Décision

Décision n° 73-595/597 AN du 21 juin 1973

A.N., Corse (3ème circ.)
Rejet

Le Conseil constitutionnel,

Vu l'article 59 de la Constitution ;

Vu l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

Vu le code électoral ;

Vu 1 ° la requête présentée par M. Albert Gabrieleff, demeurant à Orly (94310), 13, rue Anatole-France, ladite requête enregistrée le 15 mars 1973 au secrétariat général du Conseil constitutionnel et tendant à ce qu'il plaise au Conseil statuer sur les opérations électorales

auxquelles il a été procédé le 4 mars l973 dans la troisième circonscription de la Corse pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;

Vu 2 ° la requête présentée par M. Paul Bungelmi, demeurant à Pétrèto-Bicchisano (Corse), ladite requête enregistrée à la préfecture de la Corse le 15 mars 1973 et tendant à ce qu'il plaise au Conseil constitutionnel statuer sur les mêmes opérations électorales ;

Vu les observations en défense présentées par M. de Rocca-Serra, député, lesdites observations enregistrées le 16 avril 1973 au secrétariat général du Conseil constitutionnel ;

Vu les observations en réplique présentées par M. Gabrieleff, lesdites observations enregistrées comme ci-dessus les 27 avril 1973 et 22 mai 1973 ;

Vu les observations en réplique présentées par M. Bungelmi, lesdites observations enregistrées comme ci-dessus le 27 avril 1973 ;

Vu les observations en duplique présentées par M. de Rocca-Serra, député, lesdites observations enregistrées comme ci-dessus les 10 mai 1973, 11 mai 1973 et 29 mai 1973 ;

Vu les observations présentées par le Ministre de l'Intérieur enregistrées le 7 juin 1973 au secrétariat général du Conseil constitutionnel ;

Vu les observations présentées par M. Gabrieleff, enregistrées comme ci-dessus le 13 juin 1973 ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Ouï le rapporteur en son rapport ;

1. Considérant que les deux requêtes susvisées de M.M. Gabrieleff et Bungelmi sont relatives aux mêmes opérations électorales ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'une seule décision ;

I- Sur la requête de Monsieur GABRIELEFF

Sur les conclusions tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Nice en date du 22 février 1973 :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 159 du code électoral et « si une déclaration de candidature ne remplit pas les conditions prévues aux articles précédents, le préfet saisit dans les vingt-quatre heures le tribunal administratif qui statue dans les trois jours. La décision du tribunal ne peut être contestée que devant le Conseil constitutionnel saisi de l'élection » ;

3. Considérant que les dispositions susmentionnées donnent compétence au seul préfet pour saisir le tribunal administratif, en vue de se prononcer sur la recevabilité des déclarations de candidature à l'Assemblée nationale ;

4. Considérant que le préfet n'aurait pas dû refuser de sa propre autorité la candidature du requérant mais aurait dû saisir le tribunal administratif ;

5. Considérant, cependant, que le jugement attaqué du 22 février 1973 par lequel le tribunal administratif de Nice a statué sur le dépôt de la candidature de M.Gabrieleff, a été rendu sur requête présentée par l'intéressé ; que les dispositions ci-dessus rappelées du code électoral faisaient obstacle à ce que ledit tribunal statuât sur les conditions de recevabilité de la déclaration de candidature dont il s'agit sans avoir été saisi par le préfet ; que, dès lors, le jugement susmentionné doit être annulé ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'élection :

6. Considérant que le requérant se fonde, pour demander l'annulation de l'élection contestée, sur le fait que la déclaration de sa candidature, bien que présentée après l'expiration du délai légal, aurait néanmoins dû être enregistrée par le préfet de la Corse, en raison des circonstances qui motivaient sa présentation tardive ;

7. Considérant que le délai fixé par l'article L. 157 du code électoral pour le dépôt des déclarations de candidature a un caractère impératif et ne saurait être prolongé ; que, par suite, la candidature de M. Gabrieleff ne pouvait être enregistrée ;

Il. - SUR LA REQUÊTE DE M. BUNGELMI

8. Considérant que, si le requérant soutient, d'une part, que des enveloppes auraient été introduites frauduleusement dans les urnes à Porto-Vecchio, que des irrégularités auraient été commises dans la procédure du vote par correspondance à Porto-Vecchio et Calacuccia et que diverses autres irrégularités auraient marqué le déroulement du scrutin à Porto-Vecchio, Zoza et Pietroso, il n'apporte la preuve de ces irrégularités que pour deux suffrages seulement, alors qu'il évalue à deux mille environ le nombre de voix qui auraient été abusivement accordées à M. de Rocca-Serra ;

9. Considérant que, dans ces conditions, les faits incriminés ne peuvent être considérés comme suffisamment établis.

10. Considérant que M. Bungelmi allègue, d'autre part, que certains délégués des candidats auraient été mis dans l'impossibilité d'exercer leur contrôle sur les opérations de vote et de dépouillement et de consigner leurs réclamations au procès-verbaux ;

