Décision

Décision n° 69-53 L du 27 février 1969

Nature juridique de certaines dispositions modifiées, du premier alinéa de l'article 21-IV de l'ordonnance du 23 octobre 1958 relative à l'expropriation et des articles 12 et 17 de la loi du 2 Mai 1930 ayant pour objet de réorganiser la protection des monuments naturels et des sites de caractère artistique, scientifique, légendaire ou pittoresque
Réglementaire

Le Conseil constitutionnel,
Saisi le 27 janvier 1969 par le Premier ministre dans les conditions prévues à l'article 37, alinéa 2, de la Constitution, d'une demande tendant à l'appréciation de la nature juridique des dispositions :
1) De l'article 21-IV, premier alinéa, de l'ordonnance n° 58-997 du 23 octobre 1958 relative à l'expropriation, mais en tant seulement que ces dispositions, telles qu'elles résultent de l'article 3 de la loi n° 65-559 du 10 juillet 1965, désignent la Commission des opérations immobilières comme l'organisme dont l'estimation constitue, dans les cas visés par lesdites dispositions, le montant maximum de l'indemnité principale susceptible d'être accordée au propriétaire d'un bien exproprié ;
2) De l'article 12 de la loi du 2 mai 1930 ayant pour objet de réorganiser la protection des monuments naturels et des sites de caractère artistique, historique, scientifique, légendaire ou pittoresque, mais en tant seulement que ces dispositions, telles qu'elles résultent de l'article 7 de la loi n° 67-1174 du 28 décembre 1967, prévoient que l'autorisation spéciale susceptible d'être accordée par le ministre des Affaires culturelles, en vue de la réalisation des opérations concernant les monuments naturels et les sites classés qu'elles visent, est donnée « après avis de la Commission départementale des sites, perspectives et paysages et, chaque fois que le ministre le juge utile, de la Commission supérieure » ;
3) De l'article 17, alinéas 2, 5 et 6 de ladite loi du 2 mai 1930, mais en tant seulement que ces dispositions ont été rendues applicables dans les départements d'outre-mer par la loi n° 65-947 du 10 novembre 1965 et désignent les Commissions départementales et la Commission supérieure des sites, perspectives et paysages comme les organismes chargés de procéder, dans les conditions qu'elles déterminent, à certaines opérations de l'instruction des projets de création de zones de protection autour des monuments naturels et des sites inscrits ou classés ;

Vu la Constitution, notamment ses articles 34, 37 et 62 ;

Vu l'ordonnance du 7 novembre 1958, portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment ses articles 24, 25 et 26 ;

Vu l'ordonnance n° 58-997 du 23 octobre 1958, relative à l'expropriation, notamment son article 21-IV, premier alinéa ;

Vu la loi du 2 mai 1930 ayant pour objet de réorganiser la protection des monuments naturels et des sites de caractère artistique, historique, scientifique, légendaire ou pittoresque, notamment ses articles 12 et 17, alinéas 2, 5 et 6 ;

Vu la loi n° 67-1174 du 28 décembre 1967, relative à la restauration des monuments historiques et à la protection des sites, notamment son article 7 ;

Vu la loi n° 65-947 du 10 novembre 1965 étendant aux départements d'outre-mer le champ d'application de plusieurs lois relatives à la protection des sites et des monuments historiques, notamment son article premier ;

En ce qui concerne les dispositions de l'article 21-IV, premier alinéa, de l'ordonnance n° 58-997 susvisée du 23 octobre 1958, telles qu'elles résultent de l'article 3 de la loi n° 65-559 du 10 juillet 1965 :

1. Considérant que, dans la mesure, seule envisagée dans la demande présentée au Conseil constitutionnel, où les dispositions ainsi soumises à l'examen du Conseil tendent uniquement à désigner la commission de contrôle des opérations immobilières comme l'organisme dont l'estimation constitue, dans les cas visés par lesdites dispositions, le montant maximum de l'indemnité principale susceptible d'être accordée au propriétaire d'un bien exproprié, ces dispositions ne touchent pas aux principes fondamentaux du régime de la propriété non plus qu'à aucun des autres principes fondamentaux ni à aucune des règles que l'article 34 de la Constitution a placés dans le domaine de la loi ; que, dès lors, et dans cette mesure, elles ressortissent à la compétence du pouvoir réglementaire, sauf, toutefois, pour celui-ci, à ne pas diminuer les garanties de la fixation d'une juste indemnité, telles quelles résultent actuellement de la composition de cette commission ;

En ce qui concerne les dispositions de l'article 12 de la loi susvisée du 2 mai 1930, telles qu'elles résultent de l'article 7 de la loi n° 67-1174 du 28 décembre 1967 :

