Décision n° 2024-872 DC du 14 novembre 2024 - Communiqué de presse
Le Conseil constitutionnel juge conforme à la Constitution la loi organique visant à reporter le renouvellement général des membres du congrès et des assemblées de province de la Nouvelle‑Calédonie
Par sa décision n° 2024-872 DC du 14 novembre 2024, le Conseil constitutionnel s’est prononcé sur la loi organique visant à reporter le renouvellement général des membres du congrès et des assemblées de province de la Nouvelle‑Calédonie, dont le Premier ministre l’avait saisi conformément au cinquième alinéa de l’article 46 et au premier alinéa de l’article 61 de la Constitution.
Il lui revenait ainsi d’examiner en particulier l’article 1er de cette loi organique qui prévoit, par dérogation au premier alinéa de l’article 187 de la loi organique du 19 mars 1999 selon lequel les élections aux assemblées de province ont lieu dans le mois qui précède l’expiration du mandat des membres sortants, que les prochaines élections des membres du congrès et des assemblées de province ont lieu au plus tard le 30 novembre 2025. Ce même article proroge en conséquence les mandats en cours de leurs membres jusqu’au jour de la première réunion des assemblées élues à l’issue de ce renouvellement général. Il précise en outre que la liste électorale spéciale et le tableau annexe mentionnés à l’article 189 de la même loi organique sont mis à jour au plus tard dix jours avant la date du scrutin.
Le Conseil constitutionnel rappelle qu’il résulte des dispositions du premier alinéa de l’article 77 de la Constitution que son contrôle sur la loi organique prise sur le fondement de cet article doit s’exercer non seulement au regard de la Constitution, mais également au regard des orientations définies par l’accord de Nouméa, lequel déroge à un certain nombre de règles ou principes de valeur constitutionnelle. Toutefois, de telles dérogations ne sauraient intervenir que dans la stricte mesure nécessaire à la mise en œuvre de l’accord. Il rappelle en outre que l’accord de Nouméa, en son point 2.1.2, stipule : « Le mandat des membres du Congrès et des assemblées de province sera de cinq ans ».
Le Conseil constitutionnel juge que, s’il résulte du point 2.1.2 de l’accord de Nouméa que la durée du mandat des membres du congrès et des assemblées de province est de cinq ans, cette exigence ne fait pas obstacle à ce que le législateur organique, compétent en application de l’article 77 de la Constitution pour déterminer les règles relatives au régime électoral applicable en Nouvelle-Calédonie, puisse, à titre exceptionnel, modifier cette durée dans un but d’intérêt général et sous réserve du respect des règles et principes de valeur constitutionnelle, notamment ceux résultant de l’article 3 de la Constitution.
Il relève en outre qu’il ne dispose pas d’un pouvoir général d’appréciation et de décision de même nature que celui du Parlement. Il ne lui appartient donc pas de rechercher si le but que s’est assigné le législateur pouvait être atteint par d’autres voies, dès lors que les modalités retenues par la loi ne sont pas manifestement inappropriées à cet objectif.
À cette aune, le Conseil constitutionnel relève, en premier lieu, que la loi organique du 15 avril 2024 portant report du renouvellement général des membres du congrès et des assemblées de province de la Nouvelle‑Calédonie avait initialement reporté, au plus tard au 15 décembre 2024, les élections des membres du congrès et des assemblées de province et prorogé en conséquence les mandats en cours de leurs membres pour une durée de sept mois au plus.
Il résulte des travaux préparatoires de la loi organique déférée que le législateur a estimé que, dans la situation de crise de la Nouvelle-Calédonie, les conditions d’organisation de ce scrutin n’étaient pas réunies et que de telles circonstances justifiaient en conséquence de prévoir un nouveau report des élections des membres du congrès et des assemblées provinciales afin de permettre la reprise du dialogue entre les partenaires politiques de l’accord de Nouméa sur l’avenir institutionnel de la collectivité. Ce faisant, il a poursuivi un but d’intérêt général.
En second lieu, ce nouveau report, pour une durée maximale de onze mois, a pour effet de porter à dix-huit mois au plus la durée cumulée du report des élections. La prorogation des mandats qui accompagne ce report revêt un caractère exceptionnel et transitoire.
Le Conseil constitutionnel en déduit que, dès lors, le choix fait par le législateur organique n’est pas manifestement inapproprié à l’objectif qu’il s’est fixé.
Il juge conformes à la Constitution l’article 1er de la loi organique, ainsi que les deux autres dispositions qui la composent.