Décision

Décision n° 88-1113 AN du 8 novembre 1988

A.N., Seine-Saint-Denis (6ème circ.)
Rejet

Le Conseil constitutionnel,

Vu la requête présentée par M. Alain Meyet, demeurant au Pré-Saint-Gervais (Seine-Saint-Denis), enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 23 juin 1988, et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé le 12 juin 1988 dans la sixième circonscription de la Seine-Saint-Denis pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;

Vu les observations en défense présentées par M. Claude Bartolone, député, et le mémoire en réplique présenté par M. Alain Meyet, enregistrés au secrétariat général du Conseil constitutionnel les 6 juillet et 11 août 1988 ;

Vu la requête complémentaire présentée par M. Alain Meyet, enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 11 août 1988, et tendant à demander, d'une part, la proclamation de M. Jean-Jack Salles et, d'autre part, son audition en séance publique ;

Vu les nouvelles observations en défense présentées par M. Claude Bartolone, enregistrées au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 9 septembre 1988 ;

Vu le mémoire en réplique complémentaire présenté par M. Alain Meyet, enregistré au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 9 septembre 1988 ;

Vu la requête complémentaire présentée par M. Alain Meyet, enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 9 septembre 1988, et relative aux conditions de publication de la décision du Conseil constitutionnel au Journal officiel ;

Vu le mémoire complémentaire présenté par M. Alain Meyet et la réponse à ce mémoire, présentée par M. Claude Bartolone, enregistrés au secrétariat général du Conseil constitutionnel les 30 septembre et 19 octobre 1988 ;

Vu les observations présentées par le ministre de l'intérieur et la réponse à ces observations, présentée par M. Claude Bartolone, enregistrées au secrétariat général du Conseil constitutionnel les 17 et 19 octobre 1988 ;

Vu la Constitution, notamment ses articles 55 et 59 ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment ses articles 40 et 56 ;

Vu la loi n° 73-122 du 31 décembre 1973 autorisant la ratification de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble le décret n° 74-3160 du 3 mai 1974 portant publication de ladite convention ;

Vu le code électoral ;

Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ;

Le rapporteur ayant été entendu,

Sur la procédure :

1. Considérant que le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs, pris sur le fondement de l'article 56 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée, dispose dans son article 17 que : « Les séances du Conseil constitutionnel ne sont pas publiques » ; que cette règle n'est pas contraire à l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, lequel ne concerne que le contentieux pénal et le jugement des contestations sur les droits et obligations de caractère civil ; que, contrairement à ce que soutient le requérant, il n'existe aucun principe général du droit prescrivant la publicité des débats en toute matière et devant toute juridiction ; que, par suite, les conclusions de M. Meyet tendant à ce que sa contestation soit entendue en séance publique doivent, en tout état de cause, être rejetées ;

Sur le fond :

2. Considérant que M. Meyet consteste l'élection de M. Bartolone comme député de la sixième circonscription de la Seine-Saint-Denis au motif que son remplaçant, Mme Janine Pietruszynski, figurant sur une liste de candidats aux élections sénatoriales dans ce département, pourrait être appelée par application de l'article L.O. 320 du code électoral, à remplacer M. Debarge, sénateur élu sur cette liste en cas de vacance de son siège ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de l'ordonnance n° 59-224 du 4 février 1959, codifié partiellement à l'article L.O. 134 du code électoral, « le remplaçant d'un membre d'une assemblée parlementaire ne peul être remplaçant d'un candidat à l'Assemblée nationale ou au Sénat » ;

4. Considérant que ce dernier texte édicte une inéligibilité ; que toute inéligibilité, qui a pour effet d'apporter une atteinte à la liberté des candidatures, doit être interprétée restrictivement ;

5. Considérant que l'inéligibilité instituée par l'article L.O. 134 du code électoral a pour objet d'assurer la disponibilité permanente de la personne appelée à remplacer le parlementaire dont le siège devient vacant ; que si cette inéligibilité fait obstacle à ce qu'un candidat à l'Assemblée nationale puisse choisir comme remplaçant la personne qui, en cas de vacance du siège d'un sénateur, serait immédiatement appelée à remplacer celui-ci, elle ne saurait être étendue aux autres personnes ayant seulement vocation à acquérir la qualité de remplaçant ;

6. Considérant que Mme Pietruszynski figurait sur une liste de candidats aux élections sénatoriales qui se sont déroulées le 28 septembre 1986 dans le département de la Seine-Saint-Denis à la suite de M. Marcel Debarge, seul candidat proclamé élu, et de M. Fuzier ; que si ce dernier avait la qualité de « remplaçant » d'un sénateur au sens de l'article L.O. 134 du code électoral, tel n'était pas, au jour de l'élection, le cas de Mme Pietruszynski, qui pouvait par suite se présenter comme remplaçante de M. Bartolone, candidat dans la sixième circonscription de la Seine-Saint-Denis lors des élections législatives des 5 et 12 juin 1988 ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. Meyet n'est fondé à demander ni l'annulation de l'élection de M. Bartolone ni, en tout état de cause, la proclamation de M. Salles ;

