Décision

Décision n° 91-1141/1142/1143/1144 AN du 31 juillet 1991

A.N., Paris (13ème circ.)
Rejet

Le Conseil constitutionnel,

1 ° Vu la requête n° 91-1141 présentée par Mlle Marie-Amélie Defoy, demeurant à Paris, enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 12 février 1991, et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 27 janvier et 3 février 1991 dans la treizième circonscription de Paris pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;

Vu les observations en défense présentées par M. René Galy-Dejean, député, enregistrées au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 1er mars 1991 ;

Vu les observations présentées par Mlle Marie-Amélie Defoy et la réponse à ces observations présentée par M. René Galy-Dejean, enregistrées comme ci-dessus les 15 mars et 5 avril 1991 ;

Vu les observations présentées par le ministre de l'intérieur, enregistrées comme ci-dessus le 19 mars 1991 ;

2 ° Vu la requête n° 91-1142 présentée par M. Jean-Jacques Danton, demeurant à Paris, enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 13 février 1991, et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 27 janvier et 3 février 1991 dans la treizième circonscription de Paris pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;

Vu les observations en défense présentées par M. René Galy-Dejean, député, enregistrées comme ci-dessus le 1er mars 1991 ;

Vu les observations présentées par le ministre de l'intérieur, enregistrées comme ci-dessus le 11 mars 1991 ;

Vu les observations présentées par M. Jean-Jacques Danton et la réponse à ces observations présentée par M. René Galy-Dejean, enregistrées comme ci-dessus les 20 mars et 5 avril 1991 ;

Vu la lettre en date du 3 juin 1991, enregistrée comme ci-dessus le 4 juin 1991, par laquelle le président de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques transmet la décision de ladite commission rendue le 30 mai 1991 et relative aux comptes de campagne de M. René Galy-Dejean ;

Vu la lettre en réponse de M. René Galy-Dejean, enregistrée comme ci-dessus le 12 juin 1991 ;

Vu la décision ordonnant un supplément d'instruction rendue le 17 juin 1991 par la section chargée de l'instruction et les observations faisant suite à ce supplément d'instruction présentées par MM. René Galy-Dejean et Jean-Jacques Danton, enregistrées comme ci-dessus les 28 juin 1991 et 8 juillet 1991 ;

Vu les nouvelles observations présentées par le ministre de l'intérieur, enregistrées comme ci-dessus le 20 juin 1991 ;

Vu les nouvelles observations présentées par M. Jean-Jacques Danton, enregistrées comme ci-dessus le 25 juin 1991 ;

Vu les nouvelles observations présentées par M. René Galy-Dejean, enregistrées comme ci-dessus le 5 juillet 1991 ;

3 ° Vu la saisine en date du 3 juin 1991, enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 4 juin 1991, sous le numéro 91-1143 en ce qui concerne Mme Michèle Barzach et sous le numéro 91-1144 en ce qui concerne Mme Agnès Caradec, par laquelle la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques défère au Conseil constitutionnel, par application de l'article L.O. 136-1 du code électoral, les cas de ces candidates à l'élection à laquelle il a été procédé, les 27 janvier et 3 février 1991, dans la treizième circonscription de Paris pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale, ensemble les décisions de cette commission en date du 30 mai 1991 par lesquelles elle a rejeté les comptes de campagne de Mme Michèle Barzach et de Mme Agnès Caradec ;

Vu la lettre de M. René Galy-Dejean enregistrée comme ci-dessus le 12 juin 1991, en réponse à la communication qui lui a été donnée de la saisine ;

Vu les observations présentées par Mme Michèle Barzach, enregistrées comme ci-dessus le 1er juillet 1991 ;

Vu les observations présentées pair Mme Agnès Caradec. enregistrées comme ci-dessus le 1er juillet 1991 :

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu la Constitution. notamment son article 59 ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

Vu le code électoral ;

Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ;

Le rapporteur ayant été entendu ;

1. Considérant que les requêtes susvisées de M. Danton et de Mlle Defoy ainsi que la saisine émanant de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques sont relatives à des opérations électorales qui se sont déroulées dam la même circonscription ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'une seule décision ;

