Décision n° 94-350 DC du 20 décembre 1994
Le Conseil constitutionnel a été saisi, le 24 novembre 1994, par MM Claude Estier, René Régnault, Mme Monique Ben Guiga, M Jacques Carat, Mme Josette Durrieu, MM Léon Fatous, Marcel Bony, Jean Peyrafitte, Germain Authié, Claude Cornac, Gérard Miquel, Jean-Pierre Demerliat, Michel Dreyfus-Schmidt, Louis Philibert, Fernand Tardy, Marcel Charmant, Roger Quilliot, Guy Penne, Philippe Labeyrie, Michel Manet, Francis Cavalier-Benezet, Albert Pen, Pierre Biarnes, Philippe Madrelle, Michel Sergent, Jean-Luc Mélenchon, Michel Charasse, Jean-Louis Carrère, Paul Loridant, Roland Bernard, William Chervy, Michel Moreigne, Bernard Dussaut, Claude Saunier, Raymond Courrière, Robert Laucournet, Jacques Bialski, Gérard Gaud, Marcel Vidal, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM François Autain, Charles Metzinger, Roland Huguet, René-Pierre Signé, Franck Sérusclat, Aubert Garcia, Gérard Roujas, Roland Courteau, Louis Perrein, Jacques Bellanger, François Louisy, André Vésinhet, Tony Larue, Jean Besson, André Rouvière, Rodolphe Désiré, Mme Marie-Madeleine Dieulangard, MM Daniel Percheron, Claude Fuzier et Guy Allouche, sénateurs, dans les conditions prévues à l'article 61, alinéa 2, de la Constitution, de la conformité à celle-ci de la loi relative au statut fiscal de la Corse.
Le Conseil constitutionnel,
Vu la Constitution du 4 octobre 1958 ;
Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment le chapitre II du titre II de ladite ordonnance ;
Le rapporteur ayant été entendu ;
1. Considérant que les auteurs de la saisine ne mettent en cause que l'article 1er de la loi soumise à l'examen du Conseil constitutionnel au motif qu'il contiendrait des « références à des dispositions qui n'ont pas de bases légales en matière de droits de succession et qui, en raison d'une absence d'évaluation des biens immobiliers situés en Corse, permettent à ces derniers de bénéficier d'une exonération de fait, contraire aux principes d'égalité des citoyens devant la loi et devant l'impôt » ;
2. Considérant que cet article comporte trois alinéas ; que son premier alinéa énonce que « la Corse est dotée d'un statut fiscal destiné à compenser les contraintes de l'insularité et à promouvoir son développement économique » ; qu'aux termes de son deuxième alinéa : « dans le cadre de ce statut, l'ensemble des dispositions législatives et réglementaires actuellement en vigueur sont maintenues » ; qu'enfin son troisième alinéa indique que ces dernières « feront l'objet d'une publication par le Gouvernement dans un délai de six mois après la promulgation de la présente loi » ;
3. Considérant que la régularité au regard de la Constitution de dispositions de nature législative en vigueur ne peut être utilement contestée qu'à l'occasion de l'examen de dispositions législatives qui les modifient, les complètent, ou en affectent le domaine ;
4. Considérant qu'il ressort des dispositions de la loi éclairées par les travaux préparatoires qu'en faisant référence à un statut fiscal de la Corse, le législateur s'est borné à souligner que la collectivité de Corse faisait l'objet de dispositions fiscales spécifiques dont l'économie générale lui est apparue justifiée par ses particularités géographiques et économiques ; qu'en énonçant, au surplus, que les dispositions législatives et réglementaires relevant de ce régime fiscal sont « maintenues », il n'a entendu ni remettre en vigueur des dispositions abrogées antérieurement, ni faire obstacle à des modifications ou abrogations ultérieures par le législateur ou le pouvoir réglementaire dans leurs domaines respectifs de compétence ; que les dispositions critiquées sont ainsi dépourvues d'effet normatif ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'article 1er de la loi ne comporte aucune disposition modifiant des dispositions de nature législative en vigueur, les complétant ou affectant leur domaine ; que dès lors les moyens invoqués par les auteurs de la saisine ne peuvent être accueillis ;
6. Considérant qu'en l'espèce il n'y a lieu pour le Conseil constitutionnel de soulever d'office aucune autre question de conformité à la Constitution en ce qui concerne la loi soumise à son examen ;
Décide :
Article premier :
L'article 1er de la loi portant statut fiscal de la Corse n'est pas contraire à la Constitution.
