Décision

Décision n° 67-410 AN du 21 juin 1967

A.N., Indre-et-Loire (4ème circ.)
Rejet

Le Conseil constitutionnel,

Vu les articles 5, 25, 59 et 68 de la Constitution ;

Vu l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

Vu l'ordonnance n° 58-1065 du 7 novembre 1958 ;

Vu l'ordonnance n° 58-1097 du 15 novembre 1958 ;

Vu l'ordonnance n° 59-224 du 4 février 1959 ;

Vu le Code électoral, et notamment son article L. O. 134 ;

Vu la requête présentée par M. Ballot, demeurant 15, place François-Sicard, à Tours (Indre-et-Loire), ladite requête enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 20 mars 1967 et tendant à ce qu'il plaise au Conseil statuer sur les opérations électorales auxquelles il a été procédé les 5 et 12 mars 1967 dans la 4e circonscription du département de l'Indre-et-Loire pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;

Vu le mémoire en défense présenté par M. Voisin, député, ledit mémoire enregistré le 1er avril 1967 au secrétariat général du Conseil constitutionnel ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Ouï le rapporteur en son rapport ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'élection contestée :

Sur le moyen relatif à l'allocution des Chef de l'Etat :

1. Considérant que pour demander l'annulation de l'élection contestée le requérant soutient, en premier lieu, que l'allocution prononcée par le Président de la République sur les antennes de l'O. R. T. F. le 4 mars 1967, veille du premier tour de scrutin, aurait, en violation des dispositions de l'article L. 167-1 du Code électoral qui fixent les modalités d'utilisation des antennes pour la campagne en vue des élections législatives, exercé une influence déterminante sur le résultat du scrutin ;

2. Considérant qu'il résulte tant des dispositions de la Constitution - et notamment de son article 68 - que de celles de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, que ce dernier, saisi d'une contestation en matière électorale, n'a pas compétence pour se prononcer, même par voie d'exception et nonobstant l'article 44 de ladite ordonnance, sur la conformité à la loi de la déclaration susmentionnée du Chef de l'Etat ; qu'il suit de là que le requérant ne saurait utilement invoquer devant lui le moyen qu'il énonce pour demander l'annulation de l'élection contestée ;

Sur 1e moyen relatif à l'application de l'article L.O. 134 du Code électoral :

3. Considérant que ce moyen doit être apprécié par rapport aux dispositions de l'article 1er de l'ordonnance n° 59-224 du 4 février 1959, codifié partiellement à l'article L. O. 134 du Code électoral, dont la rédaction n'a pu avoir pour effet de modifier le sens et la portée du texte de ladite ordonnance ;

4. Considérant que cette ordonnance a abrogé une précédente ordonnance n° 58-1027 du 31 octobre 1958, dont l'article 1er disposait qu' « un membre d'une Assemblée parlementaire ne peut être remplaçant d'un candidat à l'autre Assemblée » et qu'elle lui a substitué une nouvelle disposition aux termes de laquelle « un député, un sénateur ou le remplaçant d'un membre d'une assemblée parlementaire ne peut être remplaçant d'un candidat à l'Assemblée nationale ou au Sénat » ;

5. Considérant que ce dernier texte édicte une inéligibilité ; que toute inéligibilité, qui a pour effet d'apporter une atteinte à la liberté des candidatures, doit être interprétée restrictivement ;

6. Considérant que l'article 25 de la Constitution et les articles 5 des ordonnances n° 58-1065 du 7 novembre 1958 et 58-1097 du 15 novembre 1958, prises pour son application, en vue d'éviter le recours à des élections partielles, ont prévu, « en cas de vacance du siège » , le remplacement des députés ou des sénateurs par des personnes élues à cette fin ; que conformément à ces dispositions, l'ordonnance du 4 février 1959 a pour objet d'assurer la disponibilité permanente de ces personnes afin que le remplaçant soit à même, à tout moment, de remplacer effectivement le parlementaire dont le siège devient vacant ;

7. Considérant que, dans cet esprit, le texte de l'ordonnance du 4 février 1959, reproduisant en cela les dispositions de l'ordonnance du 31 octobre 1958, tend, en premier lieu, à faire obstacle à ce qu'un membre d'une Assemblée parlementaire, soit remplaçant d'un candidat à l'autre Assemblée ;

8. Considérant, en second lieu, que le texte de ladite ordonnance du 4 février 1959 étend au remplaçant d'un membre d'une Assemblée parlementaire l'interdiction visée ci-dessus ;

9. Considérant, enfin, que le même texte stipule la même interdiction à l'égard d'un membre ou du remplaçant d'un membre d'une assemblée pour une élection à la même assemblée ;