Sur la requête de M Danton :

2. Considérant que le requérant invoque un moyen unique tiré de ce que les dépenses de campagne de M.Galy-Dejean, candidat proclamé élu à l'issue du second tour, ont dépassé le plafond des dépenses électorales fixé par l'article L. 52-11 du code électoral que ce plafond est de 500 000 F par candidat pour l'élection des députés dans les circonscriptions dont la population est égale ou supérieure à 80 000 habitants ; que M. Danton demande au Conseil constitutionnel de constater le dépassement du plafond des dépenses autorisées, de prononcer l'inéligibilité de M. Galy-Dejean en tant que député pour une durée d'un an à compter de l'élection et d'annuler celle-ci ;

3. Considérant qu'en vertu du premier alinéa de l'article L 52-12 du code électoral « chaque candidat ou candidat tête de liste soumis au plafonnement prévu à l'article L. 52-11 est tenu d'établir un compte de campagne retraçant, selon leur origine l'ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l'ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l'élection, par lui-même ou pour son compte, au cours de la période mentionnée à l'article L. 52-4 » ; qu'il est spécifié que : « Sont réputées faites pour son compte les dépenses exposées directement au profit du candidat et avec l'accord, même tacite, de celui-ci, par les personnes physiques ou morales, les groupements et partis qui lui apportent leur soutien » ; que le premier alinéa de l'article L. 52-12 exige enfin que « le candidat estime et inclut, en recettes et en dépenses, les avantages directs ou indirects, les prestations de services et dons en nature dont il. a bénéficié ».

4. Considérant que le deuxième alinéa de l'article L. 52-12 du code électoral fait obligation au candidat à une élection législative de déposer à la préfecture son compte de campagne et les annexes de ce compte dans les deux mois qui suivent le tour de scrutin « où l'élection a été acquise » ; que ce compte doit être présenté par un membre de l'ordre des experts-comptables et des comptables agréés et accompagné des justificatifs des recettes ainsi que de tout document de nature à établir le montant des dépenses payées par le candidat ou pour son compte, qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 52-15 du code précité , « La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques approuve et, après procédure contradictoire, rejette ou réforme les comptes de campagne » ; que le deuxième alinéa de l'article L.O.-128 du code électoral dispose dans une première phrase que : « Est inéligible pendant un an à compter de l'élection celui qui n'a pas déposé son compte de campagne dans les conditions et le délai prescrits par l'article L. 52-12 et celui dont le compte de campagne a été rejeté à bon droit », et énonce dans une seconde phrase que : « Peut également être déclaré inéligible, pour la même durée, celui qui a dépassé le plafond des dépenses électorales tel qu'il résulte de l'article L. 52-11 » ; qu'enfin, il est spécifié à l'article L.O. 186-1 du code électoral que lorsqu'un candidat se trouve dam l'un des cas mentionnés au deuxième alinéa de l'article L.O.128, le Conseil constitutionnel prononce son inéligibilité conformément à cet article et, s'il s'agit du candidat proclamé élu, annule son élection ;

5. Considérant que le compte de campagne de M. Galy-Dejean a été déposé, conformément aux prescriptions du deuxième alinéa de l'article L 52-12 du code électoral, dans le délai de deux mois suivant le tour de scrutin à l'issue duquel il a été proclamé élu ; que par une décision en date du 30 mai 1991, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a, après réformation, approuvé le compte de l'intéressé en l'établissant en recettes, à la somme de 551772,59 F et, en dépenses, à la somme de 494 412,83 F ;

6. Considérant que la commission mentionnée ci-dessus est une autorité administrative et non une juridiction ; qu'il en résulte que la position qu'elle adopte lors de l'examen des comptes de
campagne d'un candidat ne saurait préjuger la décision du Conseil constitutionnel, juge de la régularité de l'élection en vertu de l'article 59 de la Constitution ;

7. Considérant que dans l'argumentation qu'il présente au juge de l'élection, M.Danton fait grief à M. Galy-Dejean d'avoir minoré le coût de certaines dépenses électorales qui ont été exposées par lui ou pour son compte et d'avoir omis de faire figurer dans son compte de campagne certains chefs de dépenses et, en particulier, un sondage d'opinion ;

