Communiqué

Décision n° 2015-513/514/526 QPC du 14 janvier 2016 - Communiqué de presse

M. Alain D. et autres [Cumul des poursuites pénales pour délit d'initié avec des poursuites devant la commission des sanctions de l'AMF pour manquement d'initié - II]
Conformité - non lieu à statuer

Le Conseil constitutionnel a été saisi le 14 octobre et le 10 décembre 2015 par la Cour de cassation de trois questions prioritaires de constitutionnalité relatives à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l'article L. 621-15 du code monétaire et financier (CMF) dans ses versions successives issues de la loi n° 2006-1770 du 30 décembre 2006, de la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 et de l'ordonnance n° 2010-76 du 21 janvier 2010.

Par sa décision n°2014-453/454 QPC et 2015/462 QPC du 18 mars 2015, le Conseil constitutionnel avait déclaré contraires à la Constitution certaines dispositions de l'article L. 621-15 du CMF, relatif au manquement d'initié réprimé par la commission des sanctions de l'Autorité des marchés financiers (AMF), dans sa rédaction résultant de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie. Le Conseil constitutionnel avait toutefois reporté au 1er septembre 2016 la date d'abrogation de ces dispositions.

En l'espèce, les affaires soumises au Conseil constitutionnel posaient la question de savoir si la même solution devait s'appliquer à des dispositions identiques à celles censurées mais figurant dans des versions de l'article L. 621-15 du CMF, pour l'une antérieure et pour les deux autres postérieures à celle censurée en mars 2015.

S'agissant des versions issues de la loi du 12 mai 2009 et de l'ordonnance du 21 janvier 2010, le Conseil constitutionnel a constaté que les dispositions contestées étaient identiques à celles censurées et que l'état du droit applicable à la poursuite et à la répression du délit d'initié et du manquement d'initié était demeuré analogue. En l'absence de changement de circonstances, le Conseil constitutionnel a par suite jugé qu'il n'y a pas lieu de procéder à un nouvel examen de ces dispositions. Celles-ci ne sont pas conformes à la Constitution pour les mêmes raisons que celles qui avaient justifié la censure prononcée par la décision du 18 mars 2015.

En ce qui concerne la version de l'article L. 621-15 issue de la loi du 30 décembre 2006, les dispositions contestées ne sont pas différentes de celles figurant dans la version censurée le 18 mars 2015. Cependant, lorsque la version résultant de la loi de 2006 était applicable, la sanction pécuniaire du manquement d'initié était d'un montant de 1,5 million d'euros, alors qu'elle s'élevait à 10 millions d'euros lorsqu'était applicable la version issue de la loi du 4 août 2008. Les circonstances de droit étaient ainsi différentes de celles examinées par le Conseil constitutionnel lors de sa décision du 18 mars 2015. En raison de ce changement de circonstances, il revenait au Conseil d'examiner ces dispositions et de se prononcer sur leur conformité à la Constitution.

À la différence de l'affaire jugée le 18 mars 2015, les sanctions pécuniaires applicables en cas de délit d'initié et de manquement d'initié commis par une personne physique étaient donc identiquement fixées à 1, 5 million d'euros. Toutefois, le juge pénal pouvait également condamner la personne physique auteur d'un délit d'initié à une peine d'emprisonnement. Par ailleurs, ce même juge pouvait, lorsque l'auteur des faits était une personne morale, prononcer sa dissolution et une amende cinq fois supérieure. Appliquant les critères fixés par sa jurisprudence issue de sa décision du 18 mars 2015, le Conseil constitutionnel a jugé que le délit d'initié et le manquement d'initié devaient ainsi être regardés comme susceptibles de faire l'objet de sanctions de nature différente. Il a, par suite, jugé conformes à la Constitution les dispositions contestées de l'article L. 621-15 du CMF dans sa rédaction issue de la loi n° 2006-1770 du 30 décembre 2006.