du traité d'Amsterdam, pour la détermination des procédures et conditions de délivrance des visas de court séjour par les États membres et des règles applicables en matière de visa uniforme, constitue, au regard du traité sur l'Union européenne, une modalité nouvelle de transfert de compétences dans des domaines où est en cause la souveraineté nationale. Le passage de la règle de l'unanimité à celle de la majorité qualifiée et à la procédure de "codécision ", dans de telles matières, pourrait conduire à ce que se trouvent affectées les conditions essentielles d'exercice de la souveraineté nationale. Le passage à la majorité qualifiée et à la procédure de "codécision ", sur simple décision du Conseil, s'agissant des mesures qui fixent les "normes et modalités auxquelles doivent se conformer les États membres pour effectuer les contrôles des personnes aux frontières extérieures ", porte atteinte aux conditions essentielles d'exercice de la souveraineté nationale. Contrariété à la Constitution de ces dispositions de procédure.

(97-394 DC, 31 décembre 1997, cons. 28, 29, 30, Journal officiel du 3 janvier 1998, page 165)
  • 7. DROIT INTERNATIONAL ET DROIT DE L'UNION EUROPÉENNE
  • 7.4. QUESTIONS PROPRES AU DROIT COMMUNAUTAIRE OU DE L'UNION EUROPÉENNE
  • 7.4.2. Spécificité des fondements constitutionnels
  • 7.4.2.1. Participation de la France aux Communautés européennes et à l'Union européenne (article 88-1)

Le respect de la souveraineté nationale ne fait pas obstacle à ce que, sur le fondement des alinéas 14 et 15 du Préambule de la Constitution de 1946, la France puisse conclure, sous réserve de réciprocité, des engagements internationaux en vue de participer à la création ou au développement d'une organisation internationale permanente, dotée de la personnalité juridique et investie de pouvoirs de décision par l'effet de transferts de compétences consentis par les États membres.

(97-394 DC, 31 décembre 1997, cons. 6, Journal officiel du 3 janvier 1998, page 165)
  • 11. CONSEIL CONSTITUTIONNEL ET CONTENTIEUX DES NORMES
  • 11.8. SENS ET PORTÉE DE LA DÉCISION
  • 11.8.7. Autorité des décisions du Conseil constitutionnel
  • 11.8.7.1. Hypothèses où la chose jugée est opposée
  • 11.8.7.1.1. Contentieux des normes
  • 11.8.7.1.1.3. Contentieux de l'article 61

Dans sa décision du 2 septembre 1992, le Conseil constitutionnel a déclaré conformes à la Constitution, et notamment à son article 88-2, les stipulations de l'article 100 C du traité instituant la Communauté européenne relatives à la liste des pays tiers dont les ressortissants sont soumis à obligation de visa et relatives à l'instauration d'un modèle type de visa. L'autorité qui s'attache à la chose jugée par le Conseil constitutionnel s'oppose à ce que soient remises en cause les dispositions du Traité d'Amsterdam concernant les règles relatives à la liste des pays tiers dont les ressortissants sont soumis à l'obligation de visa de court séjour et au modèle type de visa, qui se bornent à reprendre les règles de décision prévues par l'article 100 C précité.

(97-394 DC, 31 décembre 1997, cons. 27, Journal officiel du 3 janvier 1998, page 165)
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