En ce qui concerne l'omission de sondages d'opinion :

8. Considérant que le requérant fait état d'un sondage qui aurait été effectué en vue de mesurer les notoriétés respectives de M. Galy-Dejean et d'un autre candidat , qu'il soutient que son coût devrait être rattaché au compte de campagne ;

9. Considérant qu'il résulte de l'instruction que divers sondages d'opinion ayant un rapport avec l'élection litigieuse ont été pratiqués entre le 6 décembre 1990, date à laquelle il a été pris acte de la démission du député de la treizième circonscription de Paris, et le 3 février 1991 ;

10. Considérant qu'un sondage réalisé à l'échelon national les 13 et 14 décembre 1990, commandé et publié par un hebdomadaire d'information politique générale, et se proposant de mesurer la popularité d'un candidat se réclamant de M. Noir ou de Mme Barzach, ne saurait en aucune façon être rattaché aux dépenses électorales exposées par M. Galy-Dejean en vue de son élection ou pour son compte ; que la même solution doit être adoptée pour un autre sondage réalisé à la demande d'un parti politique absent de la compétition électorale et qui n'a d'ailleurs fait l'objet d'aucune publication ;

11. Considérant que ne peut davantage être rattaché au compte de campagne de M.Galy-Dejean le coût de deux sondages effectués, l'un du 21 au 24 décembre 1990, l'autre le 25 décembre 1990, à l'initiative d'un institut de sondages et qui n'ont fait l'objet d'aucune diffusion ;

12. Considérant qu'un troisième institut a, à la demande du Rassemblement pour la République pratiqué deux sondages auprès d'électeurs représentatifs de la treizième circonscription ; que les questions posées lors du premier sondage, qui s'est déroulé du 18 au 20 décembre 1990, portaient sur l'intérêt pour l'élection législative partielle, le degré probable de participation électorale, les intentions de vote au premier tour et à un éventuel second tour, et la popularité des personnalités politiques tant du 15e arrondissement de Paris que de la ville ; que des thèmes identiques ont été repris lors du second sondage effectué du 12 au 15 janvier 1991 ;

13. Considérant qu'un sondage effectué en vue de déterminer les chances de succès d'éventuels candidats à une élection ne constitue pas une dépense au sens des dispositions susmentionnées de l'article L. 52-12, dès lors que les résultats de ce sondage ne font pas ultérieurement l'objet d'une quelconque exploitation à des fins de propagande électorale ;

14. Considérant, en revanche, que constitue une dépense électorale tout sondage commandé par un candidat ou, avec bon accord même tacite, par les personnes physiques ou morales, les groupements et partis qui lui apportent un soutien, et servent à l'orientation de sa campagne électorale dans la circonscription ;

15. Considérant qu'il ressort des questions posées dans le sondage effectué du 18 au 20 décembre 1990 que celui-ci avait pour objet non de conduire à la désignation de M. Galy-Dejean comme candidat, mais de permettre, avec l'accord tacite de l'intéressé, au parti politique l'ayant déjà investi de définir les voies et moyens de sa propagande électorale ; qu'il en va a fortiori de même du sondage effectué du 12 au 15 janvier 1991, soit postérieurement à la date d'ouverture de la campagne électorale fixée par l'article 2, alinéa 2 du décret n° 90-1162 du 24 décembre 1990 ; qu'il suit de là que le coût des deux sondages précités, qui s'élève toutes taxes comprises à la somme de 207 550 F, doit, bien que supporté par le R.P.R. figurer, en dépenses, dans le compte de campagne de M. Galy-Dejean ;

En ce qui concerne les autres chefs de dépenses contestées :

16. Considérant que certaines dépenses imputées par le requérant à la campagne électorale de M. Galy-Dejean concernent en fait des campagnes organisées par le Rassemblement pour la République sur l'ensemble du territoire national ; que d'autres dépenses concernent le coût d'une lettre adressée par le maire de Paris, à tous les Parisiens à propos de projets ayant pour effet de modifier la dotation globale de fonctionnement dont bénéficiait jusqu'alors la ville de Paris ; qu'il découle du premier alinéa de l'article L.52-12 sur les dépenses faites par les personnes, groupements et partis qui soutiennent un candidat ne peuvent être rattachées à son compte que si elles ont été exposées directement à son profit, ce qui n'était pas le cas en l'espèce ;

