Communiqué

Décision n° 2003-484 DC du 20 novembre 2003 - Communiqué de presse

Loi relative à la maîtrise de l'immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité
Non conformité partielle

Saisi par plus de soixante députés et par plus de soixante sénateurs de la loi relative à la maîtrise de l'immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité, adoptée par le Parlement le 28 octobre 2003, le Conseil constitutionnel a rendu sa décision le 20 novembre. Quinze articles étaient contestés et le Conseil en a examiné d'office un seizième.
Le Conseil a prononcé trois censures et émis deux réserves d'interprétation.
1) L'article 7, relatif aux visas délivrés au titre des visites de caractère familial et privé de courte durée, obligeait la personne hébergeant un visiteur étranger à s'engager à prendre en charge les frais de rapatriement de l'intéressé si ce dernier ne disposait pas, à l'issue de sa visite, des moyens lui permettant de quitter le territoire français. En imposant un tel engagement à l'hébergeant, sans tenir compte ni de ses ressources financières, ni du prix du voyage de retour, ni de sa bonne foi, ni du comportement de son visiteur, ni du temps écoulé depuis la fin de la visite, la loi a rompu de façon caractérisée l'égalité devant les charges publiques proclamée par l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789.
2) Si, par son économie générale, l'article 76, relatif au contrôle de la réalité du consentement des futurs époux, n'est pas contraire à la liberté du mariage, composante de la liberté personnelle protégée par les articles 2 et 4 de la Déclaration de 1789, il n'en allait de même ni de l'assimilation de l'irrégularité du séjour à un indice sérieux de non consentement, ni de l'obligation faite à l'officier d'état civil d'informer immédiatement le préfet de l'irrégularité du séjour.
3) A l'article 49, relatif à la rétention administrative des étrangers faisant l'objet de mesures d'éloignement, les nouvelles durées et conditions de prolongation de la rétention n'ont pas été jugées porter à la liberté individuelle des atteintes excessives au regard de la nécessité d'éloigner les étrangers séjournant illégalement en France. Le Conseil a relevé que l'irrecevabilité des demandes d'asile déposées plus de cinq jours après la notification de ses droits faite à l'étranger à son arrivée dans le centre de rétention ne pourra pas conduire à des mesures d' éloignement mettant en péril sa vie, sa liberté ou l'intégrité de sa personne. Par ailleurs, l'autorité judiciaire devra conserver la possibilité d'interrompre à tout moment la prolongation lorsque la rétention n'est plus nécessaire à l'éloignement.
4) A l'article 53, relatif aux marchés susceptibles d'être passés avec une personne privée en vue de transporter des étrangers retenus dans un centre de rétention ou maintenus dans une zone d'attente, la surveillance des personnes transportées ne devra pas incomber aux agents privés et l'arme dont ils seraient éventuellement dotés ne devra pas servir à cette surveillance.
5) Enfin, le Conseil constitutionnel a déclaré d'office contraire à la Constitution le dernier alinéa de l'article 1er de la loi déférée qui prévoyait l'organisation d'un débat en séance publique à la suite du dépôt d'un rapport annuel sur les orientations de la politique d'immigration. Sauf à y être autorisé par la Constitution, il n'appartient pas en effet au législateur d'imposer par avance au Gouvernement, ni aux instances parlementaires compétentes, de contrainte relative à l'ordre du jour de chaque assemblée.