Décision

Décision n° 2002-2644/2648 AN du 20 janvier 2003

A.N., Seine-et-Marne (3ème circ.)
Rejet

Le Conseil constitutionnel,

Vu 1 ° la requête n° 2002-2644 et le mémoire complémentaire, présentés par M. Jean-François JALKH, demeurant à Gretz-Armainvilliers (Seine-et-Marne), enregistrés au secrétariat général du Conseil constitutionnel les 24 et 26 juin 2002 et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 9 et 16 juin 2002 dans la 3ème circonscription de Seine-et-Marne pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;

Vu le mémoire en défense présenté par M. Yves JEGO, député, enregistré comme ci-dessus le 29 juillet 2002 ;

Vu 2 ° la requête n° 2002-2648 présentée par M. Frédéric MAUPIN, demeurant à Montereau-Fault-Yonne (Seine-et-Marne), enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 25 juin 2002 et tendant à l'annulation des mêmes opérations électorales ;

Vu les mémoires en défense présentés par M. JEGO, enregistrés comme ci-dessus les 18 juillet et 15 octobre 2002 ;

Vu les observations présentées par le ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales sur les deux requêtes, enregistrées comme ci-dessus les 17 septembre et 12 novembre 2002 ;

Vu la décision de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, en date du 26 septembre 2002, approuvant le compte de campagne de M. JEGO ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu la Constitution, notamment son article 59 ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

Vu le code électoral ;

Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ;

Le rapporteur ayant été entendu ;

1. Considérant que les requêtes de M. JALKH et de M. MAUPIN sont dirigées contre la même élection ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une même décision ;

2. Considérant que, s'il incombait au législateur, en vertu des dispositions combinées de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et des articles 3 et 24 de la Constitution, de modifier la délimitation des circonscriptions, afin de tenir compte, chaque fois que c'était nécessaire, des évolutions de la population intervenues depuis l'entrée en vigueur de la loi n° 86-1197 du 24 novembre 1986 relative à la détermination des circonscriptions pour l'élection des députés, il n'appartient pas au Conseil constitutionnel, se prononçant, comme en l'espèce, en application de l'article 59 et non de l'article 61 de la Constitution, d'apprécier la constitutionnalité des dispositions législatives contenues dans le tableau n° 1 annexé à l'article L. 125 du code électoral ; que M. JALKH ne saurait dès lors utilement contester la délimitation de la circonscription dans laquelle il était candidat ;

3. Considérant que l'inéligibilité aux fonctions de conseiller général qui avait frappé le député élu, M. JEGO, en vertu d'un jugement du tribunal administratif de Melun du 20 octobre 1998 statuant sur saisine de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, confirmé par une décision du Conseil d'Etat du 17 septembre 1999, ne s'étendait pas aux élections législatives ; que, par suite, M. MAUPIN ne peut utilement invoquer ce jugement, lequel avait au surplus cessé de produire ses effets à la date de l'élection de M. JEGO aux fonctions de député, pour demander l'annulation de cette élection ;

4. Considérant que le grief tiré par M. MAUPIN de l'importance du matériel de propagande électorale utilisé par M. JEGO n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier la portée ; que, si M. JEGO a fait diffuser avant le premier tour de scrutin des documents de propagande électorale en méconnaissance des dispositions du dernier alinéa de l'article L. 165 du code électoral, cette circonstance n'a pas eu pour effet de fausser les résultats des deux tours de scrutin, à l'issue de chacun desquels le candidat élu a obtenu un nombre de voix très supérieur à celui de la candidate arrivée en deuxième position ; que, enfin, si l'absence du nom et du domicile de l'imprimeur sur les tracts de M. JEGO est contraire aux dispositions de l'article 2 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, applicables à la propagande électorale en vertu de l'article L. 48 du code électoral, cette omission n'a pas eu pour effet de faire obstacle à la vérification du compte de campagne du candidat dès lors que ce compte devait, en application de l'article L. 52-12 du code électoral, être accompagné des factures, devis et autres documents de nature à établir le montant des dépenses payées ou engagées par le candidat ou pour son compte ;