Article 2 :
La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française.Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 20 décembre 1994.
Le président, Robert BADINTERJournal officiel du 24 décembre 1994, page 18387
Recueil, p. 134
ECLI : FR : CC : 1994 : 94.350.DC
Les abstracts
- 11. CONSEIL CONSTITUTIONNEL ET CONTENTIEUX DES NORMES
- 11.5. GRIEFS (contrôle a priori des lois - article 61 de la Constitution)
- 11.5.3. Cas des lois promulguées
11.5.3.2. Exception : admission conditionnelle du contrôle
La régularité au regard de la Constitution de dispositions de nature législative en vigueur ne peut être utilement contestée qu'à l'occasion de l'examen de dispositions législatives qui les modifient, les complètent ou en affectant le domaine. En énonçant que des dispositions législatives et réglementaires sont "maintenues", le législateur n'a entendu ni remettre en vigueur des dispositions abrogées antérieurement, ni faire obstacle à des modifications ou abrogations ultérieures par le législateur ou le pouvoir réglementaire dans leurs domaines respectifs de compétence. Les dispositions critiquées sont ainsi dépourvues d'effet normatif. Le Conseil ne fait pas porter son contrôle sur les dispositions ainsi "maintenues", les dispositions de la loi déférée ne modifient, ne complètent ni n'affectent le domaine de dispositions législatives antérieures.
- 11. CONSEIL CONSTITUTIONNEL ET CONTENTIEUX DES NORMES
- 11.7. EXAMEN DE LA CONSTITUTIONNALITÉ
- 11.7.2. Conditions de prise en compte d'éléments extrinsèques au texte de la loi
- 11.7.2.2. Référence aux travaux préparatoires
11.7.2.2.3. Référence aux travaux préparatoires de la loi déférée
Il ressort des dispositions de la loi éclairées par les travaux préparatoires qu'en faisant référence à un statut fiscal de la Corse, le législateur s'est borné à souligner que la collectivité de Corse faisait l'objet de dispositions fiscales spécifiques dont l'économie générale lui est apparue justifiée par ses particularités géographiques et économiques. En énonçant, au surplus, que les dispositions législatives et réglementaires relevant de ce régime fiscal sont "maintenues", il n'a entendu ni remettre en vigueur des dispositions abrogées antérieurement, ni faire obstacle à des modifications ou abrogations ultérieures par le législateur ou le pouvoir réglementaire dans leurs domaines respectifs de compétence. Les dispositions critiquées sont ainsi dépourvues d'effet normatif.
- 11. CONSEIL CONSTITUTIONNEL ET CONTENTIEUX DES NORMES
- 11.8. SENS ET PORTÉE DE LA DÉCISION
- 11.8.1. Dispositions de loi dépourvues d'effet normatif
11.8.1.1. Déclaration d'inopérance
Il ressort des dispositions de la loi éclairées par les travaux préparatoires qu'en faisant référence à un statut fiscal de la Corse, le législateur s'est borné à souligner que la collectivité de Corse faisait l'objet de dispositions fiscales spécifiques dont l'économie générale lui est apparue justifiée par ses particularités géographiques et économiques. En énonçant, au surplus, que les dispositions législatives et réglementaires relevant de ce régime fiscal sont "maintenues", il n'a entendu ni remettre en vigueur des dispositions abrogées antérieurement, ni faire obstacle à des modifications ou abrogations ultérieures par le législateur ou le pouvoir réglementaire dans leurs domaines respectifs de compétence. Les dispositions critiquées sont ainsi dépourvues d'effet normatif.