17. Considérant que les autres dépenses mentionnées par le requérant ont fait l'objet d'une évaluation de la part de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques ; que les indications qu'il fournit n'apportent pas, au regard de l'appréciation portée par la commission, d'éléments supplémentaires d'information qui justifieraient une révision de cette évaluation ;

En ce qui concerne l'évaluation globale des dépenses de campagne de M. Galy-Dejean ;

18. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le montant des dépenses de campagne exposées par M. Galy-Dejean ou pour son compte s'établit à la somme de 701 962,83 F ;

19. Considérant que le deuxième alinéa de l'article L.O. 128 du code électoral prévoit deux cas distincts d'inéligibilité ; que, d'une part, est inéligible rendant un an à compter de l'élection celui qui n'a pas déposé son compte de campagne dans les conditions et délais prescrits par l'article L. 52-12 du code électoral et celui dont le compte de campagne a été rejeté à bon droit : que, d'autre part, « peut... être déclaré inéligible pour la même durée celui qui a dépassé le plafond des dépenses électorales » ; que, dans cette dernière hypothèse, le juge de l'élection dispose, comme le confirme d'ailleurs l'article L.O. 186-1 du code électoral, d'une marge d'appréciation pour déterminer l'incidence sur la régularité de l'élection d'un député du dépassement par l'intéressé du plafond des dépenses électorales ;

20. Considérant que le dépassement du plafond des dépenses électorales par M. Galy-Dejean tire son origine de l'adjonction à ses dépenses de campagne du coût de deux sondages d'opinion effectués à l'initiative du parti politique dont il avait l'investiture ; que la loi no 90-55 du 15 janvier 1990, applicable pour la première fois à une élection à l'Assemblée nationale, ne comporte, ni dans son texte, ni dans les débats qui ont précédé son adoption, aucune précision sur le rattachement des sondages d'opinion aux dépenses électorales ; qu'il y avait donc lieu à interprétation du texte ; que, dans ces conditions, le dépassement du plafond fixé par l'article L. 52-15 du code électoral ne justifie pas que soit prononcée l'inéligibilité de M.Galy-Dejean ;

Sur la requête de Mlle Defoy :

21. Considérant que Mlle Defoy soutient que M. Galy-Dejean, dès lors qu'il est à la fois membre du Conseil de Paris et président du conseil d'administration de la Société d'économie mixte d'équipement et d'aménagement du 15e arrondissement, tombe sous le coup de la disposition de l'article L. 231 du code électoral selon laquelle sont inéligibles au Conseil de Paris les entrepreneurs de services municipaux dans le ressort où ils assurent leurs fonctions ; qu'elle en déduit que c'est illégalement qu'il est maire du 15e arrondissement de Paris ; qu'il n'aurait donc pas dû se prévaloir selon elle de cette qualité lors de la campagne électorale ;

22. Considérant que les élections au Conseil de Paris ne peuvent être contestées que devant les juridictions administratives dans les conditions et délais prescrits, suivant le cas, par les articles L. 248 à L 251 du code électoral ou L. 52-15 et L. 118.3 de ce code et ne peuvent être ultérieurement remises en cause ; que si, par ailleurs, un membre du Conseil de Paris, pour une cause survenue postérieurement à son élection, se trouve dans un cas d'inéligibilité, il appartient au préfet de le déclarer démissionnaire dans les conditions prévues par L'article L. 236 du code électoral : que toute personne inscrite sur les listes électorales de la ville de Paris peut solliciter la mise en oeuvre de ces dernières dispositions et déférer au juge administratif, si elle s'y croit fondée, le refus du préfet d'en faire application ;