5. Considérant que le nom de la remplaçante de M. JALKH figurait sur sa déclaration de candidature comme sur ses bulletins de vote conformément aux prescriptions des articles L. 155 et L. 165 du code électoral ; que c'est, dès lors, en méconnaissance des dispositions du cinquième alinéa de l'article R. 38 et du troisième alinéa de l'article R. 34 du même code que la commission de propagande a, d'une part, refusé d'accepter ces bulletins de vote, au motif que ce nom différait de celui que le préfet avait mentionné sur le récépissé de déclaration de candidature, et, d'autre part, omis de les adresser aux électeurs ; que c'est également à tort qu'elle n'a pas exécuté l'injonction que, par une ordonnance du 4 juin 2002, le juge des référés du tribunal administratif de Melun lui a faite d'adresser à tous les électeurs de la circonscription le bulletin de vote de M. JALKH ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que la commission de propagande a adressé aux électeurs la profession de foi de M. JALKH et que les bulletins de vote de celui-ci étaient à la disposition des électeurs dans tous les bureaux de vote de la circonscription, y compris dans celui de Laval-en-Brie, où étaient inscrits 308 électeurs et pour lequel il n'est pas établi que ces bulletins de vote n'auraient pas été disponibles dès l'ouverture du bureau de vote ; que, dans ces conditions, et compte tenu de la circonstance que M. JALKH, qui a obtenu 6 104 voix au premier tour de scrutin, aurait dû recueillir 1 238 suffrages supplémentaires pour pouvoir être candidat au second tour en application des dispositions du troisième alinéa de l'article L. 162 du code électoral, l'irrégularité tenant à l'absence d'envoi des bulletins de vote de M. JALKH aux électeurs par la commission de propagande, pour particulièrement blâmable qu'elle soit de la part d'une autorité administrative, n'a pas eu pour effet de modifier l'issue du scrutin ;

6. Considérant que, si la commission de propagande a refusé d'accepter les bulletins de vote d'une autre candidate, il ne résulte pas de l'instruction, et il n'est d'ailleurs pas allégué, que ce refus serait entaché de la même irrégularité que celle qui affectait le refus opposé à M. JALKH ou de toute autre irrégularité ; que M. JALKH n'est dès lors pas fondé à soutenir que le refus de la commission de propagande aurait eu pour effet de modifier l'issue du scrutin ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que MM. JALKH et MAUPIN ne sont pas fondés à demander l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 9 et 16 juin 2002 dans la troisième circonscription de Seine-et-Marne,

Décide :
Article premier :
Les requêtes de MM. Jean-François JALKH et Frédéric MAUPIN sont rejetées.
Article 2 :
La présente décision sera notifiée à l'Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 20 janvier 2003, où siégeaient : MM. Yves GUÉNA, Président, Michel AMELLER, Jean-Claude COLLIARD, Olivier DUTHEILLET de LAMOTHE, Pierre JOXE, Mmes Monique PELLETIER, Dominique SCHNAPPER et Simone VEIL.

Journal officiel du 28 janvier 2003, page 1681
Recueil, p. 51
ECLI : FR : CC : 2003 : 2002.2644.AN

Les abstracts

  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.3. Campagne électorale - Moyens de propagande
  • 8.3.3.2. Bulletins
  • 8.3.3.2.2. Acceptation des bulletins par la commission de propagande

Le nom de la remplaçante du requérant figurait sur sa déclaration de candidature comme sur ses bulletins de vote conformément aux prescriptions des articles L. 155 et L. 165 du code électoral. C'est, dès lors, en méconnaissance des dispositions du cinquième alinéa de l'article R. 38 et du troisième alinéa de l'article R. 34 du même code que la commission de propagande a refusé d'accepter ces bulletins, au motif que ce nom différait de celui que le préfet avait mentionné sur le récépissé de déclaration de candidature. C'est également à tort qu'elle n'a pas exécuté l'injonction que le juge des référés du tribunal administratif lui a faite d'adresser les bulletins en cause à tous les électeurs. Il résulte toutefois de l'instruction que la commission de propagande a adressé aux électeurs sa profession de foi et que ses bulletins de vote étaient à disposition dans tous les bureaux de vote de la circonscription. Compte tenu de ce que le requérant, qui a obtenu 6 104 voix au premier tour de scrutin, aurait dû recueillir 1 238 suffrages supplémentaires pour pouvoir être candidat au second tour en application des dispositions du troisième alinéa de l'article L. 162 du code électoral, l'irrégularité tenant à l'absence d'envoi de ses bulletins de vote aux électeurs par la commission de propagande, pour particulièrement blâmable qu'elle soit de la part d'une autorité administrative, n'a pas eu pour effet de modifier l'issue du scrutin. Si la commission de propagande a refusé d'accepter les bulletins de vote d'une autre candidate, il ne résulte pas de l'instruction que ce refus serait entaché d'irrégularité. Grief rejeté.

