Décision

Décision n° 95-12 I du 14 septembre 1995

Situation du président de l'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie au regard du régime des incompatibilités parlementaires
Incompatibilité

Le Conseil constitutionnel,
Saisi le 7 juillet 1995 par le président de l'Assemblée nationale, au nom du bureau de cette assemblée, dans les conditions prévues au quatrième alinéa de l'article LO 151 du code électoral d'une demande tendant à apprécier si M Gérard Trémège, député des Hautes-Pyrénées, qui envisage de conserver ses fonctions de président de l'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie, se trouve dans un cas d'incompatibilité ;

Vu les observations produites par M Trémège, enregistrées au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 18 juillet 1995 ;

Vu les pièces desquelles il résulte que communication de la requête a été faite au ministre de l'industrie, lequel n'a pas produit d'observations ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu la Constitution ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

Vu le code électoral, notamment ses articles LO 145, LO 151 et LO 151-1 ;

Vu le décret n° 64-1200 du 4 décembre 1964 portant création d'une assemblée permanente des chambres de commerce et d'industrie, modifié notamment par le décret n° 91-739 du 18 juillet 1991 ;

Le rapporteur ayant été entendu ;

1. Considérant que la question posée au Conseil constitutionnel est de savoir si M Gérard Trémège se trouve, en raison de ses fonctions de président de l'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie, dans un des cas d'incompatibilité prévus par le code électoral ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article LO 145 du code électoral : « Sont incompatibles avec le mandat de député les fonctions de président et de membre de conseil d'administration ainsi que celles de directeur général et de directeur général adjoint exercées dans les entreprises nationales et établissements publics nationaux ; il en est de même de toute fonction exercée de façon permanente en qualité de conseil auprès de ces entreprises ou établissements. L'incompatibilité édictée au présent article ne s'applique pas aux députés désignés soit en cette qualité soit du fait d'un mandat électoral local comme présidents ou membres de conseils d'administration d'entreprises nationales ou d'établissements publics nationaux en application des textes organisant ces entreprises ou établissements. » ;

3. Considérant d'une part que l'article 1er du décret du 4 décembre 1964, qui crée l'assemblée permanente des chambres de commerce et d'industrie devenue en vertu du décret susvisé du 18 juillet 1991 l'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie, confère à celle-ci la qualité d'établissement public ;

4. Considérant d'autre part qu'en vertu de ce même article, cet établissement public qui a son siège à Paris regroupe les chambres de commerce et d'industrie de la métropole, des départements et territoires d'outre-mer, les délégations départementales des chambres de commerce et d'industrie dont la circonscription s'étend à plusieurs départements ainsi que les chambres régionales de commerce et d'industrie ; qu'aux termes de l'article 2, « l'assemblée permanente des chambres de commerce et d'industrie effectue sur le plan national la synthèse des positions adoptées par les chambres de commerce et d'industrie et les chambres régionales. Elle peut se voir confier la gestion de services à l'usage du commerce et de l'industrie lorsque cette gestion ne peut être convenablement assumée au plan régional ou local » ; que dès lors l'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie constitue un établissement public national ;

5. Considérant qu'en faisant référence au président du conseil d'administration des établissements publics nationaux, l'article LO 145 du code électoral vise le président du ou des organes délibérants de ces établissements, quelle que soit la dénomination susceptible d'être attribuée à de tels organes par les décrets instituant les établissements publics en cause ; qu'aux termes de l'article 7 du décret précité le président préside les assemblées générales, le comité directeur et le bureau de l'assemblée permanente des chambres françaises de commerce et d'industrie qui constituent les organes délibérants de l'établissement concerné ;

6. Considérant que M Trémège n'a pas été désigné comme président en qualité de député ou du fait d'un mandat électoral local ;

7. Considérant que dès lors l'exercice de cette fonction doit être regardé comme incompatible avec son mandat de député en vertu des prescriptions de l'article LO 145 du code électoral précité,

Décide :
Article premier :
Les fonctions de président de l'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie exercées par M Gérard Trémège sont déclarées incompatibles avec l'exercice par ce dernier de son mandat de député.
Article 2 :
La présente décision sera notifiée au président de l'Assemblée nationale, à M Gérard Trémège et publiée au Journal officiel de la République française.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 14 septembre 1995, où siégeaient MM Roland DUMAS, président, Etienne Dailly, Maurice FAURE, Marcel RUDLOFF, Georges ABADIE, Jean CABANNES, Michel AMELLER, Jacques ROBERT et Mme Noëlle LENOIR.
Le président, Roland DUMAS

Journal officiel du 16 septembre 1995, page 13667
Recueil, p. 221
ECLI : FR : CC : 1995 : 95.12.I

Les abstracts

  • 10. PARLEMENT
  • 10.1. MANDAT PARLEMENTAIRE
  • 10.1.2. Incompatibilités
  • 10.1.2.3. Cumul avec l'exercice d'une fonction publique
  • 10.1.2.3.1. Fonctions publiques non électives
  • 10.1.2.3.1.5. Établissements publics nationaux et entreprises nationales

L'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie, établissement public qui, ayant son siège à Paris, regroupe les chambres de commerce et d'industrie de la métropole, d'outre-mer, leurs délégations interdépartementales et les chambres régionales de commerce et d'industrie, effectue sur le plan national la synthèse des positions adoptées par ces chambres et peut se voir confier la gestion de services à l'usage du commerce et de l'industrie lorsque cette gestion ne peut être convenablement assurée au plan régional ou local. Elle constitue un établissement public national au sens de l'article L.O. 145 du code électoral.

(95-12 I, 14 septembre 1995, cons. 4, Journal officiel du 16 septembre 1995, page 13667)

En établissant une incompatibilité entre le mandat parlementaire et les fonctions de président ou d'administrateur d'" établissements publics nationaux ", le législateur a entendu interdire aux membres du Parlement, sauf dans les cas mentionnés au deuxième alinéa de l'article L.O. 145 du code électoral, d'exercer des fonctions dirigeantes au sein d'établissements publics relevant de la tutelle de l'État. En faisant référence au président du conseil d'administration des établissements publics nationaux, l'article L. O. 145 du code électoral vise le président du ou des organes délibérants de ces établissements, quelle que soit la dénomination susceptible d'être attribuée à de tels organes par les décrets instituant les établissements publics en cause.

(95-12 I, 14 septembre 1995, cons. 5, Journal officiel du 16 septembre 1995, page 13667)

Le président de l'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie, établissement public national, qui préside les organes délibérants de cet établissement, doit être regardé comme exerçant les fonctions d'un président de conseil d'administration au sens de l'article L.O. 145, fonction incompatible avec le mandat parlementaire.

(95-12 I, 14 septembre 1995, cons. 4, 5, 7, Journal officiel du 16 septembre 1995, page 13667)
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