Sur les conclusions relatives aux conditions de publication de la décision du Conseil constitutionnel au Journal officiel :

8. Considérant que ces conclusions sont sans rapport avec la contestation de l'élection d'un député, qu'elles sont, dès lors, irrecevables,

Décide :
Article premier :
La requête susvisée de M. Alain Meyet est rejetée.
Article 2 - La présente décision sera notifiée à l'Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 8 novembre 1988, où siégeaient : MM, Robert BADINTER président, Louis JOXE, RobeR Lecourt, Daniel MAYER, Léon JOZEAU-MARIGNÉ, Georges VEDEL, Robert FABRE, Francis MOLLET-VIÉVILLE, Jacques LATSCHA.

Journal officiel du 9 novembre 1988, page 14068
Recueil, p. 196
ECLI : FR : CC : 1988 : 88.1113.AN

Les abstracts

  • 7. DROIT INTERNATIONAL ET DROIT DE L'UNION EUROPÉENNE
  • 7.3. TRAITÉS ET ACCORDS INTERNATIONAUX EN VIGUEUR
  • 7.3.3. Compétence du Conseil constitutionnel
  • 7.3.3.4. Compétence du Conseil constitutionnel en tant que juge électoral

Le Conseil constitutionnel, saisi, en application de l'article 59 de la constitution, examine si le règlement de procédure applicable au contentieux électoral qu'il a élaboré sur le fondement de l'article 56 de l'ordonnance organique n° 58-1067 du 7 novembre 1958 n'est pas contraire à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

(88-1113 AN, 08 novembre 1988, cons. 1, Journal officiel du 9 novembre 1988, page 14068)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.2. Candidatures
  • 8.3.2.1. Conditions d'éligibilité
  • 8.3.2.1.9. Remplaçants

L'inéligibilité instituée par l'article L.O. 134 du code électoral a pour objet d'assurer la disponibilité permanente de la personne appelée à remplacer le parlementaire dont le siège devient vacant. Si cette inéligibilité fait obstacle à ce qu'un candidat à l'Assemblée nationale puisse choisir comme remplaçant la personne qui, en cas de vacance du siège d'un sénateur, serait immédiatement appelée à remplacer celui-ci, elle ne saurait être étendue aux autres personnes ayant seulement vocation à acquérir la qualité de remplaçant.

(88-1113 AN, 08 novembre 1988, cons. 5, Journal officiel du 9 novembre 1988, page 14068)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.8. Contentieux - Recevabilité
  • 8.3.8.1. Dépôt de la requête
  • 8.3.8.1.6. Irrecevabilité des conclusions
  • 8.3.8.1.6.5. Contestation ne portant pas sur l'élection elle-même

Des conclusions relatives aux conditions de publication de la décision du Conseil constitutionnel sont sans rapport avec la contestation de l'élection d'un député et sont, dès lors, irrecevables.

(88-1113 AN, 08 novembre 1988, cons. 8, Journal officiel du 9 novembre 1988, page 14068)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.10. Contentieux - Instruction
  • 8.3.10.3. Incidents de procédure, demandes particulières, non-lieu à statuer
  • 8.3.10.3.7. Demandes particulières

Publicité de l'audience. Le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs dispose dans son article 17 que " les séances du Conseil constitutionnel ne sont pas publiques ". Cette règle n'est pas contraire à l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui ne concerne que le contentieux pénal et le jugement des contestations sur les droits et obligations de caractère civil et il n'existe aucun principe général du droit prescrivant la publicité des débats en toute matière et devant toute juridiction.

(88-1113 AN, 08 novembre 1988, cons. 1, Journal officiel du 9 novembre 1988, page 14068)
  • 10. PARLEMENT
  • 10.1. MANDAT PARLEMENTAIRE
  • 10.1.3. Exercice du mandat parlementaire
  • 10.1.3.4. Remplacement

L'inéligibilité instituée par l'article L.O. 134 du code électoral a pour objet d'assurer la disponibilité permanente de la personne appelée à remplacer le parlementaire dont le siège devient vacant ; si cette inéligibilité fait obstacle à ce qu'un candidat à l'Assemblée nationale puisse choisir comme remplaçant la personne qui, en cas de vacance du siège d'un sénateur, serait immédiatement appelée à remplacer celui-ci, elle ne saurait être étendue aux autres personnes ayant seulement vocation à acquérir la qualité de remplaçant.

(88-1113 AN, 08 novembre 1988, cons. 5, Journal officiel du 9 novembre 1988, page 14068)
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