(2002-2644/2648 AN, 20 janvier 2003, cons. 5, 6, Journal officiel du 28 janvier 2003, page 1681)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.3. Campagne électorale - Moyens de propagande
  • 8.3.3.16. Tracts
  • 8.3.3.16.3. Irrégularités sans influence sur les résultats de l'élection
  • 8.3.3.16.3.3. Contenu et portée des tracts

Le grief tiré de l'importance du matériel de propagande électorale utilisé par le candidat élu n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier la portée. Si ce dernier a fait diffuser avant le premier tour de scrutin des documents de propagande électorale en méconnaissance des dispositions du dernier alinéa de l'article L. 165 du code électoral, cette circonstance n'a pas eu pour effet de fausser les résultats des deux tours de scrutin, à l'issue de chacun desquels le candidat élu a obtenu un nombre de voix très supérieur à celui de la candidate arrivée en deuxième position. Enfin, si l'absence du nom et du domicile de l'imprimeur sur les tracts du candidat élu est contraire aux dispositions de l'article 2 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, applicables à la propagande électorale en vertu de l'article L. 48 du code électoral, cette omission n'a pas eu pour effet de faire obstacle à la vérification du compte de campagne du candidat, dès lors que ce compte devait, en application de l'article L. 52-12 du code électoral, être accompagné des factures, devis et autres documents de nature à établir le montant des dépenses payées ou engagées par le candidat ou pour son compte.

(2002-2644/2648 AN, 20 janvier 2003, cons. 4, Journal officiel du 28 janvier 2003, page 1681)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.5. Financement
  • 8.3.5.5. Dépenses produites au compte de campagne
  • 8.3.5.5.2. Dépenses devant figurer dans le compte
  • 8.3.5.5.2.2. Affiches, tracts, lettre circulaire

Si l'absence du nom et du domicile de l'imprimeur sur les tracts du candidat élu est contraire aux dispositions de l'article 2 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, applicables à la propagande électorale en vertu de l'article L. 48 du code électoral, cette omission n'a pas eu pour effet de faire obstacle à la vérification du compte de campagne du candidat, dès lors que ce compte devait, en application de l'article L. 52-12 du code électoral, être accompagné des factures, devis et autres documents de nature à établir le montant des dépenses payées ou engagées par le candidat ou pour son compte.

(2002-2644/2648 AN, 20 janvier 2003, cons. 4, Journal officiel du 28 janvier 2003, page 1681)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.7. Contentieux - Compétence
  • 8.3.7.2. Questions n'entrant pas dans la compétence du Conseil constitutionnel
  • 8.3.7.2.8. Conformité à la Constitution d'un texte législatif

S'il incombait au législateur, en vertu des dispositions combinées de l'article 6 de la Déclaration de 1789 et des articles 3 et 24 de la Constitution, de modifier la délimitation des circonscriptions, afin de tenir compte, chaque fois que c'était nécessaire, des évolutions de la population intervenues depuis l'entrée en vigueur de la loi n° 86-1197 du 24 novembre 1986 relative à la détermination des circonscriptions pour l'élection des députés, il n'appartient pas au Conseil constitutionnel, se prononçant, comme en l'espèce, en application de l'article 59 et non de l'article 61 de la Constitution, d'apprécier la constitutionnalité des dispositions législatives contenues dans le tableau n° 1 annexé à l'article L. 125 du code électoral. Le requérant ne saurait, dès lors, utilement contester la délimitation de la circonscription dans laquelle il était candidat.

(2002-2644/2648 AN, 20 janvier 2003, cons. 2, Journal officiel du 28 janvier 2003, page 1681)
À voir aussi sur le site : Version PDF de la décision.
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