11. Considérant que ces faits, qui sont seulement allégués et cela pour un nombre très limité de bureaux de vote de la circonscription, n'ont pu, dans les circonstances de l'espèce, exercer sur les opérations électorales une influence suffisante pour en modifier le résultat ;

Décide :
Article premier :
Le jugement susvisé du tribunal administratif de Nice en date du 22 février 1973 est annulé.
Article 2 :
Les conclusions de la requête de M. Gabrieleff tendant à l'annulation de l'élection, ainsi que la requête de M. Bungelmi sont rejetées.
Article 2 :
La présente décision sera notifiée à l'Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 21 juin 1973, où siégeaient : Gaston PALEWSKI, président, MONNET, REY, SAINTENY, GOGUEL, DUBOIS, COSTE-FLORET, CHATENET, LUCHAIRE.

Journal officiel du 29 juin 1973, page 6975
Recueil, p. 108
ECLI : FR : CC : 1973 : 73.595.AN

Les abstracts

  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.2. Candidatures
  • 8.3.2.3. Déclaration de candidature

Le délai fixé par l'article L. 157 du code électoral pour le dépôt des déclarations de candidature a un caractère impératif et ne saurait être prolongé.

(73-595/597 AN, 21 juin 1973, cons. 7, Journal officiel du 29 juin 1973, page 6975)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.2. Candidatures
  • 8.3.2.3. Déclaration de candidature
  • 8.3.2.3.3. Recevabilité de la déclaration de candidature
  • 8.3.2.3.3.2. Recours du préfet devant le tribunal administratif (voir également : Déclaration de candidature - Candidatures de liste - Refus de déclaration de candidature)

Seul le préfet a qualité pour saisir le tribunal administratif pour lui demander de se prononcer sur la recevabilité des déclarations de candidature à l'Assemblée nationale. Le tribunal administratif ne peut donc être valablement saisi en cette matière, par la demande d'un candidat.

(73-595/597 AN, 21 juin 1973, cons. 2, 3, 4, 5, Journal officiel du 29 juin 1973, page 6975)

Les dispositions de l'article L. 159 du code électoral donnent compétence au seul préfet pour saisir le tribunal administratif de la recevabilité d'une déclaration de candidature et le préfet ne peut refuser une candidature de sa propre autorité sans saisir ladite juridiction.

(73-595/597 AN, 21 juin 1973, cons. 2, 3, 4, 5, Journal officiel du 29 juin 1973, page 6975)

Est nulle et non avenue une candidature qui contrevient aux prescriptions prohibant les candidatures multiples. La nullité ne peut être constatée que par le tribunal administratif saisi à cet effet par le représentant de l'État dans le département. En raison du caractère d'ordre public de cette nullité, le tribunal peut être saisi sans condition de délai.

(73-595/597 AN, 21 juin 1973, cons. 2, 3, 4, 5, Journal officiel du 29 juin 1973, page 6975)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.6. Opérations électorales
  • 8.3.6.3. Délégués des candidats

Délégués mis dans l'impossibilité d'exercer leur contrôle sur les opérations de vote. Sans influence, en l'espèce.

(73-595/597 AN, 21 juin 1973, cons. 10, Journal officiel du 29 juin 1973, page 6975)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.6. Opérations électorales
  • 8.3.6.9. Établissement des procès-verbaux et de leurs annexes
  • 8.3.6.9.2. Procès-verbaux

Délégués mis dans l'impossibilité d'exercer leur contrôle sur les opérations de dépouillement et de consigner leurs réclamations aux procès-verbaux. Faits, n'ayant pu, dans les circonstances de l'espèce, exercer sur les opérations électorales une influence suffisante pour en modifier le résultat.

(73-595/597 AN, 21 juin 1973, cons. 10, 11, Journal officiel du 29 juin 1973, page 6975)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.11. Contentieux - Appréciation des faits par le Conseil constitutionnel
  • 8.3.11.1. Irrégularités qui ne modifient pas le résultat
  • 8.3.11.1.5. Irrégularités qui ne modifient pas le résultat en raison des circonstances particulières de l'élection
  • 8.3.11.1.5.2. Candidatures

Les dispositions de l'article L. 159 du code électoral donnent compétence au seul préfet pour saisir le tribunal administratif de la recevabilité d'une déclaration de candidature et le préfet ne peut refuser une candidature de sa propre autorité sans saisir ladite juridiction. C'est donc à tort qu'un tribunal administratif a statué, à la requête de l'intéressé, sur la recevabilité d'une candidature et le jugement ainsi rendu doit être annulé. Pas d'influence sur le résultat de l'élection, la déclaration de candidature ayant été présentée après l'expiration du délai légal.

(73-595/597 AN, 21 juin 1973, cons. 2, 3, 4, 5, Journal officiel du 29 juin 1973, page 6975)
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