23. Considérant que M.Galy-Dejean n'ayant pas été déclaré inéligible ni démissionnaire d'office dans les conditions rappelées ci-dessus, il était en droit de faire état de ses fonctions de maire du 15e arrondissement ; que la requête de Mlle Defoy doit, par suite et en tout état de cause, être rejetée ;

Sur la saisine de la Commission nationale des comptes de compagne et des financements politiques :

24. Considérant que l'article L. 52-15 du code électoral dispose, ainsi qu'il a été dit ci-dessus que : « La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques approuve et, après procédure contradictoire, rejette ou réforme les comptes de campagne » , que, selon la première phrase de l'article L.O. 136-1 du même code, la commission « saisit le Conseil constitutionnel du cas de tout candidat susceptible de se voir opposer les dispositions du deuxième alinéa de l'article L.O. 128 » ; que ce dernier texte dispose notamment qu'« est inéligible pendant un an à compter de l'élection celui dont le compte de campagne a été rejeté à bon droit » ;

25. Considérant que la Commission nationale des comptes, de campagne et des financements politiques a, par des décisions rendues le 30 mai 1991, rejeté les comptes de campagne présentés respectivement par Mme Michèle Barzach et par Mme Agnès Caradec, candidates à l'élection législative partielle qui a eu lieu les 21 janvier et 3 février 1991 dans la treizième circonscription de Paris ; qu'elle a en conséquence saisi le Conseil constitutionnel conformément à l'article L.O. 136-1 du code électoral ; que, suivant la deuxième phrase de cet article : « Le Conseil constitutionnel constate, le cas échéant, l'inéligibilité... » ; qu'il lui appartient a suite de rechercher si c'est à bon droit qu'ont été rejetés les comptes de campagne faisant l'objet de sa saisine et, dans l'affirmative, de constater l'inéligibilité du ou des candidats concernés, comme ils prescrivent les dispositions combinées des articles L.O. 136-1 et L.O. 128 du code électoral ;

26. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 52-4 du code électoral : « Pendant l'année précédant le premier jour du mois d'une élection et jusqu'à la date du tour de scrutin où l'élection a été acquise, un candidat à cette élection ne peut avoir recueilli des fonds en vue du financement de sa campagne que par l'intermédiaire d'un mandataire nommément désigné par lui, qui est soit une association de financement électorale, soit une personne physique dénommée le mandataire financier » " ; qu'il est précisé au troisième alinéa du même article qu'« en cas d'élection anticipée ou partielle, ces dispositions ne sont applicables qu'à compter de l'événement qui rend cette élection nécessaire » ; que l'événement qui a rendu nécessaire une élection partielle dans la treizième circonscription de Paris pour la désignation d'un député est la démission de Mme Barzach, dont il a été pris acte par l'Assemblée nationale au cours de sa séance du 6 décembre 1990 ;

27. Considérant qu'il est spécifié au troisième alinéa de l'article L 52-5 du code électoral qu'une association de financement électorale ne peut recueillir de fonds que pendant la période prévue à l'article L. 52-4 " ; que les mêmes prescriptions s'imposent à un mandataire financier en vertu du troisième alinéa de l'article L. 52-6 ;

28. Considérant qu'il résulte des dispositions combinées des articles L 52-4, L 52-5 et L.52-6 du code électoral que les candidats à l'élection législative partielle de la treizième circonscription de Paris ne pouvaient recueillir de fonds en vue du financement de leur campagne électorale qu'au cours de la période allant du 6 décembre 1990 au 3 février 1991, date du tour de scrutin où « l'élection a été acquise », que si les dispositions des articles précités, en raison de la finalité qu'elles poursuivent, ne font pas obstacle à ce que figurent dans le compte de campagne des recettes correspondant à des versements postérieurs à l'élection, c'est à la condition que ces versements aient fait l'objet d'engagements souscrits antérieurement à l'élection ;

En ce qui concerne Mme Barzach :

29. Considérant que le compte de campagne de Mme Barzach a été déposé dans le délai de deux mois suivant le tour de scrutin à l'issue duquel M. Galy-Dejean a été proclamé élu, ainsi que l'exige le deuxième alinéa de l'article L. 52-12 du code électoral ; que le compte 6 fait apparaître que dix dons, représentant au total 145 000 F, soit plus de 30 p. 100 des recettes, ont été perçus entre le 8 février et le 25 mars 1991 ;