10. Considérant que le fait, pour un candidat à l'Assemblée nationale, de choisir comme remplaçant un député ou le remplaçant d'un député soumis à réélection, n'est de nature à mettre en cause aucun des objectifs visés tant à l'article 25 de la Constitution qu'aux articles 5 des ordonnances des 7 novembre et 15 novembre 1958 et à l'article 1er de l'ordonnance du 4 février 1959 ; que, dès lors, il ne saurait faire obstacle à l'éligibilité dudit candidat ;

- Sur le moyen relatif à une prétendue irrégularité d'affichage :

11. Considérant que si le requérant allègue que M. Voisin a fait apposer un nombre considérable d'affiches comportant sa photographie accompagnée de la mention « Ve République », il n'apporte aucun commencement de preuve de l'importance de cet affichage qui, ayant pour objet de faire connaître aux électeurs la personne du candidat élu et son appartenance politique, n'a donc constitué ni une irrégularité ni une manoeuvre ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à demander l'annulation de l'élection contestée ;

- Sur les conclusions tendant an remboursement des frais de campagne électorale :

13. Considérant que les conclusions présentées par M. Ballot et tendant à obtenir le remboursement des frais engagés par le requérant en vue de sa campagne électorale ne relèvent pas de la compétence du Conseil constitutionnel ; qu'elles ne sont, dès lors pas recevables ;

Décide :
Article premier :
La requête susvisée de M. Ballot est rejetée.
Article 2 :
La présente décision sera notifiée à l'Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 21 juin 1967, où siégeaient : MM. Gaston PALEWSKI, président, Cassin, DESCHAMPS, MONNET, WALINE, ANTONINI, GILBERT-JULES, MICHARD-PELLISSIER ET LUCHAIRE.

Journal officiel du 1er juillet 1967, page 6547
Recueil, p. 128
ECLI : FR : CC : 1967 : 67.410.AN

Les abstracts

  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.2. Candidatures
  • 8.3.2.1. Conditions d'éligibilité
  • 8.3.2.1.9. Remplaçants

Le fait, pour un candidat à l'Assemblée nationale, de choisir comme remplaçant un député ou le remplaçant d'un député soumis à réélection, ne saurait faire obstacle à l'éligibilité dudit candidat.

(67-410 AN, 21 juin 1967, cons. 10, Journal officiel du 1er juillet 1967, page 6547)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.3. Campagne électorale - Moyens de propagande
  • 8.3.3.1. Affiches
  • 8.3.3.1.2. Présentation des affiches

Apposition d'affiches comportant la photographie du candidat accompagnée de la mention " Ve République ". En l'espèce ni irrégularité, ni manœuvre.

(67-410 AN, 21 juin 1967, cons. 11, Journal officiel du 1er juillet 1967, page 6547)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.4. Campagne électorale - Pressions, interventions, manœuvres
  • 8.3.4.1. Nature des pressions, interventions, manœuvres
  • 8.3.4.1.1. Interventions d'autorités officielles
  • 8.3.4.1.1.1. Chef de l'État

Le Conseil constitutionnel saisi d'une contestation en matière électorale n'a pas compétence pour se prononcer, même par voie d'exception, sur la conformité à la Constitution d'une déclaration du chef de l'État.

(67-410 AN, 21 juin 1967, cons. 2, Journal officiel du 1er juillet 1967, page 6547)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.4. Campagne électorale - Pressions, interventions, manœuvres
  • 8.3.4.1. Nature des pressions, interventions, manœuvres
  • 8.3.4.1.4. Utilisation du crédit d'autorités officielles
  • 8.3.4.1.4.3. Divers

L'usage du sigle " Ve République " ne constitue ni une irrégularité, ni une manœuvre, dès lors que cette mention a pour but de faire connaître aux électeurs l'appartenance politique du candidat.

(67-410 AN, 21 juin 1967, cons. 11, Journal officiel du 1er juillet 1967, page 6547)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.7. Contentieux - Compétence
  • 8.3.7.2. Questions n'entrant pas dans la compétence du Conseil constitutionnel
  • 8.3.7.2.4. Remboursement des frais de propagande

Conclusions tendant à obtenir le remboursement des frais engagés par le requérant en vue de sa campagne électorale. Incompétence du Conseil constitutionnel. Conclusions non recevables.

(67-410 AN, 21 juin 1967, cons. 13, Journal officiel du 1er juillet 1967, page 6547)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.7. Contentieux - Compétence
  • 8.3.7.2. Questions n'entrant pas dans la compétence du Conseil constitutionnel
  • 8.3.7.2.7. Appréciation de la régularité d'un acte du chef de l'État

Le Conseil constitutionnel saisi d'une contestation en matière électorale n'a pas compétence pour se prononcer, même par voie d'exception, sur la conformité à la Constitution d'une déclaration du chef de l'État.

(67-410 AN, 21 juin 1967, cons. 2, Journal officiel du 1er juillet 1967, page 6547)
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