2. Considérant que les dispositions dont il s'agit sont soumises à l'examen du Conseil constitutionnel en tant seulement que l'autorisation spéciale du ministre des Affaires culturelles, à laquelle elles subordonnent la réalisation des opérations qu'elles visent concernant les monuments naturels et les sites classés, est donnée « après avis de la Commission départementale des sites, perspectives et paysages, et chaque fois que le ministre le juge utile, de la Commission supérieure » ; que cet avis, purement consultatif pour l'exercice d'une compétence de l'Etat, ne met pas en cause les principes fondamentaux du droit de propriété non plus qu'aucun des autres principes fondamentaux ni aucune des règles que l'article 34 a placés dans le domaine de la loi, que, dès lors, les dispositions susvisées ressortissent à la compétence du pouvoir réglementaire ;

En ce qui concerne l'extension aux départements d'outre-mer réalisée par la loi n° 65-947 du 10 novembre 1965 des dispositions de l'article 17, alinéas 2, 5 et 6, de ladite loi du 2 mai 1930 :

3. Considérant que ces dispositions sont soumises à l'examen du Conseil constitutionnel en tant seulement qu'elles ont été rendues applicables dans les départements d'outre-mer par la loi n° 65-947 du 10 novembre 1965 et dans la mesure où elles tendent à désigner les commissions départementales et la commission supérieure des sites, perspectives et paysages comme les organismes chargés de procéder, dans les conditions qu'elles déterminent, à certaines opérations de l'instruction des projets de création des zones de protection autour des monuments naturels et des sites inscrits ou classés ;

4. Considérant que, dans la mesure ci-dessus définie et pour des raisons identiques à celles qui ont été précédemment indiquées à l'occasion de l'examen des dispositions de l'article 12 de la loi du 2 mai 1930, l'extension des dispositions en cause ne saurait être regardée comme touchant aux principes fondamentaux de la propriété privée, non plus qu'à aucun des autres principes fondamentaux ni à aucune des règles qui relèvent de la compétence du législateur en vertu de l'article 34 de la Constitution ; que, dès lors et pour les mêmes motifs que ceux qui ont été précédemment retenus, les dispositions ainsi étendues sont du domaine du règlement ;

Décide :
Article premier :
Ont le caractère réglementaire, dans la mesure précisée dans les visas et par les motifs de la présente décision ainsi que sous les réserves exprimées dans ces derniers, toutes les dispositions susvisées et soumises à l'examen du Conseil constitutionnel par la demande du Premier ministre en date du 27 janvier 1969.
Article 2 :
La présente décision sera notifiée au Premier ministre et publiée au Journal officiel de la République française.

journal officiel du 13 mars 1969
Recueil, p. 23
ECLI : FR : CC : 1969 : 69.53.L

Les abstracts

  • 3. NORMES LÉGISLATIVES ET RÉGLEMENTAIRES
  • 3.5. POUVOIR RÉGLEMENTAIRE
  • 3.5.2. Pouvoir réglementaire national - Modalités d'exercice (voir Domaine de la loi et du règlement)
  • 3.5.2.4. Consultations diverses
  • 3.5.2.4.3. Avis simples
  • 3.5.2.4.3.1. Caractère obligatoire de l'avis
  • 3.5.2.4.3.1.1. Ancienne jurisprudence

La disposition obligeant à prendre l'avis purement consultatif d'une commission administrative préalablement à l'exercice d'une compétence de l'État ressortit à la compétence du pouvoir réglementaire. Tel est le cas, en l'espèce, pour l'exigence de l'avis de la commission départementale des sites ou celui de la commission supérieure.

(69-53 L, 27 février 1969, cons. 2, 3, 4, journal officiel du 13 mars 1969)
  • 3. NORMES LÉGISLATIVES ET RÉGLEMENTAIRES
  • 3.7. RÉPARTITION DES COMPÉTENCES PAR MATIÈRES
  • 3.7.14. Régime de la propriété, des droits réels et des obligations civiles et commerciales
  • 3.7.14.1. Principes fondamentaux du régime de la propriété
  • 3.7.14.1.2. Avis d'organismes consultatifs

Des dispositions tendant à désigner la commission de contrôle des opérations immobilières comme étant l'organisme dont l'estimation constitue le montant maximum de l'indemnité d'expropriation ne touchent pas aux principes fondamentaux du régime de la propriété et relèvent de la compétence du pouvoir réglementaire, sauf pour celui-ci à ne pas diminuer les garanties de la fixation d'une juste indemnité qui résultent de la composition de cette commission.

(69-53 L, 27 février 1969, cons. 1, journal officiel du 13 mars 1969)

Ne touche pas davantage aux principes fondamentaux du régime de la propriété l'exigence de l'avis purement consultatif des commissions des sites préalablement à l'autorisation de certaines opérations par le ministre chargé des sites.

(69-53 L, 27 février 1969, cons. 2, 3, 4, journal officiel du 13 mars 1969)
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