30. Considérant qu'il résulte des éléments portés à la connaissance du Conseil constitutionnel, sans avoir été produits devant la commission, que les dons mentionnés ci-dessus avaient fait l'objet d'engagements financiers antérieurs au 4 février 1991 ; qu'il n'y a pas lieu dès lors de faire application à Mme Barzach de l'article L.O. 128 du code électoral ;

En ce qui concerne Mme Caradec :

31. Considérant que le compte de campagne de Mme Caradec a été déposé dans le délai légal ; que ce compte fait apparaître qu'un don de 50 000 F a été effectué le 26 mars 1991 et annonce le versement d'un autre don de même montant ; que ces dons représentent plus de 25 p. 100 des recettes du compte de campagne ;

32. Considérant qu'il résulte des éléments portés à la connaissance du Conseil constitutionnel sans avoir été produits devant la commission, que les dons mentionnés ci-dessus avaient fait l'objet d'engagements financiers antérieurs au 4 février 1991 ; qu'il n'y a pas lieu dès lors de faire application à Mme Caradec de l'article L.O. 128 du code électoral,

Décide :
Article premier :
La requête susvisée de Mlle Marie-Amélie Defoy est rejetée.
Article 2 :
Les conclusions de la requête de M Jean-Jacques Danton tendant au prononcé de l'inéligibilité de M. René Galy-Dejean et à l'annulation de son élection sont rejetées.
Article 3 :
Il n'y a pas lieu pour le Conseil constitutionnel de prononcer l'inéligibilité de Mme Michèle Barzach et de Mme Agnès Caradec.
Article 4 :
La présente décision sera notifiée à l'Assemblée nationale, à M. René Galy-Dejean, à Mme Michèle Barzach, à Mme Agnès Caradec, au président de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, et publiée au Journal officiel de la République française.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du M juillet 1991 où siégeaient M. Robert BADINTER, président, MM. Daniel MAYER, Léon JOZEAU-MARIGNÉ, Robert FABRE, Francis MOLLET-VIÉVILLE, Jacques LATSCHA, Maurice FAURE, Jean CABANNES, Jacques ROBERT.

Journal officiel du 3 août 1991, page 10391
Recueil, p. 114
ECLI : FR : CC : 1991 : 91.1141.AN

Les abstracts

  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.5. Financement
  • 8.3.5.3. Présentation du compte
  • 8.3.5.3.9. Régularisation devant le Conseil constitutionnel

Il résulte des éléments portés à la connaissance du Conseil constitutionnel, sans avoir été produits devant la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, que des dons perçus par deux candidates à une élection législative partielle postérieurement à cette élection, avaient fait l'objet d'engagements souscrits par les donateurs avant le tour de scrutin où l'élection a été acquise. Il n'y a pas, dès lors, lieu de faire application à ces candidates de l'article L.O. 128 du code électoral.

(91-1141/1142/1143/1144 AN, 31 juillet 1991, cons. 29, 30, 31, 32, Journal officiel du 3 août 1991, page 10391)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.5. Financement
  • 8.3.5.4. Recettes produites au compte de campagne
  • 8.3.5.4.4. Dons consentis à un candidat par une personne physique (article L. 52-8, alinéa 1er, du code électoral)
  • 8.3.5.4.4.2. Période

Il résulte des éléments portés à la connaissance du Conseil constitutionnel, sans avoir été produits devant la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, que des dons perçus par deux candidates à une élection législative partielle postérieurement à cette élection, avaient fait l'objet d'engagements souscrits par les donateurs avant le tour de scrutin où l'élection a été acquise. Il n'y a pas, dès lors, lieu de faire application à ces candidates de l'article L.O. 128 du code électoral.

