Communiqué

Décision n° 2019-790 DC du 1er août 2019 - Communiqué de presse

Loi de transformation de la fonction publique
Conformité

Réaffirmant les principes constitutionnels applicables à la fonction publique, le Conseil constitutionnel juge que ceux-ci ne sont pas méconnus par les dispositions de la loi de transformation de la fonction publique qui lui étaient déférées

Par sa décision n° 2019-790 DC du 1er août 2019, le Conseil constitutionnel s'est prononcé sur plusieurs dispositions de la loi de transformation de la fonction publique, dont il avait été saisi par plus de soixante députés.

- Plusieurs dispositions de la loi déférée portant réforme des instances du dialogue social dans les trois versants de la fonction publique étaient critiquées au regard du principe de participation des travailleurs résultant du huitième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946.

S'agissant des articles 1er, 10, 25 et 30 de la loi réformant les commissions administratives paritaires pour prévoir, notamment, que celles-ci ne sont pas saisies de toutes les décisions individuelles relatives aux fonctionnaires, mais uniquement de celles prévues par la loi et par le pouvoir réglementaire, le Conseil constitutionnel a écarté cette critique en rappelant que le principe de participation concerne la détermination collective des conditions de travail.

L'article 4 de la loi déférée remplaçant les comités techniques et les comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail par une instance paritaire unique dénommée comité social d'administration au sein de la fonction publique d'État, comité social territorial au sein de la fonction publique territoriale et comité social d'établissement au sein de la fonction publique hospitalière, était critiqué au motif que cette instance ne comporterait une formation spécialisée en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail que lorsque les effectifs de l'administration ou de l'établissement en cause dépasseraient un certain seuil. Le Conseil constitutionnel a toutefois relevé que, quel que soit l'effectif de l'administration ou de l'établissement, le comité social d'administration, territorial ou d'établissement, composé de représentants de l'administration et du personnel, connaît des questions relatives à la protection de la santé physique et mentale, à l'hygiène, à la sécurité des agents dans leur travail, à l'organisation du travail, au télétravail, aux enjeux liés à la déconnexion et aux dispositifs de régulation de l'utilisation des outils numériques, à l'amélioration des conditions de travail et aux prescriptions légales y afférentes. Il en a déduit que les dispositions contestées ne méconnaissent pas le droit de participation des travailleurs à la détermination collective des conditions de travail.

- S'agissant de l'élargissement, par les articles 16, 18, 19 et 21 de la loi déférée, des cas dans lesquels, par exception, des agents contractuels peuvent être recrutés pour occuper certains emplois, notamment de direction, dans la fonction publique d'État, territoriale et hospitalière, le Conseil constitutionnel a rappelé, sur le fondement de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, que le principe d'égal accès aux emplois publics n'interdit pas au législateur de prévoir que des personnes n'ayant pas la qualité de fonctionnaire puissent être nommées à des emplois qui sont en principe occupés par des fonctionnaires.

Il a en outre relevé que, en vertu de la loi déférée, le recrutement d'agents contractuels pour pourvoir des emplois permanents doit respecter une procédure garantissant l'égal accès aux emplois publics, à l'exception des emplois supérieurs à la décision du Gouvernement, de ceux de directeur général des services d'une collectivité territoriale et de ceux de direction de la fonction publique hospitalière. À ce titre, l'autorité compétente assure la publicité de la vacance et de la création de ces emplois. Par ailleurs, le Conseil constitutionnel a rappelé qu'il appartient aux autorités compétentes de fonder leur décision de nomination sur la capacité des intéressés à remplir leur mission, y compris pour les emplois pour lesquels cette procédure ne s'applique pas. Le Conseil constitutionnel a enfin indiqué que, au surplus, en application de la loi déférée, le recrutement d'un agent contractuel occupant un emploi dont le niveau hiérarchique ou la nature des fonctions le justifient fait l'objet d'un contrôle déontologique, qui donne lieu, le cas échéant, à un avis de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique.
Par ces motifs, il a jugé que les dispositions contestées ne méconnaissent pas le principe d'égal accès aux emplois publics.

- S'agissant des dispositions de l'article 56 de la loi déférée encadrant le droit de grève dans les services publics locaux, le Conseil constitutionnel a relevé que le législateur a suffisamment délimité le champ des services publics soumis à ce nouveau régime en rendant celui-ci applicable aux services publics de collecte et de traitement des déchets des ménages, de transport public de personnes, d'aide aux personnes âgées et handicapées, d'accueil des enfants de moins de trois ans, d'accueil périscolaire et de restauration collective et scolaire dans le cas où leur interruption, en cas de grève des agents publics participant directement à leur exécution, contreviendrait au respect de l'ordre public, notamment à la salubrité publique, ou aux besoins essentiels des usagers de ces services.

Il a en outre relevé que l'obligation de déclaration préalable de participation à la grève, qui ne saurait être étendue à l'ensemble des agents, n'est opposable qu'aux seuls agents participant directement à l'exécution des services publics et qualifiés d'« indispensables » à la continuité du service public dans l'accord prévu par l'article 56 ou dans la délibération de la collectivité territoriale ou de l'établissement public local. Une telle obligation n'interdit pas à un de ces agents de rejoindre un mouvement de grève déjà engagé et auquel il n'avait pas initialement l'intention de participer, ou auquel il aurait cessé de participer, dès lors qu'il en informe l'autorité territoriale au plus tard quarante-huit heures à l'avance.

Le Conseil constitutionnel a précisé que la restriction apportée aux conditions d'exercice du droit de grève, à raison de la possibilité donnée à l'autorité territoriale d'imposer aux agents en cause d'exercer leur droit de grève dès leur prise de service et jusqu'au terme de ce dernier, n'oblige pas l'agent qui souhaite cesser son travail à le faire dès sa première prise de service postérieure au déclenchement de la grève.

Enfin, les sanctions disciplinaires prévues par les dispositions contestées sont uniquement destinées à réprimer l'inobservation des obligations de déclaration préalable et d'exercice du droit de grève dès la prise de service, dont la méconnaissance ne confère pas à l'exercice du droit de grève un caractère illicite.

Pour l'ensemble de ces raisons, le Conseil constitutionnel a jugé que les aménagements apportés aux conditions d'exercice du droit de grève ne sont pas disproportionnés au regard de l'objectif poursuivi par le législateur et ne méconnaissent pas le septième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946.