Communiqué

Décision n° 2019-806 QPC du 4 octobre 2019 - Communiqué de presse

M. Gilbert A. [Taux dérogatoires des cotisations sociales des assurés sociaux non fiscalement domiciliés en France]
Conformité - réserve

La loi peut prévoir des taux dérogatoires de cotisations d'assurance maladie afin d'assurer, dans certains cas, une participation équivalente des assurés dans le cadre d'un système de financement mixte de l'assurance maladie

Le Conseil constitutionnel a été saisi le 5 juillet 2019 par la Cour de cassation (deuxième chambre civile) d'une question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité à la Constitution de l'article L. 131-9 du code de la sécurité sociale.

Ces dispositions permettent au pouvoir réglementaire de prévoir des taux particuliers de cotisations d'assurance maladie, maternité, invalidité et décès applicables aux revenus d'activité et de remplacement des assurés d'un régime obligatoire de sécurité sociale français qui, ne remplissant pas les conditions de résidence fiscale définies à l'article L. 136-1 du code de la sécurité sociale, ne sont pas assujettis à la contribution sociale généralisée sur ces mêmes revenus. Ces dispositions créent donc, au sein d'un même régime obligatoire, une différence de traitement entre les assurés sociaux selon qu'ils sont ou non résidents fiscaux en France.

Le requérant reprochait à ces dispositions de créer une différence de traitement injustifiée entre les assurés sociaux relevant d'un même régime obligatoire d'assurance maladie, selon qu'ils satisfont ou non aux critères de résidence fiscale définis à l'article L. 136-1 du code de la sécurité sociale.

Examinant ces dispositions à la lumière des principes d'égalité devant la loi et devant les charges publiques qui résultent des articles 6 et 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, le Conseil constitutionnel relève que, depuis plusieurs années, le financement de la protection sociale n'est plus assuré par les seules cotisations sociales mais pour partie par l'impôt. Il juge que, en autorisant le pouvoir réglementaire à prévoir des taux particuliers de cotisations sociales pour les bénéficiaires de l'assurance maladie qui, n'étant pas des résidents fiscaux en France, ne sont pas assujettis à la contribution sociale généralisée sur les revenus d'activité et de remplacement, le législateur a cherché à éviter que ceux-ci puissent bénéficier d'une baisse attendue des taux de cotisations sociales sans subir, en contrepartie, la hausse de la contribution sociale généralisée. Ce faisant, il a entendu que les assurés sociaux participent de manière équivalente au financement des régimes obligatoires d'assurance maladie. Il a ainsi poursuivi un objectif d'intérêt général.

Le Conseil constitutionnel juge, en outre, que la différence de traitement ainsi instaurée est en rapport direct avec l'objet des cotisations sociales, tel qu'il doit s'entendre dans le cadre d'un système de financement mixte de la protection sociale, pour des prestations d'assurance maladie, maternité, invalidité ou décès dont le niveau n'est pas nécessairement lié à la durée pendant laquelle ces cotisations ont été versées ou à leur montant.

Le Conseil constitutionnel énonce toutefois une réserve d'interprétation aux termes de laquelle les dispositions contestées ne sauraient, sans méconnaître les principes d'égalité devant la loi et devant les charges publiques, être interprétées comme autorisant le pouvoir réglementaire à retenir des taux particuliers de cotisations sociales de nature à créer des ruptures caractérisées de l'égalité dans la participation des assurés sociaux au financement des régimes d'assurance maladie dont ils relèvent.

Sous cette réserve, les dispositions contestées sont jugées conformes à la Constitution.