(91-1141/1142/1143/1144 AN, 31 juillet 1991, cons. 29, 30, 31, 32, Journal officiel du 3 août 1991, page 10391)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.5. Financement
  • 8.3.5.4. Recettes produites au compte de campagne
  • 8.3.5.4.5. Dons consentis à un candidat par une personne morale à l'exception des partis ou groupements politiques (article L. 52-8, alinéa 2, du code électoral)
  • 8.3.5.4.5.2. Période

Il résulte des éléments portés à la connaissance du Conseil constitutionnel, sans avoir été produits devant la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, que des dons perçus par deux candidates à une élection législative partielle postérieurement à cette élection, avaient fait l'objet d'engagements souscrits par les donateurs avant le tour de scrutin où l'élection a été acquise. Il n'y a dès lors pas lieu de faire application à ces candidates de l'article L.O. 128 du code électoral.

(91-1141/1142/1143/1144 AN, 31 juillet 1991, cons. 29, 30, 31, 32, Journal officiel du 3 août 1991, page 10391)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.5. Financement
  • 8.3.5.5. Dépenses produites au compte de campagne
  • 8.3.5.5.2. Dépenses devant figurer dans le compte
  • 8.3.5.5.2.7. Sondages

Sondages ayant un rapport avec l'élection législative partielle litigieuse et pratiqués entre la date de survenance de l'événement qui a rendu cette élection nécessaire et le second tour du scrutin. Ne sont cependant pas rattachables aux dépenses électorales exposées par le candidat proclamé élu : - un sondage réalisé à l'échelon national, commandé et publié par un hebdomadaire d'information politique générale, et se proposant de mesurer la popularité d'un autre candidat se réclamant de certaines personnalités politiques ; - un sondage réalisé à la demande d'un parti politique absent de la compétition électorale, et qui n'a d'ailleurs fait l'objet d'aucune publication ; - deux sondages effectués à l'initiative d'un institut de sondages et qui n'ont fait l'objet d'aucune diffusion.

(91-1141/1142/1143/1144 AN, 31 juillet 1991, cons. 9, 10, 11, Journal officiel du 3 août 1991, page 10391)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.5. Financement
  • 8.3.5.5. Dépenses produites au compte de campagne
  • 8.3.5.5.3. Dépenses n'ayant pas à figurer dans le compte

Il découle du premier alinéa de l'article L. 52-12 du code électoral que les dépenses faites par les personnes, groupements et partis qui soutiennent un candidat ne peuvent être rattachées à son compte de campagne que si elles ont été exposées directement à son profit. Tel n'est le cas ni des dépenses occasionnées par des campagnes organisées par un parti politique sur l'ensemble du territoire national, ni, en l'espèce, du coût d'une lettre adressée par le maire de X à tous les habitants à propos d'un projet de loi ayant pour effet de modifier la dotation globale de fonctionnement revenant à la ville.

(91-1141/1142/1143/1144 AN, 31 juillet 1991, cons. 16, Journal officiel du 3 août 1991, page 10391)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.5. Financement
  • 8.3.5.7. Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques
  • 8.3.5.7.1. Nature de la Commission (voir également : Titre 15 Autorités indépendantes)

La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques est une autorité administrative et non une juridiction. Il en résulte que la position qu'elle adopte lors de l'examen des comptes de campagne d'un candidat ne saurait préjuger la décision du Conseil constitutionnel, juge de la régularité de l'élection en vertu de l'article 59 de la Constitution.

(91-1141/1142/1143/1144 AN, 31 juillet 1991, cons. 6, Journal officiel du 3 août 1991, page 10391)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.5. Financement
  • 8.3.5.7. Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques
  • 8.3.5.7.4. Évaluations effectuées par la Commission

Les indications fournies par le requérant n'apportent pas d'éléments supplémentaires d'information qui justifieraient une révision de l'évaluation, faite par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, de certaines dépenses électorales exposées par le candidat proclamé élu.

