Décision n° 68-35 DC du 30 janvier 1968
Le Conseil constitutionnel,
Saisi le 2 janvier 1968 par le Premier ministre, conformément aux dispositions de l'article 61 de la Constitution, du texte de la loi relative aux évaluations servant de base à certains impôts directs locaux, adoptée par le Parlement ;
Vu les observations présentées par le Président du Sénat dans sa lettre en date du 19 janvier 1968 ;
Vu la Constitution et notamment ses articles 34, 37, 61 et 62 ;
Vu l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment le chapitre II du titre II de ladite ordonnance ;
1. Considérant que, si l'article 34 de la Constitution place dans le domaine de la loi la fixation des règles concernant l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toute nature, la mise en oeuvre de cette compétence ne saurait faire obstacle à l'exercice par l'autorité réglementaire des pouvoirs que celle-ci tient de l'article 37, 1er alinéa, de la Constitution ;
2. Considérant que les dispositions de l'article 22 du projet de loi adopté par le Parlement et dont le texte est, avant sa promulgation, soumis à l'examen du Conseil constitutionnel, prévoient qu'aucune mesure réglementaire ne pourra entraîner une réduction des ressources fiscales des collectivités locales ; que, dans la mesure où elle vise des dispositions de caractère réglementaire qui pourraient intervenir, pour l'application de mesures de forme législative dans des matières relevant du domaine de la loi en vertu de l'article 34 de la Constitution, cette prescription ressortit à la compétence du législateur ; mais qu'en revanche, dans la mesure où elle est susceptible de faire obstacle à l'exercice du pouvoir qui appartient normalement à l'autorité réglementaire dans des domaines qui lui sont réservés par l'article 37, 1er alinéa, de la Constitution, elle méconnaît les dispositions de celle-ci relatives aux domaines respectifs de la loi et du règlement ;
3. Considérant qu'en raison des termes très généraux dans lesquels l'article 22 est formulé, il échet pour le Conseil constitutionnel d'en préciser la portée ;
4. Considérant que les mesures d'ordre réglementaire visées par ce texte doivent être regardées comme s'appliquant uniquement à celles prévues dans la loi adoptée par le Parlement et relative aux évaluations servant de base à certains impôts directs locaux ; que, compte tenu de cette limitation, ledit article 22 doit être déclaré conforme à la Constitution ;
5. Considérant, enfin, qu'en l'espèce il n'y a lieu pour le Conseil constitutionnel de soulever aucune question de conformité à la Constitution en ce qui concerne les autres dispositions de la loi soumise par le Premier ministre à son examen ;
Décide :
Article premier :
La loi relative aux évaluations servant de base à certains impôts directs locaux, soumise à l'examen du Conseil constitutionnel, conformément à l'article 61 de la Constitution, est déclarée conforme à celle-ci, pour autant que les dispositions de l'article 22 de ladite loi tendant à ce qu'aucune mesure d'ordre réglementaire ne puisse entraîner une réduction des ressources fiscales, s'appliquent limitativement à celles prévues dans le texte de ladite loi.Article 2 :
La présente décision sera notifiée au Premier ministre et publiée au Journal officiel de la République française.Journal officiel du 1er février 1968, p.
Recueil, p. 19
ECLI : FR : CC : 1968 : 68.35.DC
Les abstracts
- 3. NORMES LÉGISLATIVES ET RÉGLEMENTAIRES
- 3.5. POUVOIR RÉGLEMENTAIRE
- 3.5.1. Pouvoir réglementaire national - Autorités compétentes
3.5.1.2. Gouvernement
La mise en œuvre des compétences que le législateur tient de l'article 34 de la Constitution, notamment en matière de fixation de l'assiette et du taux des impositions, ne saurait faire obstacle à l'exercice du pouvoir qui appartient normalement à l'autorité réglementaire en vertu de l'article 37, alinéa 1er de la Constitution. L'article contesté est formulé en termes très généraux, le Conseil constitutionnel doit donc en préciser la portée : la limitation de la compétence Gouvernementale doit être regardée comme s'appliquant uniquement aux ressources prévues dans le cadre de la loi où elle figure.