(91-1141/1142/1143/1144 AN, 31 juillet 1991, cons. 17, Journal officiel du 3 août 1991, page 10391)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.5. Financement
  • 8.3.5.9. Inéligibilité du candidat élu
  • 8.3.5.9.3. Dépassement du plafond des dépenses
  • 8.3.5.9.3.1. Principes

Le deuxième alinéa de l'article L.O. 128 du code électoral prévoit deux cas distincts d'inéligibilité. D'une part, est inéligible pendant un an à compter de l'élection celui qui n'a pas déposé son compte de campagne dans les conditions et le délai prescrits par l'article L. 52-12 du code électoral et celui dont le compte de campagne a été rejeté à bon droit. D'autre part, peut être déclaré inéligible pour la même durée celui qui a dépassé le plafond des dépenses électorales. Dans cette dernière hypothèse, le juge de l'élection dispose, comme le confirme d'ailleurs l'article L.O. 186-1 du code électoral, d'une marge d'appréciation pour déterminer l'incidence sur la régularité de l'élection d'un député du dépassement par l'intéressé du plafond des dépenses électorales.

(91-1141/1142/1143/1144 AN, 31 juillet 1991, cons. 19, Journal officiel du 3 août 1991, page 10391)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.5. Financement
  • 8.3.5.9. Inéligibilité du candidat élu
  • 8.3.5.9.3. Dépassement du plafond des dépenses
  • 8.3.5.9.3.3. Dépassement ne justifiant pas le prononcé de l'inéligibilité

Le dépassement du plafond des dépenses électorales tire en l'espèce son origine de l'adjonction aux dépenses électorales de l'intéressé du coût de deux sondages. La loi n° 90-55 du 15 janvier 1990, applicable pour la première fois à une élection à l'Assemblée nationale, ne comporte ni dans son texte ni dans les débats qui ont précédé son adoption, aucune précision sur le rattachement des sondages d'opinion aux dépenses électorales. Il y avait donc lieu à interprétation du texte. Dans ces conditions, le dépassement constaté du plafond des dépenses électorales ne justifie pas que soit prononcée l'inéligibilité de l'intéressé.

(91-1141/1142/1143/1144 AN, 31 juillet 1991, cons. 20, Journal officiel du 3 août 1991, page 10391)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.8. Contentieux - Recevabilité
  • 8.3.8.1. Dépôt de la requête
  • 8.3.8.1.6. Irrecevabilité des conclusions
  • 8.3.8.1.6.7. Contestation portant sur des élections antérieures

Les élections au Conseil de Paris ne peuvent être contestées que devant les juridictions administratives dans les conditions et délais prescrits par le code électoral, et ne peuvent être ultérieurement remises en cause. Si, par ailleurs, un membre du Conseil de Paris se trouve postérieurement, dans un cas d'inéligibilité, il appartient au préfet, sur la demande de tout électeur et sous le contrôle du juge administratif, de le déclarer démissionnaire. Cas d'un membre du Conseil de Paris, qui n'a pas été déclaré inéligible ni démissionnaire d'office, proclamé ultérieurement élu à une élection législative partielle à Paris. Contrairement à ce qui est soutenu par le requérant, qui demande pour ce motif l'annulation de cette élection, l'intéressé était en droit de faire état de ses fonctions de maire d'arrondissement au cours de sa campagne électorale.

(91-1141/1142/1143/1144 AN, 31 juillet 1991, cons. 21, 22, 23, Journal officiel du 3 août 1991, page 10391)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.10. Contentieux - Instruction
  • 8.3.10.1. Pouvoirs généraux d'instruction
  • 8.3.10.1.2. Jonction d'instance

Jonction de deux requêtes et d'une saisine émanant de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, qui sont relatives à des opérations électorales s'étant déroulées dans la même circonscription.

(91-1141/1142/1143/1144 AN, 31 juillet 1991, cons. 1, Journal officiel du 3 août 1991, page 10391)
  • 15. AUTORITÉS INDÉPENDANTES
  • 15.4. DÉCISIONS
  • 15.4.2. Portée des décisions
  • 15.4.2.1. Commission nationale des comptes de campagne

La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques est une autorité administrative et non une juridiction. Il en résulte que la position qu'elle adopte lors de l'examen des comptes de campagne d'un candidat ne saurait préjuger la décision du Conseil constitutionnel, juge de la régularité de l'élection en vertu de l'article 59 de la Constitution.

(91-1141/1142/1143/1144 AN, 31 juillet 1991, Journal officiel du 3 août 1991, page 10391)
À voir aussi sur le site : Références doctrinales.
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